Le Poids des héros
Prix Landerneau de la BD 2022 Une majestueuse et foisonnante recomposition de son enfance par David Sala
Autobiographie Casterman Ecole Emile Cohl Enfance(s) Futurs immanquables Les prix lecteurs BDTheque 2022 Lyon One-shots, le best-of Prix Landerneau
Dans Le Poids des héros, David Sala retrace sa trajectoire personnelle très tôt marquée par les figures tutélaires, mais non moins écrasantes, de ses grands-pères, héros de guerre et de la résistance. En convoquant son point de vue de petit garçon, il nous plonge dans une majestueuse et foisonnante exploration de l'enfance et de l'adolescence. Le recours à l'imaginaire permet d'approcher les zones d'ombre et les failles à bonne distance, tout en recomposant un parcours d'apprentissage et de transmission universel pour le lecteur. Sans oublier la saveur impérissable des courses en vélo, de la découverte des premiers morceaux de rap US, des premiers temps d’initiation artistique à l'école Emile Cohl.
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Date de parution | 19 Janvier 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
David Sala réalise une très belle mise en page, aux couleurs et au trait franchement maitrisé. On sent que David Sala s'ingénie à rendre les portraits des membres de sa famille, tout en nous gratifiant d'un visuel coloré qui rend l'ensemble très agréable et maitrisé lors de la lecture. Maintenant, la BD est assez difficile à noter parce que j'ai lu l'ensemble avec un vrai intérêt et que j'ai apprécié celle-ci, sauf que je n'aurais pas grand chose à en dire et sans doute pas tant à en tirer. C'est l'histoire du grand-père de l'auteur, mais aussi son récit à lui (ce qui le fait clairement lorgner vers le récit autobiographique selon moi) et l'ensemble porte sur ce que nous apportent nos ancêtres, ce qu'on en garde et ce qu'on redonne. C'est intéressant, mais la BD semble osciller entre raconter la vie du grand-père et le récit autobiographique, sans jamais vraiment trancher. La première partie est clairement distincte de la seconde là-dessus et les deux ne sont pas entremêles dans le cœur du récit. On a également le rapport avec la mère de Sala, ainsi que ses débuts dans la BD. C'est dommage de ne pas avoir resserré sur son sujet, parce qu'il y a de bonnes interrogations dedans (comme le fait de sentir un poids de culpabilité lorsqu'il vite certaine chose, les mettant en rapport avec ce que son grand-père a vécu). Je n'aurais pas grand chose à dire de plus sur cette BD, c'est un peu dommage. Elle est plaisante, mais pas marquante. Je suis quelques jours après ma lecture et je trouve déjà que l'effet retombe, me laissant finalement assez peu de souvenirs de l'ensemble.
D'abord un gros coup de coeur pour l'illustration, elle est magnifique, les couleurs sont incroyables. Après le choix du titre est parfait pour cette belle histoire. Nous suivons ce petit garçon curieux David grandir et devenir une homme mais sont hypersensibilité le charge du poids de l'histoire terrible de son grand père . La guerre, la résistance, l'emprisonnement, les camps de concentration... Toute cette charge émotionnelle lui est transmise comme un héritage mais ce sera son fardeau... Ça pousse à cette réflexion que nous avons tous à un moment de notre vie, avons-nous le droit à la tristesse alors que nous n'avons pas connu le vrai malheur ? Avons nous le droit de nous plaindre alors que nous avons le ventre plein et un toit sur la tête ? Alors comme David je pense que oui on doit s'estimer chanceux mais chaque période de l'histoire a sont lot de malheur et d'anxiété, nous avons tous le droit de ressentir des émotions négatives, c'est de cette façon que l'humanité arrive à se relever plus haut. David a la charge de transmettre l'histoire de son grand père. Lui aussi devra donner ce fardeau à l'un de ses enfants... Il y a cette très belle phrase au début du livre " lorsque vous écrivez un livre sur l'horreur de la guerre, vous ne dénoncez pas l'horreur, vous vous en débarrassez"
2.5 Encore une fois, je rejoins l'avis de Ro ! Le style de dessin de l'auteur n'est pas ma tasse de thé, mais il va très bien pour illustrer certaines scènes cauchemardesques qui traversent le récit. Sauf que voilà, ce ne sont que quelques scènes éparpillées tout le long du récit. J'ai bien aimé celles qui montraient le passé injuste des grands-pères de l'auteur et le passage où on va apprendre le destin sordide d'un copain de classe de l'auteur. En fait, la majeure partie traitant de l'enfance de l'auteur est pas mal. J'aime cette ambiance où les adultes d'une famille discutent de tout et les enfants essaient de comprendre ce qu'ils disent. Malheureusement, plus j'avançais dans ma lecture, plus je trouvais qu'il y avait des longueurs et j'ai complètement décroché lorsque David Sala devient adulte. C'est pas que je suis insensible à ce qu'il a vécu, mais le résumé parlait du destin tragique des grands-pères et au final on voit surtout la vie de Sala et disons que cela m'intéresse pas trop de savoir qu'au début il avait de la difficulté à trouver du travail chez des éditeurs et que j'aurais aimé qu'il mette plus ses grands-parents en avant.
Voici une bien jolie BD, d'abord par ses stupéfiantes illustrations évoquant nombre de grands peintres (Klimt, Khalo, Chagall, Matisse...), aussi par son sujet à fort potentiel dramatique (l'enfance, les grands-parents, la mort, l'engagement via la guerre civile espagnole et la seconde guerre mondiale...). Il est certain que nombre de lecteurs verront là un chef d’œuvre tant le travail de David Sala est ambitieux, méticuleux et à bien des égards magnifique. D'autres regretteront que Sala ait été dépassé par son sujet et son projet, ne parvenant tout à fait à répondre aux attentes ô combien élevées. Tous salueront un résultat a minima original et d'une indiscutable beauté. Une lecture indispensable donc.
Un univers graphique très frappant qui ressuscite les années 70 et nous fait partager le poids des héros (les grand-parents de l'auteur, l'un revenu d'un camp de concentration et l'autre échappé d'un peloton d'exécution) . C'est le premier album de David Sala que je lis, et je suis soufflée par la capacité d'évocation des images. Qu'il s'agisse des fantasmes de l'enfant entendant ses parents et grands-parents raconter l'époque de la deuxième guerre mondiale, ou les intérieurs aux tapisseries géométriques et contrastées, aux tapis profonds (pour isoler du froid du carrelage en-dessous), au sol verdâtres du couloir, aux fauteuils marrons en velours boursouflés de reliefs, aux devantures de boulangeries en pierres collées, même les posters des tableaux de Magritte, tout remonte à la surface de notre conscience alors que c'était resté enfoui jusque là. La peau tellement lisse de l'enfant confronté au passé lourd et immérité de ses grand-parents, mais tout cela par le filtre des conversations et vocabulaires quotidiens des parents et de leurs amis dans le cocon familial, dans le salon, avec notre regard qui suit le motif répétitif du tapis, en même temps que l'enfant écoute l'électrophone en fond sonore. On perçoit le parlé lyonnais de ses parents, fils d'immigrés espagnol. Ces noms espagnols à rallonge, prononcés avec fierté, dans cet univers gris de la banlieue hexagonale. Le portrait du grand-père jeune, qui se retrouve au grenier du petit-fils, et qu'un autre enfant, la génération suivante, découvre à l'occasion d'un moment d'ennui... Et pour finir, un atout supplémentaire : cette album a la tranche (ou est-ce le dos ? La partie qui reste visible quand le livre est rangé ) rose bonbon, ce qui est un atout non-négligeable pour le retrouver dans une bibliothèque !
Le Poids des héros est une longue autobiographie par le biais de laquelle l'auteur rend hommage à ses deux grands-pères qui ont souffert durant la guerre civile Espagnole puis durant la seconde guerre mondiale. Il les voit comme des héros et se voit lui comme chargé de porter sur ses épaules le poids de leur souvenir et le devoir de le perpétuer et de le transmettre, ce qu'il fait de facto avec cet ouvrage. C'est le graphisme qui fait la force de cet album, en tout cas son originalité. Si je ne suis pas un grand fan du trait de l'auteur et de sa représentation des personnages, il faut avouer que son travail sur la couleur est impressionnant, avec des patchworks très contrastés, le summum étant atteint dès les premiers chapitres dans ces scènes dans un salon bigarré aux tapisseries psychédéliques des années 70 avec des protagonistes portant des pullovers bariolés. Ça va jusqu'à complexifier la lecture de l'image mais elle reste lisible. L’histoire n'est pas inintéressante mais au fur et à mesure qu'on continuait à suivre la vie de l'auteur, je me demandais de plus en plus où il voulait en venir avec tout cela. Il parle finalement plus de lui que de ses grands-parents sans pour autant transmettre un message clair à mes yeux. Paradoxalement, la fin m'a paru un peu basique, attendue : OK, la vie continue, le souvenir s'effacera peut-être un jour mais l'esprit de ces deux hommes se perpétuera dans leur famille et leurs descendants. J'ai suivi le tout avec un peu de curiosité et parce que je trouvais le graphisme intéressant, mais je n'ai pas été passionné et j'ai refermé l'album en étant moyennement convaincu.
La lecture du Joueur d'échecs avait déjà été un choc visuel. L’impression que l’on ressent à la lecture de ce nouvel album est encore plus forte à mon sens. On se demande d’ailleurs si David Sala n’est pas d’ailleurs un peintre dans l’aligner de Gustave Klimt plutôt que d’un dessinateur de BD classique. Les planches sont d’une beauté rare. Même si les amateurs n’achètent pas cet album je les invite toutefois à tourner les pages de cet album chez leur libraire préféré. Mais cet album ne vaut pas uniquement pour sa beauté graphique car l’histoire est vraiment digne d’intérêt : comment vivre dans une famille où votre grand père fut un rescapé de la guerre d’Espagne et des camps de concentration ? Pour sa famille et son petit-fils c’est tantôt un motif de fierté, tantôt un poids car on se réfère souvent au grand homme dans la famille et l’on sent bien que on ne sera jamais tout à fait digne de lui. C’est ça le poids des héros. Et le petit fils c’est David Sala lui-même qui trouvera sa voie dans le dessin. Mais je vous laisse le soin de découvrir l’histoire par vous-même. Et cela en vaut largement la peine.
On comprend vite à la lecture du « Poids des héros » pourquoi l’éditeur a choisi ce format imposant, et ce n’est pas à cause du titre. D’emblée, l’immense talent de David Sala nous submerge autant qu’il nous immerge. Sa maîtrise de la couleur est juste sidérante et ses cases relèvent davantage de l’art moderne, avec une iconographie très seventies mâtinée d’influences fauvistes ou expressionnistes. On pense beaucoup à Matisse, à Chagall et parfois à Munch. On a rarement vu ça dans la bande dessinée, d’autant que le talent de David Sala ne se limite pas à un simple étalage pictural. Celui-ci possède également les codes de l’art séquentiel en nous délivrant à l’aide d’une mise en page aérée une histoire personnelle avec simplicité et fluidité. Ces souvenirs d’enfance qu’il nous narre lui fournissent ainsi l’occasion d’honorer ses ancêtres venus d’outre-Pyrénées, et c’est avec le grand-père maternel Antonio qu’il inaugure son récit. Un grand-père qui se sera battu toute sa vie contre la barbarie et l’injustice et survivra à l’enfer des camps, et dont le dernier combat (et la dernière victoire !) fut mené sur son lit d’hôpital, où il se jura de ne pas mourir avant le dictateur Franco. L’autre grand-père, Josep, le « tarzan catalan », fut lui aussi un combattant de la première heure, et son statut de réfugié le conduisit à s’engager très vite aux côtés de la résistance française, période durant laquelle il rencontra Denise, l’amour d’une vie qui ne s’éteignit jamais. D’un point de vue graphique, la trame principale, qui a trait à l’enfance de l’auteur jusqu’à l’âge adulte, est donc traitée dans un style semi réaliste très pictural. David Sala restitue de façon étonnante l’atmosphère des années 70, tant dans l’aspect vestimentaire que du mobilier. Les nappes à fleurs « moches » prennent soudain une autre dimension, tout comme les « affreux » papiers peints désuets. Les motifs « vintage cheap » qui prêtent parfois à la moquerie aujourd’hui deviennent sous le pinceau de l’artiste de véritables œuvres d’art que l’on admire longuement. Aux côtés de la narration centrale viennent se greffer les récits d’Antonio et de Josep, dans un mode plus onirique (la scène inaugurale relatant la fuite d’Antonio vers la France est juste sublime) avec une tournure plus expressionniste lorsqu’il s’agit de décrire le quotidien dans les camps nazis, où les couleurs franches comme l’enfance semblent tenir à distance l’horreur et l’immonde. Il serait presque embarrassant de dire que visuellement c’est magnifique, mais ce contraste renvoie à l’imagination du garçonnet qu’était alors David, tout en obligeant le lecteur à affronter l’ineffable noirceur de l’âme humaine que les mots ne sauraient décrire. Si le récit traite aussi beaucoup de la mort dans sa trame de base (l’assassinat lâche d’un camarade d’école par un sadique et la disparition brutale de la maman de l’auteur) du deuil et de l’absence, cela n’est jamais pesant pour autant. L’émotion est belle, poignante, jamais larmoyante. Parmi les autres thèmes abordés, il y a la perte de l’innocence (en grande partie liée à la mort du copain), l’écroulement des certitudes et sa « colère archaïque » (le divorce de ses parents et la dépression de son père), mais aussi la question du fameux « poids » du titre, qui impose à l’auteur des problèmes existentiels dans sa vie de père de famille urbain bénéficiant d’un confort douillet, et qui n’a jamais connu la guerre. Que lui reste-t-il pour exister ? La réponse est contenue dans la lecture même du livre… Art et résistance sont intimement liés, l’auteur le prouve ici. Car le stylo et le pinceau, ou toute autre forme artistique, sont aussi des armes de résistance, parfois plus puissantes qu’un fusil. L’art en effet permet de transmettre, de montrer le beau sans nier l’innommable, et c’est peut-être par là que commence la résistance. Marteler sans répit aux nouvelles générations que la démocratie reste fragile (on peut le constater chaque jour à travers l’actualité politique) et que l’état de paix, notamment celle que connaît l’Europe depuis la deuxième guerre mondiale (en tout cas pour les conflits de grande ampleur) n’est jamais acquis sans la vigilance de tous. Et c’est sans doute ce qui permet ici à David Sala de réconcilier sa propre identité d’artiste avec ses aïeux piedestalisés de par leur héroïsme. Avec « Le Poids des héros », David Sala réussit un véritable coup de maître, nous offrant un pur chef d’œuvre. Le tout est équilibré, avec des questionnements pertinents, traités avec une rare justesse, mais surtout avec le cœur. Dans un passage du livre, il évoque la perte d’un œil dans son enfance, à cause d’un méchant virus. Et l’on ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec la virtuosité incomparable de son dessin. Si un aveugle développe ses autres sens comme l’odorat, l’ouïe et le toucher, David Sala, avec son œil unique, fait ressortir deux fois plus fort la beauté du monde telle qu’on aimerait la voir, la beauté contenue dans les toutes petits choses qui échappent souvent à ceux qui ont la chance d'avoir leurs deux yeux. Son album n’est rien de moins qu’une ode foisonnante à la vie, ici magnifiée et émouvante dans toute sa fragilité, grâce à sa propre expérience et celle de ceux qui se battent pour qu’elle soit belle.
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