Clément V - Le Sacrifice des Templiers
Un Pape face au roi de France.
1300 - 1453 : Moyen Âge et Guerre de Cent ans Biographies La BD au féminin Les Templiers
Lyon, 15 novembre 1305. Philippe le Bel, le puissant souverain, assiste au couronnement de Bertrand de Got devenant ainsi le pape Clément V. A la sortie de l’abbatiale Saint Juste, le nouveau pape, ému, est acclamé par les lyonnais. Il est le dixième pape français de l’histoire. Une foule immense et joyeuse s’est rassemblé sur le chemin du cortège qui traverse la ville. Mais soudain, un immense mur s’effondre sous le poids et l’agitation des gens venus voir le nouveau pape ! C’est la catastrophe, les corps inanimés s’entremêlent dans les gravats, la poussière et la décombres. Le roi est sauf mais le cheval du pape, en se cabrant, fait basculer celui-ci qui n’est finalement que blessé ! Onze personnes décèderont des suites de cet accident, parmi lesquels le duc de Bretagne et le jeune frère du pape. Cet évènement dramatique ouvra le pontificat tel un mauvais présage sans que Philippe le Bel ne laisse ni répit ni ne montre d’indulgence à l’égard de son rival au pouvoir bien encombrant. Pendant les six premières années de son pontificat, le pape résista plus ou moins aux injonctions du roi de France – qui exigeait, par exemple, que son adversaire défunt Boniface VIII fût condamné par un concile, et que son conseiller Guillaume de Nogaret, celui qui avait arrêté l’ancien pape à Anagni, soit absout par l’Église dans une bulle spéciale ! Philippe le Bel, sous une personnalité un peu secrète, est aussi cruel que déterminé… Le roi obtint aussi de Clément V qu’il condamne l’ordre du Temple et proclame sa dissolution. Devant les aveux des dirigeants de l’ordre, pourtant arrachés sous la torture par l’instruction diligenté par le roi, le pape ne peut empêcher que Jacques de Molay et ses compagnons ne soient menés au bûcher. Ainsi furent sacrifié les Templiers qui avaient pourtant servi avec ferveur le royaume et la chrétienté menant les grandes croisades en Terre Sainte.
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Date de parution | 20 Janvier 2021 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
La torture ne sert pas la vérité. - Ce tome contient une biographie partielle du pape Clément V qui se suffit à elle-même et ne nécessite pas de connaissances préalables. Il a été écrit par France Richemond, médiévaliste, dessiné et encré par Germano Giorgini, et mis en couleurs par Florence Fantini. Il comprend quarante-six pages de bande dessinée, et la première édition date de 2021. La scénariste a également écrit un autre tome de cette collection consacrée aux papes : Léon le Grand : Défier Attila (2019), dessiné par Stefano Carloni. le tome se termine avec un dossier documentaire de huit pages, réalisé par Bernard Lecomte, composé des parties suivantes : Clément V premier pape d'Avignon, Un Bordelais nommé Bertrand de Got, Les 17 papes français, Philippe IV le Bel plus puissant que le pape ?, Qui étaient les templiers ?, Les routes des trois grandes croisades, Les moines soldats iront-ils en enfer ?, La croix rouge, La fin des templiers, Un procès scandaleux, Jacques de Morlaix trahi par le pape, le pape Formose, le vin des papes, Les rois maudits, un lexique. Lyon, basilique Saint-Just. le 14 novembre de l'an de grâce 1305. Couronnement de Bertrand de Got. Qui devient le pape Clément V. Il reçoit la tiare à la double couronne. Couronne du royaume terrestre. Couronne du royaume spirituel. Il devient ainsi le père de tous, princes et roi, le recteur de la Terre, le vicaire du seigneur Jésus-Christ. Alors que la procession du nouveau pape monté sur sa mule pontificale avance dans les rues de la ville, un mur sur lequel étaient montés des spectateurs s'écroule. Plusieurs jours ont passé. le duc de Bretagne est mort. Gaillard de Got agonise. Onze décès jettent un voile de ténèbres sur le couronnement du pape. le roi Philippe le Bel vient le trouver : il a besoin de lui. Les rapports restent tendus avec l'Angleterre malgré les traités. le roi veut donner sa fille Isabelle, au prince héritier et il lui faut une dispense. le pape la lui accorde bien volontiers. Le roi Philippe le Bel continue : La perte du royaume chrétien d'Orient est terrible. Son grand-père Saint Louis s'est sacrifié pour le créer. Aujourd'hui son œuvre est anéantie ! Cette nouvelle croisade doit les implanter définitivement. Quelques croisés désordonnés ne suffisent pas. Il faut une armée de métier. Or les templiers ont failli. Leur stupide rivalité avec les hospitaliers a tout gâché. Ils ont oublié quel est l'ennemi. le pape répond que certes, mais ils ont défendu leur dernier bastion Saint-Jean-d'Acre jusqu'à la mort. le roi insiste : Élire l'orgueilleux Jacques de Morlay à la tête du Temple fut une erreur. Il se perd dans un jeu de puissance. le pape reconnaît que ce choix fut maladroit car Molay est si rigide. Il refuse la fusion avec les Hospitaliers. Il faut pourtant bien réformer le Temple puisqu'il n'y a plus de pèlerins à protéger. Ils ne peuvent être juste des banquiers. le roi intime au pape de faire cesser ce scandale qui souille l'Église. Il doit imposer la fusion ou les supprimer et créer un nouvel ordre. Ce tome permet à la scénariste de revenir sur la disparition de l'ordre des Templiers, événement auquel elle faisait déjà référence dans Jeanne, la Mâle Reine, tome 1 (2018) avec Michel Suro. le titre annonce que l'ouvrage s'attache principalement à la vie du pape Clément V, et également à la fin de l'ordre des Templiers. le choix de la scénariste est de se focaliser sur la vie de Bertrand de Got (1264-1314) uniquement pendant la période où il fut pape. le récit commence donc avec son sacre en 1305 et il se termine avec son décès. La première séquence s'accompagne d'un moment spectaculaire, propice à capter l'attention du lecteur : le mur qui s'écroule et les badauds pris en dessous. Puis vient la biographie en elle-même qui parvient à mêler les tracas personnels de Bertrand de Got, en particulier ses problèmes de santé, ses difficiles décisions politiques pour essayer de résister à Philippe le Bel, et à maintenir l'autorité du pape sur l'Église, l'itinérance de sa curie, les événements historiques majeurs en France et en Italie, les attaques de Philippe le Bel contre les Templiers pour asservir leur ordre. France Richemond impressionne le lecteur par la dextérité avec laquelle elle parvient à gérer le volume d'informations nécessaires pour établir les enjeux et rendre compte des défis à l'échelle de l'Église, par le biais de dialogues plausibles, ce qui lui permet de limiter la taille des cartouches de texte, évitant ainsi l'effet exposé massif et indigeste. La fluidité de l'exposé des informations revêt un tel naturel que le lecteur peut ne pas se rendre compte de la densité de la reconstitution. Si cet aspect l'intéresse, il consulte le lexique en fin d'ouvrage et se rappelle qu'effectivement les personnages représentés dans la bande dessinée ont évoqué Albert Ier de Hasbourg, Arnaud de Pellegrue, Boniface VIII, Célestin V, Charles d'Anjou, Charles II d'Anjou, Charles de Valois, Guillaume de Beaujeu, Guillaume de Nogaret, Henri VII de Luxembourg, Hugues de Payns, Jacques de Molay, Robert d'Anjou, Geoffroy de Charnay, etc. le lexique continue avec la liste des lieux traversés ou évoqués, au nombre d'une dizaine, avec par exemple Anagni (ville d'Italie où le pape Boniface VIII s'est fait arrêter en 1303 par l'envoyé de Philippe le Bel) ou Ferrare (puissante seigneurie italienne dans le delta du Pô). Vient ensuite une vingtaine de termes relatifs à la religion, dont concile cadavérique, gibelins, relaps. Ces trois registres de vocabulaires transcrivent bien les différentes dimensions du récit : politique et historique, française et italienne, histoire de l'Église et de son dogme. La scénariste sait transcrire toutes ces dimensions, sans faire de prosélytisme ou du dénigrement systématique, sans occulter le religieux. Par la force des choses, un récit historique de cette nature impose une narration visuelle descriptive pour une reconstitution historique rigoureuse et documenté. le dessinateur impressionne également par sa capacité à remplir cet objectif : représenter les tenues d'époque et les costumes liés aux fonctions au sein de l'Église, montrer les cathédrales avec fidélité, ainsi que les rue des villes, les environnements particuliers comme des cellules ou la muraille d'un fort. Il représente les arrière-plans dans plus de 80% des cases, même celles avec des gros plans sur les personnages : le lecteur peut donc se projeter dans chaque et il ne ressent pas de solution de continuité qui serait provoquée par l'absence de décors plusieurs cases d'affilée. La séquence d'ouverture lui permet de mettre à profit la dimension spectaculaire de la cérémonie, puis du mur qui s'écroule. le lecteur constate que la scénariste a fait l'effort de penser en termes visuels chaque fois que la séquence s'y prête : un affrontement entre Templiers et infidèles à Saint-Jean-D'acre, le déplacement de la curie itinérante du pape, l'entrée en ville du roi et de ses soldats, l'arrivée à Avignon, celle au petit prieuré de Groseau, l'attaque des remparts de Ferrare par l'armée d'Arnaud de Pellegrue, les Templiers mis au bûcher à l'orée du bois de Vincennes, le banquet de clôture du concile, l'exécution de Jacques de Morlay. de la même manière, il est visible que le dessinateur a conçu des plans de prise de vue spécifique pour chaque discussion, évitant l'alternance mécanique de champ / contrechamp, montrant ce que font les personnages pendant les échanges, où il se trouvent. L'investissement de l'artiste sur la mise en scène participe de manière significative à la fluidité globale de la narration, à se tenir à l'écart de tout impression de texte copieux limitant les cases à de simples illustrations. Le lecteur se retrouve vite transporté auprès du pape Clément V. Il sait bien qu'il ne s'agit pas d'un reportage pris sur le vif, qu'il n'existe pas d'archives visuelles ou audio permettant d'avoir la certitude que les événements se sont bien déroulés de cette manière, que les personnages ont prononcé ces paroles ou ont pris ces positions. Les auteurs savent rendre plausibles ce qu'ils racontent, le lecteur étant d'autant plus convaincu par la solidité des références, par la densité d'informations. Il éprouve la sensation que cette reconstitution lui montre pour partie la vérité. Il voit bien que les auteurs se tiennent à l'écart d'une représentation manichéenne ou simpliste : le pape n'est pas un héros ayant permis d'éviter le pire face à un roi omnipotent, ni un lâche ayant abdiqué toute responsabilité et se pliant aux diktats de Philippe le Bel. La réalité décrite s'avère complexe. Les personnages agissent conformément à la structure sociale de l'époque, à l'existence d'une religion d'état, aux jeux des alliances politiques et des guerres. La narration n'essaye pas d'intégrer tous les événements, de gaver le lecteur de passages encyclopédiques : elle s'appuie plutôt sur des événements montrés, et d'autres évoqués, laissant le lecteur libre d'aller se renseigner plus longuement s'il le souhaite. le dossier documentaire en fin d'ouvrage apporte des informations complémentaires, ou présente certaines sous une autre facette que la bande dessinée, s'avérant très intéressant. La reconstitution historique est un genre à part entière, particulièrement exigeant en termes de recherches, de compréhension du contexte de l'époque, et assez difficiles à restituer de manière agréable sous forme de bande dessinée. le lecteur fait le constat par lui-même de la rigueur et de l'investissement des auteurs dans leur ouvrage, ainsi que de leur coordination et de leur complémentarité pour réaliser une narration agréable à la lecture, sans rien sacrifier à l'ambition de cette reconstitution. L'ouvrage donne envie de découvrir cette époque, les actions de ce pape, et une fois terminé, le lecteur en ressort avec l'envie d'en apprendre plus. Une belle réussite.
C'est le troisième tome que je lis de cette collection Un pape dans l'Histoire, après Léon le Grand et Alexandre VI, et j'en sors satisfait. Ce pape Clément V, je le connais bien puisque c'est le pape de chez moi, il est né en Aquitaine sous le nom de Bertrand de Got, à Uzeste, petite commune rurale située à une quarantaine de km de Bordeaux, dans la partie où les vignobles des Graves rejoignent ceux du Sauternais. Uzeste possède une magnifique collégiale où l'on peut voir le tombeau et gisant de Clément V ; archevêque de Bordeaux, il aimait sa région puisque les alentours sont constellés de châteaux dits "clémentins", c'est à dire qu'ils appartenaient aux membres de sa famille (qui comme chez tous les papes, fut grandement favorisée par son pontificat), principalement des neveux dont certains comme Gaillard de La Mothe furent élevés au rang d'évêque alors qu'ils n'étaient même pas religieux. Bref, ces châteaux que j'ai de multiples fois photographiés, sont pour certains dans un état plutôt bon, on peut y étudier l'alliance de la défense et de la plaisance, ils sont appelés clémentins parce que ce sont des forteresses de plaine de plan rectangulaire et flanquées de tours circulaires qui sont toutes inspirées par le château de Villandraut (52 km de Bordeaux), château de Bertrand de Got, qu'il put embellir une fois devenu pape et où il pouvait déployer la pompe pontificale ; c'est une résidence confortable pour une forteresse des XIIIème-XIVème, dont les systèmes de défense sont très instructifs à étudier. Comme son titre l'indique, l'album est pratiquement centré entièrement sur la crise de l'ordre du Temple qui met Clément V face au redoutable roi de fer, Philippe IV le Bel ; ce bras de fer occupe les 3/4 de l'album mais les auteurs en profitent pour signaler tel ou tel fait, notamment le fait que le château Pape Clément (situé à Pessac, aux portes de Bordeaux) tire son nom d'une ancienne propriété de Bertrand de Got, ainsi que l'affaire d'adultère des brus du roi qui ébranla sa fin de règne, ou encore le fait que le premier pape d'Avignon habitait en fait Carpentras car le Palais des Papes n'était pas encore construit ; il sera bâti par ses successeurs. Il y a aussi l'affaire du procès posthume de Boniface VIII (avec une démonstration outrancière de "procès cadavérique"), j'avais complètement oublié ce détail, ce qui prouve que le roi de France avait la rancune tenace. Très soigné sur le plan scénaristique, cet album est instructif et je pense que tout a été abordé sur le procès des Templiers (y compris les tortures et les lieux de détention comme le château de Chinon), en évitant soigneusement la vision romantique qu'en a donnée Maurice Druon dans les Rois Maudits ; la fameuse harangue de Jacques de Molay sur son bûcher maudissant le pape Clément, Guillaume de Nogaret et le roi de France a été remplacée par des paroles beaucoup moins théâtrales mais probablement plus proches de la vérité. 46 pages pour traiter d'une période complexe et d'un moment capital de l'Histoire de France, c'était un peu juste, mais les auteurs se tirent bien de cet exercice par d'habiles raccourcis, de même que le contexte historique autour du royaume de France est bien retranscrit, en rendant cette Histoire de France abordable et accessible à tous les publics, et pas qu'aux érudits et historiens. Le caractère du pape n'est peut-être pas assez développé, mais il ne faut pas croire qu'il fut entièrement soumis à Philippe le Bel, j'ai lu plusieurs ouvrages d'auteurs aquitains qui justement le réhabilitent en affirmant qu'il pouvait jouer au mielleux face au roi en feignant ceci ou cela, et qu'il avait non seulement une autorité mais aussi du caractère ; c'est donc une erreur de croire son total asservissement royal, ce cliché a été colporté injustement à travers les siècles, il respectait le roi mais il pouvait aussi prendre certaines décisions qui allaient à contre-courant. Au niveau graphique, rien à dire, je n'aime pas trop certains visages un peu ratés, sinon ça reste du bon travail sur les décors et le découpage. Un bon album enrichi par un dossier historique un peu succinct mais qui relate l'essentiel sur le pape, le roi de France et Jacques de Molay.
C’est le deuxième opus de Richemond que je lis dans cette collection, et on sent qu’elle maitrise mieux son sujet, qu’elle est plus à l’aise avec sa période de prédilection que pour Léon le Grand. Conçue en collaboration avec les éditions chrétiennes du Cerf, cette collection est inégale. Mais cet album se révèle intéressant, malgré quelques défauts, essentiellement liés au choix éditorial de tout traiter en 1 volume de 48 pages seulement. Car ce n’est pas seulement Clément V qui est ici mis en avant, mais aussi l’ambition du roi de France Philippe le Bel – déjà croisé dans plusieurs albums de diverses collections historiques récentes (Isabelle - La Louve de France, Philippe le Bel) chez Glénat ou Delcourt. C’est surtout le procès des Templiers qui est au cœur de cet album, au point qu’on aurait tout aussi bien pu inverser titre et sous-titre ! Et du coup le personnage de Clément V est parfois un peu falot, ballotté par les événements qu’il peine à canaliser, entre ses conseillers, les guerres intestines italiennes et les menaces du roi de France. Donc, il y a des raccourcis, des ellipses, certains passages fleurant bon la chronologie illustrée et didactique. Mais Richemond s’en sort là bien mieux que d’autres je trouve, et la lecture, malgré certaines frustrations, se révèle agréable. D’autant plus que le dessin de Giorgiani est vraiment bon (j’ai aussi trouvé la colorisation agréable). Bref, ce n’est pas forcément un pape bien mis en valeur (il est même plutôt faible et est davantage un pape "dans" l'Histoire qu'un pape faisant l'histoire), mais c’est une lecture qui complète bien les albums cités précédemment, et qui intéressera je pense les amateurs de la période. Le dossier final, assez succinct, est quand même intéressant, alliant petite érudition et vulgarisation multiforme (cinéma, TV, etc.).
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