Beate et Serge Klarsfeld - Un combat contre l'oubli

Note: 3.6/5
(3.6/5 pour 5 avis)

Un roman graphique adapté du livre Mémoires de Beate et Serge Klarsfeld et fait sous leur contrôle, pour l'histoire, la mémoire et la justice.


1961 - 1989 : Jusqu'à la fin de la Guerre Froide Adaptations de romans en BD Autobiographie La Boite à Bulles Les petits éditeurs indépendants Nazisme et Shoah Politique

« Si les Allemands nous arrêtent, moi, je survivrai parce que je suis fort mais pas vous ». Ces paroles, prononcées en 1943 par son père, assassiné à Auschwitz, Serge Klarsfeld ne les oubliera jamais. Après la guerre, il se marie à Beate, une jeune allemande installée à Paris. Ensemble, ils se font la promesse d'obtenir la mise à l’écart de la vie politique allemande de tous les anciens nazis, puis d’obtenir le jugement et la condamnation des principaux responsables nazis de la déportation, notamment ceux ayant sévi en France. Distribution de tracts, manifestations, tentatives d'enlèvements, la « méthode Klarsfeld » prouve leur obstination à débusquer les anciens criminels de guerre qui vivent paisiblement en toute impunité alors que, durant la guerre, ils occupaient des postes officiels, soit comme gradé nazi avec Lischka, Hagen, ou Barbie soit en tant que collaborateurs français comme Papon, Bousquet ou Touvier... Dans ce roman graphique, Pascal Bresson revient sur les combats de la vie de Beate et Serge Klarsfeld pour que justice soit rendue et que nul n'oublie. Un ouvrage très fort pour l'histoire, la mémoire et la justice, brillamment mis en image par Sylvain Dorange. Texte : Editeur.

Scénario
Oeuvre originale
Dessin
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 09 Septembre 2020
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Beate et Serge Klarsfeld - Un combat contre l'oubli © La Boîte à Bulles 2020
Les notes
Note: 3.6/5
(3.6/5 pour 5 avis)
Cliquez pour afficher les avis.

19/08/2020 | Alix
Modifier


L'avatar du posteur bamiléké

Dans son très bel essai, Le Convoi, Beata Umubyeyi Mairesse, survivante du génocide des Tutsi au Rwanda s'étonne que la Shoah ne fut pas plus tôt au centre de la mémoire historique de l'Europe de la seconde moitié du XXème siècle. A mes yeux la série biographique sur le couple Klarsfeld est l'illustration parfaite de cette pensée. Ce documentaire biographique précis et complet n'est pas d'une lecture aisée. Pourtant on peut le voir comme une œuvre essentielle de volonté de justice trop souvent déniée aux victimes des génocides ou des massacres de masse: Shoah, Gitans, Rwanda, Congo, Cambodge pour citer les plus connus. L'originalité du propos est de montrer dans le parcours du couple Klarsfeld, la difficulté de faire reconnaître de façon légale cette indignation légitime et l'acceptation de la vérité historique. J'ai beaucoup aimé la première partie de l'ouvrage qui montre très bien l'état d'esprit des années 60 dont ont profité nombre de bourreaux Nazis ou de Collabos. La volonté de réconciliation, la méfiance vis à vis du bloc communiste ne justifie pas tous les aveuglements de l'époque. J'ai beaucoup aimé la clairvoyance du couple en page 52 quand il cite Jaspers sur la survivance et la continuité de l'Etat allemand à la fin du conflit. Ce qui fut dit pour l'élection à la chancellerie de Kiesinger pourrait probablement s'appliquer pour d'autres personnalités qui ont eu accès à de hautes responsabilités après guerre. C'est un débat difficile qui vaut pour tous les génocides ou massacres entre deux légitimités contraires : l'amnistie de certains et le jugement des autres. La construction du récit n'est pas simple. Elle fait des sauts chronologiques et renvoie à des références historiques peu connues. Ainsi j'ai aimé le rappel par Serge Klarsfeld et l'importance dans son parcours de l'engagement de Hans et Sophie Scholl (lire La Rose Blanche - Des étudiants contre Hitler). Comme la série prend le temps d'approfondir les sujets, les auteurs abordent des thématiques compliquées qui peuvent s'entrechoquées: légalité, légitimité, morale et raison d'Etat... Cela donne parfois des passages assez lourds mais nécessaires pour ne pas être superficiels. J'ai moins accroché à la seconde partie sur Klaus Barbie. Probablement à cause de ma lecture de l'excellent Klaus Barbie - La Route du rat que j'avais trouvé plus tonique. Toutefois l'ensemble est cohérent avec des moments intimistes qui donnent de belles pauses dans un récit très dense. Dans ce genre de thématiques le graphisme passe souvent au second plan. Le trait de Dorange un peu minimaliste correspond bien à ce genre documentaire. J'ai une réserve sur le physique de Beate avec ce nez pointu qui ne correspond pas du tout aux photos de la belle jeune femme. Je trouve que le choix graphique de Dorange fait de Beate un personnage trop pointu et agressif. Cela reste une minuscule appréciation perso. La mise en couleur qui souligne les époques du récit aide bien à la compréhension de la narration. Une belle lecture qui enrichit une thématique très visitée. 3.5

16/09/2024 (modifier)
L'avatar du posteur Tomdelapampa

Content de l’avoir lu mais je n’y reviendrai pas, typiquement le truc que je ne lis qu’une fois. Le sujet est loin d’être désintéressant mais il ne me passionne pas. J’avoue avoir zappé certains dialogues au cours de ma lecture, c’est assez lourd à suivre. Pourtant le dessin est pas mal et allége un peu le rendu, la narration est maîtrisée, on voyage beaucoup (espace et temps) mais on n’est jamais perdu. L’histoire du couple Klarsfeld est admirable de ténacité et de justice, j’en connaissais quelques bouts mais n’avais pas cette vision complète, ce qu’ils ont réussi à faire est assez fort. Une œuvre de mémoire.

04/06/2022 (modifier)
Par Ro
Note: 3/5
L'avatar du posteur Ro

J'assimilais à tort le nom de Klarsfeld à celui d'un avocat médiatisé et controversé sans savoir qu'il s'agissait du fils des deux protagonistes de cette biographie. Je connaissais de loin le sujet de la traque des nazis et du procès de Klaus Barbie mais j'ignorais que c'était ce couple qui en était grandement à l'origine et qui l'avait menée presque seuls contre tous. Cette lecture fut donc pour moi très instructive. Même si le sujet du militantisme et de la recherche de nazis en fuite ne me passionne pas, j'ai appris pas mal de choses et j'ai surtout découvert comment cette femme et son mari ont réussi, à force de motivation et de ténacité, à faire plier des états et à amener en justice des personnages protégés par plus puissants qu'eux. Il leur a fallu une sacrée dose d'audace et de don de soi. C'est impressionnant et édifiant. Et la narration de cet album rend tout cela clair et bien compréhensible. Le sujet est abordé en profondeur, ce qui est à la fois une qualité et un défaut. La qualité est l'apport d'informations ainsi offert, mais le défaut est une lecture un peu longue et parfois légèrement laborieuse pour un lecteur comme moi qui ne suis pas particulièrement exalté par le sujet et sa foule de détails. J'ai donc lu cette BD comme une intéressante tranche de livre d'histoire, mais sans être forcément plus touché que cela par son contenu.

08/12/2020 (modifier)
L'avatar du posteur Noirdésir

Même si l’on pourra chipoter, et reprocher à cet album un inévitable côté hagiographique, gommant certainement quelques aspects moins consensuels de la personnalité de Beate ou Serge Klarsfeld (l’album est une adaptation d’un livre de mémoires écrit par le couple), on ne peut que s’incliner devant le combat de cette femme et de cet homme, et la façon qu’ils ont eu de le mener, la plupart du temps contre des appareils d’Etat et contre une amnésie plus ou moins volontaire des populations allemandes et françaises par rapport au génocide et à ceux qui l’ont permis durant la seconde guerre mondiale. Et bien sûr, il faut aussi saluer leur courage face aux menaces des séides de l’extrême droite (menaces téléphoniques, écrites, attentats, etc.), hélas toujours actifs lorsqu’il s’agit de défendre « l’honneur » de SS ou de collaborateurs notoires. Après un passage montrant la rencontre entre Beate et Serge, nous suivons donc leur combat contre l’oubli et l’impunité. D’abord en Allemagne, contre des personnes menant une retraite tranquille (ou qui accèdent même aux plus hautes charges, comme celle de chancelier !), « oubliés » par la justice. Puis en France et en Amérique latine, contre ceux qui, comme Barbie en Bolivie ou Papon en France sont longtemps passés entre les mailles du filet. Les Klarsfeld n’ont jamais renoncé malgré les embûches, et ont permis – hélas bien tard et parfois trop tard – de lever quelques voiles, et de rendre, même imparfaitement, mais au moins symboliquement, justice pour les dizaines de milliers de victimes des bourreaux qu’ils ont « traqués ». Même si ce n’est pas le propos central, j’aurais aimé voir développé (c’est quand même évoqué plusieurs fois) le rôle de la CIA et des officines anti communistes, en Europe et au USA, voire en Amérique latine, pour « reconvertir », blanchir de véritables monstres froids. Même si les Klarsfeld ont vu leur rôle reconnu, ont été décorés, c’est bien tardivement. Entre temps, on leur a plutôt mis des bâtons dans les roues. Ces poils à gratter de la mauvaise conscience post génocide méritent en tout cas d’être reconnus : ils ont permis que ne soient pas totalement oubliées certains principes de la démocratie, et cet album montre très bien leur combat, la complicité qui les a liés – Beate affirme même que ce combat a renforcé leur couple, je veux bien la croire. Un album à lire si l’on ne connait pas ce couple et sa vie de combat. Pour les autres, c’est une piqûre de rappel intéressante.

19/09/2020 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Alix

J’avais 11 ans lors du procès très médiatisé de Klaus Barbie, mais je dois avouer que tout ça m’était un peu passé au-dessus de la tête (la notion de « crime contre l’humanité » étant assez abstraite pour l’enfant que j’étais). Cet album, adapté du roman « Mémoires » de Beate et Serge Klarsfeld, raconte la vie passionnante de ces deux individus hors du commun. Beate et Serge ont passé leur vie à traquer des anciens nazis criminels de guerre (dont Klaus Barbie, donc) qui vivaient paisiblement en toute impunité, parfois même dans des rôles politiques. Ils ont sacrifié beaucoup de temps et d’argent, beaucoup douté, parfois pris des risques insensés (leur voiture explosa un jour, heureusement quelques heures trop tôt, la minuterie de la bombe ayant mal fonctionné), et subirent beaucoup d’attaques, de menaces de mort… Ils parvinrent toutefois à concilier tout ça avec une vie de famille relativement « normale ». Quel courage, quelle détermination ! L’adaptation de Pascal Bresson est réussie, les planches ne sont pas (trop) chargées en textes, ce qui n’a pas dû être chose aisée, le roman original faisant plus de 1000 pages. La lecture reste longue et dense (en particulier le tout dernier chapitre, sous forme d’entretien avec une journaliste), donc un album à lire en plusieurs fois selon moi. La mise en image de Sylvain Dorange (que j’avais découvert dans le superbe La Plus Belle Femme du Monde - The Incredible Life of Hedy Lamarr) est sobre et efficace, et contribue positivement à la narration (avec par exemple plusieurs palettes de couleurs pour représenter les différentes époques). L’album photo en fin de récit est une excellente idée, et humanise encore plus ce couple au destin vraiment exceptionnel. Une lecture passionnante et instructive.

19/08/2020 (modifier)