Le Mangeur d'espoir
Il se passe des choses étranges à Montmartre... Le quartier est hanté par des créatures surnaturelles et des esprits maléfiques...
Douleurs intimes Paris
Rachel, 16 ans, vit seule avec sa mère, qui souffre d'une grave dépression. D'après l'étrange Docteur Adrian Stern, le mal viendrait du Mangeur d'espoir, une entité démoniaque qui envahit l'esprit de ses victimes et se nourrit de leurs plus beaux souvenirs. Pour la sauver, Rachel doit pénétrer dans sa mémoire et y traquer le monstre... (texte : Gallimard)
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Date de parution | 09 Septembre 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J'aime beaucoup ce que fait cet auteur, dont le Le Réveil du Zelphire m'avait attiré il y a quelques années, pour une lecture mitigée mais dont j'avais tiré quelques petits détails qui me donnaient envie d'y revenir. Je me suis donc attardé sur cette BD, clairement à destination de la jeunesse et qui fait passer un message très sympathique sur la dépression et le deuil d'une façon métaphorique mais assez claire pour les lecteurs adultes. C'est tout à l'honneur de l'auteur de faire une BD qui soit avant tout claire pour les jeunes et bien plus compréhensive pour les adultes, qui devinent sans peine les métaphores du récit. L'auteur à pondu une BD plutôt épaisse mais dont le dessin, bien aéré, rend la lecture fluide et rapide. Presque un peu trop, d'ailleurs, puisque certains éléments de narration semblent assez bref. Le personnage principal accepte bien vite une situation assez peu ordinaire et les dialogues ne sont pas nombreux, laissant libre court à des scènes d'actions et d'ambiances qui fonctionnent plutôt bien. C'est sombre et glauque lorsqu'il faut que ça le soit, mais aussi lorsque le scénario demande une certaine beauté aux scènes, l'auteur ne se prive pas de le faire. C'est surtout la colorisation qui joue là-dessus, entre un quotidien qui semble plutôt grisâtre, des souvenirs sombres ou au contraire lumineux. Une série de contraste qui joue très bien avec les tons pour en dégager un propos. L'histoire tourne autour de ce mangeur d'espoir, mais j'aime la façon dont la métaphore ne se contente pas d'un bête ennemi à abattre. Il y a l'idée de dévorer progressivement tout les souvenirs pour n'en laisser qu'une copie sombre, finissant par les souvenirs les plus heureux, l'aide venue de l'extérieur et le "médecin" qui vient assister pour que finalement le mal soit vaincu. Sous une apparence simple, l'auteur présente la dépression comme un mal insidieux qui ne peut être vaincu aussi facilement, et surtout pas avec "un peu de bonne volonté" et un coup de pied au cul comme certains l'imaginent. Dans une histoire comme celle-ci, l'important est d'aider à lutter pour le vaincre. Bref, sous une histoire un peu trop rapide et un dessin qui fait franchement mouche, l'auteur arrive assez bien à parler de quelque chose de dur et plutôt touchant, à travers une relation mère-fille qui connait le deuil et la dépression. En un sens, ça m'a rappelé la BD Clara (Lemoine-Cécile) qui parlait du deuil en s'adressant à des enfants d'une manière plutôt originale. J'ai beaucoup aimé ma lecture et je la recommande, surtout au plus jeunes enfants qui pourront ainsi comprendre d'une manière plus simple la dépression et la façon dont elle agit sur nous.
Voici un album que j'attendais assez impatiemment. Karim Friha est un jeune auteur, qui a été révélé par Le Réveil du Zelphire, puis La Flamme et l'Orage, en tant qu'auteur complet. Petit à petit il creuse son trou, et son nouvel album, un one shot cette fois-ci, va renforcer son statut de petit prince de la bd fantastique. Le sujet est cette fois-ci un vampire psychique, surnommé le Mangeur d'espoir. Il hante les esprits des personnes mentalement fragiles, pour s'emparer de leurs souvenirs, les flétrir, en transformer les protagonistes en créatures monstrueuses, jusqu'à détruire totalement le psychisme de ses victimes. On est clairement dans une allégorie de la dépression, dont les origines sont parfois inconnues. Un point de départ intéressant, qui rappelle fortement les ressorts de certains récits écrits par un autre auteur de fantastique, et pas n'importe lequel : Stephen King. Il s'agit d'ailleurs là d'une référence assumée par Karim Friha, qui a, toutes proportions gardées, transposé -entre autres- des éléments du Fléau à Montmartre. On y voit en outre certains "trucs" cinématographiques que King a popularisé, dans le mouvement, dans la transition entre les personnages et les plans, etc. Il en résulte un récit très efficace, plutôt maîtrisé, même si je trouve qu'il est un peu vite lu. J'aurais aimé, par exemple, qu'Adrian Stern mette plus de temps à convaincre Rachel. Ainsi on apprend par exemple qu'il a sauvé la vie de l'ami de Rachel, mais sans savoir comment. Il y a peut-être aussi une part de frustration de ma part dans cette impression, car j'étais bien embarqué dans cette histoire. Deux petites remarques négatives en plus : l'argumentaire en quatrième de couverture laisse entendre un ancrage important du personnage-titre dans le paysage parisien, à Montmartre en particulier, voire un lien fort entre celui-ci et le lieu. Or, hormis quelques cases où l'on voit le Sacré-Coeur et le jardin des Buttes-Chaumont, deux lieux iconiques de la capitale, l'environnement géographique n'a pas vraiment de présence. Malgré leur beauté visuelle, on ne voit pas vraiment l'importance soulignée par l'éditeur. Et une -toute petite- déception concernant une case qui est par ailleurs très forte, celle où l'on voit Rachel marcher d'un air triste, son vélo à la main, dans le cimetière de Montmartre. Un petit défaut de perspective m'a sauté aux yeux lors de ma lecture de l'album, alors que j'adore par ailleurs cette case, qui est présente en noir et blanc dans mon bureau depuis des mois, après que Karim l'ait publiée sur Facebook. A côté de ces menus défauts, que je tenais tout de même à signaler, j'ai passé un très bon moment de lecture. L'ambiance est réussie, le récit plutôt bien mené, tandis que les personnages sont très travaillés. Mention spéciale au Mangeur d'espoir, entité muette, mais d'une présence très angoissante. On sent que Friha l'a énormément travaillé, lui a donné un look très particulier qui va me marquer je pense. Bref un très bon album, de la part d'un auteur que je vais continuer à suivre.
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