Qu'importe la mitraille

Note: 4/5
(4/5 pour 1 avis)

Les débuts des deux auteurs, mais aussi une immersion dans le monde de la petite édition.


Documentaires Les petits éditeurs indépendants Profession : bédéiste Séries avec un unique avis

Avec Qu’importe la mitraille, opus tourmenté réalisé à quatre mains, Matthias Lehmann et Nicolas Moog nous montrent toute l’étendue de la complicité, dans l’adversité, de deux auteurs emblématiques de la bande dessinée alternative. Ils décryptent l’ensemble de leurs parcours artistique et le monde de l’édition dite alternative, des années 1990 à aujourd’hui, à travers des remémorations fragmentées en courts récits. Et c’est à la fois triste et pas triste. Dans la lignée du livre de Tanx, Des croûtes aux coins des yeux, ils questionnent la réalité de façon outrancière et impudique, causent de la réalité sociale du travail et constatent leurs statuts de losers de l’art. L’humour est grinçant, les crocs-en-jambe fatals et le désespoir noyé dans des flots d’alcool. En filigrane de leur vies et de leurs travaux, cette correspondance graphique étalée sur plus de 10 ans, regroupe des récits parus dans diverses revues, ou inédits, sur lesquels ils mélangent, dans toutes les combinaisons possibles dessins, écritures et encrages. On pourra faire un parallèle avec Les professionnels de Carlos Gimenez, qui apparait en clin d’œil dans deux histoires, tant Matthias Lehmann et Nicolas Moog centrent ce débat sur le rôle et l’aventure du métier d’auteur, offrant une version actuelle aux questionnements qui en découlent. Beaucoup d’hommages sont au rendez-vous de ces petites histoires (Clowes, Tillieux, Chaland, Franquin...), les auteurs explorant à foison leurs sources d’inspiration afin de mieux saisir les origines de leur engagement. Site éditeur

Scénario
Dessin
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 17 Octobre 2016
Statut histoire Histoires courtes 1 tome paru

Couverture de la série Qu'importe la mitraille © 6 Pieds Sous Terre 2016
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 1 avis)
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10/11/2019 | Noirdésir
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On peut lire cet album sous plusieurs angles, et y trouver à satisfaire des intérêts assez différents. Et ma note paraitra peut-être trop généreuse à certains. Il n’empêche que j’ai vraiment apprécié ma lecture, et j’y ai trouvé de la fraicheur, mais aussi une présentation très éclairée et intéressante de l’évolution du « métier » d’auteur de BD, de libraire, et du paysage underground et du fanzinat. Ceux que ces sujets intéressent peuvent compléter cette lecture avec « Toutes les croûtes au coin des yeux », album intégrale publié par Tanxxx chez le même éditeur. J’ai parlé de plusieurs angles de lecture. Tout d’abord il y a l’amitié entre deux hommes, Matthias Lehmann et Nicolas Moog, que l’on voit se développer, les deux auteurs partageant beaucoup (travail et déceptions, réflexions), jusqu’à devenir presque fusionnels : en témoigne cet album-ci, écrit à quatre mains – comme leur récent « La vengeance de Croc-en-jambe » paru chez Fluide Glacial. Transparaissent aussi, au travers de leurs échanges, leur vie privée, l’évolution de leur caractère (et, légèrement, de leur « condition »). Tout cet aspect est sympathique, mais je n’aurais sans doute mis que trois étoiles si l’album n’était constitué que de ces bribes biographiques. Mais voilà, ce qui fait la richesse de cet album, c’est qu’au travers de la vie, de l’expérience de ces deux auteurs, nous découvrons le monde fourmillant de l’underground, du fanzinat et des petites maisons d’éditions, des années 1990 à nos jours. Bourré d’anecdotes – mais aussi de références à des œuvres et des auteurs plus « connus », aux à côtés d’Angoulême, etc., l’album prend toute sa force dans ce côté « historique ». C’est aussi, au travers de la trajectoire de ces deux auteurs, une réflexion sur le rôle des « vrais » libraires. Je voudrais ici, à la suite de Mattias Lehmann, dire toute mon admiration pour le travail de Jacques Noël (décédé en 2016) dans sa librairie « Le regard Moderne », véritable grotte hyper bordélique (on aurait pu croire que Gaston Lagaffe s’était chargé du rangement !), mais remplie de merveilles, de tout ce qui échappait aux circuits classiques (en terme de poésie, de BD, d’érotisme, d’écrits politiques). J’ai fréquenté énormément cette librairie dans les années 1990 entre autres (et donc j’ai dû y croiser Lehmann, mais moi ce sont surtout des plaquettes et revues de poésie que j’y cherchais à l’époque). Bref, je m’écarte du sujet – quoi que – et reviens vers cet album, autobiographique, sociologique, que les curieux, qui s’intéressent à l’arrière du décor, à la microédition, trouveront intéressant. Le ton est à l’autodérision, à la mauvaise foi assumée, la lecture – malgré certains passages avec un texte très abondant – se révèle très fluide (l’humour aide aussi). Au final, le titre prend tout son sens. Tous ses sens devrais-je plutôt dire, puisque les auteurs se moquent de recevoir des coups, et sont restés fidèles à leurs idées de jeunesse, quitte à galérer longtemps sans le sou. Note réelle 3,5/5.

10/11/2019 (modifier)