Le Grand Voyage de Rameau
Un exaltant récit d’aventure introspectif où s’entremêlent rencontres, enchantements et désenchantements.
Ere Victorienne Jack l'Eventreur Londres
Dans le bois des Mille Feuilles vit une tribu de petites créatures. Une légende ancienne raconte que trois d’entre elles, jadis attirées par les humains et leurs inventions, ont vécu un drame… Depuis, il fut formellement interdit d’avoir un contact avec eux ! Le temps a passé. Un jour, la jeune Rameau ayant décidé de braver l’interdit se retrouve convoquée par le conseil des anciens, la sanction tombe : elle doit rejoindre Londres, la ville monstre, afin de se rendre compte par elle-même que le monde des humains n’est pas aussi bon que ce qu’elle imagine. Un vieux magicien aveugle nommé Vieille branche lui propose de l’accompagner… Le grand voyage de Rameau dans le monde des humains révélera-t-il qu’il est peut-être préférable de vivre éloigné d’eux ?...
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Date de parution | 30 Septembre 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J'avais déjà lu une BD de Phicil, mais je n'avais pas noté que c'était lui qui était aux commandes de cette BD. En tout cas, j'ai immédiatement reconnu son coup de crayon au niveau des nez ! La BD est une petite histoire en forme de conte, mais aussi de balade dans Londres de l'époque victorienne. L'idée d'un petit peuple qui découvre le monde humain n'est pas nouveau mais relativement bien exploité, notamment en essayant de comprendre ce qui fait que les humains soient capable de telles choses. Le personnage de Rameau est une jeune insouciante qui rêve de robes magnifiques ou de jolis colifichet, sans se demander quel monde produit ce genre de choses. La découverte des personnes de l'époque victorienne est d'ailleurs descendante, des plus grands jusqu'au plus humble. Une manière de représenter la société qui termine sur la note amère de toute l'horreur du XIXè siècle. Je dois être honnête, si j'ai trouvé l'ensemble très sympathique, je ne suis pas plus impliqué que ça dans le récit. C'est une jolie histoire de découverte, mais je trouve que certains personnages présentés sont assez peu intéressants. Il n'y a pas de réels liens établis avec les protagonistes, c'est plus pour les lecteurs qui connaitraient les personnages et les replacent dans le récit. D'ailleurs je n'en connaissais pas certain, ce qui m'a fait me demander comment les choix on été fait. Au final, c'est une lecture plaisante mais que je n'ai qu'apprécié de loin, sans vraiment rentrer dedans. C'est mignon et plaisant, mais je l'oublierai sans doute assez vite.
Un bon conte quoique je n'irais jusqu'à le trouver extraordinaire. J'ai bien aimé le dessin et surtout la manière dont les petites créatures interprètes le monde des humains. Le scénario est prenant quoiqu'au fil des chapitres j'ai trouvé qu'il y avait des longueurs. En fait, je n'ai pas aimé l'apparition dans le récit de plusieurs personnalités de l'époque. Que les personnages rencontrent la reine en allant au palais de Buckingham, cela fait du sens, mais là ils semblent très bon pour aller où sont les écrivains et je n'ai pas trop aimé quand l'auteur mettait des extraits d'œuvres de fictions dans son récit, cela ne fait pas du tout naturel. De toute façon ses apparitions ne m'ont pas semblé pertinent sauf pour Jack l'éventreur vu qu'il a une vraie incidence dans le récit. Donc un conte pas mal, mais sans plus pour moi à cause des défauts que j'ai mentionné.
« Le Grand Voyage de Rameau » est un conte magnifique, qui au travers la quête initiatique de Rameau offre une réflexion assez sombre sur la nature humaine. Elle pose beaucoup de questions naïves et innocentes (« Pourquoi les hommes aiment-ils tant accumuler des objets ? », « Pourquoi cet homme dort-il dans la rue, qu’a-t-il fait de mal ? ») qui ne sont certes pas spécialement originales, mais font quand même diablement réfléchir et touchent par leur justesse. Les rencontres successives avec des écrivains connus (William Morris, Oscar Wilde) sont intéressantes, et l’apparition de Jack L’éventreur sur la fin est bien vue, puisqu’elle sert d’apothéose au triste tableau dressé par nos aventuriers. Le dessin est magnifique. J’ai particulièrement adoré les promenades touristiques dans un Londres victorien, qui nous font (re)découvrir de nombreux lieux connus superbement mis en image. La fin est finalement assez convenue, mais elle est belle et satisfaisante. Un excellent conte, pour les petits comme pour les grands.
Même si on commence à être habitué par le bon goût éditorial de la collection Métamorphose, on ne peut s’empêcher de s’extasier comme presque à chaque fois qu’une de ses nouveautés nous arrive dans les mains… Alors désolé si ça n’est pas très original, mais c’est encore une fois le cas ici… Et comme souvent, l’objet, de très belle facture, tient parfaitement ses promesses quant au contenu. « Le Grand Voyage de Rameau » est consistant (un peu plus de 200 pages) et cela tombe très bien car dès le départ, on est immédiatement en immersion et on ne voudrait déjà pas que cela finisse… Nous avons affaire ici à un conte, et comme dans tout conte, on y trouve une portée initiatique, laquelle concernera en premier lieu la jeune héroïne au nom étrange de Rameau. Envieuse des géantes de la cité, Rameau voudrait elle aussi porter une jolie robe, et non pas cette frusque insignifiante ! Pour elle, Londres est un paradis luxueux plein de promesses radieuses, une idée fixe qui poussera la fillette à braver l’interdit en franchissant l’orée du bois, et par voie de conséquence, la « condamnera » à l’exil vers la ville qu’elle admire tant… Phicil excelle littéralement avec ce conte aux charmes multiples, comme s’il était parvenu à trouver la combinaison idéale entre écriture et dessin. Tous deux s’allient pour produire une petite merveille bédéphilique, à tel point qu’on imagine mal pouvoir les dissocier l’un de l’autre. La fluidité de la narration propre au genre répond à l’authenticité d’un trait délicieux et unique dont on aperçoit les coutures, idéal pour représenter ces petits êtres aussi difformes qu’attachants, à commencer par Rameau et son physique impossible mais désopilant (une tête énorme, un nez surdimensionné surmonté de petits yeux et une bouche très large), assorti d’une forte personnalité. S’inscrivant dans une tradition littéraire victorienne oscillant entre Gaslamp et low fantasy, « Le Grand Voyage de Rameau » établit une sorte de pont entre un univers enfantin champêtre et enchanteur et un monde littéraire témoignant d’une période assez noire typique de l’Angleterre industrielle de la fin du XIXe siècle. Jouant sur ces contrastes, le récit va débuter dans une atmosphère idyllique de candeur verdoyante, évoluant progressivement vers l’immensité urbaine et tentaculaire de la « Ville Monstre », d’abord avec l’architecture imposante de Londres et ses salons « cosy », où l’on croisera notamment Oscar Wilde jeune (avec déjà une pointe d’inquiétude quant au contexte social dur et puritain), puis vers les bas-fonds sordides où l’ombre de Jack l’Eventreur est omniprésente. Mais au beau milieu de cette obscurité va scintiller la discrète lumière de nos farfadets par le biais de pierres magiques (les cornalines), qui guideront nos voyageurs vers plusieurs personnages-clés, notamment la Reine Victoria, telles des balises jalonnant le parcours initiatique de la jeune Rameau… En résumé, les nombreuses qualités de cet ouvrage, qui n’est pas sans rappeler « Peter Pan » ou « Pinocchio », nous plongent dans un émerveillement rare où notre part d’enfance est réactivée de façon prodigieuse. En nous faisant voir le monde des humains à travers les yeux de ces petites créatures, soucieuses de se tenir à distance de ces « géants au cœur malade », Phicil nous montre les aspects les moins reluisants de notre nature, tout en conservant une grande fraîcheur d’esprit conjuguée à un humour dépourvu de cynisme qui fera rire de bon cœur. Il ne faut pas passer à côté du « Grand Voyage de Rameau », une des pépites de l’année, et puisque c’est la période, un très très joli cadeau à déposer dans les souliers, petits ou grands…
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