L'Appel de Madame la Baronne
Le dessinateur ardennais et le poète belge s'unissent pour une rêve en noir et blanc.
Absurde Les années (A SUIVRE) Servais
Jean-Claude Servais a bâti "L'Appel de Madame la Baronne" à partir des textes de Julos Beaucarne et a donné à son personnage principal le visage du poète. Les autres protagonistes empruntent, eux, leurs traits à des masques créés par différents artisans. Sous le signe de cette double inspiration. Servais a pétri ensemble les mots et la matière. Et par la magie du verbe, les figures de bois, de grès ou de cuir ont poris vie.
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Date de parution | Septembre 1989 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Je tenais à donner mon avis car je constate, avec regret, que personne ne semble avoir beaucoup apprécié cet ouvrage. Il représente à mes yeux un petit chef d'œuvre de la BD belge, que je classerais au même titre que L'Ombre du Corbeau de Comès ou, dans un toute autre registre, "L'Enfant Penchée" de Schuiten. Je ne connaissais pas bien Julos Beaucarne au moment de découvrir l'œuvre (et je ne le connais pas d'avantage aujourd'hui) mais je n'ai pas eu de mal à me faire happée par l'histoire - que j'ai d'ailleurs relue plusieurs fois. Je ne me risquerais pas à une interprétation exhaustive, parce que je pense que l'art ne doit pas être toujours intellectualisé, mais je n'ai pu m'empêcher de voir de nombreuses métaphores, parfois cyniques, caustiques ou ironiques, à l'égard du monde contemporain. Tout d'abord, on remarque rapidement que seul le personnage principal vit encore en chair et en os. Les autres ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes : bustes de statues animées, personnages masqués, marionnettes de bois et de ficelles, les êtres qui gravitent autour du protagoniste sont tous, d'une certaine manière, en quête d'une humanité perdue. Il en va de même pour la bêbête, une créature un peu niaise, qui court éperdument après le dernier des hommes pour le dévorer vivant (et retrouver, ainsi, un peu de son humanité ?) Cette bêbête, d'ailleurs, est prise peu à peu en affection. Loin d'y voir la décadence de l'espèce humaine, le lecteur y reconnaît plutôt le double du dernier survivant. La bêbête représente ce que le héros pourrait devenir à tout instant du récit, s'il venait à oublier qui il est ; s'il venait à se perdre dans les 'fables', les "croyances", les "récits absurdes" qui circulent autour de lui. Ces fables sont nombreuses : elles concernent les canons esthétiques, l'existence du soleil, ou encore, l'amour. Le héros lui-même court après un amour perdu, mais son parcourt, loin d'une quête chevaleresque, ressemble à une éternelle transgression. Plutôt que de répondre aux énigmes qui lui sont adressées, il préfère lancer des calembours, s'esquiver, user de ruse ! Il s'aventure peu à peu dans une grotte qui n'est pas sans rappeler la caverne de Platon, avant de s'élever, au moyen d'un vélo solaire, vers le ciel nuageux. Là-haut, près de l'astre éternel, il retrouve ses semblables. Je donne le mot de la fin à Julos Beaucarne : "Croyez en l'extase des nuages qui traversent les grands horizons, au petit vent du soir, au cœur de l'été chaud."
« L’Appel de Madame la baronne » fait partie de ces œuvres (il y en a d’autres me concernant, en poésie ou en peinture) que je trouve intéressantes, intrigantes, mais dont j’admets volontiers ne pas comprendre tout ce qu’elles offrent à mes sens. Pour cet album, Servais dit s’être inspiré d’œuvres d’arts (masques, sculptures) à sa disposition. Mais aussi du personnage et de l’œuvre de Beaucarne (que je ne connais pas). Il a donné en tout cas son visage au personnage principal. Pour le reste, un résumé n’est ni souhaitable ni réalisable – y a-t-il d’ailleurs une intrigue au sens où on l’entend généralement ? Beaucoup de lecteurs y ont vu de l’absurde. Je ne sais pas, ce n’est pas ce qui prédomine. J’y trouve davantage un univers très onirique (peut-être un peu foutraque) et très poétique. Avec des rencontres imaginaires, imagées, qui relèvent souvent du surréalisme. Le dessin de Servais est excellent, hyper précis, et le trait fin en Noir et Blanc renforce cette quasi minutie – d’autant plus remarquable que l’histoire est loin d’être aussi « carrée ». Et les cases, remplies de détails, de rencontres improbables (Lautréamont en aurait apprécié certaines) sont pleines de dessins qui ressemblent à des collages (comme ceux de Max Ernst ou de Max Bucaille, réalisés à partir de gravures du XIXème siècle), cet aspect visuel renforçant encore le côté poétique et surréaliste. Un album qui peinera peut-être à trouver ses lecteurs dans le grand public (mais pourquoi pas après tout ?), qui est à feuilleter avant d’envisager un achat. Mais les amateurs du genre se doivent d’y jeter un coup d’œil. Note réelle 3,5/5.
Si l'on n'est pas un adepte de l'univers chanté de Julos Beaucarne et si la fantasmagorie et l'absurde ne sont pas votre tasse de thé alors cette BD n'est pas faite pour vous. Ne le prenez pas mal, j'en fait aussi partie. Nous sommes ici en face de ce que j'appellerais un ovni. Certes il n'est pas dénué de qualité, le dessin de Servais y est pour beaucoup mais c'est tout le reste qui souffre, pour un lecteur lambda, d'un aspect un peu trop tarabiscoté. Certes, les valeurs d'humanisme, de bonté sont là, la poésie aussi est présente mais l'ensemble est à mon sens un peu abscons. Une BD pas simple qui en rebutera plus d'un.
J'aime bien le noir et blanc de Servais. Il devrait le faire plus souvent car c'est merveilleux ! En revanche, je n'ai pas trop aimé l'histoire. Je n'ai pas accroché du tout et je ne suis jamais entré dans l'histoire. Je n'ai rien contre l'absurde et j'aime des auteurs comme Fred ou Forest, sauf qu'avec eux même les trucs les plus bizarres semblent naturels dans leurs histoires et j'accepte comme si c'était normal alors qu'ici j'ai eu l'impression que l'auteur improvise et faisait n'importe quoi donc j'ai été bouche-bée devant des scènes qui ne veulent rien dire. C'est une impression un peu difficile à décrire, mais parfois l'absurde passe et d'autre fois pas du tout.
Ce n’est pas évident du tout de s’immerger dans cet univers fantasmagorique inspiré à Servais tant par l’univers de Julos Beaucarne que par sa propre collection de masques et de sculptures d'amis artistes. Personnellement, je dois avouer être resté très en dehors de ce récit, savourant bien plus l’univers graphique que l’histoire en elle-même. Au niveau du récit, j’ai vraiment le sentiment de n’avoir pas pu saisir toutes les subtilités de ce scénario. En cause, sans doute, ma très mauvaise connaissance de l’univers de Julos Beaucarne, mais aussi un style narratif très évasif. Le résultat à mes yeux, c’est que j’ai face à moi un personnage qui, répondant à l’appel d’une baronne disparue dont il est épris, s’enfonce dans un univers étrange propice à de multiples rencontres. Au niveau graphique, ces multiples rencontres sont autant d’occasions pour Servais de démontrer une fois de plus toute sa maîtrise technique. Les personnages, directement inspirés à l’artiste par des sculptures et des masques qu’il possède réellement, sont souvent attirants, séduisants esthétiquement parlant. Et l’association du trait précis, académique et réaliste de l’auteur avec ces créations bien plus fantaisistes est la cause principale de ma relativement bonne appréciation d’ensemble. Etrange tout de même … et pas totalement convaincant.
Il y a quelque chose de paradoxal dans cette notation et je le sais bien. En règle générale, j'aime plutôt bien les oeuvres de Servais. Je suis réellement admiratif devant tant de virtuosité dans le dessin. En effet, on frise presque la beauté absolue. C'est un bel album à regarder. Cependant, je ne peux pas donner une note plus favorable à une histoire que je n'ai absolument pas compris. L'absurde me fait fuir quand il n'y a pas un semblant de cohérence. Je n'ai pas ressenti de la poésie comme je le peux le ressentir dans d'autres oeuvres. Ce n'est pas parce qu'on emprunte un pierrot que cela va le faire. Néanmoins, je dois reconnaître tout de même un bon verbiage. Cependant, il n'est pas au service d'un scénario, c'est plutôt le contraire. Je reste alors plutôt mitigé à cette lecture.
Je ne suis pas un fan de Servais, mais là je dois avouer avoir beaucoup apprécié cette BD d'autant plus qu'elle m'a marqué (je l'ai lue une fois seulement il y a 8 ans, je crois, et je m'en souviens encore très bien). Elle mêle fantastique, onirique et poésie dans l'univers d'une maison et de cavernes qu'on peut trouver en dessous, où l'on peut trouver tout ce qui compose les rêves et l'imagination. L'histoire garde une part de mystère et il faut y accepter le fantastique comme naturel : il ne faut pas s'attendre là à un scénario complexe et fouillé : ce sont plutôt les errances d'un homme dans un rêve éveillé ou alors dans un monde fantastique et déroutant. En outre, la beauté poétique du tout a su me toucher, et depuis bien longtemps comme je l'ai déjà dit. Bref, une oeuvre originale, belle et sans doute destinée à un public de rêveurs et de poètes (quoique je n'aie rien d'un poète personnellement).
Je n’ai jamais été fana du dessin de Servais, généralement trop détaillé et trop figé à mon goût. Dans cet album son trait possède toujours les mêmes caractéristiques, mais cette fois-ci, en noir et blanc et avec un scénario de cette carrure, ça passe très bien! Julos Beaucarne, je l'aime beaucoup, le poète anarchiste a toujours exercé sur moi une étrange fascination; le genre de gars dont on ne peut s'empêcher de penser qu'il a atteint une certaine plénitude, un stade supérieur d'humanisme et d'humanité. Même s'il n'a pas directement écrit le scénario de cette bd, cet humanisme et sa poésie se ressentent très bien. En partant de certains textes de poète, Servais a écrit ce scenario et s'est visiblement senti porté par un souffle poétique qu'il arrive très bien à communiquer au lecteur. Voici une histoire qui semble n'avoir ni queue ni tête. Les circonstances et les lieux sont flous. Les personnages aussi, on ne sait jamais si l'on a à faire à l'imagination du valet ou si ces créatures existent indépendamment de lui. Rêve ou cauchemar? C'est l'enjeu de cette étrange histoire, envoûtante et stimulante pour nos propres rêves. Quand on referme un album de cette carrure, on reste toujours un moment un peu ébahi, un peu soufflé...et songeur.
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