Pigalle, 1950
Antoine, dit « Toinou », décide de plaquer son Aubrac rural pour le Paris rutilant des années 1950. À 18 ans, il découvre avec stupéfaction les charmes de Pigalle, en particulier ceux des danseuses du cabaret « La Lune Bleue », dans lequel il va travailler.
1946 - 1960 : L'Après-Guerre et le début de la Guerre Froide Aire Libre Gangsters Paris Pierre Christin
Pris sous l'aile du patron, « le Beau Beb », il va ainsi faire la rencontre de personnages hauts en couleur tels que « Pare-brise », le comptable, « Poing-barre », le videur, ou encore Mireille, la vendeuse de cigarettes... Mais à trop fréquenter le monde de la nuit, le naïf jeune homme va vite se retrouver plongé dans de sombres histoires de grand banditisme, dont la violence va profondément changer son existence... Toinou brûlera-t-il son innocence à la lumière enivrante de sa nouvelle vie ? Un grand album « Aire Libre » signé Christin et Arroyo, entre polar et évocation nostalgique du Paris éternel.
Scénario | |
Dessin | |
Couleurs | |
Editeur
/
Collection
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | 08 Avril 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
C'est un niais, il fera l'affaire. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. La première édition date de 2022. Il a été écrit par Pierre Christin, dessiné et mis en couleurs par Jean-Michel Arroyo. Il s'agit d'une bande dessinée en bichromie comprenant environ 124 pages. L'ouvrage se termine avec neuf dessins en double page représentant différents endroits de Paris en 1950 : le cinéma Gaumont-Palace 1 rue Caulaincourt, le Muséum d'histoire naturelle au Jardin des Plantes, le cirque Médrano 63 boulevard Rochechouart, les usines Citroën quai de Javel, le café de Flore 172 boulevard Saint-Germain, le parc des Buttes-Chaumont 1 rue Botzaris, les usines à gaz à la Plaine Saint-Denis, le Pont Royal vu de la passerelle Solférino, l'Île Saint-Lois et le Pont Louis-Philippe. Dans les années 1980, par une soirée pluvieuse, Antoine, la cinquantaine, emprunte le funiculaire de Montmartre. Il sort de la cabine et va se promener dans le quartier, dans des rues qu'il a fréquentées, jusqu'à l'avenue Junot. Bien avant ce temps, il est parti à la fin de l'été, pile le jour de ses dix-huit ans. À part le petit cri de la buse qui le précédait, pas un bruit. Sa seule copine sur le plateau d'Aubrac, celle-là. Peut-être qu'elle avait compris qu'il s'en allait pour de bon ? Les autres gars du buron avaient du mal à y croire eux. Plusieurs années qu'ils étaient tous les quatre là-haut à fabriquer de la tome chaque été. Bouffer du lard rance et du pain rassis en buvant du lait sans jamais voir personne pendant des jours et des jours, ça leur allait. Comme il était le plus jeune de l'équipe, on disait le roul, il était chargé des cochons et des ordures. Mais tout ça, c'était fini pour lui. Fini. Antoine monte à Paris, pour se rendre chez Alric, un cousin bougnat. Pas habitué aux chaussures que sa mère lui a payées à Rodez. Pas habitué à marcher sur du dur. Paris lui parait immense. Des endroits si différents en quelques centaines de mètres. Des gens faisant des choses bizarres. C'est plus tard qu'il a appris ce que c'était que des chandelles, des prostituées quoi. Des gens bizarres eux-mêmes. Hommes ou femmes ? C'est plus tard aussi qu'il a su comment on les appelait. Beaucoup de noms pour se moquer d'eux, en fait. Sur le boulevard, des animaux bizarres aussi. Les vaches et les cochons, il a vite compris qu'il n'y aurait pas que ça dans la vie. Des lumières tout aussi bizarres, il n'avait jamais vu ça, des néons on lui a dit. Il parvient rue Lepic, et trouve le café et le commerce de son cousin. Celui-ci l'accueille et lui montre sa chambre, au-dessus de l'écurie. le boulot d'Antoine est de charger la charrette en boulets de charbon. le lendemain, réveil à cinq heures, et première livraison à six heures à l'établissement La Lune bleue, un des plus gros clients, un des cabarets les plus connus de Pigalle. Fillette, la jument tirant la carriole, sait même y aller toute seule. Antoine fait comme demandé : charger la remorque, aller se coucher, et se lever à l'heure. le lendemain, il entre pour la première fois dans ce cabaret, où il est accueilli par Poing Barre, l'aboyeur de la Lune bleue. C'est l'histoire d'un jeune gars du Massif Central qui monte à Paris et qui fait son apprentissage de la vie dans le quartier de Montmartre, dans un milieu criminel. le mode narratif tient un peu le lecteur à distance. La scène introductive se déroule dans les années 1980 : trois pages dont deux sans aucun mot, et la bande dessinée se termine avec une séquence de trois pages qui lui fait écho. le scénariste commence donc par un dispositif qui indique que l'histoire se déroule dans le passé, qu'il s'agit d'événements révolus et déjà connus. Cela produit un premier effet de distanciation. La seconde scène dure cinq pages et est racontée par la voix d'Antoine âgé qui évoque son arrivée à la capitale : autre effet d'éloignement, car le lecteur ne vit pas en direct les événements. Les dialogues commencent donc en page 13, quand le jeune adulte se présente à son cousin. Cet effet de prise de recul se produit régulièrement, le scénariste repassant en mode commentaire du personnage principal plus âgé dans des cartouches pour apporter des informations supplémentaires sur ce que montrent les dessins. Cette sensation est encore accentuée par le parti pris de la mise en couleurs : une sorte de bichromie, faite de nuances de gris. En outre, sous ce gris, les dessins sont très propres sur eux : des contours adoucis pour les personnages, des décors propres et en bon état. Cette sensation de détachement n'entame pas pour autant l'envie de lecture et de découverte. le titre annonce clairement l'intention : une reconstitution de ce quartier de Paris à cette époque. le lecteur constate tout de suite la qualité de la reconstitution historique visuelle. Bon, le funiculaire de Montmartre, les ruelles, les façades d‘immeuble, la ferme sur le plateau de l'Aubrac : bien dessiné, mais rien de très extraordinaire. La traversée de quelques quartiers en 1950, à l'arrivée à Paris : sympathique pour les tenues vestimentaires et les voitures. À partir de la page 13, Antoine s'installe au-dessus du café de son cousin, et là la reconstitution historique atteint un autre niveau avec la description du quotidien : les boulets de charbon à charger dans la charrette, la jument Fillette, la cabaret La Lune bleue au petit matin avec les tables pas encore débarrassées, les réverbères, le calorifère, les autobus de l'époque, les différents modèles de voiture de la traction avant à celle de la police, les usines à gaz en proche banlieue, une salle de billard, etc. Les auteurs emmènent également le lecteur à la basilique avec une superbe vue du ciel, et devant le Moulin rouge, avec sa façade éminemment reconnaissable. Mais globalement ce n'est pas une reconstitution de nature touristique : elle se concentre plutôt sur les éléments du quotidien d'Antoine : en tant que livreur de charbon le matin, de spiritueux le soir, puis d'aide au cabaret, et enfin d'homme de confiance pour le patron de cet établissement. Manquant parfois un peu de texture ou d'un détail concret comme la nature du revêtement de chaussée, les dessins génèrent parfois comme une vague impression de consistance insuffisante. Mais lorsqu'il regarde les neuf dessins en double planche après la fin du récit, le lecteur distrait prend conscience que les auteurs ne se sont pas contentés d'aller chercher quelques cartes postales d'époque pour installer un décor en toile de fond. le scénariste a effectué des recherches plus approfondies sur le tissu socio-économique du quartier, et le rayonnement probable d'un individu comme Antoine, pour trouver à quels lieux cela correspondait. Ces derniers sont représentés de manière organique dans les planches, sans que l'artiste n'attire l'attention sur eux, mais bien présents et nourrissant le récit. De la même manière, le scénariste donne l'impression de raconter une histoire toute simple, très linéaire, très facile à lire, sans beaucoup de consistance. Mais en y repensant, le lecteur peut lister les différentes composantes de la reconstitution historique : la vie sur le plateau de l'Aubrac, les bougnats, le cabaret et ses artistes, ainsi que sa clientèle hétérogène, les petits trafics et les plus gros, l'évolution des numéros de cabaret, l'évolution de la géopolitique et en particulier la situation en Algérie. À nouveau, le ressenti est assez étrange : entre une forme de détachement, et une sensation d'évidence, comme si l'auteur alignait des lieux communs. Toutefois c'est sa connaissance de l'époque qui lui permet d'aboutir à une narration qui coule de source, encore faut-il disposer de cette connaissance des faits et savoir la distiller de manière organique dans le récit, sans donner l'impression de passer en mode leçon d'Histoire. du coup, le récit maintient l'attention du lecteur en douceur. Il n'y a pas de vrai drame, ou plutôt lorsqu'une mort survient, elle est présentée comme un simple fait, avec des conséquences émotionnelles très limitées. Une image montre les parents de Mireille, en tandem, fauchés par un bus. L'image d'après, leur fille affiche un regard attristé, mais c'est un souvenir déjà lointain et durant les années écoulées, elle a fait son deuil et trouvé comment gagner de l'argent pour pouvoir nourrir et s'occuper de sa petite sœur Blanche. C'est de l'histoire ancienne. Plus loin dans le récit, un gang de Corses entre dans La Lune bleue et ouvre le feu sur les clients et les employés, dans une séquence de cinq pages. La mise en scène du coup d'éclat montre bien la panique et les morts, à nouveau de manière plus factuelle qu'émotionnelle, ne touchant pas forcément le lecteur. Il n'y a pas de volonté de faire pleurer dans les chaumières, en exagérant pour toucher la corde sensible. Pierre Christin & Jean-Michel Arroyo font revivre le quartier de la Butte Montmartre, en suivant la vie d'un jeune provincial monté à Paris, et s'intégrant progressivement dans le milieu, sans manier de flingue, sans commettre d'agressions. Les auteurs effectuent une reconstitution visuelle remarquable, en toute discrétion, et évoquent plusieurs facettes de cette époque, de ce milieu, également sans se reposer sur des artifices spectaculaires. le lecteur suit bien volontiers Antoine, son premier amour, sa découverte du monde du cabaret, sa participation plus périphérique que directe aux affaires, sans pour autant être dupe des activités illégales du patron du cabaret et de sa bande. D'un côté, il apprécie cette narration pragmatique, sans romantisme ou cynisme artificiel ; de l'autre, il peut être décontenancé par ce rythme posé et presque tranquille.
Même si j’ai ressenti quelques frustrations, je dois dire que cet album se laisse lire très agréablement. D’abord grâce au dessin d’Arroyo (que je découvre ici). Dans un gaufrier aux grandes cases, la mise en pages très aérée lui permet de bien s’exprimer. Un trait classique et réaliste, avec une colorisation qui colle bien à l’ambiance rétro mise en place par Christin, c’est vraiment agréable. Il reconstitue très bien la Paris de l’après-guerre, le quartier de Pigalle au tout début des années cinquante. Il place aussi un petit clin d’œil à Buck Danny page 99 (série dont il illustre l’un des derniers surgeons). L’intrigue de Christin est très classique. Trop d’ailleurs, c’est l’un des reproches que je lui ferais, avec le fait qu’elle se termine un peu brutalement, et que j’aurais bien vu se développer davantage le microcosme de la Lune bleue (et les personnages sont trop vite expédiés). Mais l’ambiance du Paris populaire de l’après-guerre est bien restituée. C’est la réussite majeure de ce récit, dans lequel Christin a sans doute glissé quelques souvenirs d’enfance je pense. Une lecture sympathique, fluide, agréable, même si j’en attendais davantage.
La BD est un long flash-back qui raconte la montée à Paris d’Antoine âgé de 18 ans, depuis l’Aubrac jusqu’à Paris où il va d’abord retrouver un cousin auvergnat, puis être embauché dans un cabaret proche de Pigalle. L’apprentissage de la vie d’Antoine se fait dans ce monde de la nuit, où se croisent patrons de cabaret plus ou moins recommandables, danseuses, truands et flics, dans un Paris désormais disparu que Jean-Michel Arroyo fait revivre de façon magnifique. L’histoire est un récit noir assez classique, mais l’illustration la met en valeur de très belle façon, que ce soit dans les scènes d’action, les plans larges, ou les personnages qui sont très typés, expressifs et réalistes.
J'avais repéré cet album depuis un moment, intrigué que j'étais sur ce que nous préparait Arroyo, que je suis depuis les débuts de sa reprise des Buck Danny. C'est un véritable défi que s'est lancé ce dessinateur avec cette bande dessinée à mille lieues des aéronefs de l'US Navy. Arroyo nous offre sa vision de Paris des années 50, et son trait et ses couleurs sépia nous replongent dans le cinéma des années 50, où l'on pourrait presque croiser Gabin à chaque page. Contrairement à certains, je ne rentrerai pas dans le débat des perspectives soit disant ratées, des anachronismes dans les véhicules, mais je ne retiendrai une seule chose, c'est l'ambiance que dégage Arroyo dans ces pages. On s'y croirait, les cabarets, les bougnats, les malfrats corses, les politiques corrompus, bref cette bd relate parfaitement une époque. Par contre, je suis assez déçu par le scénario de Christin, qui m'a habitué à mieux par le passé. Nous suivons la vie d'Antoine presqu'au jour le jour au fil des pages, mais au moment le plus intéressant, Christin préfère l'ellipse qui donne à cette bd un sentiment de frustration, un manque, qui font que l'on a du mal à s'attacher au personnage principal. Graphiquement réussi (la poursuite en voitures dans les usines à gaz de la plaine Saint Denis en est un exemple) mais un scénario qui me laisse sur ma faim me donne un goût d'inachevé à la lecture de cet album.
Paris 1950, Pierre Christin et Jean-Michel Arroyo mettent en scène un jeune campagnard auvergnat qui débarque à la capitale avec ses yeux candides et se retrouve rapidement admis au sein de l'équipe d'un cabaret dont le patron magouille régulièrement avec quelques mafieux. Il y croise la faune locale bigarrée et y fait peu à peu sa place, avec de bonnes et de mauvaises conséquences. J'ai aimé cette plongée dans le quartier de Pigalle de l'époque. J'avoue que je ne savais pas que les gangsters d'alors étaient majoritairement corses, pas plus que je n'avais idée des différentes parties en présence à l'époque, notamment les motivations des Américains. Mais tout cela n'est pas au coeur de l'intrigue puisque c'est avant tout le parcours d'un brave type qui fait peu à peu son trou, s'attache à quelques bons amis, et en parallèle se mêle plus ou moins ouvertement à certaines magouilles. On sent que Jean-Michel Arroyo se fait plaisir dans la représentation du Paris de l'époque. Il est généreux dans ses décors qu'il nous offre avec moults détails. J'ai toutefois trouvé ses perspectives parfois un peu étranges, comme si les bâtiments étaient ramassés et leurs façades un peu plates. De même, les voitures s'intègrent parfois bizarrement aux décors, donnant quelques fois l'impression d'être davantage des jouets que des véhicules réalistes. Les gangsters corses y paraissent aussi un peu caricaturaux avec leurs costumes et leurs chapeaux en guise d'uniformes. Mais ce serait pinailler que de s'attacher à ça car l'ensemble est très réussi, les personnages sont bien rendus et la majorité des planches nous plonge agréablement dans les rues parisiennes d'alors. L'histoire est tout aussi plaisante. On s'attache assez vite au jeune héros, aussi ingénu soit-il par moment. Son entourage aussi est sympathique, même ceux qui auraient pu paraitre hautains et distants en première impression. Et même les malfrats se révèlent humains et faillibles, avec certes les quelques défauts que cela implique. Au niveau narration, j'avoue avoir un peu ri du "Plus tard" qui introduit la première case de l'album et de ma recherche pour voir si j'avais manqué un prologue sur les pages précédentes. Passé cela, on se laisse porter par l'intrigue qui ressemble à une longue mise en place tandis que le héros se fait de mieux en mieux accepter par les habitués de Pigalle et de ce fameux cabaret de la Lune Bleue. L'histoire coule bien et plonge le lecteur dans un décor historique dépaysant et au milieu de protagonistes plaisants à suivre. On attend toutefois un certain temps que l'intrigue prenne enfin son essor pour de bon. Et c'est peut-être là que le bât blesse car au moment où l'on se dit que les choses sont enfin en place, l'histoire subit un arrêt un peu abrupt, légèrement frustrant. C'est ce qui m'empêche de mettre une meilleure note à cet album que j'ai certes apprécié dans son ensemble mais qui n'a pas su me charmer totalement.
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2024 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site