Jours de sable

Note: 3.84/5
(3.84/5 pour 19 avis)

Après Le Retour de la Bondrée (Prix Saint-Michel du meilleur album) et L'Obsolescence programmée de nos sentiments (en collaboration avec Zidrou, Prix d'argent du Japan International Manga Award), Aimée de Jongh signe un récit émouvant, inspiré par des faits historiques et nourri par un séjour sur place.


1930 - 1938 : De la Grande Dépression aux prémisces de la Seconde Guerre Mondiale Agriculture et élevage Auteurs néérlandais BD à offrir La BD au féminin Les coups de coeur des internautes Les prix lecteurs BDTheque 2021 One-shots, le best-of Photographie Prix des Libraires de Bande Dessinée [USA] - Middle West

Washington, 1937. John Clark, journaliste photoreporter de 22 ans, est engagé par la Farm Security Administration, l'organisme gouvernemental chargé d'aider les fermiers victimes de la Grande Dépression. Sa mission : témoigner de la situation dramatique des agriculteurs du Dust Bowl. Située à cheval sur l'Oklahoma, le Kansas et le Texas, cette région est frappée par la sécheresse et les tempêtes de sable plongent les habitants dans la misère. En Oklahoma, John tente de se faire accepter par la population. Au cours de son séjour, qui prend la forme d'un voyage initiatique, il devient ami avec une jeune femme, Betty. Grâce à elle, il prend conscience du drame humain provoqué par la crise économique. Mais il remet en question son rôle social et son travail de photographe...

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 21 Mai 2021
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Jours de sable © Dargaud 2021
Les notes
Note: 3.84/5
(3.84/5 pour 19 avis)
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15/05/2021 | Mac Arthur
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Par Emka
Note: 4/5 Coups de coeur du moment
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Une BD qui prend le temps de raconter, de poser une ambiance, et de nous immerger dans une époque. L’histoire se déroule pendant les années 1930, en plein Dust Bowl, cette période où les tempêtes de sable ont ravagé les grandes plaines des États-Unis. On suit John, un jeune photographe envoyé par une administration fédérale US pour documenter la misère des fermiers, et très vite, son regard change. Ce qu’il pensait être un simple reportage devient quelque chose de plus personnel. Graphiquement, c’est superbe. Les dessins alternent entre des couleurs terreuses, presque étouffantes, et des moments de clarté qui donnent de l’air. Aimée de Jongh joue beaucoup sur les textures et la lumière pour retranscrire cette poussière omniprésente, cette lourdeur qui colle à la peau. Les portraits qu’elle croque sont saisissants, remplis d’humanité, et on sent son admiration pour les photographes de l’époque, comme Dorothea Lange, qui ont inspiré l’histoire. Le récit, lui, avance doucement mais sûrement. Ce n’est pas une BD qui mise sur les rebondissements, mais sur une progression intérieure. John commence par observer, puis il se heurte à des dilemmes : comment rendre justice à ces gens ? Comment raconter leur histoire sans les trahir ? Ces questions donnent toute sa force à l’album, en écho à notre rapport actuel aux images et à leur impact. C’est une lecture qui marque par sa sincérité. Elle ne cherche pas à faire grandiloquent, juste à raconter quelque chose de vrai, avec des personnages qui sonnent justes et des émotions qui restent. Une belle réussite, à la fois visuellement et narrativement.

15/11/2024 (modifier)
Par Simili
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Simili

Il n'est pas évident pour nous d'imaginer ce que pouvait être la vie au début du XXème siècle. Il est encore moins possible d'imaginer que la population américaine pouvait être à ce point en difficulté dans l'entre 2 guerres. Et pourtant c'est bien dans ce cadre, historiquement vrai que ce déroule la fiction d'Aimée De Jongh. "Jours de sable" nous conte l'histoire d'un jeune photographe envoyé au cœur des Etats Unis qui sont touchés par des tempêtes de sables et des sécheresses à répétition. Complétement ignorant de ces choses, je ne peux que louer le travail d'enquête réalisé par l'auteure pour arriver à caler sa fiction dans un contexte réel. La petite documentation en fin d'ouvrage me laisse à penser qu'elle y est arrivée de manière optimale. Le dessin est très plaisant à regarder et j'ai trouvé le choix des couleurs parfaitement adapté. Il n'y a aucune fausse note à ce niveau là. Pour ma part je serai un peu plus indulgent que Gruizzli sur le personnage de John. Son histoire combinée à sa mission et tout ce qu'il en a appris ne m'ont pas choqué. Comme si le Dust Bowl avait balayé ses illusions et enterré ses démons pour lui faire prendre conscience du réel sens de la vie. Sur moi ce point a parfaitement fonctionné. Ce qui a moins fonctionné c'est la fin dont j'ai trouvé l'arrivée très brutale, comme si il avait fallu conclure très rapidement car on manquait de pages. J'aurai préféré un développement un peu plus long de cette partie de l'histoire. "Jours de sable" est un belle BD à offrir et à l'aube d'un changement climatique majeur un bon rappel que nous ne sommes que des grains de poussières face aux forces de la nature. Il conviendrait donc de la respecter un peu plus si nous espérons continuer à pouvoir vivre.

13/09/2024 (modifier)
L'avatar du posteur Triskeriaki

Jours de sable est un one-shot particulièrement travaillé, que ce soit au niveau de la documentation (l'autrice y a passé 4 ans, à voyager et interviewer beaucoup de gens, dont la fameuse "Migrant mother") ou au niveau artistique. J'ai adoré cette BD qui est émouvante et raconte beaucoup de choses sur une période méconnue de l'histoire des Etats-Unis. Jours de sable traite du Dust Bowl, cette région au centre des USA qui pendant les années 30 a subi 10 ans de sécheresse, de tempêtes de sable et de poussière. Plus de deux millions de personnes ont dû émigrer et accepter un travail pénible. D'autres sont morts de faim ou de pneumonie. Ce fléau de poussière est en partie dû à l'agriculture intensive qui a retiré l'herbe des terres. Ainsi, au moindre coup de vent les particules s'élèvent dans les airs et ne retombent jamais, car tout est plat sur des centaines de kilomètres. L'autrice a su retranscrire le caractère dramatique de cette période tragique, via son héros, un jeune photographe qui vient dans l'Oklahoma pour faire un reportage du phénomène. Le contact est difficile, il doit revoir entièrement sa méthode, et on s'attache à ce personnage qui se pose beaucoup de questions sur la moralité de sa démarche. Il s'inquiète pour les habitants, et finalement la photographie passe presque au second plan, tant il est ému par ces familles en déclin, condamnées à fuir ou mourir. Visuellement, c'est généreux puisque Jours de sable contient de nombreuses pleines pages pour mieux décrire l'ampleur du phénomène climatique. J'aime beaucoup l'économie des bulles de dialogue, pour avoir lu beaucoup de BD qui ressemblent à des romans illustrés. La plupart du temps, la page est découpée en trois rangées seulement, ce qui donne beaucoup d'espace pour la mise en scène. Le découpage est plutôt sobre, avec quelques diagonales pour marques des transitions. Des photographies réelles viennent compléter le récit. Ca m'a initié à cette période de l'histoire, je me suis empressé de regarder le documentaire Arte sur le Dust Bowl. C'est un vrai coup de coeur pour moi, j'ai hâte de découvrir le reste de son travail.

07/01/2023 (modifier)
L'avatar du posteur bamiléké

Je n'ai pas lu "Les Raisins de la Colère" et je ne connaissais pas cet épisode de l'histoire américaine liée au New Deal. C'est l'un des nombreux mérites de l'oeuvre d'Aimée De Jongh de me donner l'envie de me plonger dans l'oeuvre de Steinbeck. J'ai trouvé le récit de l'auteure empreint d'une très forte humanité. De Jongh aborde ainsi de nombreux thèmes qui traversent notre actualité avec beaucoup de justesse et de pertinence. C'est paradoxal pour une histoire qui se passe il y a 85 ans. Ainsi dans notre civilisation où l'image est devenue reine à travers les différents média et les réseaux sociaux, De Jongh nous propose une vraie réflexion sur la vérité véhiculée par une photo. Bien des pages majeures de notre histoire contemporaine ont été écrites grâce ou à cause d'une photo qui a bouleversé une partie de "l'opinion" Je pense au Vietnam, à la Roumanie ou à la Syrie par exemple. Mais De Jong à travers ce scénario à forte valeur émotionnelle ajoutée ne se contente pas de créer ce troublant roman d'amour, elle nous propose à partir du patrimoine photographique du Sénat américain une image inhabituelle du Sud profond. Elle nous peint une population attachante et courageuse au "sang fort". Une image qui n'élude pas le problème racial mais qui rappelle une population de migrants climatiques aux yeux bleus. Ce rappel des erreurs inconscientes de nos parents ne peut que résonner très fort face aux défis qui se dressent devant nos enfants. J'ai trouvé le graphisme agréable. D'une facture assez réaliste, il s'appuie sur les photos intercalées dans le récit. Son trait est précis et fin. Ses extérieurs de tempêtes ou les pauvres intérieurs des paysans du Nomansland sont d'un réalisme saisissant et provoquent une atmosphère très crédible. Ma seule réserve porte sur les visages des personnages que je trouve trop poupons pour des conditions de vie aussi difficiles. En conclusion j'ai trouvé cette lecture excellente. Elle propose non seulement une tension dramatique forte mais aussi un récit à base historique très intéressant. Un vrai moment de bonheur de lecture. 4.5

14/12/2022 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Alix

Quel chouette album. L’histoire (fictive) de « Jours de sable » est ancrée dans un contexte historique passionnant, qui nous est présenté dans un mini-documentaire photo en fin d’album : le Dust Bowl, la grande dépression, et le projet photographique controversé de la FSA (Farm Security Administration) pour « montrer » la pauvreté de cette région au reste du pays. Le ton du récit est avant tout humain. John Clark prend ses photos, fait des rencontres, mais surtout se pose beaucoup de questions sur le rôle de son travail, de la photographie en général. La fin m’a beaucoup touché, je me suis attaché à ces personnages qui tentent de survivre et de rester positifs dans des circonstances pourtant difficiles. La narration est légère, avec des grandes cases magnifiques et peu de texte. La lecture est donc aisée et fluide, malgré le nombre de pages. Des photos magnifiques s’intercalent entre chaque chapitre et humanisent encore plus le récit. Un excellent moment de lecture.

06/01/2022 (modifier)
Par fuuhuu
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur fuuhuu

Une véritable claque visuelle ! Dès les premières pages, nous sommes subjugués par des pleines planches magnifiques, puissantes et pleines d'émotions. On sent que rien n'a été fait au hasard. Les détails, les décors, les expressions des personnages, les couleurs,.. tout cela mis ensemble, forme un tout qui dégage un "je-ne-sais-quoi" indescriptible, mais en tout cas, très émouvant et prenant. Concernant le scénario, la aussi, l'auteur est épatant. Nous accompagnons un photographe envoyé faire un reportage photo sur le "Dust Bowl". D'un point de vue historique, l'album est très enrichissant. Ayant 26 ans, je n'avais pas spécialement connaissance de ce point de l'Histoire et j'en ai beaucoup appris. Cette BD m'a également donné envie d'en apprendre plus sur ce phénomène, elle a attisé ma curiosité. De plus, le personnage principal est agréable à suivre. Nous partageons ses questionnements et ses doutes. Nous nous remettons en question avec lui. Il y a une véritable évolution dans sa perception des choses, et la conclusion du héros m'a été très satisfaisante. Enfin, la bd est ponctuée de nombreuses "mini-histoires" grâce aux nombreux personnages secondaires. Cela m'a permis de mieux saisir les enjeux du "Dust Bowl". Je ne sais pas si cet album deviendra culte avec les années, mais dans tous les cas, visuellement c'est un chef d'œuvre. Gros coup de cœur 4,5 étoiles MAUPERTUIS, OSE ET RIT !

18/09/2021 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Blue boy

Cet album très attendu d’Aimée de Jongh est un véritable choc visuel et sensoriel, ce qui en fait assurément un événement pour cette année 2021. C’est à partir d’un fait historique un peu oublié, le Dust Bowl — un phénomène météorologique lié à la sécheresse qui provoqua la misère et la fuite des paysans principalement du Texas, de l’Oklahoma et du Kansas, de 1931 à 1937 —, que l’autrice néerlandaise a conçu seule cette fiction hors normes. Elle s’est inspirée également des nombreuses photographies en noir et blanc, pour certaines très célèbres, témoignant de cette catastrophe inédite et dont une partie montrait les habitants de la région dans une immense détresse. Si John Steinbeck a évoqué dans « Les Raisins de la colère » l’exode vers la Californie de ces populations plongées dans la misère, il n’a en revanche que peu traité la question de ce dérèglement climatique dû à l’activité humaine, peut-être le premier de cette ampleur dans l’histoire de l’humanité. La narration impeccable, faite de longues plages de silence où le dessin prend le dessus, associée à une mise en page aux plans très serrés, souvent en pleine page, nous emporte telle une tornade au cœur de l’histoire. Et si la comparaison est facile, elle n’en est pas moins vraie… Le lecteur est littéralement immergé dans cette atmosphère suffocante aux tonalités oscillant entre le gris beige et le brun orangé. Visuellement, c’est aussi magnifique que la situation des habitants appauvris par la catastrophe n’est tragique, et l’esthétique soignée n’enlève rien à la puissance de l’image. Le cadrage est saisissant, comme si l’autrice avait cherché à nous mettre le nez dans ces vents de sable pour nous faire mieux ressentir l’âpreté d’une situation dont les victimes ont littéralement « mordu la poussière ». Le trait sensible et réaliste d’Aimée de Jongh retranscrit parfaitement les états d’âme de ces gens livrés à eux-mêmes, pris dans la nasse du désespoir et pour une bonne partie captifs d’une terre maudite, sans même avoir les moyens financiers de la quitter… Le jeune héros, John, va vivre, à travers cette première expérience professionnelle en tant que photographe, un véritable parcours initiatique qui va le plonger dans des abîmes existentiels. Très vite, malgré sa jeunesse, le douteval’envahir quant à l’éthique de la fonction qui lui a été assignée par le journal qui vient de l’embaucher : prendre des clichés suivant des thématiques très précises, un rien cyniques dans leur aspect factuel, car déjà à l’époque, le « choc des photos » était nécessaire pour augmenter les ventes. Mais il n’est pas pour autant question de porter un jugement trop sévère sur ces photographies, dont la mise en scène pouvait travestir la réalité pour la rendre plus percutante. Car sans ces témoignages sur pellicule (et ces portraits saisissants, dont certains ont marqué la conscience collective), qu’aurions-nous su de cette tragédie et quelles traces en aurait gardé l’Histoire ? Aimée de Jongh elle-même aurait-elle pu réaliser cet album ? Pourtant, John, ce garçon sensible et empathique, l’est peut-être un peu trop pour exercer un métier se résumant à observer le monde dans sa dureté, où le photographe croit se protéger derrière la froideur mécanique de son objectif… En plus de toutes les qualités narratives et graphiques de ce one-shot, ce qui le rend encore plus marquant, plus prégnant, est la façon dont les faits décrits résonnent puissamment avec les problématiques environnementales de notre époque. On imagine sans peine qu’une telle catastrophe puisse désormais se reproduire sous n’importe quelle latitude, surtout quand l’actualité nous annonce que la côte Ouest du Canada ou la Sibérie subissent des températures approchant les 50° Celsius… Nul doute que « Jours de sable » marquera les esprits pour longtemps et ne passera pas inaperçu. La maison Dargaud, qui l’a bien compris, a doté l’ouvrage d’une qualité éditoriale on ne peut plus seyante, renforcée par un excellent choix visuel pour la double couverture et un minimalisme stylé pour la couverture intérieure. Avec ce petit plus qui n’est rien d’autre qu’une déclaration d’amour à l’objet papier : la cordelette marque-page. Avec une réussite aussi évidente, qui pourra encore oser prétendre que le neuvième art est une affaire de mecs et nier l’importance des autrices ?

10/07/2021 (modifier)