Dans le même bateau
Alors que l’Allemagne est sur le point de vivre un moment historique, Wiebke aspire à remporter les championnats du monde junior en aviron. Quand la grande Histoire s’invite dans la vie d’une sportive allemande.
1961 - 1989 : Jusqu'à la fin de la Guerre Froide Allemagne Auteurs allemands Autobiographie La BD au féminin Nouveau Futuropolis One-shots, le best-of Sport
Allemagne de l’Ouest, 10 octobre 1989, Lac de Baldenay. Britta et Wiebke, deux sœurs qui pratiquent l’aviron en double, s’entraînent en s’invectivant. Les relations sont tendues car Britta, l’ainée de la fratrie, se montre exigeante et ne supporte aucune erreur de sa sœur. Le coach est exaspéré par l’attitude infantile de ces deux athlètes. Cette année est la dernière dans la catégorie junior A pour Britta et donc la seule opportunité pour elle de se qualifier aux championnats du monde juniors qui se dérouleront sur le lac d’Aiguebelette en France. Les deux filles sont les partenaires les plus compatibles qui soit et le coach est persuadé qu’elles peuvent devenir les déesses du lac. Pendant ce temps, en Allemagne de l’Est, la société bouge. Des rassemblements populaires sont de plus en plus fréquents, des flots de ressortissants de la RDA migrent vers la RFA via la Hongrie.
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Date de parution | 06 Novembre 2019 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J'ai acheté cette BD pour ma femme qui fait de l'aviron, et c'est vrai que c'est un plutôt chouette album. Il mélange trois thématiques sur lesquels il va prendre le temps de développer son discours. La première est l'aviron en tant que sport et la compétition en particulier, comment à force d'efforts on peut arriver au succès en championnat du monde. Pour éclairer son propos, l'autrice offre plusieurs doubles pages explicatives de comment les choses fonctionnent, les termes d'aviron, les détails de l'entrainement officiel, ceux des compétitions, etc... C'est clair et instructif. Et j'ai pu constater avec ma femme que tout ce qui est moments intimes du sport et des relations entre rameuses est proche de la réalité. La seconde thématique est la chute du mur de Berlin et la réunification de l'Allemagne, avec là encore quelques doubles pages explicatives pour que le lecteur comprenne bien la situation. Si au départ, l'héroïne suit cela d'un peu loin, comme un évènement historique heureux mais ne l'affectant pas vraiment, elle va se retrouver bien plus concernée quand les sportives est-allemandes bien plus entrainées (et pour certaines dopées aux anabolisants depuis leur jeune adolescence) vont s'ajouter à la compétition nationale où elle espérait être la meilleure. Comment la grande Histoire rejoint la petite. Et enfin il y a le thème de l'adolescence, de ses sentiments, peines et joies tandis qu'on la voit évoluer entre ses 17 et 19 ans. Plus intime, mais fortement liés aux deux thèmes précédents, c'est intéressant même si je ne me suis pas tellement attaché au personnage. Quant au dessin, il est très agréable et surtout très clair pour une bonne compréhension. Bref, c'est très bien.
La rame en couple - Ce tome contient une histoire complète et indépendante de toute autre. Sa première édition date de 2019. Il a été réalisé par Zelba pour le scénario, les dessins, les couleurs, le lettrage. Il s'agit d'une bande dessinée de 156 pages. Zelba est également l'autrice du remarquable Mes mauvaises filles. Le 10 octobre 1989, Wiebke Petersen (16 ans) et sa soeur Britta (17 ans) sont en train de s'entraîner à l'aviron sur le lac Baldeney, dans l'Essen, sous le regard de leur coach. Elles commencent à se disputer et le coach finit par s'énerver pour de bon, cassant sa chaise en plastique à force de taper avec. Il leur dit de rentrer chez elles. Dans les deux pages suivantes, se trouve une présentation des caractéristiques principales du sport d'aviron : le deux sans barreur, le gouvernail, le siège coulissant sur deux rails, le fait que le rameur avance en reculant, les avirons en fibre de carbone et la forme des palettes, l'absence d'argent dans ce sport. de retour à la maison Bri, leur mère, se moque du manque de contrôle du coach, à table. le père demande le silence car il souhaite entendre la journaliste du journal télévisé. Il est question d'une manifestation du lundi à Leipzig. Ce rassemblement a eu lieu devant l'église Saint-Nicolas, et le cortège a ensuite traversé la ville jusqu'au siège de la Stasi, en criant : Nous sommes le peuple. le flot des ressortissants de la RDA qui arrivent en RFA via la Hongrie et l'Autriche reste ininterrompu. Plusieurs centaines de communes ont dépassé leurs capacités d'accueil en logements d'urgence et ont dû aménager des hangars emplis de caravanes pour héberger les familles, parfois dans des conditions déplorables. La mère Bri commente qu'on n'imagine pas ce que vivent les gens dans la RDA pour être prêts à tout sacrifier. de fait, Wiebke avait une image assez floue de la vie de ces autres Allemands, les Ossis, connaissant l'Histoire, mais pas la réalité de l'autre côté du rideau de fer. Pour Wiebke, les préoccupations de ses 16 ans étaient assez limitées à son petit monde. le lycée, avec ses copines et l'entraînement d'aviron avec ses copains ! À côté, de ça, il y avait la corvée des cours de guitare, et le babysitting. Mais l'aviron et les hormones prenaient de plus en plus de place. À 13 ans, elle avait copié sa sœur et s'était inscrite au club d'aviron. Elle avait ramé en poids léger de 14 à 15 ans. La saison de 1988 se termina pour elle et sa sœur avec les championnats d'Allemagne des U16 à Cologne d'où elles rentrèrent victorieuses. À quinze ans et demi, elle a eu ses règles. Pour année 1989/1990, elle rame avec sa sœur sur un deux sans barreur. Après l'altercation de la veille, le coach les reçoit rappelant à Britta que c'est sa dernière année en junior A, et qu'il faut qu'elle se décide entre se qualifier pour le championnat du monde des juniors sur le lac d'Aiguebelette ou se fritter avec sa sœur. Les entraînements reprennent de plus belle, avec une alternance, l'hiver, entre la rame sur le lac froid, et les séances de musculation. Dans cette bande dessinée, l'autrice retrace deux années de son adolescence, sportive de haut niveau participant au championnat du monde d'aviron de 1990. Il s'agit donc d'une chronique adolescente, avec les amitiés fortes, les premiers amours, les premiers rapports sexuels, la pratique de sport de haut niveau. Il s'agit également de la reconstitution d'une époque charnière dans L Histoire mondiale, avec la chute du mur de Berlin, et l'incidence de la réunification. L'autrice plonge donc le lecteur dans un environnement spatial et temporel très précis. Afin que le lecteur dispose de tous les éléments de compréhension nécessaires, elle réalise des doubles pages développant un thème pour apporter les connaissances correspondantes : l'aviron (6 & 7), Britta (12 & 13), le 9 novembre 1989 (24 & 25), le grand voyage du François M. (34 & 35), la compétition (44 & 45), la réunification du 3 octobre 1990 (68 & 69), le sport en RDA (74 & 75), Ratzeburg (110 & 111), nos charmantes Est-Ouest différences (122 & 123). Ces pages se composent de plusieurs illustrations, sans bordure de case, avec un commentaire rapide pour chacune. Dans la première, le lecteur apprend les rudiments de l'aviron pour que les entraînements et les compétitions aient un sens pour lui. Il apprécie les dessins précis pour les notions techniques, avec une touche d'exagération comique pour les personnages. Quel que soit son degré d'intérêt pour l'aviron, il se prête bien volontiers au jeu d'investir les 2 ou 3 minutes nécessaires pour assimiler ces informations, grâce à cette présentation vivante, et à leur intérêt immédiat dans le cadre de cette histoire. Il retrouve le même dosage de précision synthétique et de touche amusée dans les autres thèmes ainsi exposés. La première scène présente les deux sœurs, et le lecteur s'attache immédiatement à Wiebke, une adolescente tout ce qu'il y a de plus normale, et peut-être banale. Une jeune fille élancée, avec son petit caractère, une assurance de façade pour mieux faire face à ses moments de manque d'assurance, un humour très sympathique, et une joie de vivre irrésistible. L'artiste dessine dans un registre réaliste et descriptif, avec un degré de simplification variable pour les visages, en fonction de l'intensité de l'expressivité qu'elle souhaite leur conférer. Les personnages sont très régulièrement souriants, et de nombreuses émotions et états d'esprit se manifestent sur leur visage, créant une proximité avec eux en tant qu'être humain, et une douce empathie. Zelba se montre une excellente directrice d'acteurs, que ce soit dans l'action comme la pratique de l'aviron, ou que ce soit dans les moments de dialogue ou d'intimité émotionnelle. Elle sait user de l'exagération comique avec discernement et légèreté, comme page 23 où le nez de Wiebke s'allonge à l'instar de celui de Pinocchio. le lecteur partage de nombreux moments touchants : de rire quand elle remet à leur place un groupe de garçons émoustillés par son teeshirt mouillé, ou quand elle émet un jugement de valeur sur une sportive qui fume, ou encore quand elle s'inquiète pour la santé de sa mère, souffrant d'un déficit respiratoire. Il éprouve la sensation d'être une très bonne copine de Wiebke qui dit tout honnêtement sans tabou, et sans arrière-pensée. L'autrice fait partager son intimité avec un naturel évident extraordinaire. En suivant Wiebke, le lecteur partage donc le quotidien d'une adolescente, sportive de haut niveau. Il l'accompagne aux entraînements. Il ressent la déception de la blessure, le plaisir de bien ramer, les contraintes logistiques de ce sport. À aucun moment, il ne se sent perdu, car la bédéiste joint l'image à la parole : les dessins apportent tout naturellement les éléments d'information venant montrer ce qui est évoqué dans les dialogues. Cette interaction entre mots et dessins coule tellement de source qu'elle en devient invisible. Pourtant s'il s'y arrête un instant, le lecteur voit comment elle parvient à rendre compte de l'intensité d'une épreuve d'aviron, en tirant tout le parti de cases de la largeur de la page, en montrant les positions relatives des bateaux, mais aussi l'effort qui se lit dans la tension des corps, dans les visages durs. La narration visuelle est tellement évidente que le lecteur ne prend pas forcément de temps de recul pour se représenter l'investissement de Wiebke dans la pratique du sport. Il s'en rend mieux compte quand elle fait elle-même le bilan de ses semaines à raison de 8 entraînements hebdomadaires, chaque jour dont deux le samedi, et de l'absence de grasse matinées pendant 4 ans. le lecteur considère alors ce qu'il vient de lire, sous un autre angle. Ce qui lui est apparu facile et rapide pour parvenir à participer au championnat junior du monde d'aviron acquiert une autre valeur au regard des efforts cumulés sur plusieurs années. L'histoire de cette adolescente s'inscrit également dans la grande Histoire. Là encore cette dimension du récit s'intègre tout naturellement comme une caractéristique significative dans la trajectoire de vie de Wiebke. Elle n'a pas de lien familial avec des habitants de l'Est, ni de connaissance particulière sur le sujet. La réunification a comme principale conséquence de fusionner deux équipes nationales en une seule. Les compétitions d'aviron ont pour effet de faire se côtoyer des Allemands de l'Est et de l'Ouest alors que ces deniers s'en faisaient une idée très floue à l'aune des maigres informations dont ils disposaient. le lecteur (re)découvre cette situation : un peuple arbitrairement scindé en deux, une réunification s'étalant de la chute du mur le neuf novembre 1989 à la date officielle de réunification le trois octobre 1990, entre la République Démocratique Allemande (RDA) et la République Fédérale d'Allemagne (RFA). L'autrice explique très bien comment les premiers se sont retrouvés assimilés dans les seconds, devant abandonner leur mode de vie antérieur, et adopter celui de l'ouest. Il n'y a pas de révélation fracassante sur ce processus, simplement le regard d'une jeune Allemande de l'ouest, et son expérience vécue à son niveau. Le titre semble annonce une puissante métaphore qui développerait comment les Allemands de l'Est et de l'Ouest se sont retrouvés dans le même bateau, comment une sportive de l'ouest a dû faire équipe avec une autre de l'Est. À la lecture, l'intention de l'autrice apparaît différente : simplement raconter deux années de son adolescence. Dès les premières pages, le lecteur se prend d'amitié pour Wiebke Petersen, son entrain, les dessins un peu arrondis agréables à l’œil et pleins de vie, et pour cette même personne devenue autrice et racontant sa vie avec une franchise et une honnêteté généreuses. Elle sait intéresser le lecteur aussi bien à la pratique de l'aviron à haut niveau, qu'au processus de réunification entre les deux Allemagnes, à travers les faits historiques, et les petits faits du quotidien, allant de la découverte de la carrure des sportifs est-allemands, au port du maillot national avec l'aigle chargé de connotations négatives. Une réussite autobiographique enchanteresse.
J'avais cette BD dans ma liste d'envie depuis sa sortie et j'ai franchi le pas pour découvrir toutes les sorties de Zelba avant d'aller l'interviewer. Je savais déjà que j'aimais son dessin et les approches qu'elle pouvait avoir de différents sujets (j'ai été un lecteur régulier de son blog pendant des années), mais la BD est franchement excellente ! En parlant de sa jeunesse, son adolescence et l'entrée dans le monde adulte, sa pratique de l'aviron et sa famille, Zelba nous livre une jolie autobiographie qui m'a appris quelques trucs sur l'aviron, sport que je ne connais pas du tout. Mais le bonus, c'est la couche sociétale : la chute du mur et la réunification de l'Allemagne, évènement symboliquement fort d'une Allemagne qui se retrouve après 40 ans de séparation forcée. Zelba nous explique quelques points importants de celle-ci, mais surtout nous dévoile l'impact sur les jeunes allemands de cette époque : un mélange de curiosité envers ces "étrangers", le poids de la guerre encore présent mentalement, la question de l'avenir de cette jeunesse sans mur et sans nazisme. L'ensemble est dans la veine du roman graphique autobiographique, mais j'ai englouti les pages sans les sentir passer. C'est aéré et dynamique, mais je suis biaisé par son style que j'apprécie depuis des années, et l'ensemble de l'histoire se dévoile sans temps mort. J'ai vite été embarqué et je trouve que l'ensemble se tient parfaitement entre l'histoire d'émancipation d'une jeune femme et un pays qui se retrouve. Les deux trames narratives se mêlent à merveille, hasard de l'Histoire qui se mêle à la petite histoire. C'est une BD assez étonnante, qui n'est pas totalement une autobiographie et pose des questions intéressantes sur l'Allemagne, la jeunesse, l'accomplissement, le sport … Plein de petites intrigues et trames qui se croisent sans temps mort, pour un résultat franchement plaisant à lire. Je recommande la lecture !
Ouh punaise. En voilà un album qu’il est bien !! Je découvre l’auteure mais je vais me pencher sur ses autres productions, une lecture intéressante, légère et agréable. J’ai trouvé qu’elle réussissait un beau numéro d’équilibriste avec ce récit autobiographique. Elle nous narre son expérience dans l’aviron junior à la fin de son adolescence (1989 à 91), nous sommes en Allemagne de l’Ouest post chute mur de Berlin, un mélange de chroniques familiale, adolescente, sportive et historique. C’est vraiment sympa à suivre en plus d’être instructif et authentique. Les 2 précédents aviseurs ne s’y sont pas trompés, c’est servi avec beaucoup de sincérité et de (fausse) simplicité, d’ailleurs Canarde pointe très bien un des thèmes de l’album. Une mise en page aérée pour un récit qui respire malgré sa belle densité. Une belle découverte pour ma part.
Plongée dans le quotidien de l'adolescence, au moment où la grande histoire s'invite dans une famille toute simple d'Allemagne de l'Ouest. Le dessin : Noir et blanc , mais dans le genre clair, avec de grandes cases aérées, sans contours, ça respire. Et heureusement parce qu'on suit d'abord deux sœurs sur un aviron, et il y a besoin d'oxygène, la capacité respiratoire est un thème très présent dans l'album, d'autant que leur mère est à l'hôpital la moitié du temps pour soigner une maladie pulmonaire. le trait est souple, au feutre, avec des petites ombrettes pour donner un peu de relief. Le récit autobiographique est entrecoupé de double-pages en couleur sur la politique à cette époque ou les différentes nuances techniques de l'aviron. Le sujet : Une jeune sportive ouest-allemande suit sa sœur dans les compétitions d'aviron et finit par participer aux championnats du monde où l'Allemagne sera de nouveau représentée unie en 1991. On survole donc les thèmes de l'adolescence, des rapports de genre, du patriotisme allemand écorné par le souvenir du Nazisme, les modes vestimentaires, la place du corps et du sport d'un coté et de l'autre du mur. Mais l'atout principal de cette histoire c'est la simplicité, pas de circonvolution, d'afféterie, c'est direct, sincère. Cela semble spontané et cela doit représenter justement un grand travail pour arriver à ça.
Cela faisait des mois que je voulais mettre la main sur ce titre où l'on va suivre les aventures sportives d'une allemande de l'Ouest qui va s'associer à une partenaire au moment de la chute du mur de Berlin en 1989 et qui finira par devenir championne d'Allemagne à force de courage et de persévérance. C'est surtout la rencontre de deux Allemagne séparées depuis plus de 40 ans. Il va falloir vaincre les préjugés et les réticences mutuels pour former une équipe unie vers la victoire. Je trouve que c'est un très beau symbole, moi qui n'aime ni la guerre, ni les conflits. Par ailleurs, on apprendra tout ce qu'il faut savoir sur l'aviron, qui semble être un sport particulièrement difficile. J'ai apprécié ce graphisme en bichromie très réaliste qui met non seulement en valeur les personnages mais également les décors bucoliques de ces beaux lacs où se font les entraînements. Ratzeburg n'aura également plus aucun secret pour vous. On apprendra également que ce fut surtout aux Allemands de l'Est de s'adapter à ceux de l'Ouest. La liberté avait un prix. A noter qu'il s'agit d'un récit autobiographique assez authentique et sincère.
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