Payer la terre (Paying the Land)
A la rencontre des premières nations des territoires du Nord-Ouest Canadien "Redonner à la nature ce que la nature nous a donné"
BD Reportage et journalisme d'investigation Canada Consensus sur une BD Documentaires Froid. Neige. Glace Futurs immanquables Les prix lecteurs BDTheque 2020 Nouveau Futuropolis One-shots, le best-of Tribus et peuples isolés
Joe Sacco, l'auteur de Gaza 1956 et Gorazde, reprenant ses carnets de reporter-dessinateur, s'ets rendu dans les Territoires du Nord-Ouest du Canada, au-dessous de l'Arctique, une région grande comme la France et l'Espagne, mais peuplée de seulement 45.000 personnes. Allant à la rencontre des Dene, il nous retrace l'histoire de ce pays depuis l'arrivée des premiers colons et dresse un portrait actuel, économique, écologique et terriblement humaniste. "Pour les anciens, les vies étaient dictées par l'environnement, par les animaux. Ils vivaient en harmonie à leur contact. Les Dene mesuraient l'importance du monde qui les entoure. Ils devaient se lever tôt, pour pouvoir saluer le soleil. Ils enseignaient à traiter la terre avec égard. Avant de creuser des trous, de faire du tapage, ils disaient de prier et de payer la terre. Donner quelque chose ... de l'eau, du tabac ou du thé. Il fallait apporter un cadeau, comme lorsque tu rends visite à quelqu'un."
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Date de parution | 08 Janvier 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Il m’a fallu plusieurs jours pour que je finisse de lire « Payer la terre ». En effet, ce dernier album de Joe Sacco contient plus de 250 pages bien chargées de textes. Et il a fallu quatre ans à Joe Sacco pour réaliser ce one-shot. A l’origine, « Payer la terre » était un documentaire commandé par la revue « XXI », pour sa parution chez l’éditeur Futuropolis, il a ensuite été complété par d’autres petits récits afin de présenter un reportage plus fourni et plus explicatif sur la situation des autochtones du Canada, en particulier les Dene. Pourquoi un reportage sur le nord-ouest de ce vaste pays ? Parce que Joe Sacco avait envie d’approfondir les conséquences de la colonisation européenne sur les amérindiens du Canada et aussi, parce qu’il voulait « mesurer » les conséquences de l’exploitation du minerai, du pétrole et du gaz (en particulier, le procédé controversé du fractionnement hydraulique afin d’exploiter le gaz de schiste) sur la population locale. Le résultat est que tout cela fait quand même froid au dos notamment sur la méthode utilisée par des occidentaux pour que les autochtones aient accès à l’école. Dès 1850, le procédé a consisté à forcer, arracher les jeunes Dene de leurs familles pour les envoyer étudier dans des pensionnats gérés par l’église loin de leurs proches. Si ce moyen a été efficace pour ce qui est d’enseigner l’anglais aux Dene et de les « convertir » à la culture occidentale, ce fut en revanche un vrai désastre social pour des générations d’amérindiens qui ont perdu leurs repères, leurs cultures et la confiance en soi au point de se réfugier dans l’alcool et les addictions. Et je ne parle pas de la problématique des frontières territoriales et de l’implantation de l’industrie minière dans le nord-ouest du Canada… Joe Sacco, en compagnie d’une descendante des Dene, est donc allé à la rencontre de ces amérindiens où il a réuni des tonnes et des tonnes de témoignages. Ainsi, on apprend comment ils vivaient avant et pendant l’arrivée des colons. L’auteur restera généralement neutre sur ces sujets, se contentant de noter leurs dires même si, de temps en temps, de manière ironique, il lancera quelques « piques » sur certains protagonistes. Alors pourquoi ce temps pris pour lire ce recueil ? Non seulement à cause de sa pagination mais aussi par la redondance de nombreux témoignages et un texte envahissant qui m’ont souvent fait lâcher prise à cette lecture… Un besoin irrésistible de me poser afin de « digérer » toutes ces informations et aussi de réfléchir tranquillement aux problématiques de ces amérindiens. J’ai failli ne mettre que 3 étoiles sur 5 pour ce nouvel ouvrage de Joe Sacco à cause de la répétition des nombreux témoignages des Dene et la nécessité de bien rester concentré sur les tonnes d’informations recueillies par l’auteur. Mais, quelques jours après avoir fini cette lecture, je me suis aperçu que « Payer la terre » est une bande dessinée qui m’a marqué, qui me fait encore réfléchir sur ce que j’ai découvert. Je me suis aperçu aussi que ces témoignages, sa mise en images par l’auteur (des planches où on découvre la vie de ces autochtones dans leur milieu naturel ont été validées et corrigées par des amérindiens eux-mêmes) et autres auront une valeur inestimable pour les générations futures d’amérindiens. Une lecture indispensable !
Œuvre de terrain par excellence, « Payer la terre » est une BD documentaire de l’auteur américano-maltais Joe Sacco (né en 1960) qui s’est rendu auprès des Dénés, premiers occupants des vastes territoires du nord-ouest canadien, afin de comprendre l’imbroglio économico-juridique et de saisir la complexité socio-culturelle du « peuple » des régions arctiques. Dans ce reportage austère, dense et touffu, Joe Sacco multiplie les points de vue, non exempts de redites, des autochtones. Les trajectoires multiples et croisées donnent le tournis. L’accumulation des textes accompagnant les images exigent une attention constante. Le lecteur doit s’accrocher pour suivre et poursuivre mais l’effort consenti est récompensé par la valeur et l’importance du témoignage. Si Joe Sacco utilise les codes de la bande dessinée, son travail va au-delà de la figuration narrative avec la réalisation d’un reportage graphique dont la thématique actuelle demeure brûlante. Faut-il exploiter les ressources minières et se développer économiquement ou bien respecter la nature et y puiser de quoi vivre en autarcie ? Comment les Dénés peuvent-ils concilier leurs us et coutumes ancestrales et le mode de vie consumériste d’aujourd’hui ? : « Quelle est la vision du monde d’un peuple qui ne murmure ni remerciements ni prières, qui extrait tout ce qu’il veut de la terre et paie ses dettes avec de l’arsenic ? ». Si les magouilles politiques et les spoliations territoriales sont clairement exposées au fil du récit, c’est l’acculturation violente subie par les enfants, arrachés à leurs familles et envoyés de force dans des redoutables pensionnats qui retient l’attention. Les séquelles qui s’ensuivent sont irréparables. Débutant par une naissance, se clôturant par une renaissance, le reportage dessiné penche en faveur des peuples premiers en évitant tout manichéisme.
J’adore le travail de Joe Sacco (j’ai lu presque tous ses bouquins), ce n’est donc pas moi qui vais faire baisser la moyenne de son nouveau reportage « Payer la terre ». Le titre fait référence à la symbiose entre le peuple Dene et la nature (par exemple il faut offrir du thé ou du tabac à la terre avant de creuser un trou), un comportement tellement respectueux qu’il semble presque anachronique en 2020. Sacco a le don pour donner la parole aux peuples opprimés ou démunis (voir ses autres albums), il sait s’effacer, il écoute beaucoup et juge peu… et puis toujours ces touches d’autodérision. Mon intérêt n’a pas été constant. J’ai trouvé les passages très administratifs sur la division des terres difficiles à digérer, même si je reconnais qu’il s’agit d’un sujet important… le reste m’a passionné. Les témoignages, notamment sur les écoles catholiques, m’ont bouleversé… De manière générale la lecture est longue et dense, et à étaler sur plusieurs jours selon moi. « Payer la terre » était à l’origine une histoire de 60 pages pour la revue française XXI, puis « augmentée » pour approfondir les choses (d’où ce côté un peu déstructuré). En tout cas le travail de recherche force le respect. Un excellent reportage, dans la lignée des autres oeuvres de cet auteur.
Sacco est un auteur que j’aime bien. D’abord par les sujets qu’il choisit de traiter. Ensuite par la façon qu’il a de les aborder. Cet album ne déroge pas à la règle. Il a visiblement pris son temps pour réaliser son enquête (faisant plusieurs longs séjours dans la région, pour nouer des liens, rencontrer et interroger de nombreuses personnes, observer, etc.), et son éditeur lui a aussi laissé la place pour nous la présenter (l’album est relativement épais). Par petites touches, au gré des sujets abordés et des personnes intervenantes, Sacco dresse le portrait d’une région, d’une population, du peuple Dene, de la façon dont on les a dépossédés de leurs terres, et les différentes luttes menées par certains pour retrouver leur dignité. Certains passages sont durs : les pensionnats, qui ressemblent à s’y méprendre à des camps de concentration (gamin quasiment « déportés », rasés, ne répondant plus qu’à un numéro, subissant des châtiments physiques, à qui on interdisait de parler leur langue, etc.) – on retrouve le même phénomène aux États-Unis, avec l’école Carlisle, ou alors les violences intra familiales découlant du déracinement et de l’alcoolisme par exemple. Broyés par des intérêts qui les dépassent (multinationales pétrolières, état colonisateur, missionnaires jouant leur rôle d’évangélisateur plus ou moins brutalement), les Dene tentent tardivement de retrouver leurs racines, alors que l’expérience destructrice des pensionnats, mais aussi les ravages de l’alcoolisme (aussi présent, pour les mêmes raisons dans beaucoup de réserves des États-Unis) laissent de terribles séquelles dans la société Dene. Et l’on se dit que le message de tolérance et de défense de la nature, s’il entre frontalement en conflit avec le système capitaliste, est aussi de nature à donner des pistes et de l’espoir à tous ceux qui souhaitent lutter contre les changements climatiques à l’œuvre. On a en tout cas là un beau reportage, mesuré (même si l’on sait et voit pour qui le cœur de l’auteur balance), dont je vous recommande la lecture.
Joe Sacco a le don pour faire des documentaires intéressants qui traitent de problèmes importants. Vivant au Québec, je ne fus pas surpris de voir la condition misérable des amérindiens, victime du système des blancs. J'ai retrouvé des sujets qui ont fait beaucoup parlé d'eux chez moi ces dernières années: l'horreur des pensionnats autochtones, les batailles pour la reconnaissance des droits des autochtones, les projets de pétrole qui passent dans des terres revendiquer par les autochtones, etc et etc. Je suis bien content que Sacco a donné la parole à ses gens et j'espère que cette bande dessinée va informer des milliers de gens. Je préviens certains témoignages sont durs. Malgré tout, on sent parfois de l'optimiste face à l'avenir avec ses amérindiens qui veulent prendre leurs destins en main et briser le cycle d'abus infernal, résultat de l'assimilation forcé mené par le gouvernement du Canada. On retrouve aussi des témoignes sur la manière traditionnelle que les amérindiens des territoires du nord-ouest vivaient et j'ai trouvé cela passionnant à lire. Sacco est un auteur qui sait comment rendre n'importe quelle sujet captivant. Bref, un album à lire d'urgence et qui détruit l'image gentil que le Canada a à l'étranger.
Cette bd est le fruit d'une enquête menée au Nord-Ouest du Canada au sein de la nation Dene. Ce témoignage est l'analyse du choc entre deux cultures que tout oppose et des conséquences de l'intégration dans notre monde occidental du peuple Dene . Aujourd'hui, c'est le constat d'un peuple dépendant qui survit grâce aux aides sociales Une nation broyée, tiraillée entre ceux qui veulent collaborer et ceux qui résistent aux changements. Une nation qui a perdue tous ses repères et tente de se reconstruire à partir d'une génération qui n'a pas subi les pensionnats. L'auteur s'est immiscé au sein de cette communauté qui lui a fait confiance et délivré son histoire sans rien occulter, le résultat est brutal. Des témoignages touchants qui nous décrivent la vie bouleversée des autochtones au cours de la colonisation. Une nation qui veut profiter du progrès et qui va comprendre le prix à payer pour l'obtenir. Aspirer par la technologie, ils doivent pour consommer ces biens payer avec le fruit de leur travail. Le troc des fourrures ne suffira pas, ils doivent s'employer dans les compagnies pétrolières ou minières et c'est le départ d'une dépendance sans retour possible à leur ancien mode de vie. Des questionnements riches d'enseignements pour nous aussi les occidentaux, les dirigeants du peuple Dene s'interrogent. Comment profiter du progrès sans perdre son autonomie? Comment avoir les avantages sans les inconvénients? Les dirigeants Dene nous expliquent qu'ils ne peuvent pas lutter contre le progrès, pour exister il faut s'éduquer pour faire partie des décideurs et se prendre en main. Un message pour nous les occidentaux sur la représentativité des dirigeants. Malheureusement c'est l’État canadien qui va organiser cette éducation. Nous découvrons les pensionnats autochtones et là je laisse les futurs lecteurs découvrir une organisation permettant l'occidentalisation d'un peuple. Nous sommes le témoin d'un système aboutissant à créer une rupture en séparant les enfants des parents pour supprimer la transmission de leur mode de vie de leur culture y compris la perte de leur langue maternelle pour les intégrer au monde occidental. En une génération, toutes les coutumes ancestrales et leur mode de vie, ces repères qui donnent une identité à un peuple sont oubliés. Sacco fait témoigner plusieurs personnes, toutes nous délivrent le même message, c'est la cause origine de tous leurs maux. Ce peuple qui n'appartient plus à aucune communauté va se réfugier dans l'alcoolisme et subir ses conséquences: violence, pédophilie et suicides. Cet ouvrage est la description d'un long processus pour occidentaliser un peuple. Le point fort de ce témoignage est que ce sont les victimes qui parlent et non pas ceux qui dirigent, donnant à l'histoire un point de vue différent. Le témoignage est poignant, un peuple qui mesure avec lucidité l'étendue de la catastrophe sociétale et environnementale.
Un documentaire complet sur le déracinement organisé par les pouvoirs publics du peuple Déné au Canada. Je n'avais jamais lu de BD de Sacco, et les sujets précédents me paraissaient tellement durs que je ne me sentais pas le courage de commencer par ça... En réalité, celui-ci l'est tout autant (dur). Le plus étonnant c'est qu'il m'a renvoyé finalement à ce qu'a dû subir ma mère née en Auvergne en 1945. Ses parents parlaient patois et à 7 ans, elle a été mise en pension chez les "bonnes sœurs", puis est partie étudier à Lyon. Avec ce nouveau formatage, il n'a plus été question pour elle de revenir à la ferme, elle est "montée dans l'échelle sociale" mais a perdu sa langue et la responsabilité de son territoire, dont elle héritera pourtant, et sans doute moi après elle.. Le parallèle peut sembler exagéré, mais regardons les choses en face, les auvergnates sont toutes parties à la ville, les hommes, en charge des fermes ont cherché des épouses sur les petites annonces du chasseur français (de l'est ou d'outre-mer), certains se suicident, bref, ce n'est pas très reluisant quand-même. L'éducation forcée organisée par l'état canadien pour tous les enfants Dénés qui ont été arrachés à leur culture de chasseurs cueilleurs (et non d'éleveur comme en Auvergne) a créé un désastre culturel dont Joe Sacco et sa chauffeuse Shauna, sont venus observer les détails, et sonder les motivations. Les motivations : arracher les peuples à leur terre, pour pouvoir exploiter les forêts de manière industrielle. Les détails : alcoolisme, chômage, incompréhensions et divisions à l'intérieur des familles, les enfants revenant incapables d'allumer un feu, de peler un orignal ou de construire une barque avec sa peau. Bref cette lourde somme de 263 pages d'interviews d'autochtones de tous avis racontant leurs expériences, à l'âge de l'enfance dans le monde traditionnel et nomade, puis l'internement forcé dans des écoles "civilisatrices", et leur vies aujourd'hui, salariés dans des boîtes d'exploitation forestières ou minières, ou chômeurs, instituteurs, travailleurs sociaux, ... Le dessin, très précis, en noir et blanc, avec des visages en gros plan, des véhicules, des paysages, des machines d'extraction, est une représentation touffue et appliquée. On sent la volonté de faire référence, que tout cela soit visible à la face du monde. Lisez "Payer la terre", vous verrez que toutes nos familles paysannes françaises ont été soumises au même chantage au progrès : Votre culture va mourir, mais en échange vous aurez l'argent. So what ?
Le dernier Joe Sacco est arrivé, et avec lui un nouveau sujet documentaire que je n'aurais jamais connu sans cela. C'est déjà cela qui me fait apprécier chaque nouveauté de l'auteur : la découverte du sujet, bien souvent trop méconnu. Et en l’occurrence, je suis obligé de le dire, il fait fort, le bougre. Le style de Sacco ne change absolument pas ! Il a toujours ce don pour faire des portraits qui sont proches de la caricature et pourtant très précis, comme s'il tentait de représenter les visages sans parfaitement y parvenir. Mais il a aussi une précision dans la représentation des décors, et dans le cadre d'un récit se déroulant dans le Grand Nord Canadien, je n'en attendais pas moins ! Ce fameux Grand Nord, j'en suis friand depuis mes lectures d'enfance des récits de Jack London, mes lectures d'adolescence de Bernard Clavel ou mes lectures adultes de tous les auteurs que j'ai pu trouver parlant de cette région sévère, difficile et rude, mais ô combien belle et grande, vide et froide. Un rêve pour moi, qui aime les grands espaces, le calme et le froid. J'ai donc un intérêt déjà certain pour la thématique, et je suis d'autant plus intéressé que les récits concernant les peuplades premières de ces lieux ne sont pas les plus nombreux, les seuls que j'ai lus jusqu’à présent étant ceux de Nicolas Vanier (pas très objectif ou documenté sur le sujet, avouons-le). Un documentaire complet, foisonnant et renseigné m'a donc beaucoup intéressé. Grand bien m'en a pris, puisque Sacco a toujours cette précision du documentaire, sa volonté de transmettre en toute transparence et sans jamais dédaigner de donner son avis, ce qui peut étonner pour un documentaire mais ajoute, selon moi, le côté humain qui manque souvent dans des simples documentaires se tenant à distance de leurs sujets. Et en l'occurrence, l'humain va avoir une place centrale dans le récit. Joe Sacco livre un témoignage de la situation des Dene, natifs canadiens en proie aux habituels soucis de ces nations : perte de leurs terres, problème d'argent, d'alcool, de violence, de drogue, d'extractions de ressources, de manipulation politique ou encore d'intérêts de groupes financiers immoraux. L'auteur va parcourir le territoire à la rencontre de ses habitants, les interrogeant sur leur vie. Et quelle vie ... Quelle vie ? Les témoignages sont nombreux, et l'abondance de texte peut réellement rebuter (prévoir quelques jours pour le lire et le digérer tranquillement, tout de même), mais c'est le meilleur moyen de réellement représenter l'état de ce territoire en proie à toutes sortes de conflit. Bien que construit d'une manière désordonnée, le récit essaye tout de même de garder un fil de narration allant du passé vers le présent, exposant la vie en forêt des ancêtres, les valeurs et les traditions de ce peuple, pour ensuite arriver aux soucis majeurs qu'ils connurent (l'acculturation forcée dans les bagnes ... pardon, les pensionnats religieux), les répercussions de tout ceci sur leurs vies et leur culture, et l'arrivée des nouveaux soucis politiques (forage pétrolier, indemnisation, alcoolisme, désertion des lieux, cours de la bourse, pollution ...) qui se sont profilés avec les nouvelles générations. C'est riche en événements, mais aussi en points de vue et en avis. Rien n'est simple en ce bas-monde, et surtout pas lorsque cela concerne un aussi grand nombre de personnes sur un aussi grand nombre de sujets. Rien que l'affrontement sur la question de l'indemnité des populations indiennes pour la perte de leurs cultures, leurs terres, leur langue est sujette à débat. Et il est souvent triste de voir les anciens parler de tout ce qu’ils ont perdu pour arriver à la constatation qu'ils n'ont plus rien maintenant. Si vous voulez le lire, attendez-vous à des cruautés et des horreurs, mais aussi à beaucoup de résignation et d’abattement. La situation semble noire pour ce peuple qui navigue entre deux mondes, en voie de disparition. Et pourtant Joe Sacco arrive à en tirer une BD qui flirte avec l'optimisme et tente de redonner confiance. L'espoir est permis, et tout n'est pas encore joué. Peut-être arriverons-nous finalement à prendre conscience de ce qui se joue, de la vie de ces humains et de leurs combats. Ce genre de documentaire est à réserver aux passionnés, aux lecteurs assidus et j'ajouterai même aux personnes ayant déjà lu du Joe Sacco. C'est dense et lourd, pas toujours très dynamique dans la narration. Mais c'est passionnant et édifiant sur la société que nous avons bâtie. En un sens, je lui trouve beaucoup de points communs avec le Petit traité d'écologie sauvage dans les thématiques et les réflexions sur la place de l'homme dans la nature. Une découverte que j'ai aimé faire, même si maintenant elle va trotter un petit moment dans ma tête avec ses nombreuses réflexions et piques envers notre société bien ancrée dans un monde qu'elle détruit trop vite.
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