Entrez dans la danse
Après sa magistrale adaptation de Charly 9, Richard Guérineau met à nouveau son talent au service de l’oeuvre de Jean Teulé pour donner chair à cette incroyable épidémie de danse survenue il y a 500 ans à Strasbourg.
1454 - 1643 : Du début de la Renaissance à Louis XIII Grand Est Jean Teulé Les prix lecteurs BDTheque 2019 Mirages One-shots, le best-of
Strasbourg, juillet 1518. La ville est soumise depuis quatre ans aux pires calamités. La sécheresse, les grands froids, la famine, la maladie… C’est ce qui explique pourquoi Enneline est allée précipiter son enfant depuis le pont au Corbeau. Ça et la folie de la danse qui s’est saisie d’elle tout de suite après. Nombreux furent ceux à entrer dans la danse à sa suite… certains jusqu’à la mort.
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Date de parution | 28 Août 2019 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Cet album est pour sûr graphiquement très réussi. Le trait des personnages parvient étonnamment à être à la fois réaliste et caricatural, en plus d'être expressif et fort agréable à l'oeil. Les vues de Strasbourg sont également très réussies, et dans un autre registre certaines planches de danses sont magnifiques de grâce. Guérineau emprunte aussi à Michel Ange sa création d'Adam, remplaçant Dieu par ce que j'interprète comme la folie à l'origine de cette danse, et la double page de folie représentée comme une soirée en boîte de nuit surprend, dans le bon sens du terme. C'est sur l'histoire que je serai un peu plus réservé. Si le récit de cette étonnante et mystérieuse folie est intéressant et certainement original, si on sent fort bien la misère cruelle qui frappe la ville entière au début, si les différents personnages, que ce soient le maire, l'évêque, le capitaine ou encore les deux couples que l'on suit tout au long de l'album (Enneline et Troffea, et Jérôme et Attale) sont bien rendus, si quelques traits d'humour assez acides parsèment l'ensemble, si encore la critique sur le clergé catholique de cette époque est complètement pertinente et la montée naissante du protestantisme est fort bien mise à contribution dans ces pages, et si enfin on est estomaqués par la solution à cette maladie, j'ai tout de même éprouvé le sentiment de quelques longueurs ou d'un rythme qui - tel un danseur fou - s’essoufflait parfois ou peinait à maintenir l'intérêt du lecteur. Du coup je ne suis pas certain, et ce malgré toutes ses qualités, de relire cet album. Il reste tout de même une lecture fort intéressante que je recommande au lecteur un peu curieux.
Encore une adaptation d'un roman de Jean Teulé fort réussie par Richard Guérineau. Les deux auteurs nous entraînent cette fois-ci à Strasbourg vers l'an 1458 où une bien mystérieuse épidémie a jeté une partie de la population (souvent très pauvre) dans les rues pour y danser jusqu'à l'épuisement total. Si la cause de ces comportements n'a jamais été élucidée à ce jour, ce qui est intéressant ici, c'est la réaction des autorités de la ville. Ecclésiastiques ou administratives, ces autorités ont montré une totale impuissance face au phénomène. Que l'on me taxe d'anticlérical s'il le faut, mais encore une fois, force est de constater que l'église de l'époque a su trouver une solution que je n'ose qualifier de finale pour régler le problème. C'est une fois de plus sur la crédulité des gens qu'elle s'est appuyée, mettant en avant la montée de la réforme de Luther et une hypothétique invasion des Turcs. Les deux auteurs traduisent bien l'ambiance qui règne dans la ville, spécialement le dessinateur qui retransmet à merveille par plusieurs planches muettes la folie qui s'est emparée de la ville. Pour ma part, ce récit est un petit régal tant pour les yeux que pour ce qu'il nous dit des autorités d'une ville confrontée à quelque chose qu'elle ne comprend pas et ne maîtrise pas. Encore un coup de maître des deux auteurs, un récit hautement recommandable.
Une nouvelle adaptation d’un roman de Teulé pour Guérineau, qui se retrouve donc encore embarqué dans les délires roublards du romancier, qui excelle depuis quelques années à trouver dans les interstices de l’Histoire les petits épisodes truculents, étonnants ou tout simplement extraordinaires, qui se révèlent être des réservoirs inépuisables d’histoires à raconter. Le dessin de Guérineau, dans un style à mi-chemin entre la caricature et le semi-réaliste, est efficace, ses personnages aux traits simples, un peu joufflus, ses décors à la fois simples et assez détaillés, un jeu sur la colorisation souvent original (quelques planches ont des couleurs flashy donnant à certaines scènes des airs de boite de nuit !). Quant à l’intrigue, elle se développe gentiment autour de cette « épidémie » mystérieuse de danse incontrôlée – qui a bien existé, et que les historiens n’ont pas complètement expliquée. Dans une ambiance tendue (plus que les Turcs, que certains avancent comme surprenants boucs émissaires, ce sont les premières critiques de Martin Luther qui « mettent » la pression sur les autorités ecclésiastiques). C’est justement l’évêque de Strasbourg qui joue ici le rôle du méchant, caricature du profiteur, d’un clergé dévoyé justement mis en cause par Luther, et qui ici, fait face au maire lui aussi dépassé, mais plus mesuré. Cet évêque cynique et corrompu est la bonne trouvaille – même si au final le maire reprend la main, dans le duel qui les oppose pour contrôler la ville. Voilà donc une histoire qui se laisse lire agréablement, un bon divertissement pour une intrigue finalement assez noire, malgré quelques pointes d’humour.
J'avais vaguement entendu parlé de cet événement où des gens s'étaient subitement mis à danser, mais je ne connaissais pas les détails. Ce fut donc une lecture très intéressante en ce qui me concerne, car j'aime bien les événements étranges de notre histoire. Dommage qu'on n'aura jamais le fin mot sur cette folie collective (pourquoi donc des gens se mettraient à danser ?!) et j'espère que ce que décrivent les auteurs est proche de la réalité parce que je n'aime pas trop quand on ment sur des faits historiques. En tout cas, ce qui est décrit dans cet album semble crédible et j'ai particulièrement aimé la description des pouvoirs publics qui ne savent pas du tout comment gérer cette situation si particulière. Il y a des passages très glauques qui peuvent être malsains pour certains lecteurs. Personnellement, j'ai tellement lu d'horreurs dans ma vie que cela ne m'a pas trop dérangé. C'est donc un récit historique captivant servi par un bon dessin. Donc si on a aimé les autres œuvres de ce duo, c'est à lire !
Jean Teulé a le chic pour aborder dans le détail des sujets historiques mal connus voire complètement incroyables. C'est le cas ici avec cette épidémie de danse qui a frappé Strasbourg au début du 16e siècle. Je n'en connaissais rien et on m'en aurait simplement parlé, j'aurais cru à une légende. D'imaginer que ça ait vraiment eu lieu est étonnant. Richard Guérineau adapte ce récit avec une belle maîtrise graphique et narrative. Son graphisme et ses couleurs sont attirantes et donnent envie de lire et de se plonger dans l'histoire. J'aime la façon dont il représente ses personnages, à la limite entre réalisme et caricature. Ses couleurs sont sobres, légèrement désaturées, mais suffisamment chaudes pour laisser une impression plaisante et pas trop déprimante au lecteur. L'histoire est intéressante mais je l'ai trouvée un peu dérangeante. Je trouve lugubre et presque effrayante cette folie dansante poussée par un désespoir intense de la population strasbourgeoise. Et de m'imaginer à la place de ce mari qui ne sait plus comment en sortir sa femme m'a fait froid dans le dos. Certains passages m'ont également paru un peu malsains. Je ne suis pas un grand amateur de malsain et ça m'empêche d'apprécier totalement une oeuvre comme cette BD. Je la trouve très bien faite, très bien racontée et instructive, mais je ne l'achèterais pas personnellement.
Strasbourg n’est pas que la capitale de Noël. Il s’est passé des choses plutôt pas très catholiques en l’an 1518 qui détruiraient sans doute le mythe. Nous avons eu une étrange épidémie qui a frappé les habitants qui se sont mis à danser frénétiquement jusqu’à en mourir d’épuisement. Cela fait d’ailleurs penser à une rave party mais avant l’heure. L’Eglise a réglé le problème d’une manière fort radicale. A vrai dire, étant habitant de cette ville et connaissant plutôt bien son histoire, je n’en n’avais jamais entendu parler. Je pense que cet épisode a sans doute volontairement été oublié au vu de ce qui s’est passé et que je ne révèlerai point. Bref, c’est extrêmement instructif car l’auteur est allé au fond des choses pour nous expliquer les conséquences que cela a entrainées. Strasbourg est devenue petit à petit protestante et ce n’est pas sans raison. On n’a jamais trop connu les causes véritables de cette peste dansante : Folie ? Hystérie collective ? Virus ? Conséquence de la terrible famine qui sévissait à l’époque des faits ? Possession diabolique ? ... On pourrait penser à un problème lié à un empoisonnement par du seigle contaminé par une mycotoxine mais ce n’est point établi avec certitude. Le traitement opéré par les scientifiques de l’époque s’est révélé catastrophique. Cela pourrait être amusant s’il n’y avait pas eu plus d’une centaine de morts. Sur le plan graphique, c’est un petit bijou. Le propos est servi par une magnifique représentation. Les couleurs sont tout à fait adéquates. Même les décors de Strasbourg sont tout à fait bien respectés. J’ai pu reconnaître par exemple le fameux pont du corbeau où Emeline jette son bébé car ne pouvant plus le nourrir. Avant d’entrer dans la danse, on réfléchira à deux fois. Une flashmob assez mortelle.
Pour la seconde fois, après l’excellent Charly 9, Richard Guérineau adapte un roman de Jean Teulé, qui décidément semble inspirer les auteurs de BD. Logique me direz-vous, quand on sait que celui-ci a fait ses premières armes en dessinant notamment pour l’Echo des savanes. Avec « Entrez dans la danse », Guérineau parvient une nouvelle fois à nous rendre proche un chapitre de l’histoire de France, ici très méconnu, à l’aide de son trait semi-réaliste très vivant, qui du coup convient parfaitement à la thématique traitée : la danse. La particularité du fait divers narré ici réside dans son extrême rareté et dans le fait que personne n’a jamais pu fournir d’explication satisfaisante. Folie collective ? Virus ? Mauvaise conjonction des astres ? Conséquence de la famine qui sévissait à l’époque ? Les suppositions allaient bon train chez les médecins et les ecclésiastiques… Quoi qu’il en soit, la « danse de Saint-Guy » qui s’était emparée soudainement des Strasbourgeois a démontré comment une pratique aussi anodine qu’un simple déhanchement, certes collectif et prolongé, réussit à mettre aux abois les autorités, révélant tout ce qu’elle pouvait avoir de subversif. A l’époque, la ville alsacienne était évidemment sous le carcan de l’Eglise catholique. Celle-ci jugea avec sévérité le comportement des habitants, qui pourtant ne semblaient aucunement conscients de leurs actes. Comme saisis par une transe mystérieuse, ils se contentaient de danser comme si le monde autour d’eux n’existait plus. L’originalité de l’ouvrage tient plus dans la retranscription graphique que dans la narration en elle-même (celle-ci n’étant in fine qu’un compte-rendu chronologique de ce drôle de fait divers, si terrible soit-il), et pour cela, Richard Guérineau nous a déjà montré toute la créativité dont il était capable. La description de ces danseurs et danseuses qui semblent n’être que les pantins inoffensifs totalement sous le contrôle d’une puissance occulte, ramenés au rang de zombies désarticulés, donnent lieu à de longues scènes silencieuses à la fois comiques et saisissantes, que Rabelais, contemporain de l’époque où se déroule l’action, n’aurait pas reniées. Comme il sait très bien le faire, Guérineau joue beaucoup d’un point de vue visuel sur le décalage temporel avec quelques allusions furtives à notre époque, qui par exemple voient la place de la cathédrale strasbourgeoise se transformer en rave party échevelée et torride. A travers cette histoire vraie, l’auteur dénonce à sa manière l’initiative meurtrière et sanglante des autorités catholiques pour mettre fin à ces paillardises « impures »… Hasard du calendrier ou non, Strasbourg se convertit quelques années après la tragédie au protestantisme… C’est donc avec un certain plaisir que l’on se laisse entraîner dans cette danse macabre phénoménale, dont les causes mystérieuses auront été emportées dans l’au-delà avec ses victimes, en raison de la bêtise religieuse la plus barbare. Avec ce nouvel opus, l’auteur du "Chant des Stryges" semble avoir pris goût au récit historique, un genre qui lui réussit plutôt bien.
Je vais peut-être faire une 'redit' mais oui toujours un grand plaisir de lire une nouvelle adaptation BD des romans de Teulé. Le duo d'ailleurs TEULÉ/GUÉRINEAU fonctionne super bien. Bien que je sois grandement fan du travail de Luigi Citrone sur l'adaption du Je, François Villon que je trouve merveilleuse et limite être un chef d'oeuvre ! Disons-le quand même tout de suite "Entrez dans la danse" est un récit assez court, comme le roman d'ailleurs, et Guérineau arrive en quelques pages à vraiment faire transparaître l'âme de ce que raconte Teulé en bien plus de pages. Ça, c'est très fort ! Nous sommes à Strasbourg, Au XVIe siècle, les temps sont durs. Entre le peu à manger et la menace de l'invasion turque qui pèse sur la ville, les gens meurent de faim et en bouffent même leurs enfants. Jusqu'à ce qu'une jeune femme pète les plombs et se mette à danser. Et à danser, en entraînant toute la populace. Au milieu de tout cela se mêlent les politiques et les religieux (qui sont complètement à coté de la plaque). Et un drame inqualifiable intervient ! Teulé est extrêmement doué pour mettre en avant le côté cynique de l'Histoire. C'est toujours précis, bien documenté et il a son humeur décapent qui match à chaque fois. Cette histoire d'ailleurs est complètement dingue et véridique. Les tenants et aboutissants n'ont d'ailleurs jamais été résolus. Et c'est ce que Guérineau fait bien transparaître dans son adaptation. Avec parfois des planches mystiques et totalement superbes. Mais le tout résonne dramatiquement dans notre âme car c'est ignoble ce que les Strasbourgeois vont vivre. C'est crade et ordurier. Entre émotion, dégoût, colère face aux religieux et rires 'Entrez dans la danse' se place à la même position que le roman de Teulé. C'est bien et on en redemande !
C'est toujours un plaisir que de retrouver ce duo d'auteurs qui aborde l'histoire d'une manière assez rafraichissante. Pas spécialement adepte des récits historiques un peu trop pointus et arides à mon goût, j'aime l'équilibre trouvé par Jean Teulé et Richard Guérineau pour nous narrer des moments de l'histoire ou nous conter la vie de personnages toujours un peu décalés. Dialogues et dessins sont ciselés dans ce but avec finesse, et du coup l'Histoire m’apparaît beaucoup plus digne d'intérêt. Après Charly 9 et Henriquet, l'homme-reine, c'est ce fait historique des plus hallucinant se déroulant à Strasbourg au début du XVIe que nous propose notre duo d'auteur : imaginez que la population de cette ville importante se mette à danser, danser, danser, sans pouvoir s'arrêter pendant des jours et des jours... Bon il faut dire que la population est depuis quelques temps soumise à rude épreuve : famine, récoltes réduites à rien à cause des aléas climatiques, maladies et guerre... C'est vrai qu'ils cumulent... Mais de là à rendre à moitié folle une population de grande ville pour se mettre à danser sans pouvoir s'arrêter, l'anecdote historique laisse pantois, oscillant entre le rire et les larmes. Car si les autorités prennent tout ça un peu à la légère au début, la contagion du phénomène va vite devenir une priorité ! Qui du clergé, des médecins et autres astrologues pourra sortir le malheureux maire de Strasbourg de cette folie ? L'Eglise va d'ailleurs en prendre pour son grade (à juste titre dirais-je...), Jean Teulé n'usurpe pas sur ce coup son titre de bouffe-curé ! Voilà en tout cas un album qui se lit d'une traite et met le doigt sur un moment de l'histoire que je ne connaissais pas. Les deux auteurs ont su trouver un angle tragi-comique parfait pour ce "fait divers" des plus troublant. Encore un très bon album !
Richard Guérineau adapte à nouveau un récit de Jean Teulé… et une fois de plus l’osmose est parfaite entre ce trait à la fois réaliste et caricatural de l’un et cette histoire à la fois historique et effarante d’épidémie dansante telle que racontée par l’autre. Et Jean Teulé ne se gêne pas pour écorcher la très sainte Eglise au passage, seul véritable méchant de cette histoire. Pour le reste nous naviguons entre l’horreur et le rire (le second étant souvent provoqué par le premier), entre le magnifique et le grotesque. Nous suivons des personnages dépassés par les événements, impuissants, subissant mais non résignés. Les dialogues, résolument modernes, nous rendent ces personnages très proches. Le découpage de certaines planches (surtout dans les scènes de danse) est un régal pour les yeux. Tout est donc réuni pour nous faire passer un agréable moment de lecture. Ce livre instruit, touche et amuse… Que demander de plus ? Car, comme le dit très justement l'ammeister Drachenfels dans ce récit : "Erasme, s'il revenait à Strasbourg, en ferait une drôle de gueule au milieu de tous ces agités du cul !"
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