Dope Rider - Pour une poignée de délires (Dope Rider: a fistful of delirium)
Cow-boy psychédélique.
Les drogues Les petits éditeurs indépendants Séries avec un unique avis
Dope Rider remonte en selle ! Plus de trente ans après une première salve de récits parus entre 1975 et le milieu des années 1980 (voir l’anthologie En attendant l'Apocalypse), Paul Kirchner retrouve son cow-boy fétiche pour une série de récits en une planche. Tout comme les précédentes, ces nouvelles aventures sont prépubliées dans la revue de contre-culture psychédélique High Times et pour l’essentiel, Dope Rider est resté le même, passant ses journées à rouler des joints, fumer des bangs, et courir après ses hallucinations dans des rêveries métaphysiques… Au cours d’une virée dans le désert, il rencontre une déchirure dans la trame de la réalité et l’évite comme si c’était une simple flaque d’eau, non sans nous avoir recommandé de ne pas regarder de trop près les secrets honteux de l’univers mis à nu par une telle trouée ; dans une autre histoire, Dope Rider, à la recherche de son sachet de beuh, se rend sur la lune avec Apollo 11 puis au centre de la Terre, avant de retrouver chez lui Tatty, son fidèle tatou doué de raison ; dans une autre enfin, un coucher de soleil évoque à Dope Rider et à deux de ses compagnons de défonce des mythes des cosmogonies amérindiennes mais aussi les cartoons Looney Tunes. Dope Rider se joue de la perspective comme de la langue et des barrières culturelles. Ses histoires servent en effet de prétexte à Paul Kirchner pour oser innovations graphiques et références artistiques – mais également calembours douteux. Chaque planche est l’occasion d’inventer des paysages oniriques originaux inspirés de la peinture et du cinéma (les westerns de Sergio Leone ne sont jamais très loin) mais aussi de convoquer une multiplicité de références, issues aussi bien de la culture pop récente que de la contre-culture hippie, de la mythologie amérindienne que de l’âge d’or des années 1950. Comme si le projet-même de Dope Rider était de revisiter le patrimoine mythologique américain dans toute sa diversité. Au final, Dope Rider ne s’amuse jamais autant que lorsqu’il renvoie dos-à-dos les élucubrations new age et la réalité. Dope Rider se moque de tout et reste finalement très humain dans son attachement pragmatique à la satisfaction de son besoin de base : se défoncer.
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Date de parution | Mars 2021 |
Statut histoire | Histoires courtes 1 tome paru |
Les avis
Tanibis poursuit sa défense et illustration de l’œuvre de Kirchner. Après une superbe anthologie de ses travaux (En attendant l'apocalypse), dans laquelle apparaissait Dope Rider (que j’avais découvert brièvement dans Contes à rebours), ils lui consacrent un album entier regroupant des histoires publiées plus récemment dans le magazine High Times. Comme d’habitude chez cet éditeur, le travail éditorial est de qualité, et met très bien en valeur le talent de Kirchner. Kirchner bosse pas mal pour la publicité, et ça se sent aussi, dans les cadrages, l’utilisation des couleurs : on a presque l’impression que chacune de ces pages est construite comme une affiche vantant un produit, qui serait Dope Rider. Esthétiquement, c’est vraiment très chouette (colorisation aux petits oignons, dessin réaliste très classique et sans défaut). Comme souvent chez Kirchner, ses cases font référence à Dali, et à un univers psychédélique exacerbé. Il faut dire que Dope Rider est un cow-boy atypique, chevauchant le squelette de son cheval, et consommant tous les dérivés du cannabis. Chaque page de droite propose une sorte d’histoire courte de Dope (avec quelques personnages récurrents : un tatou, une pin-up, un chef indien, etc.), plus ou moins teintée de fantastique, de SF, tandis que celle de gauche propose un simple dessin, mais dont l’ensemble peut se lire comme un flip book et forme une histoire animée de Dope. Mais, si visuellement c’est vraiment très chouette, les histoires de Dope Rider sont la plupart du temps trop courtes, et je suis resté sur ma faim. Il est clair que cela doit passer plus facilement comme un intermède récurrent glissé dans une revue (ou comme pour les précédentes publications du Triton ou de Tanibis où il apparaissait, mélangé à d’autres créations de Kirchner). A noter que Kirchner fait de nombreux clins d’œil à quelques icônes de la culture populaire américaine (John Wayne , Star Wars, certains cartoons, etc.) Un plaisir pour les yeux, une petite déception pour la narration. Je m'étonne juste que cet auteur singulier, à l'univers personnel original et fort, soit si peu lu, ou en tout cas avisé sur ce site. J'encourage les lecteurs curieux à le découvrir !
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