J'irai cracher sur vos tombes
Au milieu des années 1940, le poète, écrivain et dramaturge Boris Vian crée le personnage de Vernon Sullivan. A une époque où les romans policiers d'outre-Atlantique connaissent un grand succès en France, cet alias américain, dont Boris Vian prétend au départ n'être que le traducteur, permet à son auteur de s'essayer au roman noir et d'explorer ainsi tout un nouveau pan de sa littérature et sans doute d'assouvir quelques fantasmes secrets ... En l'espace de 4 ans , Vian écrira sous le pseudonyme de "Vernon Sullivan" quatres polars sans concession, sensuels (sinon sexuels) et teintés d'humour noir, qui firent scandale lors de leur parution.
Adaptations de romans en BD Boris Vian Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc, Bruxelles Jean-David Morvan Racisme, fascisme [USA] - Dixie, le Sud-Est des USA
« J'avais toutes les filles les unes après les autres, mais c'était trop simple, un peu écœurant. » Lee Anderson, vingt-six ans, fils d’une métisse, quitte sa ville natale après la mort de son frère noir, lynché parce qu’il était amoureux d’une blanche. Il échoue à Buckton, petite ville du Sud des États-Unis où il devient gérant de librairie. Grand, bien bâti, payant volontiers à boire et musicien de blues émérite, Lee parvient sans mal à séduire la plupart des adolescentes du coin. Auprès d’une petite bande locale en manque d’alcool mais très portée sur le sexe, il mène une vie de débauche. Sans toutefois perdre de vue son véritable objectif : venger la mort de son frère. Bien éloigné des romans habituels de Boris Vian, ce récit est probablement le plus violent, le plus cru et en même temps le plus représentatif du style « Vernon Sullivan ». À travers une histoire âpre où la sexualité, violente, est omniprésente, Vian dénonce le racisme ambiant et la condition précaire des Noirs dans le Sud des États-Unis.
Scénario | |
Oeuvre originale | |
Dessin | |
Couleurs | |
Editeur
/
Collection
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | 11 Mars 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Voici un album qui ne laisse pas indifférent. Je pense que pour avoir une critique lucide de cette adaptation de Vernon Sullivan, alias Boris Vian, il faut connaitre l'histoire de l'auteur. Lors de ma première lecture, je ne connaissais pas vraiment ce personnage artistique de l'après guerre et mon analyse en fut biaisée. L'album me parût trop sexuel et seul cet aspect ressortait de ma lecture. Je me serai arrêté là, je n'aurai pas mis mieux qu'une étoile. J'en suis même resté à cette unique adaptation sans en regarder les trois autres. Hors, quelques temps après, je suis tombé sur un reportage consacré à Boris Vian. Cela me donna l'envie de me replonger dans "J'irai cracher sur vos tombes". Lee Anderson, métis américain, cherche sa vengeance suite au lynchage mortel de son petit frère, fautif d'avoir eu une relation amoureuse avec une femme dont la couleur de peau blanche était différente de la sienne. Lee, dont le métissage lui laisse une couleur de peau parfaitement blanche contrairement à ses deux frères, trouvera sa revanche par le sexe. En effet, son but étant de tuer deux sœurs bourgeoises blanches, il veut envoyer le message qu'un homme noir (bien que d'aspect blanc) ait eu des relations sexuelles avec des femmes blanches. Boris Vian, dénonce le racisme et la condition précaire des Noirs dans le Sud des États-Unis avec cet ouvrage. Vian explique sa démarche par le fait que le sexe est la cause direct du racisme : « S'il n'y avait pas de rapports sexuels entre les Blancs et les Noirs, il n'y aurait pas de métis, il n'y aurait pas de problème. Donc si on traite d'un autre point de vue, on est malhonnête. » La complexité de l'histoire qu'il y a eu autour de "J'irai craché sur vos tombes" m'a fasciné. Sans le cela, cette adaptation scénarisé par Jean-David Morvan n'aurait que peu d'intérêt à mes yeux. La bande dessinée étant très sexuelle, cela m'avait considérablement gêné. Pour les gens avertis, il y a un réel bénéfice à lire cette œuvre aux dessins réussis et aux couleurs fidèles à l'époque de l'histoire.
Je crois avoir lu ce roman devenu culte depuis, dans mes jeunes années, mais comme je n'ai jamais été fan de l'oeuvre de Boris Vian, ni de son oeuvre ni du bonhomme, je n'en ai gardé qu'un très vague souvenir, je ne sais même plus quelle avait été ma réaction. J'ai demandé à une amie qui a lu plus récemment ce bouquin, et d'après elle, cette Bd est assez fidèle à part quelques détails, l'adaptation semble lui convenir, et pourtant elle n'est pas familière de bande dessinée, étant plus une lectrice compulsive de vrais livres. Il y a eu aussi une adaptation cinématographique en 1959, un film français réalisé par un gars dont j'ai oublié le nom, et sans vedettes, tant le roman avait fait scandale ; aucune société de films importante n'avait voulu prendre le risque de tourner une telle histoire et aucune vedette n'avait sans doute osé se compromettre, il était encore trop tôt. Remarquez que aujourd'hui, dans notre époque redevenue couille molle et prude jusqu'au fond des yeux, je crois pas que ça serait possible non plus... Toujours est-il que c'est proobablement le roman le plus violent, le plus cru et le plus sexuel écrit par Boris Vian alias Vernon Sullivan, le plus sulfureux surtout et le plus dérangeant, où la provocation est poussée jusqu'au paroxysme. La lecture du bouquin à son époque de parution devait faire bondir, de nos jours il faut prendre un sacré recul pour tenter de comprendre les intentions de Vian. C'est quand même un polar sur fond de message social et racial puisqu'il dénonce sans vergogne le racisme ambiant à travers le personnage de Lee qui veut faire payer la mort de son frère black en culbutant les femmes de la riche bourgeoisie américaine et en les humiliant, comme une sorte de souillure symbolique, puisque lui-même est métis malgré un camouflage de visage blanc (un détail de peau que j'arrive peu à comprendre). Ce sentiment d'oisiveté, de relâchement, de mollesse et d'ennui de cette bande d'insouciants peut faire penser au film d'Arthur Penn, la Poursuite impitoyable (The Chase) où l'on trouvait une bande de citoyens adultes d'une petite ville de bouseux d'Amérique profonde dans le même état de désoeuvrement et de vacuité de leur existence en se livrant à des jeux stupides et à des actes débiles, malgré l'époque du tournage qui importe peu (1966) et où ne compte que l'esprit humain. Avec une dose de sexe omniprésente voire souvent envahissante, mais qui traduit bien le désoeuvrement de cette bande de oisifs, tout comme la domination sur eux de Lee, le récit prend une dimension atmosphérique qui va très loin dans l'aspect borderline. Je dois dire que que ça ne m'a pas ennuyé mais ça ne m'a pas non plus transporté ; je ne sais pas trop à quoi ça tient, mais probablement que je ne suis pas assez rentré dans le récit dont j'avais hâte de sortir. L'ambiance par contre est bien rendue, les décors, les voitures reprennent la mythologie US vue dans quantité de films hollywoodiens qui ont nourri notre imaginaire en créant une Amérique fantasmée. Quant au dessin, je l'ai plus apprécié que sur Les Morts ont tous la même peau ; je ne sais pas qui fait quoi parmi cette équipe de dessinateurs, mais le rendu est satisfaisant tout en n'étant pas non plus renversant. Pour l'instant, après lecture de 3 adaptations des romans Vernon Sullivan de chez Glénat, c'est celle qui m'a le moins intéressé. En fait, j'étais à 2 doigts de noter 2/5, mais je trouve toutefois l'ambiance un peu glauque et dérangeante certes moins audacieuse à notre époque, mais plutôt intéressante.
La dernière adaptation des romans de Boris Vian dans sa période Vernon Sullivan qui me restait à lire. Je dois dire que si je trouve l'album correct, j'ai été un peu déçu parce qu'au vu des bonnes critiques j'en attendais un peu trop. Globalement, j'ai trouvé que le récit était moyen avec quelques moments forts qui sortent du lot dont la fin. Le principal problème est qu'il y a trop de scènes de cul à mon goût. Je comprends que Vian voulait choquer la société de la fin des années 40, mais je trouve que cet aspect a mal vieilli. Déjà le dessin ne rend pas ces scènes excitantes et je ne suis même pas certain que c'était l'intention de Vian. Il y a tellement de cul que par moment je me demandais si je lisais pas un Manara et non un récit censé dénoncer le racisme. Par moment, le cul est tellement au premier plan que cela me donnait l'impression que la vengeance était juste un truc bidon trouvé pour justifier les scènes de sexes. Un autre truc qui m'a gêné est que lorsqu'on voit ce qui arrive au frère du héros, j'ai remarqué que la femme blanche est gentille et que tous les salauds étaient des hommes blancs alors logiquement le héros métisse se venge...en attaquant des femmes blanches. Peut-être que Vian voulait critiquer la violence masculine qui réduit la femme à des trophées (les blancs ne voulant pas que le métisse noir ait son trophée de femme blanche, le frère métisse à la peau blanche il va les prendre les trophées et les souiller), mais j'avoue que cet élément du scénario me laisse perplexe...
Il est vrai que les amateurs de romans noirs ont trouvé à qui parler. Dans le genre noirceur absolu teinté de cynisme cela se pose là. Je n'avais jamais lu du Boris Vian avant de découvrir cette BD, pour moi j'avais un pré-supposé qui me faisait penser que c'était quelqu'un d'intello avec des textes un peu inabordables. Si l'on se replace dans le contexte de la date de parution du roman dont est tirée cette BD (les années 40), je me dis qu'effectivement pour l'époque ça envoyait du lourd. Un noir qui s'envoie à tire-larigot des petites blanches et des scènes de sexe plus qu'explicites. Je me dis que mes grands-parents n'ont pas dû lire ça souvent. Si ma mémoire est bonne et elle l'est aucun B. Vian dans leur bibliothèque par ailleurs bien fournie. Ne connaissant pas le roman je ne peux juger de son adaptation, mais pour ce que j'en vois c'est plutôt bon. Le dessin est plutôt bon avec une colorisation tout en douceur qui vient en contrepoint de l'action. Je vais aller voir les autres titres de la collection consacrée aux adaptations en BD des romans de Vian.
« J’irai cracher sur vos tombes » fait partie de la collection Vernon Sullivan, alias de Boris Vian utilisé dans les années 40 pour raconter des histoires provocantes. Il est paru chez Glénat en même temps que Les Morts ont tous la même peau. Le titre laisse peu de place au suspense. C’est froid, impertinent, violent et cru. Lee Anderson, fils blanc d’une métisse, est en quête de vengeance. Son frère noir a été lynché pour avoir aimé une blanche. Les blancs vont devoir payer ! Graphiquement, c’est propre et efficace, même si je regrette les confusions entre certains personnages féminins. En fonction du niveau de détails des planches/cases, les visages et physiques ne permettent pas toujours d’identifier la protagoniste, surtout si elle est blonde. Comme dans Les Morts ont tous la même peau, le postulat de départ est bon, mais le développement souffre des mêmes défauts. L’histoire de vengeance se serait suffie à elle-même… mais dans les années 40, Boris Vian veut choquer, provoquer. Il ajoute donc à un contexte de lutte raciale déjà subversif une (grosse) dose de sexe. Autant aller au bout de la provocation. Je ne suis évidemment pas contre la démarche, ni un apport érotique dans un scénario. Mais là encore, je trouve que cela affecte l’équilibre du récit et noie la vengeance dans le cul. Dommage !
Glaçant et dérangeant. Je n'ai pas lu le roman original, mais je comprends bien pourquoi ce livre a fait scandale à sa sortie : La morale est entièrement bouleversée, la crudité des sentiments et des actes du héros ont eu de quoi rendre perplexe les médias des années 50/60. Un nègre blanc se venge du lynchage de son petit frère en abusant de riches filles désœuvrées. Boris Vian, caché derrière le nom de Vernon Sullivan, et se prétendant son traducteur, peut se jeter à corps perdu dans un fantasme d'écriture américaine : phrases courtes, dépravation, violences raciales, déracinement. L'adaptation de Morvan mélange cette avidité vers une liberté imaginée d'outre-atlantique et une esthétique un peu antique, avec des corps musculeux, nus et blonds. Si bien que ce drame issu de la ségrégation raciale finit par parler de la douleur des noirs sans jamais en montrer un seul. Ce qui a un coté encore plus déplacé. La voix Off suit le point de vue du héros. Les couleurs pâles et peu nombreuses, dans une lumière blafarde, et les traits indécis, contribuent à une sorte d’ambiguïté générale qui pèse tout du long. Les grandes maisons coloniales et les voitures américaines restent dans un crayonné vague, comme pour éviter tout plaisir de l’œil, intempestif. Personne n'est vraiment sauvé dans ce scénario : la vie des riches blancs est vide, les noirs son absents, mis à part ce cheval de Troyes qu'est le Héros, caché sous la profession inoffensive de libraire. Pas d'empathie, pas de psychologie non plus. La cruauté pourrait presque être perçue comme un acte gratuit. Bref ça questionne, A qui peut-on s'identifier dans cette histoire ? A Personne.
J’ai eu ma période Boris Vian, et j’en garde encore de très bons souvenirs de lecture (ah ! Vercoquin et le plancton !). Et j’avais découvert en même temps la partie Vernon Sullivan de son œuvre, qui m’avait tout autant captivé. « J’irai cracher sur vos tombes » en particulier. Et je dois dire que Morvan n’a pas trahi ce roman, et a bien respecté la violence brute qui le traverse, qui habite le héros, Lee. Lee cherchant à venger la mort d’un frère, l’humiliation d’un autre à cause de leur peau noire. Il faut dire que Lee est un « nègre blanc », sa peau ne trahit pas sa couleur, comme son comportement calme et jouisseur ne trahit pas la haine qui bouille en lui. Le côté superficiel de la société blanche américaine de l’après-guerre est bien rendu. Et cet aspect morne, plan plan, bêtement jouisseur, renforce évidemment par contraste la violence de Lee. D’autant que Vian comme Morvan la montrent à son état brut, sans alibi psychologique ni enrobage romantique. Et la violence érotique aussi (Pauvert avait ainsi d’ailleurs étudié ce roman dans sa remarquable « Anthologie des lectures érotiques » - en citant comme extrait la scène en trio dans la salle de bain, ici reprise). Non, c’est une belle adaptation. Mes bémols iront juste au dessin, qui n’est pas forcément ma tasse de thé (et qui change parfois), avec des décors quasi absents parfois. Le personnage de Lee est même parfois difforme je trouve. Mais bon, ça passe quand même, l’essentiel est ailleurs… Et Morvan peut ici donner envie de se replonger dans la noirceur sauvage de Vian (voire de découvrir ses romans !). Note réelle 3,5/5.
Ouh, pute borgne de pute borgne de bordel de cul ! Quel roman noir que celui-ci !!! Non, sérieusement, je ne m’y attendais pas. Une telle violence, une telle haine… pas tant démonstrative que taraudeuse. Une de ces haines qui vous ronge, qui vous consume de l’intérieur, qui vous tord les tripes à vous en faire vomir de dégoût sur cette humanité répugnante. Moi qui garde de Boris Vian l’image d’un zazou innocent et provocateur, j’avais bien entendu parler de ses écrits sous le pseudo de Vernon Sullivan mais je ne m’attendais pas à un truc aussi sulfureux. « J’irai cracher sur vos tombes » est donc, avant cette adaptation, un roman. Noir… très noir. Lee Anderson a une boule de haine en lui qui en fait un des personnages les plus violents qu’il m’ait été donné de découvrir dans un roman. Pas tellement au niveau physique du terme mais ce gars a une telle rage en lui, une telle envie de détruire que la violence exsude de tous ses pores. Roman écrit dans les années ’40 et adapté récemment en bande dessinée avec brio, je ne saurais dire si c’est dû à l’un ou à l’autre mais ce récit est d’une modernité étonnante. Modernité de ton par le caractère sexuel affirmé de l’intrigue. Modernité de thème ensuite puisqu’il est encore question ici de racisme et de la condition des afro-américains dans le pays de l’oncle Sam. Modernité de l’écriture, enfin, qui nous donne tout sauf le sentiment de lire l’adaptation d’un roman signé au sortir de la seconde guerre mondiale. Ce récit est prenant, puissant, sexuellement explicite. Pas étonnant qu’il ait dérangé à sa sortie. Le plus formidable étant qu’il a été publié ! Et l’adaptation que nous livrent Jean-David Morvan et Ray Macutay ne souffre d’aucune faiblesse. Cette bande dessinée nous offre une lecture fluide, le découpage est clair, le dessin est sec et net, l’ambiance est là. Vous cherchez un polar noir, violent et sans tabou. N’allez pas plus loin ! ‘Tain, là, ils m’en ont foutu plein la tronche !!
Le roman de Boris Vian a créé la polémique en son temps. Trop de violence gratuite, trop de sexe, pour au final une histoire pas du tout vertueuse qui a entrainé notre Boris Vian et sa maison d’édition rapidement devant la justice. C’est pourtant à ce classique de notre littérature que se sont attaqués Jean David Morvan au scénario accompagné pour le dessin de Yen, de Rafael Ortiz et de Rey Macutay. Une réussite totale ! L’atmosphère glauque, l’inhumanité latente, le sexe consommé sans tabou, ou encore la violence pour la violence sont palpables tout au long des 108 pages de cet album. Boris Vian aurait apprécié indéniablement le graphisme et n’aurait pu qu’être satisfait du travail des auteurs. Je recommande vivement cet album
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2024 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site