Léon le Grand
Le dernier rempart face aux invasions barbares ?
Attila, Gengis Khan et les Hordes Au temps de Rome et de l'Empire Romain Biographies La BD au féminin
Au Ve siècle de notre ère, le pape Léon le Grand, qui règne fermement sur son troupeau alors que l’Empire romain se désagrège et s’effondre, est une figure centrale de la papauté. Imposant la tradition avec force et détermination, il contribue à structurer l’Église et impose le choix de Rome comme siège incontestable du Christianisme. Ses sermons, ses lettres, sont toujours aujourd’hui consultés et restent une référence. À ce titre, Léon est l’un des pères de l’Église. Mais plus encore, lorsque le peuple de Rome se retrouve désarmé devant l'avancée barbare, alors que l’Empereur est incompétent ou même a pris la fuite, Léon ira affronter tant Attila et sa horde de Huns, que Genséric, le terrible chef vandale... L’empire s'effondrant, le pape reste le seul pouvoir auprès duquel les romains, terrifiés, cherchent refuge.
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Date de parution | 10 Avril 2019 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Vous êtes étranges, vous les chrétiens. Vous adorez des perdants qui ont été mis à mort. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il s'agit d'une reconstitution de la vie de Léon Ier le grand de l'an 452 à l'an 455. Sa première édition date de 2019. Il a été réalisé par France Richemond, médiéviste, pour le scénario, Stefano Carloni pour les dessins, et Luca Merli pour la couleur. Il comporte quarante-six planches de bande dessinée. En fin d'ouvrage, se trouve un dossier écrit par Bernard Lecomte, développant le contexte historique dans lequel a vécu le quarante-cinquième pape : le déclin de l'Empire romain, Un pouvoir impérial en déconfiture, La primauté de Rome, Que sait-on de Léon ?, Léon triomphe à Chalcédoine, La lutte contre les hérésies, le face-à-face avec Attila, Après Attila, Genséric, Ce qui reste de Léon. À Milan, des barbares à cheval, poursuivent des citoyens et les exterminent avec leur épée : c'est un massacre ! Quelques temps auparavant, à Ravenne, dans le palais de l'empereur d'Occident, Valentinien III reçoit le vénérable Léon, évêque de Rome. Avant que l'hôte ne soit autorisé à entrer, la discussion s'engage entre l'empereur, son épouse Licinia Eudoxia et Honoria la soeur de Valentinien. Son épouse lui reproche de ne pas s'intéresser à la religion, de ne pas avoir l'envergure de son cher père, l'empereur d'Orient qui a tant lutté pour la Foi, que son manque d'ambition a pour conséquence que l'empire restera éternellement divisé entre l'Orient et l'Occident. Il rétorque qu'il n'a peut-être pas d'envergure, mais qu'il est vivant, alors que son père Théodose vient de se tuer bêtement, d'une chute de cheval. Elle réagit : il aurait pu en profiter pour réclamer l'empire d'Orient puisqu'elle est la seule héritière, au lieu de laisser sa tante Pulchérie se saisir de la pourpre avec Marcien, son époux fantoche. Il décide de faire entrer le pape Léon premier. Le pape l'informe que c'est un jour heureux : le concile de Chalcédoine que la défunte impératrice Galla Placidia souhaitait tant a rétabli la pureté de la Foi. Licinia en rajoute : la mère de l'empereur savait, elle, que le destin de l'empire est lié à celui de l'Église. Léon premier synthétise les faits : une grave hérésie est venue du moine Eutychès, supérieur d'un puissant monastère de Constantinople. Sa réputation de sainteté et d'ascèse rayonnait dans tout l'Orient, pourtant il s'acharnait dans l'erreur monophysite. Eutychès refusait de croire que le Seigneur Jésus ait une âme humaine. Il la jugeait incompatible avec sa divinité. Honoria rappelle que l'empereur Théodose avait tout fait pour protéger ce moine. Jusqu'à convoquer un concile dans le seul but de faire lever l'excommunication lancée contre lui. Concile où l'on refusa la parole aux légats du vénérable pape Léon, et où Flavien, le patriarche de Constantinople, fut arrêté violemment en pleine séance. Les rappels théologiques continuent ainsi jusqu'à l'irruption d'un soldat qui les informe qu'Attila et ses Huns sont en train de massacrer les romains dans la cité de Milan. Un défi ambitieux : une reconstitution historique, devant en plus évoquer la Foi catholique puisqu'il s'agit d'un pape. le lecteur habitué des bandes dessinées à caractère historique s'est déjà forgé son horizon d'attente : des dessins descriptifs, avec beaucoup de dialogues ou d'exposition à rendre vivants, quelques exagérations romanesques dans les prises de vue, une nécessité contraignante pour la scénariste d'exposer de nombreux éléments historiques dans une pagination restreinte, également par le biais de cartouches. La première séquence comporte deux pages consacrées au massacre des habitants de Milan par les Huns. La prise de vue est dynamique, avec des angles et des cadrages accentuant l'impression de mouvement par des plongées et des contreplongées, de la violence. Il n'y a que quatre phylactères très courts pour laisser la place à l'action visuelle. La seconde séquence se déroule sur six pages, des discussions en deux parties, d'abord entre l'empereur, sa sœur et son épouse, puis avec l'interlocuteur supplémentaire qu'est le pape Léon. L'artiste met en œuvre un réel savoir-faire, avec une forte implication pour que la prise de vue ne se limite pas à une simple alternance de champ et contrechamp. Il ne lésine ni sur la représentation des arrière-plans, ni sur les angles de vue travaillés, avec par exemple une vue de dessus de la salle du trône pour établir la configuration de la pièce. La scénariste entremêle les informations avec l'état d'esprit des personnages, faisant ainsi passer leurs émotions. La narration s'avère vivante, retenant l'attention du lecteur. Au vu du titre et du sujet, cette bande dessinée attire le lecteur qui y vient en toute connaissance de cause : un récit historique sur un moment précis de la vie du quarante-cinquième pape, dans un contexte bien défini. Pour autant, les auteurs doivent s'adresser aussi bien au néophyte qu'à celui qui dispose déjà de quelques notions. Pour être crédible, le dessinateur doit être en mesure de proposer des visuels plausibles, et de nature descriptive, ce qui induit un bon niveau de recherches de références historiques, ainsi qu'un degré de détails suffisant, sans devenir trop pesant. S'il a déjà lu d'autres bandes dessinées historiques, le lecteur se retrouve très favorablement impressionné par l'investissement de Stefano Carloni pour donner à voir cette époque. le lecteur prend le temps de savourer les différents lieux et leurs aménagements : la salle du trône de Valentinien III avec son dallage, ses colonnes, son plafond, le camp des Huns et leurs tentes, celle d'Attila où il reçoit le pape, les meubles, les tapis, les plats et les mets servis, l'extérieur du palais impérial à Rome, sa piscine pour les bains, le port de Rome alors qu'arrivent les navires de la flotte de Genséric, roi des Vandales et des Alains, la grande place de Rome, l'étude dans laquelle Léon dicte ses missives et rédige ses sermons, etc. le dessinateur ne se contente pas de représenter le décor dans la première case de chaque séquence, puis de laisser les fonds vides au bon soin du coloriste : il les représente dans presque toutes les cases, ce qui permet au lecteur de se projeter dans chaque lieu, d'avoir à l'esprit où se déroule chaque scène, de découvrir d'autres aspects du lieu dans les cases suivantes en fonction des mouvements de caméra. D'une manière tout aussi solide et documentée, la scénariste dose habilement les informations historiques et leur exposé, avec des moments faisant ressortir la personnalité ou l'émotion des personnages. le lecteur n'éprouve jamais la sensation de se perdre en route, ou de passer à côté des enjeux. La scène d'ouverture établit visuellement qu'il s'agit d'éviter que Rome et ses habitants ne subissent le même sort que Milan et les milanais. Les personnages historiques bénéficient d'une présentation savamment dosée pour être définis, sans jamais avoir l'impression de lire une fiche dans une encyclopédie. le lecteur fait ainsi connaissance avec Valentinien, son épouse Licinia Eudoxia, sa soeur Honoria, le pape Léon, Flavius Aetius, Attila, le sénateur Flavius Bassus Hercolanus, Dame Lucina et son époux, etc. Dans le même temps, il prend note de ceux qui sont évoqués lors de conversation : Priscillien (340-385), Marcien (392-457), Pélage (v. 350 - v. 420), etc. Leur mention se fait avec ce qu'il faut d'informations pour qu'il ne s'agisse pas d'une liste désincarnée, sans devenir trop pesant. Lorsque se produit le face-à-face promis par le titre, le lecteur situe aussi bien Attila en tant que chef de la horde des Huns, et les enjeux pour lui, que le pape Léon, d'où il vient et sa foi. L'entretien s'avère passionnant, sans que les auteurs n'aient besoin de recourir à une dramatisation artificielle ou appuyée. L'évocation d'un moment de la vie d'un pape ne s'arrête pas à une reconstitution historique de nature politique : le lecteur attend également que soit évoqué l'Église et la Foi. La scénariste n'occulte pas cette dimension, sans faire ni œuvre de prosélytisme, ni se montrer moqueuse. Elle établit l'Église comme une force politique indissoluble de l'unité de l'empire. Elle ne se limite pas à ça : elle intègre le fait que le pape est le chef de l'Église et le montre à l’œuvre. Il ne s'agit pas de le montrer accomplissant les rituels catholiques : elle met en scène son apport décisif à l'unité de l'Église en luttant contre les hérésies. À nouveau, pas besoin d'être versé dans l'histoire du dogme catholique pour comprendre les enjeux. La narration comporte les éléments nécessaires à la compréhension d'hérésies comme le monophysisme, le pélagianisme ou le manichéisme. Libre au lecteur de continuer en allant chercher de plus amples informations dans une encyclopédie. Après avoir parcouru le dossier en fin d'ouvrage, il prend mieux la mesure de la qualité d'écriture et de narration de la bande dessinée : ce texte vient étoffer ce qui est exposé dans la bande dessinée, attestant qu'elle contient bien tous les éléments essentiels. Parfois, un lecteur doute que les auteurs parviennent à tenir leurs promesses, tellement le projet est ambitieux. Ici, il vient pour découvrir qui fut le pape Léon premier, pourquoi il a laissé une trace dans l'Histoire, et dans quelles circonstances il s'est retrouvé face à Attila, sans forcément nourrir un goût prononcé pour la religion. Il reconnait bien les spécificités propres à la majeure partie des bandes dessinées historiques : dessins descriptifs pour donner de la consistance à la reconstitution, et volume d'informations important. Il se rend vite compte que dessinateur et scénariste se montrent très compétents et investis pour réaliser des planches sans dramatisation artificielle ou arrière-plans sporadiques, avec un dosage de l'information remarquable. Les personnages historiques sont animés par des motivations et des émotions réelles, tout en restant cohérents avec la vérité historique. le rôle de l'Église est au cœur du récit, ainsi que l'importance du pape, sans prosélytisme, tout en établissant les enjeux tant politiques que théologiques de l'institution. Remarquable.
Je n'avais d'Attila que la vision de ses hordes hunniques s'opposant à Aetius dans les autres Bd que j'avais lues sur lui, tout comme dans le film Attila fléau de Dieu, où Anthony Quinn incarnait le roi Hun. D'autre part, je connaissais peu ou pas le pape Léon Ier, et encore moins le rôle capital qu'il a joué, ce personnage ne figure pas dans le film, ni dans le volume de Histoire de France en Bandes Dessinées qui est consacré aux grandes invasions barbares du Vème siècle. J'ai donc découvert réellement ce pape grâce à cet album issu de cette collection consacrée aux grands papes de l'Histoire. Léon Ier est considéré comme le dernier rempart face aux invasions barbares, c'est une figure centrale de la papauté, il va renforcer les fondations du christianisme, et ce qui est extraordinaire, c'est qu'un religieux ait réussi à repousser le grand roi des hordes barbares qui ont déferlé sur l'Europe de l'ouest (Gaule et Italie) rien qu'en parlementant. La rencontre entre Léon Ier et Attila a d'ailleurs été immortalisée par le peintre Raphaël sur commande du pape Jules II en 1514, le peintre situe la scène à Rome alors qu'elle a eu lieu près de Mantoue, c'est une fresque monumentale qui figure dans le palais du Vatican. C'est donc un bon album qui rend bien compte de tous ces faits, même si certaines connaissances en théologie peuvent être utiles pour la compréhension globale, parce que cet acte de négociateur comporte des tas de manoeuvres avant d'aboutir ; le dossier complémentaire en fin d'album décrypte un peu tout ceci. On sait aussi que les moines et les scribes ont considérablement noirci le personnage d'Attila pour plonger les chrétiens dans la crainte, exagérant sa férocité et son rôle de roi impitoyable et assoiffé de sang, beaucoup d'historiens modernes ont fait des relectures du personnage, on sait que c'était un roi avisé et un politique plutôt doué, ça corrobore le fait que Léon Ier ait pu argumenter avec lui en lui suggérant d'épargner Rome. Le dessin de Stefano Carloni est soigné dans le découpage et les cadrages, pratiquement aussi bon que sur Clémenceau et Sinclair, j'aime ce genre de dessin qui correspond à ma conception d'une Bd historique. Cette collection semble intéressante, d'autres volumes existent ou sont prévus comme ceux consacrés à Clément V (les Templiers), Alexandre VI (les Borgia), Pie VII (opposé à Napoléon), ces albums peuvent grandement m'intéresser.
France Richemond délaisse un temps le XVème siècle par lequel je l’avais connue (entre autres avec sa belle série Le Trône d'argile), pour traiter de l’Antiquité finissante, l’écroulement de l’Empire romain d’occident, en intégrant cette nouvelle et prolifique collection historique de chez Glénat, qui présente, en partenariat avec les éditions catholiques du Cerf, les « grands » papes. J’avais découvert cette collection avec Saint Pierre, qui ne correspondait pas selon moi aux critères de cette collection, mais en attendais davantage de ce Léon le Grand, car l’arrière-plan historique est à la fois plus riche et bien plus documenté. Et, accessoirement, c’est vraiment un pape (mais c’est une autre histoire – voir mon avis sur Saint pierre). Je sors avec une impression mitigée de ma lecture. D’abord parce que l’on sent trop dans certains passages et dialogues (mais aussi dans le dossier final) la patte du Cerf, une vision historique certes, mais très chrétienne. Même si l’on peut relativiser cela, en disant que le portrait dressé de Léon est quand même fidèle et crédible dans les grandes lignes. Effectivement, dans cette période charnière de l’Histoire de l’occident, l’Église a réussi à « sauver sa peau », malgré les invasions barbares et les nombreuses hérésies qui la menaçaient. Si un fort ancrage peut l’expliquer, la personnalité de Léon y est aussi sans doute pour quelque chose. Ensuite justement, ce qui me laisse sur ma faim, c’est cette période même, que j’espérais mieux utilisée. Et là je suis plus déçu. Je n’ai par exemple pas compris pourquoi les auteurs ont fait le choix de ne pas traiter de la période précédant les premières incursions des Huns ou des peuples qui les précèdent ou qui les accompagnent, et en particulier la bataille des Champs Catalauniques, le rôle joué par Aetius à ce moment. Tout ça est très rapidement évoqué, mais cela me frustre. Mais ça n’en reste pas moins une lecture que j’ai trouvée plus intéressante que celle du premier opus de la collection que j’avais lu autour de Saint pierre.
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