Lucarne (Windowpane)
Angoulême 2020 : Prix Révélation Dans ce recueil de cinq histoires, certaines précédemment publiées dans la revue éponyme de Breakdown Press, Joe Kessler dépeint un monde riche en quêtes, en sensations, en surprises
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Lucarne mêle le récit de l’auteur et la perception de ses protagonistes. Lucarne, c’est aussi la vision depuis une case de bande dessinée. Une narration innovante et envoûtante, qui mérite plusieurs lectures, pour dépasser l’émerveillement esthétique qu’il suscite la première fois. Les couleurs, franches voire flamboyantes, épaulent la narration d’un point de vue subjectif : l’environnement apparaît et disparaît en fonction de ce que vivent les personnages. Les odeurs, la peur, le plaisir, l’urgence sont représentés comme autant d’explosions chromatiques.
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Date de parution | 13 Mars 2019 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Je vous avoue ne pas trop savoir quoi dire… Rien dans ce mini album ne trouve grâce à mes yeux, à l'exception de quelques jolies cases nocturnes, lorsqu'un bâtiment ou autre est éclairé de l'intérieur. Le reste est l'incarnation même de ce que j'abhorre en matière d'art, du 1er au 10ème : la création médiocre, pour ne pas dire nulle, habillée d'un concept dont le but est d'obtenir les hourras d'une fraction de passionnés en quête de nouveauté. On dirait que cela a fonctionné ici, puisque "Lucarne" a remporté le prix de la révélation à Angoulême en 2020... je n'arrive toujours pas à y croire… Du dessin au scénario, le lecteur vogue en plein cauchemar. Couleurs hideuses, trait grossier, planches brouillonnes, passages incompréhensibles, histoire sans intérêt et sans but… dois-je poursuivre ? Si ce genre d'œuvre (le mot me fait mal) n'est pas ma tasse de thé, je ne savais pas à quoi m'attendre en ouvrant l'album. Ma lecture a donc débuté en toute objectivité. La réalité m'a rapidement rattrapé et conduit à l'abandon. Cet album me fâche… espérons qu'une prochaine lecture me le fasse oublier rapidement.
Fraichement lesté du Prix Révélation lors du dernier festival d’Angoulême, le britannique Joe Kessler propose avec Lucarne une expérience graphique radicale qui, à défaut sans doute de faire l’unanimité, vous fera envisager votre organe rétinien sous un jour nouveau. Difficile de raconter Lucarne. Certains y verront une succession de plusieurs nouvelles graphiques, d’autres une aventure abracadabrante, énigmatique, riche en rebondissements… On pourrait tenter de résumer cette œuvre, bien entendu, mais ce serait vain, futile, totalement inutile, parce qu’au delà de la narration, c’est une galaxie inconnue qui s’offre à nos yeux ébahis. Ces histoires semblent en effet n’avoir ni début, ni fin, pas plus que de titre… On passe de l’une à l’autre à l’autre un peu à la manière d’un cadavre-exquis. On s’imprègne de différentes ambiances, charge au lecteur de tisser son propre chemin. Ici, la narration passe essentiellement par des sensations. Qu’importe finalement si l’on saute d’un cauchemar de destruction à un jardin inondé de soleil, si l’on suit une espèce de magicien louche et vaguement inquiétant pour finir sur le pont d’un navire en compagnie de deux amants improbables… L’important ici est de vous égarer dans le dédale de ces histoires à tiroir, d’en inventer chaque interstice. Lucarne est une œuvre profondément polysémique qu’il est périlleux d’aborder comme une BD classique. Joe Kessler ne fait pas dans la facilité, sollicitant abondamment l’intelligence et l’imagination de ses lecteurs. Les mauvaises langues affirmeront sans perdre une dent qu’il n’y a rien à comprendre dans Lucarne. Qu’importe finalement : je répondrai qu’il y a tout à imaginer. Ce « travail » d’imagination est servi par un mélange de techniques admirables, qu’il s’agisse des crayonnés, des « feutrés », de l’usage discret de l’ordinateur… Chaque page semble judicieusement adaptée à son propos, et chaque case est une histoire à elle seule. Les ambiances variées évoquées précédemment sont parfaitement rendues avec une fluidité, une aisance et une simplicité remarquables : les scènes nocturnes, le travail des ombres, Les jeux de lumière, les images déformées par l’eau, les impressions visuelles, les attitudes, les poses des personnages… On ne sait plus où donner des yeux, si bien que l’on finit par ne plus distinguer ce qui relève du dessin ou de la pure sensation. Tout se mélange dans un tourbillon frais et coloré. Ca vibre, ça s’agite, ça bondit et rebondit sans cesse. Le pied ! C’est bien entendu l’utilisation des couleurs qui saute immédiatement aux yeux. De toute évidence, Joe Kessler flirte avec le Psychédélisme, tout autant avec l’Impressionnisme. Ses dessins faussement mal dessinés, avec leurs traits souvent épais et tracés au feutre, vous éclatent littéralement au visage, renvoyant à l’enfance, au plaisir éprouvé à barbouiller de couleurs de larges feuilles blanches. On sent une énergie dévorante et communicative parcourir chaque page. Cette silhouette verte presque phosphorescente est-ce une peau qui frissonne dans la fraîcheur du soir ? Et ces contours flous et grossiers sont-ils les échos d’un rêve obsédant qui s’attarde au réveil ?… Le traitement des cases prend tout son sens au fil de la lecture, ce que ne permet pas un feuilletage rapide. Il n’y a pas de place pour la demi-mesure : ou le lecteur accepte la découverte, ou il repose l’objet avec dédain dans un jugement hâtif et forcément erroné. D’ailleurs, en forçant le trait (ha ha), on peut se hasarder à penser que toute tentative de caractérisation de ce livre serait de fait bancale. Comment résumer une telle expérience ? Car c’est bien d’une expérience dont il s’agit ici, tant graphique que physique. En ce sens, Lucarne m’évoque, toutes proportions gardées, le cinéma russe qui selon moi est peut-être le meilleur cinéma au monde : L’Île de Lounguine, Le Soleil de Sokourov ou bien encore Requiem pour un massacre de Klimov… Tout comme ces quelques films cités à titre d’exemples, Lucarne est une œuvre dense où le fond et la forme sont inextricables. Par le biais même de son trait, on touche à l’intime de son auteur, et pour un peu on pénétrerait son âme. Alors pour terminer cette vague tentative de synthèse, je me contenterai de paraphraser Dante, en te suggérant, ô aventurier qui entrera dans ces pages, d’abandonner ici tout jugement et de commencer à rêver.
Ce livre nous entraîne dans une étrange sarabande poétique et psychoactive en terre inconnue. Conçue (peut-être) par un sale gosse, Joe Kessler, pur génie ou fumiste patenté (ou les deux en même temps), capable de séduire le jury d’un illustre festival de BD. Voilà bien un ouvrage qui m’interroge et me pose une sorte de dilemme. Arnaud, mon frère de sang comme de cœur, avec qui nous avons des goûts généralement assez similaires en matière de bande dessinée, était le premier à m’avoir parlé, début janvier — et de façon dithyrambique — de ce petit livre, signé d’un auteur inconnu et qui figurait dans la sélection pour le palmarès 2020 du Festival d’Angoulême. Quelques jours plus tard, « Lucarne » recevait du jury angoumoisin le Prix révélation… Désormais, il était évident que je ne pouvais plus faire l’impasse, même si cet OVNI, qui en premier lieu m’avait révulsé par sa couverture, ne m’avait pas davantage convaincu lorsque je l’avais feuilleté sur le stand de l’Association. Pourtant, ma curiosité ayant été titillée, il me fallait sortir de ma zone de confort et découvrir ce qui pouvait bien se tramer derrière cette « Lucarne ». Bien décidé à aborder l’ouvrage avec un œil vierge, je respirai trois grandes bouffées d’air et ravalai mes grimaces aprioriques. Après avoir contemplé pendant une bonne minute la couverture, je commençai à tourner les pages avec l’état d’esprit d’un nouveau-né découvrant le monde qui l’entoure. Ayant pu faire abstraction du style, proche de celui d’un enfant de trois ans — d’où l’intérêt sans doute de se mettre dans la peau d’un nouveau-né — et des aplats globalement limités à trois couleurs (vert, jaune, rouge) affreusement criardes, j’espérais pouvoir trouver une compensation dans une narration un tant soit peu construite. Mes espoirs furent bien vite déçus, et c’est dans un état d’hébétement total que je terminai cette lecture, qui heureusement pour mes mécanismes de concentration poussés au taquet, ne dura pas plus de quinze minutes. Au-delà je l’avoue, j’eus craint de me cramer les yeux. Dès lors, vous l’aurez compris, mon avis ne sera guère favorable. Parce que je ne suis jamais rentré dedans, et que plus j’avançais, plus la fameuse lucarne se réduisait aux dimensions d’un œil-de-bœuf. A cause sans doute d’une part de fainéantise que j’assume pleinement, je serais bien incapable de résumer ce récit ou d’en parler. Pas plus que je ne pourrai faire semblant de l’avoir compris ou de l’avoir apprécié autant que l’Association et le jury d’Angoulême. En un mot comme en cent, j’avoue humblement être resté totalement hermétique face au petit bouquin, même si j’ai bien conscience qu’il fallait l’appréhender comme une œuvre poétique, atypique, hors normes, révolutionnaire, néo-conceptuelle, nihiliste, néo-dadaïste, déconstruite, post-psychédélique et j’en passe, bref, tous les qualificatifs qu’utiliseront vraisemblablement ceux qui ont aimé… Mais il me semble que l’étiquette « expérimental » permet un peu trop facilement de faire passer des délires mystico-maniaques pour du talent… Et pourtant, j’ai beau trouver l’objet moche et sans intérêt, j’ai assez peu envie de le vouer aux gémonies, par frustration ou par dépit d’être bêtement resté au bord du chemin. Peut-être aurais-je dû consommer des psychotropes ou autres substances débridantes (faut dire que j'fume pu d'shit)… Le résumé de l’éditeur suggère que plusieurs lectures sont nécessaires. Un argument peut-être utile, aucune notice explicative n’étant fournie. Dans un style assez voisin, on préférera Brecht Evens, qui pour sa part parvient à mettre un peu d’ordre et de beauté dans son chaos intérieur.
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