Primo Levi
Un survivant de l'holocauste témoigne auprès d'une classe d'élèves l'horreur de la guerre et le traitement subi par les juifs dans les camps nazis.
Auteurs italiens L'univers concentrationnaire nazi Les petits éditeurs indépendants Nazisme et Shoah
Dans une salle d'école, la maîtresse avertit ses élèves qu'un homme va venir les voir pour leur faire un cour d'histoire. Il n'est pas professeur, mais le témoin vivant du drame que fut la seconde guerre guerre mondiale. Un homme aux cheveux blancs, portant des lunettes, frappe à la porte. Il s'appelle Primo Levi et explique aux enfants qu'il a toujours aimé les chiffres. Or certains lui collent à la peau, comme ceux que l'armée allemande lui a gravé de manière indélébile sur la peau. Certains enfants ont du mal à imaginer que cet homme, malingre, ait pu survivre à la guerre. Primo leur rétorque qu'il n'y a aucune méthode pour s'en sortir, juste de la chance. Il leur parle alors de sa volonté d'intégrer les rebelles, puis son arrestation et le traitement de faveur qu'il reçut, du fait de ses qualifications en chimie. Il n'échappa pas non plus au camp, le Lager, et aux mauvais traitements qui y incombe. Certains élèves ont du mal à comprendre pourquoi il était traité de la sorte. Primo leur rétorque que la raison est simple : il est juif...
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Date de parution | 06 Septembre 2017 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
La Bd est essentielle au devoir de mémoire et cela justifie en partie ma note. Parce que sur la question purement personnelle, j'aurais été plus proche du 3, puisque la BD ne va pas assez loin selon moi dans certains aspects de la vie de Primo Levi, et ces manques se font sentir si vous avez déjà étudié un peu la vie de l'auteur. J'ai eu l'occasion de travailler sur Primo Levi au cours de mes années de fac, notamment sur son livre "Les naufragés et les rescapés", livre pendant de "Si c'est un homme" avec une complétion tant sur les survivants que sur la question de la mémoire. Ce fut l'occasion de me pencher sur sa vie en général y compris la suite des camps et de son premier livre, et découvrir ce que cette BD présente : le travail qu'il accomplit suite à son retour, à savoir informer, diffuser et empêcher l'horreur de tomber dans l'oubli. La BD parle de cette intervention en école, mélangeant ainsi la vie dans les camps et la vie ensuite. C'est chargé en émotion et le dessin contraste ces deux vies en montrant l'horreur de ce que purent être ces camps. La violence passe aussi dans l'émotion que Primo Levi montre en évoquant ses souvenirs, les personnes qu'il a côtoyé et surtout la pure chance qu'il a eut, seule explication de sa survie. Les bémols que je met à cette Bd sont au nombre de deux : l'absence de développement de la vie de Primo Levi dans une Italie fasciste avant sa participation à la résistance. Cette vie préalable justifie aussi l'implication forte de Primo Levi par la suite. Il restera marqué par son parcours dans le camp de la mort, mais aussi par l'Italie fasciste et antisémite contre laquelle il n'aura de cesse de se battre, notamment en mentionnant souvent le fascisme comme un danger potentiel qui peut revenir. L'autre souci, à mon gout, c'est l'absence de développement de la fin de vie de Primo Levi. Je comprends qu'il n'est pas nécessaire de parler de sa mort, mais du contexte qui l'entoure : apparition des négationnistes, Henri Rocques et sa fameuse thèse, Faurisson et ses déclarations … Le contexte des années 80 voit émerger fortement les critiques envers les survivants, critiques teintées d'antisémitisme et politisé avec Israël. Ces affaires ont fortement marqué Primo Levi qui a eut beaucoup de périodes sombres et dépressives consécutives à ces nouveaux extrémismes. Je pense que l'intégrer aurait été une bonne chose puisque cela développe la pensée de Primo Levi, à savoir que les extrêmes sont toujours là. Et de voir l'extrême droite actuellement au pouvoir en Italie ne fait que renforcer cette peur … Donc voila, une BD intéressante mais j'aurais voulu un peu plus. Je suis conscient de pinailler parce que je connais la vie de Primo Levi et que j'ai pu étudier le contexte autour, contexte qui est passionnant et sans doute à prendre en compte, mais la BD est déjà bien suffisante pour des personnes découvrant sa vie. On va rester sur un 4* et ça passe !
Il ne faut pas passer à côté de cette série, surtout si vous n'avez pas lu "Si c'est un homme". Dans le cadre fictif d'une rencontre entre Primo Levi et des écoliers, Matteo Mastragostino reprend quelques épisodes du célèbre roman de la déportation à Auschwitz-Birkenau. Si la série n'a pas la puissance suggestive du roman, elle n'en reste pas moins un outil de mémoire très appréciable. Ainsi, elle me semble accessible à des ados assez jeunes même si je pense que cette lecture doit être accompagnée. Le déroulé du récit est un savant dosage entre les scènes d'écoles apaisantes mais très émouvantes et les scènes historiques saisissantes mais moins dures que celles du livre. Le choix de l'auteur a été de mettre en avant les épisodes de "Selection" (à l'arrivée ou pendant la captivité) ce qui a marqué tous les détenus par une sorte de culpabilité du survivant. Même si le récit ne force pas sur le sentimental, c'est très difficile de ne pas avoir la larme à l'oeil en de nombreux passages. Cela se lit d'un trait sans avoir la possibilité de laisser le livre avant le dernier mot. Le graphisme d’Alessandro Ranghiasci ne travaille pas sur un voyeurisme morbide. Si certaines cases montrent l'horreur des corps dénudés ou des cadavres entassés on sent la volonté de respecter ces pauvres victimes. Les bourreaux sont bien sûr très présents mais toujours au second plan. On les entend aboyer plus qu'on ne les voit. Les auteurs soulignent ainsi l'importance de pouvoir comprendre vite et de pouvoir communiquer dans cet enfer si hostile. Ranghiasci a laissé les visages des soldats allemands dans une ombre qui efface leur humanité. Evidemment la mise en couleur d’Alessandra Alexakis participe pleinement au contraste paix/guerre. Si la classe est claire et lumineuse dans des tons solaires, la vie au camp reste dans la nuit quelle que soit la saison. Une lecture très émouvante et touchante qui rend accessible le plus fort témoignage sur l'horreur d'Auschwitz. A ne pas manquer.
L'ouvrage porte en postface une précision : la rencontre de Primo Levi avec ces enfants n'a jamais eu lieu. Il s'agit du résultat des recherches faites par le scénariste sur ses différents témoignages, ceux de personnes qui ont pu le rencontrer, mais aussi, pour la partie relatant sa vie à Auschwitz (parler de survie serait plus juste), de digests de ses différents écrits. Il ne l'a jamais rencontré, mais a imaginé ce qu'aurait pu être la rencontre cette figure avec une classe, dont il aurait fait partie, peu de temps avant sa mort présumée accidentelle en 1987. Primo Levi est en effet un romancier très célèbre en Italie. Le début de son oeuvre est en effet marqué par des récits sans fard (ou presque) sur sa déportation et l'errance qui a résulté de la libération d'Auschwitz par l'armée russe en 1945. Il a également oeuvré dans les genres mêlant la science et la science-fiction, revenant régulièrement toutefois vers cette période particulière de sa vie. La BD se concentre essentiellement sur sa courte vie de partisan dans leVal d'Aoste, son arrestation par la milice fasciste et surtout les 11 mois passés à Auschwitz. Ce récit est donc encapsulé dans celui de sa rencontre avec une classe d'enfants de 10 ans, raconté de manière tirée au cordeau, l'horreur vécue en déportation fracassant les idées reçues des enfants. Même si elle est fictive, la scène contant la façon dont ceux-ci réagissent au traumatisme engendré par une simple sonnerie est l"une des plus belles que j'aie jamais vues en BD. Elle est symbolique, bien sûr, mais porte en elle tout l'enjeu de l'album : les rescapés de l'Holocauste sont de moins en moins nombreux, et avec leur disparition, que restera-t-il d'eux ? Le dessin d'Alessandro Ranghiasci est dans une ligne claire d'une grande intensité, l'accent a été mis sur l'allure des personnages, leurs visages. Un point a particulièrement retenu mon attention : les yeux des protagonistes. Lorsqu'ils arrivent dans le "lager", les déportés n'ont plus de pupilles, ils sont comme des fantômes, comme dépourvus d'âme, sauf lors des rares moments d'espoir. Ce sont plutôt des morts en sursis. Lorsque Primo Levi raconte cette survie, ses pupilles disparaissent aussi. Et lorsque les enfants comprennent enfin l'enfer qu'il a vécu, ils n'en ont plus à leur tour. C'est subtil mais frappant. Utile. Essentiel.
Primo Levi a été rendu célèbre par son livre Si c'est un homme dans lequel il relate son emprisonnement au cours de l'année 1944 dans le camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz. Son œuvre est communément interprétée comme une puissante affirmation de la vie face à des puissances violentes et guerrières organisées. La célèbre chanteuse populaire Mylène Farmer lui a rendu hommage dans sa chanson Souviens-toi . Souviens-toi que l'on peut tout donner. Souviens-toi que l'on peut tout briser. Et si c'est un Homme... Si c'est un Homme. Lui parler d'amour à volonté. D'amour à volonté. Les paroles résonnent encore à la lecture de cet ouvrage. Le passage à Auschwitz a été plutôt éprouvant. La difficulté était de faire comprendre l'horreur des camps à des enfants dans une classe d'école qui n'ont jamais connu la guerre et qui sont dans le confort. Ce témoignage demeure intemporel car comme il le dit à la fin, la guerre est éternelle et cela recommencera un jour ou l'autre. Cela commence par la construction d'un mur ou d'une révolution et qui sait où cela nous mènera... Je pense que nous avons là depuis Maus, une des meilleures bande dessinée sur le sujet grâce pas au seulement au message porté mais à sa grande subtilité et sa délicatesse. Comme dit, les survivants de l'horreur sont de moins en moins nombreux. Il ne restera bientôt plus de rescapés pour porter le poids de l'histoire. Cela risque de disparaître progressivement au point de tout oublier ou de remettre en cause.
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