Croke Park - Dimanche sanglant à Dublin
« Croke Park », stade irlandais mythique, est aussi l'autre nom du Bloody Sunday de 1920. Richard Guérineau et Sylvain Gâche s'emparent avec souffle de ce moment où l'histoire des luttes irlandaises percute le sport...
1919 - 1929 : L'Après-Guerre et les Années Folles Iles Britanniques Le Conflit nord-irlandais Le Rugby République d'Irlande Sport
Le 21 novembre 1920 à Croke Park, stade dublinois dédié aux sports gaéliques, eut lieu le premier Bloody Sunday, en représailles d'une opération au cours de laquelle le gang des apôtres de l'IRA avait exécuté 14 espions anglais du Cairo Club. En 2007, dans ce lieu historique, les rugbymen irlandais battent les Anglais 43-13. Le XV du Trèfle salue d'une haie d'honneur les vaincus avant que ces derniers ne leur rendent la pareille, scellant la réconciliation grâce au sport...
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Date de parution | 30 Septembre 2020 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Il y a peu, je lisais Kent State, quatre morts dans l'Ohio, de Derf Backderf. Et voilà que j’enchaine avec une nouvelle évocation historique d’une fusillade perpétrée d’une manière aveugle et disproportionnée par des autorités légitimes et militaires. Et une fois de plus, j’ai été saisi par ce récit. Sylvain Gâche et Richard Guérineau abordent cette évocation historique sous un angle original qui cadre bien avec les objectifs de cette nouvelle collection de Delcourt. Une collection qui veut mêler le sport et l’histoire. De sport et d'histoire, il sera indubitablement question au travers de ce stade de Croke Park, lieu emblématique des sports gaéliques marqué au sang par la tragédie de 1920 mais aussi lieu symbolique de la réconciliation et du pardon (mais pas de l’oubli) via ce match de rugby de 2007. Le récit se développe ainsi sur deux époques et nous permet de détricoter les événements qui mèneront à cette fusillade, de suivre le destin de certaines des victimes mais aussi de ressentir l’émotion, la ferveur, la rage qui animeront le public et les joueurs irlandais durant ce fameux match de 2007, comme celles qui animaient les membres du Sinn Fein durant la guerre d’indépendance irlandaise (la fusillade de Croke Park ayant lieu au beau milieu de cette guerre). Pour vous dire à quel point ce récit m’a emporté, une page illustre le moment durant lequel les hymnes nationaux sont joués avant la rencontre. Rien qu’à lire cette planche, les poils se sont dressés sur mes bras et un frisson a parcouru mon échine. Car pour qui connait la ferveur nationaliste des Irlandais et leur enthousiasme à chanter (et pas seulement leur hymne national), ce passage dégage une force prodigieuse. Bon sang, je peux vous assurer que je les entendais chanter !! Le travail de documentaliste de Sylvain Gâche est impressionnant. Son scénario est à la fois rigoureux du point de vue historique mais aussi prenant par l’évocation des différents destins croisés. Le dessin de Richard Guérineau est, quant à lui, d’une parfaite lisibilité. Les passages d’une époque à une autre sont graphiquement clairs, le rendu des deux époques nous plonge totalement dans les univers évoqués, les nombreux personnages sont suffisamment typés pour éviter toutes confusions. Et cerise sur le gâteau, Richard Guérineau change de trait pour apporter un dernier clin d’œil historique au récit, en usant d’un style plus vieillot au tout début et en toute fin d’album. Enfin, le riche carnet historique joint en fin d’album nous permet d’encore un peu plus approfondir notre connaissance de cette fusillade. En fait, seule la couverture me semble un peu en deça. Je la trouve en tous les cas peu engageante alors que le récit, lui, m’a enthousiasmé. Cet album a fait renaître en moi ce romantisme que je ressentais vis-à-vis de l’Irlande lorsque j’étais adolescent (et oui, je suis de la génération du « Sunday, bloody Sunday » de U2 qui, soit dit en passant n’est pas le même que le Bloody Sunday évoqué ici). La dernière page tournée, je n’ai plus qu’une seule envie : aller me recueillir en ce stade… mais un recueillement à l’Irlandaise, une pinte à la main et le chant aux lèvres ! Seo dhibh a cháirde duan Óglaigh, Cathréimeach briomhar ceolmhar, Ár dtinte cnámh go buacach táid, 'S an spéir go min réaltogach Is fonnmhar faobhrach sinn chun gleo 'S go tiúnmhar glé roimh thíocht do'n ló Fé chiúnas chaomh na hoiche ar seol: Seo libh canaídh Amhrán na bhFiann. (Bon, d’accord, j’ai intérêt à revoir mon gaélique avant d’y aller…) Mais sérieusement, c'est là un très très très grand album !
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