Le Boiseleur
Joli conte social et sociétal, Le Boiseleur, série scénarisée par Hubert et dessinée par Gaëlle Hersent, s’adresse à tous les amoureux de la nature et de l’esprit.
Environnement et écologie Hubert La BD au féminin Sculpture Soleil
En ces temps fort lointains habitait dans la ville de Solidor Illian, jeune apprenti sculpteur. Son habileté ravissait l’impitoyable Maître Koppel, délesté ainsi de la plupart des tâches de sculpture. Les habitants de Solidor avaient développé une passion pour les oiseaux exotiques, et chaque maison comportait au moins une cage en bois, avec au moins un oiseau. Les écouter enchantait Illian. Un soir, tandis qu’il fignolait un petit rossignol sculpté dans un rebut de bois, Maître Koppel surgit, furieux, avant d’être apaisé par sa fille, émerveillée par la sculpture. Une sculpture dont ils étaient, à cet instant, loin d’imaginer les répercussions sur toute la ville... Oscillant avec art entre diverses tonalités, ce récit explore l’inhumanité des systèmes et l’humanité des êtres, en offrant notamment une réflexion autour de la relation maître apprenti, de l’écologie, ou encore de la société de consommation.
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Date de parution | 19 Octobre 2019 |
Statut histoire | Série terminée 2 tomes parus |
Les avis
Tome 1 - Les Mains d'Illian Le joli néologisme du titre reflète à merveille ce conte où il est question d’oiseaux sculptés dans le bois. On connaissait le talent de conteur de Hubert, scénariste prolifique dont on ne citera que la fabuleuse saga gothique des « Ogres-Dieux ». Son talent, il le met cette fois au service de Gaëlle Hersant, dessinatrice remarquée en 2015 pour sa biographie sur Marie-Angélique Leblanc, Sauvage (Delcourt). « Le Boiseleur » possède tous les attraits des contes de notre enfance, ne serait-ce que parce qu’il emprunte à la magie de « Pinocchio », Illian évoquant de loin le personnage de Geppetto. Le livre bénéficie par ailleurs d’une narration simple avec des thématiques très contemporaines. Sans vouloir interpréter à outrance les propos de l’auteur, le jeune ouvrier Illian ne symbolise-t-il pas d’une certaine manière tous les enfants des pays pauvres exploités pour la fabrication des jouets à destination des Occidentaux ? Le même Illian qui ose faire la cour à la fille de son patron, n’enfreint-il pas les règles implicites voulues par les classes dirigeantes, consistant à maintenir les couches populaires dans leurs conditions misérables, à les empêcher de s’élever au dessus du plafond de verre séparant les dominants des dominés ?… Le don du jeune garçon pour sculpter les oiseaux est à ce titre on ne peut plus symbolique… Cette thématique sociale vieille comme le monde se double d’une autre, plus sociétale, qui aurait à voir avec nos comportements consuméristes aux effets pervers. Ici, c’est le don extraordinaire d’Illian qui, à cause du panurgisme des habitants de Solidor, va devenir une malédiction, entraînant la disparition des vrais oiseaux de l’île, et avec eux leurs chants… Le bel univers graphique de Gaëlle Hersent est loin d’être étranger au charme très particulier de ce récit. Comme si les oiseaux l’avaient inspirée, son trait semble se déployer à la manière du long plumage de ces merveilleuses créatures, pour la plupart exotiques, si bien qu’on aurait presque la sensation de les entendre agiter leurs ailes ou jaser leurs trilles harmonieuses. Des chants d’oiseaux qui persistent dans votre tête et vos oreilles longtemps après avoir refermé le livre… Il y a décidément de la magie dans ce « Boiseleur »… Non dénué d’un certain humour, le premier tome de ce diptyque se referme sur une note inattendue pleine de poésie, suggérant d’autres belles séquences à venir. Publiée dans la collection « Métamorphose », l’ouvrage bénéficie, faut-il le préciser, d’une magnifique présentation. Tome 2 - L'Esprit d'atelier Alors que la première partie était centrée sur l’activité sur bois de notre jeune héros Illian, « L’Esprit d’atelier » nous fait pénétrer dans le monde de la sculpture sur pierre, ce qui renouvelle de façon originale ce conte plein de magie. Le grand mérite de l’histoire est de nous faire aborder la sculpture sous l’angle du merveilleux tout en initiant les plus béotiens d’entre nous (dont je fais partie) au « plus mystérieux des arts ». Illian lui-même, coutumier de la sculpture sur bois, réalise que travailler la pierre, ce n’est pas du tout la même limonade ! S’il a su faire preuve de son talent avec ses oiseaux en bois, le pauvre garçon est désormais totalement déboussolé, avouant ne rien piper aux principes de façonnage de ce matériau. Le bois, c’est tendre, mais le caillou, c’est pas chou ! L’identification au jeune artiste sera d’autant plus aisée pour les « cancres » en la matière… Mettre en images un tel sujet n’était pas à la portée de n’importe quel dessinateur. Gaëlle Hersent se montre largement à la hauteur, très à l’aise pour représenter les formes, le mouvement et les courbes de la statuaire. Son crayon virevolte au rythme du ciseau, et certaines planches nous laissent admiratif, avec cette sensation de nous être appropriés les bases d’un art fascinant. Après ça, forcément, on ne regardera plus tout à fait les statues de la même façon… En revanche, si la colorisation est sobre, on pourra regretter, même si ça ne gâche pas l’ensemble, cette propension à utiliser les mêmes tonalités, qui voient principalement le marron converser avec le beige, l’orange ou un bleu tirant vers le gris, ce qui confère à l’ensemble une certaine monotonie. Comme pour chacune de ses œuvres, Hubert n’a pas oublié d’être « inclusif », sans ostentation toutefois, en intégrant à l’histoire des personnages d’origine ethnique diverses et en faisant des femmes autre chose que les faire-valoir de la gent mâle. Mais ce que l’on retiendra surtout, c’est le contenu philosophique de ce conte, dans lequel les artistes « officiels », les vaniteux, qui sont souvent les mêmes, en prennent pour leur grade. L’arrogance et l’esbroufe, c’est pas le genre de la maison Hubert ! Quant au twist final qui vient ponctuer la compétition finale entre les deux ateliers desquels le timide Illian est l’un des représentants — avec un enjeu terrible, la mise au ban de l’atelier perdant ! —, il nous invite peut-être juste à être nous-mêmes, en évitant le « côté obscur » induit par un ego surdimensionné aux effets potentiellement dévastateurs… Et pour les plus romantiques d’entre nous, les auteurs n’ont bien sûr pas oublié la discrète « love story » entre Illian et Flora, sa dulcinée restée au pays qu’il croyait perdue à jamais. Mais les auteurs nous évitent le « Ils-furent-heureux-et-eurent-beaucoup-d ’enfants » en privilégiant une fin plus subtile… Avec pour seule conclusion : en art comme en amour, c’est toujours la pureté des sentiments qui prime…. Et pour le second, pas besoin de ciseau, de gouge ou de rabot…
Le 4ème de couverture de ce splendide ouvrage parle à juste titre "d'un conte doux-amer sur l'art, la nature et le consumérisme." On ne saurait ainsi mieux résumer cette jolie histoire racontant le quotidien d'un jeune apprenti sculpteur, Ilian aux mains de son tyrannique maître l'exploitant sans vergogne pour créer de magnifiques cages d'oiseaux. Solidor est une ville commerçante en bord de mer dans des époques reculées et ressemblant fortement à la région paradisiaque du lac de Côme en Italie. Les plus nobles de ses habitants se pressent pour mettre en cage tout oiseau exotique. Lorsqu'Illian va sculpter un oiseau de bois plus vrai que nature, toute l'économie de Solidor va en être bouleversée... En effet, chaque habitant va relâcher les oiseaux pour les remplacer par les sculptures en bois du jeune prodige et Solidor va devenir bien triste en préférant de vulgaires reptiles pour animaux de compagnie. Si l'histoire parait volontairement désuète, il faut louer le talent de Hubert pour insuffler la poésie et la grâce nécessaire à cette histoire somme toute banale. Le Boiseleur dégage toute la noirceur de Beauté ou de Les Ogres-Dieux pour une ambiance aussi désinvolte qu'agréable. Et un talent en entraînant un autre, ce Boiseleur ne serait sans doute rien sans le talent hallucinant de l'autrice Gaëlle Hersent. La voir créer de splendides et nombreuses doubles pages richement détaillées confère un charme immédiat et permanent à l'ensemble de cet ouvrage. La ville de Solidor purement fictive n'a jamais semblé être aussi vivante. Le grand format inhabituel régale les rétines. Avec une portée discrète mais bien présente sur l'art, la nature et le consumérisme comme annoncé et une véritable prouesse graphique, le duo emporte l'adhésion avec un récit certes classique mais dont il nous tarde de lire la fin dans le second et ultime opus. Un joli coup de coeur qui mériterait amplement d'être offert pour toute personne sensible de votre entourage.
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