L'Éveil (Delcourt)
Deux personnalités attachantes, que pourtant tout oppose, animent sur un ton doux-amer une fable contemporaine dans laquelle les auteurs posent, non sans humour, la question de notre engagement politique et social.
Auteurs italiens Bruxelles - Brussels Street art
Par quel hasard Arthur se retrouve-t-il ce jour-là projeté dans l’improbable projet de Sandrine ? Rien de commun pourtant entre ce jeune homme hypocondriaque et cette street artist bruxelloise dont l’objectif est d’ouvrir les yeux des gens sur les « énormités » qui les entourent… Et si ce frêle garçon était contre toute attente le seul capable de l’aider à atteindre son but ?
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Date de parution | 10 Juin 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Brad Pitt, quand il est là, il n'a pas l'air de s'excuser. - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Sa première publication date de 2020. Vincent Zabus en a écrit le scénario, Thomas Campi en a réalisé les dessins et la mise en couleurs. Ces deux auteurs avaient déjà collaboré auparavant, par exemple pour Magritte : Ceci n'est pas une biographie (2016) et ont à nouveau collaboré ensemble par la suite pour Autopsie d'un imposteur (2021). Ce tome se termine avec un cahier graphique de cinq pages, et une postface d'une page, écrite par Paul Hermant, investi en permanence dans la vie citoyenne et culturelle belge, un des concepteurs et animateurs de la Quincaillerie dont parle cet album. Dans une rue de Bruxelles, Arthur se promène en se parlant à lui-même. Il s'exhorte à se calmer. Il sait bien que ce n'est rien, mais il ne s'empêcher de s'angoisser : il se gâche la vie tout seul. Il fait l'effort conscient de se concentrer sur sa respiration, en se répétant qu'il n'a rien Il se tourne vers le lecteur et se présente : il s'appelle Arthur, et la scène se passe fin 2016 à Bruxelles. C'est ici que son histoire débute, un peu mal d'ailleurs parce qu'il a une étrange sensation dans les mains, comme un étrange picotement. Ça l'inquiète. Exactement le type de situation où son cerveau s'emballe et se focalise sur un scénario catastrophe, un symptôme insignifiant qui cache un truc gravissime. Là, c'est dans les mains. Dans la devanture d'un magasin, un poste de télé, avec le son à un volume élevé, diffuse les informations : si Clinton reste favorite des sondages, Trump pourrait créer la surprise. Même si une Amérique dirigée par Donal Trump paraît totalement inimaginable… Arthur continue : dans quelques minutes, un événement va radicalement changer sa vie, mais, ça, il l'ignore encore. Ça a un lien avec l'ombre de dinosaure projetée sur le mur derrière lui. Arthur est enfin rentré dans son appartement où il peut commencer à se détendre : il stresse pour rien comme à chaque fois. Il continue d'expliquer au bénéfice du lecteur ; sur l'écran de sa télé, c'est Vertigo d'Alfred Hitchcock. Il l'a mis sur pause, juste avant son moment préféré, quand James Stewart habille et coiffe Kim Novak de manière à la rendre semblable à la femme qu'il aimait. Il regarde beaucoup de films pour se distraire de ses angoisses. D'aussi loin qu'il se souvienne, il a toujours été inquiet pour sa santé. Une version enfant de lui-même entre dans le salon en s'excusant, mais il a mal là, juste au cœur, et puis il voit moins bien d'un œil. Arthur adulte le rassure : vingt ans plus tard ils sont toujours là, bien vivants. Vivant, mais inquiet. Il remarque que son ordinateur est allumé : il ne peut pas résister à la tentation de chercher sur internet à quoi peuvent correspondre ses symptômes. Après avoir lu, il se demande pourquoi il a fait ça : son médecin lui avant bien dit de ne jamais aller sur internet. Il finit par décider de sortir pour marcher et se calmer. Une grosse branche d'arbre manque de lui tomber dessus. Il s'assoit par terre pour se remettre de ses émotions, et Sandrine, une jeune femme, l'aborde pour s'assurer que tout va bien, et lui demande de la suivre. Une ouverture originale avec cette ombre de tyrannosaure ou de Godzilla dans le ciel de la première case, un personnage qui se présente en s'adressant directement au lecteur, un récit avec un marqueur temporel très précis (la première campagne électorale de Donald J. Trump), une version enfant d'Arthur qui vient s'adresser à lui, ses mains qui se détachent de son corps pour tomber par terre, la rencontre providentielle avec une belle jeune femme, un récit entre conte et tranche de vie. le lecteur n'en est que plus intrigué s'il a lu les huit courtes lignes du texte de la quatrième de couverture, ou la postface sur la réouverture d'une quincaillerie ixelloise, lieu de rassemblement éphémère associatif et militant bruxellois, pendant quelques mois d'existence, entre les négociations sur la dette grecque et les élections espagnoles, en passant par la COP 21 de Paris, un lieu d'ouverture aux débats agitant l'Europe. La narration visuelle génère un fort capital de sympathie avec des traits de contour fins et précis sans être stricts ou durs, et une mise en couleurs avec des nuances douces apportant de nombreux détails et une forte consistance à chaque élément visuel. Le lecteur se rend vite compte que cette bande dessinée se lit toute seule : les dialogues ressortent comme naturels et justes, agréables sans êtres mièvres, intéressants avec un équilibre rare entre émotion et information. La narration visuelle révèle exactement les mêmes qualités, comme si scénario et dessins étaient l’œuvre d'un auteur complet. le lecteur se retrouve vite à mi-parcours, sans l'impression d'avoir dévoré chaque planche en oubliant de les savourer, ou d'avoir couru un marathon ayant nécessité un effort intellectuel ardu. Il a fait connaissance avec Arthur, jeune homme sympathique et sans prétention, mal dans sa peau à cause d'une hypocondrie caractérisée, sans être asocial ou aigri pour autant. Les dessins mettent en scène individu normal, un peu timoré, ce qui se voit dans ses gestes parfois mal assurés, ses expressions de visage douces et un peu timides, précautionneuses, sa façon à lui de s'étonner quand il ose quelque chose qu'il estime être risqué et qu'il n'a jamais fait. Une audace toute relative, une confiance en soi mise à rude épreuve quand il doit mentir effrontément à un policier en uniforme, Arthur ayant pleine conscience de sa situation illégale. Par comparaison, Sandrine, la jeune femme qui l'aborde, apparaît plus fantasque, plus prompte à agir sous l'impulsion d'une émotion, avec des gestes plus vifs et plus assurées, et mimiques enjouées ou mutines selon les circonstances. Le lecteur se retrouve vite dépaysé par la narration visuelle, alors que toute l'histoire se situe dans un unique quartier de Bruxelles. Il y a évidemment des scènes d'extérieur et d'autres d'intérieur. Les premières permettent de se balader à pied en regardant les façades, l'urbanisme du quartier, mais aussi un arbre sur une placette, d'autres rues aux trottoirs plantés, un pont dont une culée a été comme griffée par un monstre géant, un jardin public, la façade du parlement fédéral De Belgique. Il suit Arthur dans son appartement avec son aménagement, dans la Quincaillerie nouvellement réouverte avec ses meubles aux innombrables tiroirs, dans un café de quartier, dans l'appartement de Sandrine à la décoration beaucoup plus sage que prévue, et, de manière plus inattendue, dans une chambre d'hôpital. L'artiste sait doser avec justesse le nombre d'éléments visuels et le niveau de détails dans lequel ils sont représentés, ainsi que l'ambiance lumineuse qu'il établit avec des palettes de couleurs adaptées à chaque scène. Arthur fait donc la connaissance de Sandrine, une activiste qui l'entraîne dans son sillage, l'obligeant à s'aventurer loin de sa zone de confort, mais en fait de sa zone d'inconfort d'hypocondriaque. Pour autant, le lecteur ne plonge pas dans un ouvrage avec un message à marteler, ni un pamphlet. Il n'est même pas question de théorie du complot. L'objectif de Sandrine relève d'une nature différente. Elle commence par faire remarquer à Arthur qu'il vit dans une illusion : on ne maîtrise jamais rien, le plus simple est de l'accepter tout de suite, parce que le combat est inutile. Son objectif est de réveiller les consciences. En amenant les gens à se poser des questions. C'est là qu'intervient l'ombre du dinosaure ou du kaiju apparaissant dans le ciel de la première case. En fonction de ses convictions, le lecteur peut apprécier de ne pas être soumis à l'exposé d'une doctrine, ou trouver que dénoncer ne suffit pas. Pour autant, il ne ressort pas frustré de sa lecture. Il referme l'ouvrage fort ému par le devenir des deux personnages principaux, et complètement convaincu par la nécessité de faire preuve d'un esprit critique. Il se dit qu'en fait les auteurs ont pris sciemment le parti de ne pas proposer d'alternative à l'état et au fonctionnement du monde tel qu'il est, s'en tenant à la volonté de montrer qu'il est possible de ne pas se conformer à la pensée dominante, de faire valoir ses valeurs, d'agir en cohérence avec elles, de trouver, d'intégrer et de participer à un effort collectif d'un groupe qui pense différemment, qui ne se résigne pas à l'hypocrisie généralisée des discours officiels. L'éveil : un terme qui peut sembler bien opportuniste en 2020 pour surfer sur un courant de pensée dit Woke. S'il n'a pas d'a priori de ce type, le lecteur fait connaissance avec un jeune homme timoré, bien sympathique dans ses inquiétudes, un peu agaçant dans ses hésitations apeurées, et avec une jeune femme qui semble un peu délurée. Les deux créateurs s'avèrent des conteurs d'une épatants par leur discrétion et l'évidence des dialogues et de la narration savoureuse sans être exubérante. Il découvre la communauté très lâche qui s'est formée autour de la réouverture d'un bâtiment ayant abrité une quincaillerie à l'ancienne, dans un local à la forte personnalité, tout en s'interrogeant sur les traces du passage d'un monstre géant qui laisse son empreinte sur la ville. Il se laisse surprendre par une activité inattendue d'Arthur, et par la manière dont sa maladresse apporte une forme de réconfort à une malade. Il ressort ragaillardie de sa lecture, non pas avec des étoiles dans les yeux et la promesse de jours meilleurs, mais avec la conviction qu'il peut agir dans ce monde, et contribuer à l'améliorer.
Le récit est très intrigant, étonnant dans sa forme et dans son fond. La curiosité, et certains aspects (en particulier une poésie un peu surréaliste) m’ont un temps fait croire que j’allais être embarqué dans cette histoire avec grand plaisir. Et ce d’autant plus que l’engagement mi-utopique mi-activiste de certains personnages (Sandrine et la « quincaillerie ») avait tout pour me plaire. Mais j’ai peu à peu perdu le fil de l’histoire. D’abord parce que l’aspect politique s’évaporait. Ensuite parce qu’Arthur, le personnage principal, hypocondriaque incurable, se révèle un peu chiant au bout d’un moment. Enfin, j’ai été aussi perdu par l’intrigue, qui part dans tous les sens sans jamais permettre de faire le point ou de se raccrocher à quelque chose. Reste quelques passages intéressants, une histoire qui aurait pu – en plus politique ou plus poétique – basculer dans quelque chose de plus abouti ou clair. Je reste un peu sur ma faim. Note réelle 2,5/5.
Je n'ai pas été séduit par cette série. En fait je me suis ennuyé du début jusqu'à la fin en compagnie du personnage d'Arthur. J'ai trouvé le scénario avec une prétention intello pas vraiment convaincant. Ce type de personnage qui veut exister à travers ce genre de réalisation un peu puérile et ultra médiatisée n'est pas du tout ma tasse de thé. Les auteurs abordent des thématiques intéressantes (angoisse, fin de vie, engagement associatif) mais de façon très superficielle. Comme le graphisme ne m'a pas plu je suis resté en dehors de la BD jusqu'au final un peu pathétique. De plus, j'ai eu l'impression que les auteurs ont ajouté quelques scènes de sexe pour épicé une série bien fade et timorée pour un éveil des consciences Sans moi.
Très séduisant, mais aussi décevant. Le dessin est agréable, servi par une belle couleur à l'aquarelle vigoureuse. Les personnages sont attachants (peu nombreux cependant), les décors réalistes et bien éclairés. Les dialogues et nombreux monologues sont bien sentis, la mise en scène fait preuve de variété et d'invention, (lettre présentant les chapitres encombrant le décors, réalité et fantasmes représentés sur un même plan) mais pourtant.. 1. C'est un monde d'épouvantables bobos qui finit par agacer, avec leurs petits problèmes sentimentaux et de compréhension du monde 2. Où est le scénario ? Quelles serait le fil conducteur ? Il tient en une phrase, un jeune citadin pas très dégourdi, a besoin d'un bon coup de pied au cul pour entrer dans la vie, et c'est une belle petite brune qui s'en charge, et puis voilà.. Mais pas vraiment de tension dramatique qui nous tiendrait en haleine, (l'installation artistico-politique proposée ne vient que comme prétexte peu convaincant) ni encore moins de dénouement qui viendrait nourrir nos rêveries... Comme c'est dommage... et frustrant.
Après une première lecture n'ayant laissé que très peu de traces dans ma mémoire, j'ai du relire une deuxième fois pour être capable d'aviser cette BD. Une histoire traitant de l'engagement politique, sur fond de surréalisme et d'histoire d'amour, ça ne pouvait que me parler ! Eh bien non. Trop gentil, trop simpliste, trop convenu, le récit ne m'a pas du tout porté. Et pourtant, je suis conscient de ses qualités. C'est simplement trop simpliste à mes yeux, niveau engagement politique, trop convenu dans le déroulé (notamment la fin), et trop gentil dans le message et le propos. On peut voir là le reflet de mes attentes et mes projections quant à l'engagement politique, mais c'est trop rapidement passé dans l’œuvre pour que je le ressente vraiment. D'autre part, l'idée de la Quincaillerie et de son rassemblement passe assez vite au second plan, ce qui est dommage. L'engagement collectif a toujours plus de valeur que l'individuel, à mes yeux, et je suis déçu que le récit explore l'intime dans ce genre de situation. Il y aurait eu beaucoup à dire, pour une telle idée. Le dessin est très joli et a une atmosphère quelque peu mélancolique qui m'attire bien. J'ai bien envie de lire d'autres œuvres du dessinateur, dont j'ai déjà découvert l'excellent Les Larmes du Seigneur Afghan. C'est surtout ce dessin que j'ai retenu dans mes souvenirs d'ailleurs. Bref, une légère déconvenue pour ma part. Le récit ne m'a pas emballé et j'ai trouvé le tout flirtant bien trop avec le roman intimiste par rapport au propos politique derrière, qui m'aurait intéressé comme plus développé et mis en avant. Pas mon genre, en somme.
J’ai trouvé ce récit à la fois classique et prévisible dans sa trame de fond et original et inattendu dans sa forme. Classique et prévisible, cette histoire d’amour qui va lier un célibataire par la force des choses, maladroit, hypocondriaque, angoissé de la vie et une jeune femme pleine de vie et d’allant, de projets et de fantaisie. Et là, n’importe qui ayant déjà lu ou vu ce type de comédie drama-romantique voit le coup venir de très loin. Pas de grosse surprise donc et j’aurais pu m’ennuyer si… S’il n’y avait eu le manière de nous raconter cette histoire. Les auteurs optent délibérément pour l’absurde et le surréalisme (hommage à Bruxelles oblige), avec des personnages qui nous prennent régulièrement à témoin, avec des éléments graphiques (comme la numérotation des chapitres) qui viennent entraver les acteurs dans leurs déplacements. Le résultat ? Un récit aussi prévisible qu’inattendu, touchant et drôle. C’est étonnant et ma fois bien plaisant. J’ai dévoré l’album et le relirai avec plaisir (de toute façon, je me doutais de la fin dès le début).
Difficile de ne pas tomber sous le charme de cette BD à la belle couverture intrigante. Son atmosphère ouatée, oscillant entre rêve et réalité, achève de nous séduire, correspondant bien à l’univers d’Arthur, grand garçon pas fini qui redoute d’affronter un monde où il ne se sent pas à sa place. Il y a d’abord ses mains qui le picotent, puis se détachent de son corps pour tenter de l’étrangler, comme si ces dernières voulaient vivre leur vie en s’affranchissant de ce personnage encombrant, tourmenté et centré sur lui-même. Et ça ne fait que renforcer son angoisse, à Arthur. Pour ce trentenaire célibataire renfermé (et non endurci), le seul confident, c’est lui-même, cet enfant qui n’a pas su grandir, et qui finit par avoir des hallucinations à force de déni. Alors que sa seule occupation un peu altruiste consiste à visiter des malades dans un service de soins palliatifs, on se demande si ce n’est pas lui qui est au bout de sa vie… Mais un beau jour, alors qu’il croit frôler la mort, apparaît la jolie Sandrine — à moins qu’il ne s’agisse d’un ange —, qui va le ramener tout doucement à la réalité, apportant un début de réponse à ses hallucinations… Car Sandrine, c’est une artiste militante, qui pense pouvoir changer le monde par son action : faire croire aux passants qu’un monstre, en l’occurrence un dinosaure, menace de détruire la ville, tel un reflet d’un monde anxiogène où populisme et haine de l’autre semblent avoir le vent en poupe. Comme une sale petite musique de fond, la radio diffuse des points réguliers sur la campagne présidentielle américaine (l'action se situe en 2016), sans trop envisager une victoire de Trump… Ce que veut Sandrine, c’est provoquer un choc par son street art militant : peindre des traces de griffes géantes sur les murs ou creuser de monstrueuses empreintes dans les parcs de la ville. Bref, Sandrine veut provoquer la réflexion, et par ricochet, ce fameux « éveil », l’éveil des consciences face aux soubresauts du monde… En la croisant sur son chemin, Arthur aura peut-être bien eu la chance de sa vie… Le dessin léger de Thomas Cambi est plutôt agréable à l’œil, bénéficiant d’une très belle mise en couleur. Son trait semi-réaliste sait reproduire l’atmosphère engageante et intimiste de la capitale bruxelloise, avec ce qu’il faut de loufoquerie pour surprendre le lecteur tout au long du récit. L’esprit belge y est dépeint avec finesse, et quiconque a foulé les rues de Bruxelles le comprendra, de par l’ébahissement ressenti en voyant apparaître une fresque monumentale au détour d’une rue, comme si là-bas, dans ce foyer de la BD, le neuvième art cherchait à faire irruption dans la réalité. Quant à l’histoire, elle se lit d’une traite en nous accrochant d’emblée, par sa façon particulière de jongler avec le fantastique et l’intime, nous réservant quelques moments touchants. Les personnages sont bien campés et on les trouve aisément attachants. En définitive, Vincent Zabus nous parle de résistance, d’empathie et de transmission, en croyant — peut-être naïvement — que l’art pourra changer le monde. On a pourtant envie d’y croire à cette prise de conscience collective, et on trouve ça très beau. Toutefois, on pourra regretter que le récit n’évoque jamais les conséquences concrètes d’une telle forme d’art, par exemple en montrant comment une telle action pourrait influer sur le cours des événements autrement que par un « sampling » militant à travers le monde. Zabus n’a peut-être pas voulu être trop explicite, laissant la place à l’imagination et aux suppositions, au risque de nous laisser sur notre faim… Mais ce n’est sans doute pas l’objet du livre, et après tout, personne n’a pu jusqu’ici affirmer que l’art pouvait changer le monde ou s’il se contentait de le refléter ! Il s’agit déjà de la cinquième collaboration entre Zabus et Campi pour une bande dessinée, et probablement pas la dernière étant donné l’osmose qui, à la lecture de l’ouvrage, se devine entre les deux auteurs. Loin de nous endormir, « L’Éveil » nous aura au moins révélé le pouvoir subversif de l’art, à défaut de nous prouver son influence réelle… et qui sait, suscitera peut-être des vocations…
Gros coup de coeur pour cet album à la couverture magnifique, au contenu des plus surréalistes ! Je ne connaissais pas les deux auteurs Vincent Zabus (scénario) et Thomas Campi (dessin) qui ont pourtant l'air d'avoir l'habitude de travailler ensemble. Et ça se sent ! Quelle belle osmose entre le dessin et ce scénario bien barré, mais très intelligent et finement mené ! J'avoue avoir eu un peu de mal au début de cette histoire à comprendre où les auteurs voulaient en venir. Mais porté par le dessin et la colorisation somptueux de Thomas Campi, je me suis laissé porter et cela en valait plus que la peine. Arthur, jeune adulte bruxellois hypocondriaque, peine à trouver un sens à sa vie et à s'intégrer dans la société qui l'entoure. Pour se forcer à créer du lien il s'est inscrit sur une liste de personnes qui rendent régulièrement visite à des malades en fin de vie. Pour le reste, c'est plutôt néant... C'est lors d'une "sortie" (juste aller prendre l'air dehors, effort surhumain pour notre Arthur !!!) qu'il fait la rencontre de Sandrine, une street artiste. C'est avec cette rencontre que sa vie va basculer et va enfin trouver un sens. Nos auteurs produisent ici un album subtil, tout en finesse, où jouer avec le fond et la forme que permet le média BD prend tout son sens. La maladie d'Arthur se fait mots réels dans l'album, personnages aussi et ce jeu incessant permet d'avancer tranquillement dans l'histoire en se laissant porter par les délires de nos protagonistes. Petit à petit le fil conducteur prend de l'épaisseur et nous conduit vers cette conclusion évidente et éclatante qu'on nous propose. Un petit bijou d'absurde raisonné servi par un dessin magnifique ! Une très belle découverte !
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