Coeur de Ténèbres (Delcourt)

Note: 3.71/5
(3.71/5 pour 7 avis)

En 1794, le lieutenant Varenne est chargé avec son ami, éclaireur Mohawk, de retrouver le colonel Sherb. Celui-ci a perdu la raison et se cache dans les marais de Bretagne où il tire aussi bien sur les Blancs que sur les Bleus.


1789 - 1799 : La Révolution Française Adaptations de romans en BD Bretagne Joseph Conrad Mirages

Nous sommes en 1794 et les guerres de Vendée ne sont pas terminées. Les Bleus soldats de la Convention commettent des massacres parmi la population. Le lieutenant Varenne n'en peut plus de ces exactions et souhaite se faire muter dans l'armée du nord. Son général lui demande alors de s'enfoncer dans le marais breton où le colonel Sherb s'est réfugié avec une petite armée. Là il se livre avec ses hommes à toutes sortes de massacres autant sur la population locale que sur les hommes de la Convention, les Bleus que les Blancs favorables au roi. Le lieutenant Varenne s'enfonce dans le marais avec son ami et éclaireur indien Uncas. Leur mission ramener le colonel qui n'obéit plus aux ordres pour qu'il soit jugé ou bien le tué.

Scénario
Oeuvre originale
Dessin
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 11 Septembre 2019
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Coeur de Ténèbres (Delcourt) © Delcourt 2019
Les notes
Note: 3.71/5
(3.71/5 pour 7 avis)
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03/11/2019 | sloane
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L'avatar du posteur Noirdésir

Un album étonnant. Le titre renvoie immédiatement au très beau roman de Conrad – l’intrigue aussi d’ailleurs. Et puis Pecau y ajoute un clin d’œil incongru et surprenant au « Dernier des Mohicans », avec la présence d’un Mohican prénommé Uncas. L’histoire se déroule dans l’ouest de la France révolutionnaire, au moment où les colonnes infernales républicaines écrasent les foyers de résistance royalistes. Un officier républicain est envoyé dans les marais pour « éliminer » un officier qui a « pété les plombs », Sherb (transposition du Kurtz du roman de Conrad). La lecture est intéressante, et le visuel assez fort pour tenir un récit qui au départ est rempli d’une noirceur que le titre n’évoque qu’en partie (la forêt vierge est ici remplacée par les marais, mais la noirceur humaine est bien présente). Certains passages relèvent presque du « dessin automatique », des ébauches où la couleur fusent brusquement – alors que le Noir et Blanc grisâtre domine ailleurs. Le récit n’a peut-être pas le souffle halluciné du roman, mais cette transposition est globalement bien fichue. L’Histoire et les marais, le brouillard, ne forme que la toile sur laquelle les ténèbres de certains hommes sont projetés.

24/06/2024 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
L'avatar du posteur gruizzli

Adaptation du fameux roman "Au cœur des ténèbres" de Joseph Conrad, cette BD est avant tout une réécriture qui la place dans la guerre de Vendée alors que la révolution a éclatée depuis 5 ans. Cette période trouble et charnière fut le théâtre de sanglants affrontements dont la BD parle donc. Si j'ai bien aimé l'adaptation, l'idée étant à la fois logique et pas forcément évidente, la BD en elle-même reste très proche de la nouvelle. Ayant lu les deux, je peux dire que le déroulé est presque identique à quelques exceptions près. L'idée de s'enfoncer dans le marais comme on s'enfonce dans la folie d'un homme qui rêve d'un nouveau monde est bien amenée là aussi et permets de mettre en lumière les ravages de cette guerre, à la fois absurde et sanglante. Les déportations de femmes, les enfants abandonnés et fusillés, les villages dépeuplés. Un ballet sanglant dont personne ne sortira véritablement indemne. Le dessin colle à merveille au récit et donne un aspect halluciné à ce voyage. Il joue des couleurs sporadiquement pour faire ressortir les moments qui semblent hors du temps. C'est très beau à l'œil, magnifique même dans certaines compositions. Et surtout très lisible. Je ne pense pas qu'il s'agisse de la meilleure adaptation de la nouvelle, et je trouve d'ailleurs que Kongo est une bd bien plus saisissante sur le même sujet. Mais "Cœur de ténèbres" n'a pas à rougir de la comparaison et pose son ambiance et son visuel, affirmant son parti pris et retraçant à merveille son propos sur la guerre. Ce que j'en tire surtout, c'est que ce qu'a écrit Conrad voila plus de 100 ans me semble décidément toujours aussi pertinent, vu le nombre d'adaptations qui semblent sonner si juste encore aujourd'hui. A lire !

15/11/2023 (modifier)
Par Gaston
Note: 3/5
L'avatar du posteur Gaston

En lisant cette bande dessinée, je trouvais que cela ressemblait drôlement à Apocalypse Now (film que je connais uniquement de nom) et voilà que j'apprends que les deux œuvres ont pour base la même nouvelle. Je me retrouve dans l'avis de Guillaume.M. Le dessin est incroyable. Il est dynamique et expressif. Le noir et blanc est bien maitrisé et l'ajout de couleurs durant les moments forts est une très bonne idée qui donne d'excellentes scènes. Le scénario est captivant et j'ai été scotché...jusqu'au dénouement. Peut-être que j'en attendais trop, la tension monte au fil des pages et je m'attendais à un final explosif. En fait, c'est effectivement explosif, mais je sais pas....Je pense que je m'attendais à une confrontation finale plus développée et la fin m'a semblé brutale. J'ai eu les mêmes réflexions que Guillaume M., notamment parce que la fin du récit donne l'impression qu'on a fait une montagne pour pas grand chose. Je pourrais expliquer plus clairement ce que je n'ai pas trop aimé, mais ça serait spoiler l’œuvre. Il reste que c'est un bon one-shot qu'il faut lire au moins une fois dans sa vie de bédéphile.

20/12/2020 (modifier)
L'avatar du posteur Guillaume.M

Les ténèbres… ici le lecteur a la garantie d’y pénétrer, que dis-je, d’y être englouti. En jetant mon dévolu sur cet album et durant ma lecture, j’ignorais tout de l’origine de cette histoire, tirée de la nouvelle « Au Cœur des Ténèbres » de Joseph Conrad. J’ignorais également que ladite nouvelle avait notamment inspiré Francis Ford Coppola pour son film « Apocalypse Now ». Pécau nous propose ici de suivre le lieutenant Varenne dans une chasse à l’homme, celle du colonel Schreb, retranché dans les marécages bretons où il règne sans pitié. Le tout se passe durant la guerre de Vendée qui a opposé les républicains (bleus) aux royalistes (blancs) durant la Révolution française. Bien que le récit prenne place en Bretagne, j’ai eu l’impression de voyager aux confins de la folie dans une terre imaginaire. Le dessin est assez éloigné du style que j’affectionne habituellement. Je ne peux pourtant que m’incliner devant une telle maîtrise et ce souci de traduire l’atmosphère du scénario. Le trait de crayon est brut, parfois violent et très puissant. Certaines planches sont des modèles du genre. Le noir, le blanc et le gris renforcent l’oppression ressentie à la lecture, pour mieux laisser place à des passages en couleurs qui explosent aux yeux, un peu comme quand on allume la lumière dans une pièce restée trop longtemps dans la nuit. Pour l’anecdote, cette technique a aussi été utilisée avec succès dans Blast de Larcenet. Une réussite lors ? Oui et non. Oui, car le postulat de départ est intéressant, l’ambiance une réussite incontestable et la montée crescendo du scénario bien retranscrite. Non, parce qu'à la fin de l’album le soufflé tombe un peu vite et me laisse sur ma faim… tout ça pour ça me suis-je dit. J’avais trouvé qu’« Apocalypse Now » était une purge d’un ennui mortel, à l’exception du mythique passage napalm/cigare/hélicoptères/valkyries (mes excuses aux nombreux fans…). « Cœur de Ténèbres » est à mes yeux nettement plus réussi, sans pour autant me satisfaire au même niveau que d’autres lecteurs, d'où ma note moins clinquante.

22/10/2020 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
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Voilà un album qui aura réussi à me surprendre de bout en bout ! D'une, parce que je n'avais pas fait le lien avec l'oeuvre de Joseph Conrad en attaquant ma lecture ; d'autre part, par la force que dégage ce récit grâce à des ambiances uniques qui tiennent en partie au trait rêche, simple, mais très expressif de Benjamin Bachelier : il nous embarque complètement ! Ce côté charbonneux tout de noir et de gris impose l'attention, pour mieux nous péter à la gueule quand surgit la couleur au détour de quelques pages explosives. Si le procédé n'est pas nouveau (on pensera forcément à l'excellentissime Blast de Larcenet), il n'en est pas moins rudement efficace. Saluons aussi le travail de Jean-Pierre Pécau au scénario qui réussit là une transposition assez bluffante du roman de Conrad au temps des guerres de Vendée. Pour habiter dans la région, je connais donc un peu le sujet et les traces qui y subsistent, tant géographiquement que dans les esprits. Et c'est ce côté universel de la trame du récit qui enfonce le clou pour parfaire cet album. Pari audacieux mais pleinement réussi ! Il n'est du coup pas besoin de connaître son histoire des guerres de Vendée pour en apprécier la teneur, mais il suffit juste de se laisser bercer par la douce horreur distillée par toute guerre... Un très bon album que je recommande.

14/01/2020 (modifier)
Par LuluZifer
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur LuluZifer

Nantes, durant la longue période des guerres de Vendée (où Les Blancs et Les Bleus s’affrontaient), le lieutenant Varenne et son acolyte Uncas, sont engagés pour retrouver le colonel Schreb. Celui-ci, surnommé l’Ange de la terreur, s’est retiré dans des marécages bretons, en compagnie de toute une armée d’oubliés. Son exil est considéré comme une vendetta et si Varenne le trouve, il doit l’abattre. Transposer le célèbre court roman ‘Au cœur des ténèbres’ de Joseph Conrad doit être un sacré défi. C’est un roman intense au caractère très sombre. Il compte le récit d’un périple au cœur de l’Afrique noire d’un jeune officier de la marine marchande britannique envoyé pour rétablir des liens commerciaux, concernant le business de l’ivoire, en pleine jungle, avec un certain Kurtz qui ne donne plus de nouvelles. Je pense qu’après tout le monde doit connaître ce roman de Conrad même si jamais lu via Apocalypse now, le film de Francis Ford Coppola, en transposant le récit durant la guerre du Vietman avec ce duo inoubliable qui est Martin Sheen et Marlon Brando. Jean-Pierre Pécau replace donc les événements de la nouvelle de Conrad avec brio puisqu’il arrive à sublimer ce récit étrange et terrible. Tout en restant sur le thème du conflit, il met en place la sédition d’un homme face à l’horreur de la guerre et met en avant un épisode sanglant et sombre de l’histoire de France : les guerres de Vendée. Les thèmes abordés sont forts et nous dévoilent toute l'angoisse de cette période de l’après Terreur. De plus, Jean-Pierre Pécau arrive à garder le côté exotique, mot à prendre avec des pincettes, du récit de Conrad qui se déroule en Afrique noire, avec le personnage de Uncas, un peau-rouge de la tribu Mohawk, venu s’engager dans l’armée française. De même que le récit de Conrad se déroule sur un fleuve d’Afrique noire au milieu de la jungle, présentement le récit se déroule sur un canoë dans des marécages touffus. Le côté graphique est absolument réussi et atypique. Le trait de Benjamin Bachelier s’harmonise avec la plume de Jean-Pierre Pécau et nous applaudissons le choix de ce duo qui est en total symbiose. Tout en gris, les traits marqués des personnages nous envahissent et nous crient leur horreur, souvent nous sommes à la limite de déchiffrer comme dans un brouillard. Ils ont des regards et des expressions happés par la folie. Des regards hagards, pétris de douleur et de souvenirs sanglants. Et tout d’un coup, des touches de couleurs, très vives, qui nous font monter en pression ! Boum ! Tout en se terminant comme dans une explosion de douleurs ! C’est beau, très beau, très émouvant et très délicat en fait. Je pense que cela peut rebuter au premier coup d’œil car le rendu est presque grossier mais c’est de l’art totalement maîtrisé. Bravo aux auteurs et à l’éditeur qui a su porter à bien ce projet totalement réussi.

04/11/2019 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
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Au cœur des ténèbres. Cet ajout du "au" avant le titre de cette BD est fait en toute conscience car effectivement ce que nous proposent les deux auteurs est bien une adaptation de la célébrissime longue nouvelle de Joseph Conrad parue en 1899 "Au cœur des ténèbres". Cette nouvelle va faire au fil du temps l'objet de nombreuses adaptations cinématographiques, la plus célèbre étant sans conteste le fabuleux film de Francis F. Coppola "Apocalypse Now". On peut également citer le film de Werner Herzog "Aguirre, la colère de dieu" de 1972 où si la trame est très proche elle est par contre fondée sur des faits authentiques. Personnellement je suis un grand fan de ces deux films mais également de la nouvelle de Conrad, aussi voir une nouvelle adaptation qui de surcroit se passe dans la région où j'habite ne pouvait que me titiller. Hop là je suis breton pas vendéen... Nous suivons donc le lieutenant Varenne complétement traumatisé par les horreurs de la guerre qui se voit confier la mission de partir à la recherche du colonel Sherb surnommé "l'ange de la terreur". Ce dernier a perdu la raison et se terre dans les marais de Brière autour de la ville de Guérande. Là entouré de ses fidèles il fait tirer sans distinction aussi bien sur les blancs que sur les bleus en asservissant la population locale. En compagnie de son ami et éclaireur Mohawk, Uncas, le lieutenant Varenne s'enfonce au cœur du marais. Je connais ces marais de Brière et si l'on m'avait dit un jour qu'ils pourraient être le lieu de ce type d'histoire je ne l'aurais pas cru et c'est tout le talent du dessinateur Benjamin Bachelier de traduire sur le papier le côté fascinant, trouble, angoissant que peuvent avoir ces paysages faits de grandes étendues d'eau marquées de ci de là par des buttes de roseaux, si l'on y ajoute les bancs de brouillard, il suffit de peu d'imagination pour s'y croire. C'est donc un trait assez simple, les décors sont minimalistes, les visages cabossés mais bougrement efficaces que nous propose B.Bachelier avec des ambiances en adéquation parfaite avec le récit. Tout en noir et blanc, il se permet la couleur pour illustrer les délires maladifs du lieutenant et la mort du colonel Kurtz, oup's, colonel Sherb. En ce qui concerne le scénario je n'ai que peu de choses à dire sinon que le récit colle parfaitement à celui de Conrad et que l'idée au départ saugrenue de situer l'action dans les marais de Bretagne à l'époque de la Révolution française est au final un excellent choix. Ici le voyage se fait en canoë et n'a donc certes pas l'ampleur d'un voyage en patrouilleur, de charge en hélicoptères au son de la walkyrie ou d'odeur du napalm, pour autant cette BD plutôt silencieuse ne nous épargne pas la célébrissime réplique finale "L'horreur, l'horreur" qui hante les mémoires. C'est peu de dire que cette œuvre atypique est une réussite qu'il faut lire et faire partager.

03/11/2019 (modifier)