47 Cordes
Se faire caméléon pour mieux soumettre sa proie… Un conte de fées fantastique sur la manipulation et la possession de l’être désiré.
Gros albums
Un jour, une métamorphe tombe amoureuse d’un jeune homme nommé Ambroise. Elle peut changer de forme à volonté, mais des questions finissent par la hanter : quel visage doit-elle incarner pour se faire aimer ? Qui doit-elle être pour conquérir sa proie ? Inconscient de l’obsession dont il est l’objet, ignorant la vraie nature de la créature, Ambroise cherche à acquérir une légitimité au sein de l’orchestre qu’il vient d’intégrer en tant que harpiste. C’est alors qu’il rencontre Francesca Forabosco – cantatrice aussi excentrique que renommée – qui va le prendre sous son aile. Elle lui propose un marché. S’il veut obtenir la harpe de ses rêves, Ambroise devra relever 47 défis. Un seul échec, et l’instrument lui échappe... 47 Cordes est l’œuvre la plus dense et ambitieuse de Timothé Le Boucher. Conçue en deux parties, ce premier tome expose sur près de 400 pages un univers hypnotique, plein de tensions sensuelles et de personnages incarnés. Timothé Le Boucher construit une nouvelle fois un thriller psychologique singulier qui aborde l’obsession et le rapport à l’autre tout en évoquant les travaux de conteurs majeurs tels que Stanley Kubrick, David Lynch, Naoki Urasawa ou Suehiro Maruo...
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Public
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Date de parution | 17 Novembre 2021 |
Statut histoire |
Série en cours
(2 tomes prévus)
1 tome paru
Dernière parution :
Plus de 3 ans
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Les avis
Voila une série intrigante mais qui oscille entre le bon et le moyen, pour l'instant. L'auteur n'en est pas à son coup d'essai et ça se sent : il s'autorise à prendre le temps, développer dans la durée et laisser le lecteur volontairement dans le flou sur plusieurs points. Ça commence par un métamorphe qui semble attiré par un jeune homme, mais l'histoire se construit autour de plusieurs points. C'est avant tout le personnage de Ambroise qui est central au récit, il est mystérieux et mutique, n'aimant pas parler de lui. Le récit le dévoile progressivement, tandis que le métamorphe creuse sa vie et rentre en contact avec lui par plusieurs biais. C'est assez bien mené, avec une progression en tension dramatique qui installe l'univers. Je dirais qu'on est sur la corde raide entre le bien et le moins bien parce que l'auteur garde volontairement des zones d'ombres. Par exemple sur la volonté exacte du métamorphe, même si quelques pistes semblent se dessiner, sur le côté fortuné et excentrique de ces riches toujours prompt à inventer des jeux malsains. Mais surtout, même si plusieurs sujets sont mis en avant (identité, quête existentielle, genre ...) je trouve que rien de concret n'est encore palpable à ce niveau. J'ai un peu peur que l'auteur reste flou dessus et ne vienne jamais creuser ces sujets, ce qui serait dommage. La BD est servie par le dessin de Boucher, impeccable et renforcé par la colorisation au poil, qui accentue l'effet lent et peu bavard de l'ensemble. La lente montée de l'histoire culmine sur des dernières planches qui donnent à penser que la suite sera assez différente, mais l'ensemble prend le temps d'installer l'ambiance et les petits détails. C'est bien présenté et la lecture fut prenante pour ma part. Maintenant, j'attends la suite qui peut soit confirmer l'intérêt que j'ai, soit reste dans le même genre et risque de donner un ensemble trop fade. Je reste sur un 3* prudent, mais j'ai bien envie de découvrir la suite !
L’œuvre de Timothée Boucher (je crois qu’on peut commencer à parler d’œuvre) se révèle de plus en plus originale, tout en brassant souvent les mêmes thèmes (quête d’identité, estime/connaissance de soi, sexualité, genre). Mais il sait se renouveler. Et cette nouvelle série (entamée par un opus de près de 380 pages !) confirme son talent. Graphique d’abord. Sa ligne claire et sa colorisation tranchée donne un rendu à la fois froid et sensuel. Deux choses qui accompagnent très bien l’ambiance développée dans cette histoire. Le fantastique est très présent, mais passe très bien, on l’accepte facilement, avec cette métamorphe qui cherche par tous les moyens à séduire un jeune homme, qui, lui, est des plus rétifs (il en est même énervant à force d’être aussi asocial, mou et indécis). Il faut juste accepter quelques facilités (elle n’a pas beaucoup de temps à consacrer à son travail cette personne, qui surveille ou vit 24 heures sur 24 avec sa cible Ambroise, et en plus d’être métamorphe, elle a un sacré don d’ubiquité quand même !). Mais bon, la lecture est agréable et le cliffhanger des dernières planches nous donne envie de connaître la réaction d’Amboise !
Cette BD est un superbe récit à la fois fantastique, sensuel et empli de suspense, dans lequel le surnaturel se fait une place dans le monde réel à travers deux histoires menées en parallèle, qui s’entrecroisent progressivement et finissent par se rejoindre avec un premier tome qui se termine sur un « cliffhanger haletant » qui ne donne qu’une envie : ouvrir le 2ème tome. Le personnage d’Ambroise, harpiste confirmé aspirant à devenir professionnel est celui qui fait le lien entre ces deux récits : Le premier raconte la façon dont une métamorphe (créature fantastique capable de prendre n’importe quelle apparence) tente de le séduire sans lui dévoiler sa nature, alors que le second décrit l’insertion difficile d’Ambroise dans un orchestre où joue déjà sa sœur percussionniste. La formation musicale est traversée de sourdes tensions en raison notamment des agissements d’un corbeau malveillant et des rivalités, conflits ou attirances dans l’orchestre. Les interactions entre personnages (humains ou fantastiques) sont très riches de désirs exprimés ou refoulés, de sentiments généreux ou plus obscurs qui créent mystère et suspense. Les personnages eux-mêmes sont finement dessinés dans toutes leur diversités. Un des autres intérêts du récit est de laisser beaucoup de zones d’ombre et de mystère sur les nombreux personnages principaux et secondaires dont l’on découvre peu à peu certains secrets ou motivations, alors que d’autres restent dans l’ombre au moins pour le premier tome. Ainsi par exemple, Ambroise reste froidement indifférent à toutes les variantes d’incarnations classiques de la séduction (de la pin-up à la sportive en passant par la fille d’à côté ou la lectrice…), et c’est par un jeu de billard à deux bandes inattendu et surprenant que se révélera à lui celle qui correspond à son attente profonde : une femme plus grande que lui dans tous les domaines : que ce soit par sa reconnaissance artistique internationale, sa force de caractère, sa maturité d’âge, l’amplitude généreuse de son corps… sachant qu’une possible clé sur l’explication de cette correspondance nous est donnée ensuite plus loin dans le récit. L’histoire joue avec virtuosité sur les thèmes des relations multiples de l’amour et du désir, de la vérité et de la dissimulation, de la confiance et de la trahison... L’illustration est très réussie : les dessins fins et précis de Thomas Le Boucher sont aussi excellents lorsqu’ils représentent le monde « normal » avec finesse et réalisme, que lorsqu’ils dépeignent l’intrusion du fantastique dont certaines scènes sont dignes de certains tableaux de Jérôme Bosch, ou lorsqu’il représentent des extraits (souvent très drôles) du carnet à dessins d’Ambroise qui illustre les moments importants de sa vie. La qualité des dessins est mise au service d’un scénario découpé de façon vive et dynamique, très cinématographique.
Une excellente découverte qui ne dépasse jamais les limites du ridicule ou de l'absurde. Une inspiration de l'imaginaire intéressante et des personnages glauques à souhait qui m'ont parfois rappelé ceux de Sandman. Ne manquait plus que la musique pour accompagner ces illustrations lyriques ! Hâte de découvrir le tome 2 mais à la fois moins hâte de voir s'achever cette histoire !
Fan des précédentes BD de cet auteur, j'espérais beaucoup de celle-ci et ma déception n'en est que plus grande. L'histoire est d'une débilité inouïe, bourrée de clichés plus idiots et faciles les uns que les autres. Structure narrative incohérente. Aucune immersion possible tant les personnages sont lisses et sans relief. L'aspect malaisant est purement artificiel, sans aucune justification narrative. Je n'ai même pas réussi à terminer l'album, ce qui est très rare. Je déconseille absolument.
Depuis sa découverte par le grand public avec Ces jours qui disparaissent, j'aime énormément le dessin de Timothé Le Boucher et l'originalité de ses histoires, et pourtant j'ai toujours un malaise à leur lecture que j'arrive mal à définir. Dans le cas de 47 cordes, ce malaise, je le ressens avant tout dans la structure des protagonistes. J'ai l'impression qu'ils jouent tous un rôle, qu'ils sonnent faux, ou trop théâtral. D'un côté, nous avons une société humaine faite de jeunes urbains aux comportements de grands adolescents, de femmes aux caractères très marqués, d'hommes aux comportements efféminés, tous ou plus ou moins artistes, qui me donnent le sentiment d'être un gros bourrin poilu bourré de testostérone en comparaison. Et de l'autre côté, nous avons le fantasme d'une société cachée d'ultra-riches non-humains manipulant en secret la race humaine, avec des soirées qui sont des versions extrêmes de celle du film Eyes Wide Shut où hommes et femmes y servent ni plus ni moins que d'objets décoratifs ou d'ustensiles. Cela sonne artificiel à mes yeux, trop cliché par bien des aspects. Mais en contrepartie, il y a déjà cet excellent dessin mais aussi un scénario plein d'originalité, qui utilise une trame fantastique pour jouer sur les relations humaines, mais aussi sur la relation ambigüe d'une dangereuse créature fantastique vis-à-vis du héros, une relation faite de jeu, de séduction et peut-être finalement d'un étrange amour. Si je n'aime pas forcément les personnages, la cantatrice hautaine me révulsant et le héros mollasson m'agaçant, j'ai été intrigué par l'évolution de leur relation et où l'auteur allait nous mener. De même, la relation avec les autres protagonistes, amis et proches du héros, présente plusieurs sous-intrigues intéressantes qui m'ont maintenu en haleine. Et puis il y a la fin du premier tome qui opère un revirement de situation inattendu pour ma part et qui me donne envie de savoir comment l'intrigue va évoluer dans le tome suivant. Bref, je réserve encore mon opinion en attendant de lire la suite car pour le moment, j'hésite entre attirance et rejet envers cette BD.
Il n’est pas si évident d’appréhender la première partie de cette œuvre, certainement la plus ambitieuse de Timothé Le Boucher, qui s’était fait remarquer il y a quatre ans avec Ces jours qui disparaissent. Avec ce nouvel opus, l’(encore) jeune auteur ne fait que confirmer sa singularité. Le plus délicat, c’est d’émettre un jugement définitif sur une production non achevée. Car si « 47 cordes – Première partie » a beaucoup de qualités, on peut ne pas être totalement satisfait de ce tome introductif qui comporte quelques petits défauts. La meilleure option, pour en parler le mieux possible, est sans doute de distinguer la forme du fond. La forme d’abord. Sous ses dehors froids et académiques, le dessin de Timothé Le Boucher recèle une vraie singularité. Un peu plus éloignée de ses influences « manga jeunesse » par rapport à ses opus précédents (faut-il y voir un signe de maturité ?), sa ligne claire très fine possède une élégance et une sensualité rare. Dans sa tournure cinématographique, le cadrage millimétré permet au lecteur d’avoir, au-delà des textes, une grille de lecture parallèle où les silences ont leur place, au même titre que les expressions faciales ou les postures des personnages. Et que dire de ces splendides pleines pages où s’épanouit tout le talent graphique de Le Boucher ? Mais le dessin ne serait rien sans l’univers intérieur très personnel et très riche de l’auteur, qui déploie ici des trésors d’imagination pour nous embarquer dans un étrange voyage aux accents ésotériques, où le réalisme du quotidien côtoie le fantastique le plus débridé, où la folie douce s’allie avec un onirisme vénéneux voire cauchemardesque. Et comme rien ne semble avoir été laissé au hasard, les couleurs désaturées et délicates passent harmonieusement des tons froids aux tons chauds en fonction des ambiances. Nous allons donc suivre une partie de cache-cache amoureux entre une métamorphe, créature mythique un brin diabolique qui peut changer d’apparence à son gré, et un jeune musicien investi dans son art. Dans l’espoir de séduire ce dernier, celle-ci va s’incarner successivement en plusieurs femmes. Le jeune étudiant, discret et bien fait de sa personne, semble indifférent à la cour assidue de ces dames (qui sont en fait une seule et même personne), tout concentré qu’il est sur son objectif ultime : se procurer la harpe de ses rêves. Pour cela, le jeune homme, peu argenté, doit faire des économies. Sautant sur l’occasion, la métamorphe va ainsi endosser le corps d’une richissime cantatrice pour tenter de le mettre à sa botte, en lui promettant une série de 47 défis, soit le nombre de cordes d’une harpe. S’il les réussit tous jusqu’au 47e, l’instrument sera à lui ! Si la trame narrative semble assez simple en apparence, elle est émaillée de plusieurs circonvolutions autour du principal protagoniste, dont la vie quotidienne a pour théâtre ses séances d’escalade, où il fera connaissance de Thomas (une des nombreuses incarnations de la métamorphe...), et l’orchestre qu’il intègre grâce à sa sœur. Des rivalités liées à la place occupée au sein de l’orchestre opposent le groupe des Zodiaques et le groupe des Quotas, baptisé ainsi du fait que ses membres ne sont pas « représentatifs de l’orchestre » du fait de leur particularité physique ou de leur orientation sexuelle. Les nombreux personnages ont le mérite d’être bien campés pour la plupart, ce qui permet sans doute de ne pas s’égarer complètement dans un récit déjà passablement touffu. Certes, on a bien compris que Timothé Le Boucher souhaitait prendre son temps pour poser le cadre de son histoire, et injecter une bonne dose de mystère, notamment avec ces silhouettes silencieuses qui apparaissent au fil des pages et semblent constamment en train d’épier Ambroise, ainsi que quelques passages étourdissants comme ce sabbat charnel organisé dans le château de la cantatrice, acmé hallucinatoire du livre qui ferait passer « Eyes Wide Shut » pour une gentille réunion Tupperware. Tout cela fonctionne plutôt bien pour retenir le lecteur, qui ne peut être que fasciné, malgré un rythme qui tend à retomber puis à s’étirer, sans doute le point faible de cette première partie. Le thème récurrent des œuvres de Timothé Le Boucher a trait à l’identité dans tous ses états, de sa construction (Dans les vestiaires) à sa dissolution (Ces jours qui disparaissent) en passant par la schizophrénie (Le Patient)… Ici portée sous les projecteurs du genre fantastique, elle traite de l’identité multiple et de la manipulation visant à posséder autrui, dans un jeu de prédation sexuelle entre la cantatrice, pieuvre aux milles visages, et sa proie, le jeune adonis qu’est Ambroise. De façon plus sous-jacente, c’est l’identité hors des conventions qui est évoquée : sexuelle, en particulier à travers le personnage de Lucien, qui prétend faire du « drag », ou lors de la fameuse messe partouzarde où le brouillage du genre joue à plein, mais aussi physique en ce qui concerne Charlène, atteinte d’achondroplasie (une maladie des os). Le message sur la nécessité d’affirmer sa singularité lorsqu’on n’est pas dans la norme, est pile poil dans l’air du temps. On préférera attendre la deuxième partie pour se prononcer définitivement, mais ce premier volet, malgré ses quelques longueurs, laisse présager une suite où tout est possible, car on en est sûrs désormais, Timothé Le Boucher ne viendra jamais là où on l’attend. Une seule chose est certaine avec ce conte de fées — ou plutôt de sorcières —, à la fois perturbant et d’une modernité audacieuse, cet auteur, qui confirme son originalité à chacune de ses publications et impose ses propres codes, ne saurait laisser indifférent.
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