Polaris ou la nuit de Circé
Une inspectrice de police enquête sur le meurtre d’une jeune femme liée à un cercle très fermé d’échangistes, qui ont porté l’érotisme au rang d’art.
BDSM Fabien Vehlmann Mirages
Jeanne Condorcet, lieutenant de police à Paris, profite de son célibat pour multiplier les aventures d’une nuit avec différents mecs rencontrés sur Internet. Elle ne dit jamais qu’elle est policière – trop la honte ! – et invente à chaque mec un nouveau métier, pour mieux se repérer : kiné, assistante sociale, trapéziste… En journée, son boss l’envoie sur la scène d’un homicide tout frais. Dans un vaste appartement vide, une jeune femme git nue sur le plancher, l’air extatique, a priori étranglée. L’enquête méticuleuse débute par un nom : Elise Eternay. Puis par l’analyse des caméras de vidéo-surveillance et des appels depuis son téléphone portable qui ont borné approximativement à l’heure du meurtre. Une voiture trop rapide est repérée. Mais lors de la visite chez le propriétaire, on découvre ce dernier pendu ! Un document étrange est aussi retrouvé au domicile de la victime : un leporello (une longue bande de papier pliée en accordéon) avec des dessins et des schémas bizarres, titré « Erosismogramme, pour Circé ». Le mystère s’épaissit. Tout cela ressemble à un meurtre sexuel, lors d’une séance SM qui aurait mal tourné. Les deux familles ne portant pas plainte, l’affaire publique est sur le point d’être ainsi classée. Mais c’est mal connaître Jeanne Condorcet, que les milieux érotiques parisiens intriguent. Elle poursuit l’enquête de son côté et interroge une vieille femme nommée Ichka Gallia, liée au cercle de jeux sexuels baptisé « Circé », réservé aux initiés…
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Date de parution | 03 Octobre 2018 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J’ai récemment lu – et grandement apprécié ! – Les Derniers jours d'un immortel, et j’ai retrouvé ici avec presque autant de plaisir ces deux auteurs. Si l’album cité plus haut se déroulait dans une ambiance SF, celui-ci s’immerge dans une histoire vaguement policière. Mais les deux sont bâtis sur de solides fondations, multipliant les références, les questionnements, sans que cela ne nuise à la fluidité de la lecture. Ici, nous suivons notre enquêteuse au milieu d’un groupe original, qui cherche à expérimenter le plaisir sexuel, en le liant avec la création artistique, jouant sur des ressorts que Bataille ou d’autres ont eux-aussi utilisés, questionnés. Comme le dit l’un des protagonistes, nous avons là une sorte de pendant de l’oubapo, la littérature étant remplacée par le sexe. Dans ses remerciements, Vehlmann montre qu’il s’est longuement documenté pour rendre crédible son histoire, en particulier auprès de personnes empruntant les mêmes chemins pour trouver plaisir sexuel et intellectuel. Alors, c’est sûr, cela manque parfois de rythme, et les côtés érotique et polar, parfois en retrait, peuvent frustrer ceux qui voyaient l’un ou l’autre dominer davantage. Mais j’ai quand même bien aimé cette histoire originale. D’autant plus que le dessin de De Bonneval, jouant là encore essentiellement sur un Noir et Blanc dominant avec des nuances de gris (comme si cela avait été réalisé avec de la cendre – les passages en flash-back, très colorés, jurent sans doute un peu trop par contre), use d’un trait simple et efficace. Je voudrais juste finir par une remarque concernant le talent de Vehlmann, qui a quand même déjà écrit une grande quantité de scénarios, dans des genres on ne peut plus différents, et a produit pas mal de choses remarquables ! Note réelle 3,5/5.
« Polaris ou la nuit de Circé ». Un titre élégant et mystérieux associé à une couverture un peu fade, reflétant assez bien la teneur de cet ouvrage au pitch intrigant : une enquête policière dans les milieux libertins, conduite par une jeune lieutenant, Jeanne Condorcet, elle-même adepte des jeux sexuels déviants. Et le lecteur de se dire : « Tiens donc ? Une œuvre érotique qu’on n’aurait plus à dissimuler dans les recoins obscurs de sa bibliothèque et dont on pourrait clamer haut et fort tout le bien qu’on pense ? ». C’est donc armé des meilleures dispositions que l’on attaque ce one-shot signé Fabien Vehlmann, auteur prolixe qui a notamment participé à la série jeunesse à succès Seuls et a également écrit pour Kerascoët (Jolies ténèbres et "Satanie"). Au dessin, son frère d’armes Gwen de Bonneval, par ailleurs scénariste à ses heures, est loin d’être un amateur, avec à son actif nombre d’ouvrages qui lui ont permis d’utiliser alternativement le pinceau et la plume. Après une intro lymphatique, le récit embraye sur un crime sexuel commis dans des circonstances mystérieuses, peut-être un acte sexuel qui aurait mal tourné… En menant son enquête, Jeanne va se retrouver happée au cœur d’une organisation secrète créée dans les années 50 par une prostituée libertine amie des artistes, Polaris, dans le but d’expérimenter d’autres façons de pratiquer la sexualité. Au terme de l’album, force de constater que non seulement l’intrigue est peu palpitante, souffrant d’un manque de rythme, mais qu’en plus le dénouement est prévisible, ce qui pour un polar constitue un double handicap. Reste le fond, qui est peut-être la seule chose permettant de maintenir l’attention du lecteur, avec des questions passionnantes autour de la sexualité : l’érotisme positif et créatif, sa part cérébrale et sa mesure (avec le fameux érosismogramme), à mille lieues des pulsions sexuelles primaires, la transgression et bien sûr le consentement des partenaires dans les pratiques SM. Malheureusement, telles des traces de pas dans le sable, toutes ces réflexions se trouvent bien vite noyées sous une vague de monotonie narrative. Quant au dessin, il est en total décalage avec l’esprit du récit, en particulier pour ce qui est des personnages, dont on finit par se contrefoutre littéralement. Evoluant dans un décor lugubre, ceux-ci apparaissent figés et fantomatiques dans leurs attitudes, et, qu’ils soient hommes ou femmes, leurs visages sont laids et peu expressifs, ce qui fait qu’on les distingue mal les uns des autres. Bref, rien qui puisse évoquer une sexualité épanouie. Un comble ! A l’évidence, les auteurs semblent ne pas avoir maîtrisé leur sujet en s’éparpillant dans tous les sens, peinant à trouver un équilibre entre la forme et le fond. Si au départ il était question d’un polar érotique, on se retrouve avec un polar pas très sexy qui n’est pas vraiment un polar. A la fin de l’histoire, l’un des protagonistes, dont on aura oublié qui il était exactement, évoque une nuit d’orgie en hommage à Circé : « Et la nuit s’est terminée – beaucoup trop vite – sans que je sache si j’y avais compris quoi que ce soit ». Un peu comme le lecteur quand il referme le livre en fait…
Cette bd qu'on pouvait espérer provocatrice finit par un regard finalement assez puritain pour désigner les fantasmes d'une bande de bourgeois friqués. Même l'esthétisme est d'une grisaille alarmante voire déprimante. Certes, on avait connu Vehlmann dans des oeuvres plus grand public alors que Gwen de Bonneval dessinait des bds pour la jeunesse. C'est clair qu'on misait sur un grand écart mais ce n'est pas malheureusement un essai très réussi au final. Certes, il y a un soupçon d'audace comme l'introduction de la science-fiction mais le lecteur sera vite perdu en cours de route. En effet, il y a comme une sorte de pseudo-intellectualisation de l'érotisme via l'art et la littérature. Cependant, cela ne le fait pas car il y a un vrai classicisme ajouté à une esthétique sombre assez pauvre. Bref, c'est fade. Il n'y aura de supplice hélas que pour le lecteur...
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