Contrapaso
Contrapaso, comme un chant à deux voix : une enquête au long cours, à contretemps, dans l'Espagne franquiste des années 1950.
1946 - 1960 : L'Après-Guerre et le début de la Guerre Froide Auteurs espagnols Espagne Journalistes La BD au féminin Madrid
À Madrid, en 1956, à la rédaction de La Capital, tout semble opposer Léon Lenoir, le jeune reporter fougueux qui vient de débarquer de Paris, et Emilio Sanz, un vétéran des faits divers, aguerri aux pratiques de la presse dans cet état policier. Ces deux-là ont en commun ce besoin de vérité chevillé au corps et les quatre vertus désignées par Camus qui permettent au journaliste de rester libre même en dictature : la lucidité, le refus, l'ironie et l'obstination. Aidé par la charmante Paloma Rios, illustratrice, le duo remonte la piste d'un meurtre pour découvrir le sort des femmes victimes de la dictature au lendemain de la guerre civile. Avec son suspense et ses rebondissements de grand spectacle, le polar perce surtout le mystère des théories racistes et déterministes de l'idéologie fasciste, en mémoire des crimes de la dictature, dans la perspective de l'héritage.
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Genre
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Public
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Date de parution | 02 Avril 2021 |
Statut histoire |
Série en cours
(chaque tome peut se lire comme une histoire complète)
1 tome paru
Dernière parution :
Plus de 3 ans
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Les avis
Par où commencer? Bon, je me lance... Prix des "Bulles de Sang d'Encre 2022", récompense que je suis attentivement depuis 4 ans, je ne pouvais faire autrement que de m'approprier cette oeuvre. Amateur de romans historiques avant de m'intéresser à la bande dessinée, j'ai eu l'immense plaisir de découvrir que les deux genres étaient réunis dans Contrapaso. Nous sommes plongés dans l'Espagne franquiste des années 50, où le journalisme doit travailler pour servir le gouvernement d'un régime répressif. C'est là que nous faisons connaissance d'Emilio Sanz et Léon Lenoir, deux hommes que tout oppose mais qui fera un duo très attachant. L'enquête commence par la découverte du corps sans vie d'une femme près d'un lac. Le scénario complexe et passionnant nous plonge dans le milieu médical psychiatrique et obstétrique afin de nous peindre un tableau noir de l'Espagne franquiste. Sans vouloir en dévoiler d'avantage, l'histoire s'achève en livrant les prémices du second volet de la série. Le dessin est juste remarquable. Une richesse dans les détails et les couleurs nous laisse le temps d'observer chacune des vignettes de cette bande dessinée. Teresa Valero nous explique à la fin du livre l'application dans son travail des planches où le moindre élément de dessin est recherché. C'est une bande dessinée absolument essentielle pour tous les adeptes de l'Histoire. Étant d'origine espagnole, j'ai certainement eu une lecture plus passionnée qu'elle n'aurait dû l'être. Je m'incline face au travail impressionnant de madame Valero. Mon petit bémol viendrait peut être de la complexité un peu poussée du scénario. En effet, j'ai dû plusieurs fois faire demi tour pour comprendre certains liens. La note maximale n'est pas loin.
Eh bien, il est plutôt chouette cet album. Un dessin semi réaliste et très dynamique, une colorisation elle aussi plutôt sympa : ça se laisse lire facilement. Et d’autant plus agréablement que l’histoire prend le temps de planter le décor, de présenter les principaux protagonistes (l’album fait quasiment 150 pages !). Et qu’elle se développe avec un arrière-plan assez riche. Nous avons ainsi l’occasion de nous plonger dans l’Espagne franquiste des années 1950, très bien reconstituée. Et, au milieu de ce décor assez riche, Teresa Valero (que je découvre avec cet album) nous a concocté une intrigue policière dense, bien fichue, avec l’inévitable d’enquêteurs a priori mal assortis, ici non des flics, mais des journalistes. Surtout le vieux briscard, qui piste un serial killer depuis des années, et se refuse à totalement abdiquer devant les menaces et la censure franquistes (relayées par la police et ses supérieurs). C’est très dynamique, lisible, avec une narration fluide et agréable, comme le dessin donc. L’album conclut bien l’intrigue et l’enquête. Mais la fin reste ouverte et, même si cet album se suffit à lui-même, il est tout à fait envisageable que d’autres albums voient le jour. Ce qui ne serait pas une mauvaise idée après tout, tant le premier album se révèle bien fichu. Note réelle 3,5/5.
J'ai complètement raté cet album à sa sortie mais heureusement l'avis de Ro a retenu toute mon attention et m'a permis de réparer ce loupé. On a à priori la promesse d'un bon polar servi par un chouette dessin : cet album coche toutes les cases pour me plaire. Je me suis lancé sans hésitation. J'ai immédiatement été séduit par le graphisme. C'est esthétique, c'est maitrisé, les planches fourmillent de détails, l'ambiance est au rendez vous et l'immersion est garantie. Il y a effectivement des allures de Blacksad dans tout ça. Ce n'est pas pour me déplaire, bien au contraire. Et la qualité est constante tout au long de l'album. C'est donc un petit régal pour les yeux du début à la fin. Coté scénario on suit une enquête mené par 2 journalistes. Mais le récit ne se limite pas à cette enquête. Le background, politique notamment, occupe une bonne place du récit. Cela contextualise bien l'histoire, cela inscrit cette enquête dans une époque et son environnement. En quelque sorte, cela lui donne du sens. Mais d'un autre coté comme tous ces éléments viennent s'ajouter à une intrigue assez compliquée, car elle implique de nombreux protagonistes (médecins, patients, infirmières, flics, famille des uns et des autres, ... ) cela amène malheureusement une certaine densité pas toujours évidente à suivre. J'ai du revenir plusieurs fois en arrière pour vérifier qui était tel médecin, ou quel personnage avait dit ça. Parfois, dans certains albums, je perçois vraiment ça négativement car ça me donne le sentiment de n'avoir rien compris à ce que je viens de lire. Ce n'est pas le cas ici, mais c'est juste qu'au vu de la densité de l'intrigue, des ramifications avec le passé, et des nombreux protagonistes, je me suis imposé ces retours arrière pour être sûr de ne passer à coté de rien. Bien m'en a pris de m'accrocher car cette enquête m'a tenu en haleine et j'avais hâte de découvrir le fin mot de l'histoire. Final satisfaisant, l'enquête trouve toutes ses réponse et ouvre la porte juste ce qu'il faut pour une suite. Au final je suis emballé par la virtuosité du dessin, satisfait par l'enquête qui tient la route, mais un peu gêné par la densité et la complexité un peu trop élevée. A mon avis, il était possible de faire aussi bien, aussi complet et plus prenant en simplifiant quelques éléments. Il m'en restera un bon moment de lecture, et je ne manquerais pas de m'intéresser aux prochains albums de cette auteure.
Contrapaso est une grande oeuvre. Grande en terme de taille car l'album qui n'est que le premier tome d'une série est de bonne taille et fait plus de 150 pages pour un récit très dense, presque romanesque. Grande aussi en terme de somme de travail et de soin qui lui a été apportée par son auteure, une Teresa Valero dont je découvre ici le talent. Cela se passe à Madrid, sous la dictature de Franco dans les années 1950. Les deux héros sont journalistes, spécialisés dans les faits divers. L'un est un vieux de la vieille, ancien phalangiste désabusé qui se dédie désormais à la recherche de la vérité, notamment sur la mort de femmes tuées par ce qui ressemble à un tueur en série, chose qui n'existe officiellement pas dans l'Espagne Franquiste. L'autre est un jeune homme qui vient de revenir en Espagne après avoir fui en France pour échapper à un passé familial et romantique compliqué. Aussi novice soit-il dans le domaine journalistique, il se révèle lui aussi très motivé par la recherche de la vérité, quitte à braver les interdits, et sa forte personnalité va faire des étincelles face à celle de son collègue imposé. Si ce couple de personnages que tout oppose et qui va finalement apprendre à s'apprécier a des airs de déjà-vu (on pense par exemple au film Seven avec qui il partage une ambiance similaire), on apprécie très vite les personnalités complexes et profondes de ces deux là qui sont loin d'être des stéréotypes et qui ont bien des choses à nous faire découvrir sur leurs origines et motivations. Graphiquement, j'ai aussi très vite été séduit. Le cadre, les décors détaillés, les costumes, la mise en scène et les couleurs m'ont fait penser à Blacksad, avec de vrais humains. Je n'irais pas jusqu'à les comparer pour de bon car Teresa Valero n'atteint pas la virtuosité de Guarnido, mais c'est pour vous dire à quel point son dessin reste admirable, et surtout agréable à lire. Et maintenir ce niveau de qualité sur plus de 150 pages par album, c'est remarquable. L'histoire est complexe et surtout très mature. Nous y sommes dans l'ambiance d'un polar noir, avec une bonne part d'historique en sus. Plusieurs trames narratives s'entremêlent. Au cœur de l'intrigue, il y a l'enquête policière menée par nos deux journalistes puis une femme venue à leur aide, portant sur une série de morts suspectes visiblement en lien avec le milieu médical et notamment le traitement réservé aux lesbiennes durant les débuts de la dictature, puisque évidemment dans l'Espagne de Franco, le lesbianisme est une maladie qui doit se soigner en toute discrétion. En parallèle, nous en apprenons davantage sur le passé de nos héros, et notamment sur les relations familiales du plus jeune des deux, ainsi que sur une ancienne relation tristement avortée. Et surtout, ce qui m'a le plus intéressé ici, c'est la mise en scène et la découverte de l'intérieur de la vie sous la dictature franquiste. J'avais eu une vision assez ample de celle-ci grâce à Carlos Gimenez et ses fameux Paracuellos, Barrio et Les Temps Mauvais, auteur à qui Teresa Valero rend d'ailleurs hommage le temps d'un chapitre. Ici, c'est une autre facette qui m'a été présentée, à la fois plus adulte et moins étouffante, et en même temps toujours pleine d'hypocrisie et de contradictions. On y découvre des espagnols divisés et hésitants, ni totalement dans un camp ni totalement dans l'autre, certains d'entre eux passant même radicalement de l'un à l'autre. On y découvre surtout une Espagne lasse de sa dictature et où l'on sent que l'élite gouvernementale est en train de perdre ses marques. C'est bigrement intéressant et surtout présenté avec beaucoup d'intelligence. L'auteure s'est beaucoup documentée sur le sujet et elle en profite pour mettre en scène de nombreux personnages certes fictifs mais inspirés de personnes et de situations ayant existé. Cela offre un panel de protagonistes très originaux et qui mériteraient presque tous une histoire rien qu'à eux. En même temps, cet aspect adulte et riche en informations du récit se ressent dans la narration qui est parfois intense. Le lecteur doit garder son esprit aux aguets pour bien suivre le déroulement du récit et les nombreuses révélations qui ne se font qu'à demi-mot. D'ordinaire, moi qui ne suis pas amateur de polars, j'ai tendance à m'y perdre quand une enquête complexe accumule les non-dits, mais j'ai trouvé ici que cela passait bien et je m'étais suffisamment bien attaché aux personnages et au contexte pour bien comprendre l'intrigue, et même pour fortement apprécier sa mise en scène parfois cinématographique, avec quelques ellipses surprenantes et pourtant claires et logiques. Comme je le disais en introduction, c'est du grand art, tant sur le plan du dessin que de la narration et de l'intérêt de l'intrigue et des personnages. Et ce qui achève de me surprendre, c'est qu'il ne s'agit que du premier tome d'une série. Il est tellement dense qu'il ferait déjà à lui seul un épais one-shot, et d'ailleurs il contient bien une histoire complète qui se suffit à elle-même. Mais la fin de l'album ouvre la porte vers une suite et je retrouverai avec plaisir ses héros et son cadre si particulier pour de nouvelles aventures et enquêtes.
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