Géante - Histoire de celle qui parcourut le monde à la recherche de la liberté

Un gigantesque conte initiatique et féministe qui parle avec finesse de différence, d’amour, de liberté et de quête de l’idéal.
Auteurs espagnols Féminisme Géantes et Géants La BD au féminin Les prix lecteurs BDTheque 2020 Les Roux !
Elle était une fois Céleste, géante véritable, orpheline recueillie au coeur de la montagne, petite dernière d’une famille de six frères. Et quand vient le temps où chacun s’envole du cocon familial, Céleste veut elle aussi arpenter de nouveaux horizons. De la Vallée aux Marais en passant par Dorsodoro, elle découvrira l’hostilité créée par la différence, les injustices de la guerre ou de la religion mais aussi l’amour et pourquoi pas, au bout du chemin, la liberté d’être elle-même ?
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Date de parution | 01 Avril 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis


Je lis (en douce) et j'avise cet album juste avant de l'offrir à une jeune fille de 15 ans. Le dessin faussement naïf laisse penser que ce conte est enfantin. Alors, pas tout à fait. D'abord près de 200 pages, ce n'est pas rien, et ensuite l'histoire est dense et riche. Nous suivons l'évolution d'une ''petite'' fille vers son statut de femme et surtout de femme libre. Le parcours de l'héroïne est particulièrement intéressant. Au fur et à mesure de ses apprentissages et de ses expériences, elle s'affirme à la fois par sa forte personnalité mais aussi grâce à des rencontres avec des guides et des initiateurs (-trices) bienveillants. C'est que le monde est difficile pour tous, mais plus encore pour les filles. Oui, le propos est féministe, mais pas dans l'affrontement, juste dans le respect des autres. Dans chaque chapitre elle a à affronter les intolérances diverses, la place de la femme dans l'éducation, dans la vie familiale et la sexualité, les communautés religieuses... Elle remet tout le monde à sa place de façon magistrale. J'ai bien aimé justement son statut de géante qui lui permet de s'imposer sans qu'on lui en conte, à chacun(e) de devenir symboliquement géant(e) à son tour en suivant son exemple d'indépendance d'esprit. J'espère que la jeune fille à qui je le destine comprendra bien le message. J'ai beaucoup apprécié le dessin, même les yeux si stylisés, il sert bien le conte. Et l'édition est superbe avec une couverture des plus réussies. Pour chipoter, deux petits bémols peut-être : une fin un poil trop ''utopique'' mais c'est la suite logique de l'histoire et, ce qui me gêne un peu plus, même si la dénonciation des dogmes religieux est bien présente, il y a (à mon goût) un petit reste de religiosité avec ce ''Haut-puissant'' qui ne semble pas être remis en question.


On a là un album original qui, sans être non plus extraordinaire, procure une lecture très agréable. L’intrigue se développe dans un univers médiéval un peu fantastique, agrémenté de références diverses (l’Odyssée par exemple). Nous suivons les démêlés d’une géante donc, Céleste, qui va incarner de bout en bout la soif de liberté, dans une société peu prédisposée à l’accorder à volonté, qui plus est à une femme (le fait qu’elle soit géante, donc « hors normes », dans une société médiévale qui stigmatisait encore plus qu’aujourd’hui ceux qui sortaient du cadre habituel, n’est paradoxalement ici jamais un réel handicap). Notre héroïne va donc faire face à la violence et la fourberie des hommes, à l’intolérance religieuse, et va aussi rencontrer des personnages plus tolérants, qui vont lui permettre de s’épanouir, en développant une personnalité forte, au point de devenir une meneuse d’hommes, admirée et suivie, aimée, d’un chevalier, d’un roi, comme d’un saltimbanque, créant au final autour d’elle une société accueillante, fruit de ses rencontres. Le dessin comme l’intrigue ont des côtés naïfs qui passent généralement plutôt bien (même si cela manque un peu d’aspérités parfois), l’ensemble est très fluide. Je regrette juste quelques longueurs parfois (par exemple lors du séjour de céleste dans un couvent). C’est en tout cas une lecture agréable, une histoire qui, tout en mettant en avant des valeurs consensuelles, sort clairement des sentiers battus. Un hymne à la tolérance éloigné du prêchi-prêcha, avec un bel habillage, une lecture recommandée donc. Note réelle 3,5/5.


Il y a un certain côté épique dans cette fable en bande dessinée. Epique par les aventures que son héroïne va être amenée à vivre par delà les contrées. Epique aussi par sa taille car, à l'image de cette fameuse héroïne gigantesque, le contenu de cet album est bien plus dense et long à lire que je m'y attendais. Ses près de 200 pages se divisent en douze chapitres et chacun est presque une histoire à part entière. Elles sont pleines d'originalité et de subtilité, et si prenantes que je n'ai pas su lâcher le livre avant d'arriver à sa fin, tard dans la nuit. Nous y suivons la géante Céleste, élevée parmi les hommes avec un esprit humble mais plein d'intelligence. D'abord confinée dans son village natale, elle va finalement quitter sa famille pour parcourir le monde, avec plus ou moins de bonheur. Sa taille et sa force immense la protègeront de la plupart des dangers physiques, mais pas de la douleur morale et de possibles moments de tristesse. Elle gardera cependant l'optimisme aussi chevillé au corps que sa curiosité intellectuelle, et marquera son entourage par sa gentillesse, sa finesse d'esprit et la lumière qu'elle apporte dans un monde rude, surtout lorsqu'on est une femme. Le graphisme est dans un style rond et légèrement naïf qui se révèle non seulement agréable à la lecture mais aussi bien souvent débordant de charme, notamment grâce à sa mise en scène et à la douceur de sa colorisation. Les intrigues qui forment ce long récit abordent différentes thématiques allant de la peur de l'inconnu à l'utopie d'un monde meilleur, tout en s'attardant plus particulièrement sur la condition féminine dans un monde patriarcal. Ce sujet en particulier est appréhendé de différentes manières et par différents angles au fil des chapitres, évitant tout manichéisme en montrant les multiples faces d'une même pièce. Le scénario empruntent à de nombreuses influences, qu'il s'agisse de Rabelais et de ses propres géants, de la mythologie grecque, de Venise et d'autres encore. Mais tout s'y fond avec harmonie dans un ensemble cohérent et réjouissant. J'ai grandement aimé la diversité du cadre de chacun des chapitres qui donnent l'impression d'avoir droit à chaque fois à une nouvelle histoire. J'ai été transporté par ce récit et son attachante héroïne. Et j'ai sincèrement apprécié l'intelligence qui se dégage du scénario et du comportement des protagonistes. J'ai parfois un peu tiqué sur l'inconstance de la réaction des gens à la présence de la géante parmi eux, quelques fois terrorisés mais aussi d'autres fois semblant à peine remarquer son existence ou trouvant ça presque normal. Cependant j'ai mis cela sur le compte de la licence poétique de cette fable qui n'a pas besoin d'être trop réaliste pour se laisser apprécier. Je n'ai qu'un léger regret qui est la conclusion un peu trop utopique de l'album, mais après tout elle va dans le même sens que la liberté poétique que je cite ci-dessus, et c'est plutôt agréable d'avoir droit à une fin heureuse. C'est en tous les cas un album que je conseillerais sans hésiter.


C’est une BD tout à fait unique que nous proposent ici ses auteurs. Un véritable conte avec quelques ingrédients classique (notamment la géante qui évoque Gargantua ou le petit Poucet à travers son enfance) qui nous replonge dans les délices de l’enfance, doublé d’une quête initiatique, avec pour personnage principal une géante (gentille, très gentille) dénommée Céleste, qui fera son apprentissage de la liberté en parcourant mille contrées imaginaires. L’histoire se rapproche ainsi du récit picaresque, incluant moult rebondissements et une pincée de romance, car la jeune femme, par son intelligence et sa féminité, si imposante soit-elle, saura toucher le cœur des hommes qu’elle croisera sur sa route. Le propos est bien dans l’air du temps, axé sur un nouveau féminisme qui rejette tout extrémisme. Avec pour preuve le chapitre de l’île aux sirènes, où un groupe de femmes maintient quelques hommes captifs pour être certaines de conserver sa liberté, tout en les utilisant comme simples reproducteurs. Au grand dam de Céleste qui les aidera à fuir. Car Céleste représente à peu près tout ce qui fait la femme : déesse bienveillante irradiant de beauté physique et morale, reine mère, mère courage, sainte, confidente, mais aussi libertine. En effet, la jeune femme enchaînera les amants au gré de ses voyages… Céleste est également une idéaliste qui prend conscience de sa puissance et s’efforcera, en triant le bon grain de l’ivraie à travers sa propre expérience, de bâtir une société nouvelle, égalitaire, débarrassée du paternalisme dominant et axée sur le savoir et l’ouverture d’esprit. Pour demeurer dans le format du conte, ce sont plus des idées qui s’affrontent que des personnages, mais de très belles idées. La violence de la vraie vie semble ici sous-estimée. Les méchants ne sont jamais vraiment méchants, au risque de verser parfois dans l’excès de bons sentiments et une certaine naïveté. Pourtant, on ne saura reprocher à Jean-Christophe Deveney d’avoir manqué d’ambition, tant cette œuvre est riche, non seulement d’un point de vue scénaristique, mais par les pistes qu’elle nous offre pour nos vies présentes et notre futur. En revisitant le « Candide » de Voltaire selon l’esprit du temps, l’auteur nous propose en filigrane un modèle de société idéale où la bienveillance fait loi, et cela est plutôt rafraîchissant. Le dessin de Nuria Tamarit est agréable dans sa simplicité enfantine, généreux par sa colorisation variée invitant au voyage, avec certaines planches assez magnifiques. On pourra juste regretter l’expression sommaire des visages, avec de grands yeux ronds comme des boutons posés au hasard et des griffures assez désagréables pour signifier le tourment ou la colère. Si l’on ne s’arrête pas à ces détails, on pourra considérer que « Géante » demeurera une des œuvres marquantes de 2020, une œuvre très dépaysante qui nous aura fait le plus grand bien dans une année où nos horizons ont plus que jamais été réduits. L’ouvrage bénéficie d’une très belle édition, avec une couverture magnifique. La géante Céleste, les yeux rivés vers les étoiles, ne nous promet pas de décrocher la lune, se contentant de la toucher du bout des doigts… ce qui n’est pas si mal !
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