Automne en baie de Somme
« À la Belle Époque, elles détiennent deux armes d'exception : la beauté et l'argent. » 1896. Le corps d'un riche industriel est découvert à bord d'une goélette échouée dans la baie de Somme. Pour une affaire de cette importance, on envoie le meilleur policier de Paris, Amaury Broyan. Voir suite : Hiver à l'opéra
1872 - 1899 : de la IIIe république à la fin du XIXe siècle Paris Peinture et tableaux en bande dessinée
Très vite, l'inspecteur soupçonne la veuve, héritière de l'immense empire. L'enquête révèle alors que l'industriel avait également une maîtresse, Axelle Valencourt, un modèle ayant posé pour de nombreux artistes et notamment Alfons Mucha. Des quartiers cossus de Paris aux cabarets de la Butte Montmartre, l'inspecteur se retrouve plongé dans une affaire complexe et périlleuse, dans laquelle chaque personnage, y compris l'inspecteur, va révéler sa part d'ombre.
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Date de parution | 25 Mai 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
BD séduisante visuellement, notamment du fait de couleurs à l'aquarelle à la tonalité impressionniste et d'un trait fin à la linéarité délicatement mal assurée. Les personnages sont bien plantés, intéressants a priori avec des aspérités excessives et caricaturales à souhait, donnant à l'ensemble une inattendue tonalité semi-parodique intrigante et fort agréable. Mais les choses se gâtent peu à peu : l'intrigue policière est trop lâche, légère sinon bâclée, enchaînant les rebondissements menés par les seuls dialogues, les explications maladroites données a posteriori. Les auteurs actuels n'ont plus l'habitude de mener une intrigue complexe en un tome, ne savent plus mener une narration avec le rythme et les ellipses adéquats. Relisez "Le Schtroumpfissime" que diable ! Et puis il y a ces habituels souhaits, irréprochables au demeurant, d'ouvrir aux thématiques contemporaines (féministes ici), mais dont le traitement policier est incompatible avec la morale et les traits de caractère jusqu'alors présentés par l'album. Voilà donc une BD qui séduit a priori, déçoit peu à peu et s'achève en laissant un goût amer. La note 2 serait sévère, un 3 délié de l'impression finale bien froide.
Le polar, c'est vraiment pas mon style de prédilection. Et "Automne en baie de Somme" reste dans les poncifs du genre que je n'apprécie que modérément. C'est dommage, la BD a une vraie patte visuelle inspiré en grande partie de l'art Nouveau, cité explicitement dans le récit d'ailleurs. Mais ce qui m'a surtout marqué dans ma lecture, c'est la façon dont le récit tord les ficelles scénaristiques pour en faire un polar avec une surprise finale. A ce niveau, le chiffre marqué comme un indice (et la clé de compréhension) m'ont paru beaucoup (beaucoup) trop gros. D'autre part, le récit fait un volte-face de quelques personnages, notamment l'industriel, mais ne semble pas réellement répondre aux questions politiques qu'il pose. Je veux dire, une fois révélé les agissements de l'industriel, est-ce que ça rend alors légitime et normal le comportement de sa femme ? La BD ne l'évoque pas, mais c'est franchement étrange de poser ainsi un tel dilemme sans jamais l'évoquer ensuite. C'est ce que je reprocherais le plus à la BD, en fin de compte. Outre qu'on reste dans les industriels et les artistes du XIXè, la population ouvrière est assez peu présente (je ne parle pas des anarchistes de Montmartre qui font de la figuration), c'est le propos qui tente de montrer les peurs du socialisme d'une époque, propos esquissé et jamais abouti. Au delà de l'intrigue de polar dont la fin m'a fait tiquer (une grosse coïncidence et une explication du chiffre franchement tiré par les cheveux), le fond et le corps du récit manque de développement. Trop peu de pages, trop de sujets évoqués ? Je ne suis pas sur, mais en l'état je trouve que la BD reste surtout intéressante pour son dessin, travaillé et franchement très joli, mais je n'ai pas envie de la relire.
Elle était une saison qui sait que le temps lui est compté. - Il s'agit d'une histoire complète en un seul tome, indépendante de toute autre. Cette bande dessinée a été réalisée par Philippe Pelaez pour le scénario, et par Alexis Chabert pour les dessins et les couleurs directes. Elle comporte soixante-deux pages. Il se termine avec une postface d'une page de l'artiste expliquant pour quelle raison il a choisi 1900 à Paris. Dans ce projet, il s'est amusé à retranscrire les ambiances que son arrière-grand-mère lui a transmises, recréer un passé où il peut voyager comme un fantôme, et honorer la mémoire de ses ancêtres. Chacune des trois parties s'ouvre avec un texte de Nelly Roussel (1878-1922), extraits de son ouvrage Quelques lances rompues pour nos libertés (1910). Sur une grande plage de la baie de Somme, se trouve un petit navire à voile, échoué sur le sable comme un animal mortellement blessé regardant une dernière fois l‘horizon, avant de se coucher définitivement sur le flanc. Un homme en train d'agoniser s'extirpe tant bien que mal de la cabine et s'allonge sur le pont. Les mouettes volent haut au-dessus du bateau. le lendemain, la gendarmerie locale est sur place et elle accueille l'inspecteur Amaury Broyan, venu de Paris, dépêché par le ministre lui-même. Car le défunt était un riche industriel : Alexandre de Breucq. le lieutenant Brousse lui explique que le malheureux s'est étouffé dans son propre sang, et que son agonie a dû être longue. L'inspecteur se demande si la victime connaissait son assassin, si ce dernier avait préparé le poison en étant sûr que de Breucq le prendrait, ou s'il était à bord de cette goélette, avec lui, et qu'il a pris tout son temps pour le regarder mourir. Quelques jours après, l'inspecteur se tient à quelque distance de la mise en terre du cercueil au cimetière, accompagné par Arsène. Ils regardent les gens présents venus se recueillir : les banquiers d'un côté, les industriels de l'autre, et au milieu l'État. Un franc-maçon à la tête de l'État, un communard comme président du Conseil, et les socialistes qui gagnent encore des voix aux dernières élections municipales. Et tout ce beau monde pour enterrer le plus prometteur, le moins corrompu et le plus social des industriels. La vie est mal faite. Arsène s'écarte rapidement car la veuve Marthe de Breucq se dirige vers eux avec son garde du corps Simon. Broyan lui présente ses condoléances. Elle lui demande de passer le jeudi suivant, à dix-sept heures à son hôtel particulier. Une fois la cérémonie terminée, Elle monte dans sa calèche avec Simon et lui demande pourquoi Broyan a été choisi pour l'enquête. C'est un des policiers les plus efficaces de Paris, enfin avant les soucis avec sa défunte fille. Dans l'atelier d'Alfons Mucha, Axelle Valencourt pose pour la toile L'Automne. Elle lui fait observer que des grains commencent à se détacher de la grappe. Rien de grave : il a terminé pour aujourd'hui. Il faut qu'elle revienne dans deux jours pour terminer le tableau. le lendemain elle a prévu d'aller au marché aux modèles place Pigalle. le soir Thérèse sort de la prison de Saint Lazare, et elle monte dans le fiacre qui l'attend. Pour commencer, une couverture superbe avec un mystère, une jeune femme représentée avec une manière qui évoque Alfons Mucha (1860-1939), ce qui est tout à fait intentionnel puisque cette demoiselle est le modèle qui a servi pour sa représentation de l'Automne. le fini de la couverture est particulièrement soigné : le titre et la dorure en arc de cercle sont rendus avec une encre métallique, en légère surimpression, pour un très bel effet. En bas, le bateau échoué sur ce qui doit être une plage de la baie de Somme. Une introduction en six pages qui permet de poser le récit : une enquête policière sur le meurtre d'un industriel progressiste, un capitaine d'industrie mettant en œuvre une politique paternaliste, à la fin du dix-neuvième siècle. Elle permet aussi d'apprécier toute la palette de l'artiste. Il commence par trois pages avec plusieurs marines, très vaporeuses, un très beau rendu de l'ambiance lumineuse du ciel et du sable à deux moments différents de la journée, une goélette et des personnages détourés d'un trait fin et fragile, avec des silhouettes un peu allongées, des contours nourris par les couleurs directes. L'autre moitié se déroule d'abord dans un cimetière parisien, puis dans les rues de la capitale. La couleur directe permet de réaliser un jeu d'ombre mouvante du plus bel effet. L'artiste joue remarquablement bien du niveau de précision et du niveau d'imprécision dans les formes : le lecteur assimile facilement les contours des stèles funéraires sans avoir besoin de les voir dans le détail, et il identifie au premier regard la forme d'une colonne Morris. Raconter un polar en bande dessinée s'avère souvent un exercice périlleux, car il faut parvenir à caser tout à un tas d'informations comme les éléments de contexte, l'histoire personnelle de la victime et de ses proches, la recherche d'indices et leur analyse, et il faut également parvenir à mettre en scène les phases de déduction sans qu'elles n'apparaissent ni trop artificielles et mécaniques, ni trop parachutées ou absconses. le lecteur se rend vite compte que les auteurs savent inclure les informations avec une réelle élégance, et une réelle ambition. Ainsi, la victime était un riche industriel de type paternaliste, portrait qui se dessine par bribe au fil de remarques rapides. L'inspecteur a une histoire personnelle tragique qui influe directement sur ses motivations et donc la façon dont il hiérarchise ses priorités. Il dispose d'un physique avec une certaine carrure et des postures parlantes sur son caractère et ses dispositions d'esprit. La veuve éplorée est d'une réelle élégance, son maintien et sa façon de se tenir en disent également long sur son assurance et sa détermination. Axelle est magnifique de bout en bout, une beauté diaphane, avec un soupçon de mélancolie, une réelle douceur, une assurance d'une autre nature. L'artiste sait donner vie à chaque protagoniste, leur insuffler du caractère, ce qui est indispensable pour que la mécanique policière ne ressorte pas comme un artifice. La quatrième de couverture précise que l'histoire se déroule à la Belle Époque, et même précisément en 1896. Cette année correspond effectivement à la date de réalisation du tableau Automne par Mucha. Les auteurs ne l'ont pas choisi par hasard, et le lecteur constate rapidement que l'intrigue est indissociable de la réalité historique de l'époque, qu'elle en découle, qu'elle n'aurait pas pu se passer à une autre époque. C'est donc un véritable polar qui agit comme révélateur d'une facette de la réalité sociale de la société à ce moment-là, et à cet endroit-là. Avec son air de ne pas y toucher vraiment, l'artiste réalise une reconstitution historique visuelle impressionnante. Les tenues sont d'époque, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Il est possible d'identifier les rues de Paris où se déroule chaque scène. le lecteur finit par se rendre compte que Chabert est allé faire des recherches sur les différents modèles de voiture hippomobile en circulation à Paris, ce qui atteste du temps consacré à recréer cette époque avec authenticité. S'il ne l'a pas fait avant, le lecteur prend alors le temps de regarder les détails : les façades immeubles, la fontaine d'une place, l'évocation du cabaret Au Lapin Agile (à nouveau une mise en couleurs extraordinaire), un paravent, un intérieur bourgeois, un cabinet médical, etc. Il regarde les moulins de la Butte Montmartre et il découvre le chantier de la construction de la basilique du Sacré-Coeur de Montmartre (1875-1923), avec ses échafaudages et son campanile pas encore construit. Le décor de ce chantier en cours a été proposé par le scénariste qui, lui aussi, parsème son récit de marqueurs historiques contribuant à la reconstitution. Lors du prologue, Arsène évoque Félix Faure (1841-1899), franc-maçon alors président, et Jules Méline (1838-1925), un communard alors président du Conseil. Au fil des pages, le lecteur peut relever la mention de Sarah Bernhardt (1844-1923, actrice ayant également servi de modèle Mucha), Paul Brouardel (1837-1906, médecin légiste), et une citation de Jean Jaurès (1859-1914, on recrute dans le crime pour surveiller le crime, dans la misère de quoi surveiller la misère). Il y a également le titre de chacun des trois actes (Les sanglots longs – le cœur des femmes – Morte saison) et les citations en ouverture : elles sont toutes les trois extraites du même ouvrage de Nelly Roussel (1878-1922), une libre penseuse, franc-maçonne, féministe, antinataliste, néomalthusienne et femme de lettres libertaire française, une des premières femmes à se déclarer en faveur de la contraception, et à promouvoir l'importance de l'éducation sexuelle des femmes. Tous ces éléments font partie intégrante de l'intrigue, à l'opposé de simples éléments de décor pour meubler artificiellement. L'histoire se déroule en suivant l'inspecteur, et sa façon de procéder est dictée par son caractère et son histoire personnelle. L'enquête ne se résume pas à un jeu intellectuel, mais procède des convictions du policier. Les autres personnages ne font pas figuration : les actes d'Axelle ou de Marthe reflètent également leurs convictions et leurs objectifs, à l'opposé de personnages superficiels ou interchangeables. Le scénariste maîtrise aussi bien l'esprit que la lettre des polars. Il y a des phases de déductions, des indices, des indicateurs, quelques coups échangés, autant de conventions attendues du genre. L'enquête implique aussi bien des individus de la haute société, que des gens du peuple, et elle fait ressortir des vices cachés. Elle agit donc bien comme un révélateur de plusieurs facettes de la société de l'époque. Elle fonctionne sur ses particularités et pas indépendamment du lieu ou de l'Histoire. En un nombre limité de pages, les auteurs savent immerger le lecteur dans un environnement concret et une reconstitution historique rigoureuse. Celui-ci est sous le charme de la narration visuelle dès les premières pages, et il se prend à savourer le texte assez écrit qui parsèment les cases de la première planche. Il retrouve ce dispositif à l'occasion d'une planche dans chaque acte, venant apporter une touche littéraire et poétique à la narration. Il se laisse porter par l'enquête à la méthode naturaliste, sans essayer de devancer l'inspecteur, se retrouvant surpris à plusieurs reprises par ces découvertes, et révulsé par l'horreur du véritable crime. Excellent.
2.5 Le dessin a attiré mon attention sur cet album et de ce côté-là je n'ai pas été déçu. Le dessin est élégant et les couleurs sont splendides. Dommage que le scénario soit vraiment moyen. Au vu de la couverture, je pensais tomber dans un truc romantique ou de l'aventure exotique à l'ancienne et j'ai eu droit à un polar. J'aime bien ce genre, mais j'en ai tellement lu dans ma vite que je suis devenu plutôt exigeant et ici c'est vraiment moyen. J'ai eu l'impression d'avoir vu des situations plusieurs fois. Le pire est qu'il y a des grosse facilités dans le scénario, mention spécial au fait que l'enquêteur apprends des choses troublantes sur la victime que vers le milieu de l'album et en plus le gars semble surprit que des riches utilisent leurs pouvoirs pour faire ce qu'ils veulent en tout impunité ! Ça se laisse lire sans plus.
Un couverture qui envoie sur une fausse piste pour un polar dans le Paris de la belle époque. Le cadavre d'un riche industriel est retrouvé sur une goélette échouée en baie de Somme. L'enquête de l'inspecteur Amaury Broyan va nous plonger dans le Paris du début du XX° siècle au milieu des Apaches, de la bourgeoisie, de l'art et de parties fines. Trois chapitres composent cet album, avec à chaque fois un texte de Nelly Roussel en entrée en matière, une femme de lettres libertaire et féministe. Car il y a un relent de féminisme dans cet album. Une intrigue somme toute assez classique, mais les rebondissements successifs ont maintenu mon intérêt jusqu'à la dernière page même si c'est quelques fois tiré par les cheveux. Des personnages tout aussi classiques, ils manquent de coffre pour vraiment s'y attacher. Mais l'enquête permet de visiter les cabarets de la butte Montmartre en passant par l'atelier de Alfons Mucha,. L'atout majeur de cet album reste le dessin de Alexis Chabert, de très belles planches qui m'ont transporté dans ce Paris début XX° siècle. C'est avant tout un album d'ambiance, et sur ce point, c'est une réussite totale. Les couleurs pastel n'y sont pas étrangères. Superbe. Une lecture recommandable. Ce 11 octobre sort Hiver à l'opéra des mêmes auteurs et toujours avec l'inspecteur Amaury Broyan.
J'ai bien aimé cette série policière à la sauce Art-Déco. Le scénario est assez classique et prend pour référence les univers policiers des romans de cette époque avec une touche de Maigret qui nous rappelle presque son "Bon Dieu mais c'est bien sûr.". Les codes sont respectés avec un meurtre sous forme de punition, un indice mystérieux voire ésotérique et un inspecteur intègre qui affronte des milieux hostiles. Perso j'ai bien aimé la façon dont Philippe Pelaez nous conduit aux côtés de l'inspecteur Broyan à dépasser les apparences pour découvrir le fin mot de l'histoire. Le schéma est classique mais bien mené avec des rebondissements qui nous font voyager dans les mondes des Apaches, des artistes ou des grands bourgeois d'une ville aux mille visages. Alexis Chabert se régale et nous régale à travers ses peintures aux dominantes bleues des divers quartiers parisiens. Chabert en profite pour nous replonger dans des lieux mythiques comme le "Lapin Agile" qui ont marqué l'élan créatif de cette époque. J'ai trouvé cette lecture très plaisante à lire et franchement belle à regarder.
Alors déjà, clarifions un point. Cette bd ne se déroule absolument pas en baie de Somme. Moi qui pensais y voir des paysages que je connais bien et que j'apprécie beaucoup, je n'ai trouvé que Paris, ville que je déteste. Bon, le dessin sauve heureusement l'ensemble et s'il y a quelques facilités dans l'enquête (comme le souligne très justement MacArthur dans son avis), le tout s'avère une lecture agréable bien que dispensable. Si vous aimez l'ambiance Parisienne de ces années ou l'art déco et son univers, vous apprécierez sans doute.
Derrière un titre assez bucolique, se cache un polar assez sombre qui se déroule à la belle époque, sous la présidence du fameux Félix Faure. Nous suivons l'enquête de l'inspecteur Amaury Broyan, rongé par un drame familial, sur le meurtre d'un riche industriel parisien. Si l'enquête ne m'a guère convaincue, j'ai été littéralement séduit par le dessin d'Alexis Chabert, auteur que j'avais découvert il y a plusieurs années avec La Prophétie des deux mondes, dont je louais déjà le dessin remarquable. Alexis Chabert nous offre un superbe portrait du Paris de la belle époque, avec des références aux tableaux de Gustave Caillebotte ou encore de Jean Béraud. Il nous fait parfaitement ressentir aussi bien l'atmosphère du Paris haussmannien des salons, que du Paris des bas-fonds. Si cette bd est scénaristiquement bancale, elle est graphiquement très réussie. J'ai lu cette histoire dans l'édition canalbd, tirée à 1500 exemplaires, dans laquelle Alexis Chabert nous confie, dans le dossier présent, les origines de ce projet et les peintres qui l'ont inspiré pour cet album. J'en conseille évidemment la lecture.
Et bien ! J’en attendais sans doute de trop après lecture de l’avis de Ro et en partant du fait que j’ai bien aimé jusqu’à présent les scénarios de Pelaez, mais je dois bien avouer être franchement resté sur ma faim à la lecture de cette intrigue policière. Car il s’agit bel et bien d’une enquête policière et non d’une évocation historique ou d’un récit de vie. Par conséquent, pour me convaincre, il faut que celle-ci tienne la route. Or là, la manière dont cette enquête est résolue est d’une facilité assez incroyable, limite stupide. Pourtant nous avons tous les personnages utiles à l’intrigue. Une victime chef d’entreprise trop propre sur lui pour être honnête. Sa femme au caractère fort qui en fait une coupable toute désignée. La maîtresse au profil classique, suave modèle pour peintres. L’enquêteur pour qui cette enquête réveille de douloureux souvenirs. Rien à dire pour cette galerie de personnages, c’est exactement ce qu’il faut. Pourtant le cadre est plaisant. Bon ! Pas franchement original étant donné la prolifération d’œuvres qui utilisent Paris (oui, parce que la baie de Somme, c’est juste un détail dans ce récit) et le changement de siècle comme théâtres de leur histoire mais cette période et cette ville dégagent le romantisme qui convient. Pourtant le dessin et le découpage sont bons. Bon si la couverture et la référence à Alfons Mucha font très « Belle Epoque », le trait d’Alexis Chabert et surtout sa colorisation (mais aussi certaines vues, notamment l’intérieur d’un café dans lequel je m’attendais à croiser Hélène Andrée devant son verre d’absinthe) me rappellent bien plus le style impressionniste mais ce n’est pas grave et de toute façon conforme à l’époque. Un peu trompeur sur la marchandise au vu de la couverture (je m'attendais à avoir un découpage des planches plus audacieux) mais agréable à regarder. Mais franchement, à mes yeux l’enquête policière ne tient pas la route. Pourquoi l’enquêteur doit-il attendre la fin du récit pour trouver l’origine du problème alors même que cette origine semble être un secret de polichinelle et qu’il a passé son temps à interroger l’entourage de la victime ? C’est juste… absurde, pas plausible. Et à partir du moment où l’on a cette explication, tout l’édifice s’écroule. Le comportement de la femme de la victime devient lui aussi absurde. Quant à l’enquêteur, il passe juste pour un nigaud incompétent à mes yeux. Non, franchement du point de vue de la résolution de l’enquête policière, centre névralgique du récit, c’est une grosse déception ! Ah oui, et puis le coup de la victime qui, avant de mourir, plutôt que d’écrire le nom de son bourreau, préfère écrire un code incompréhensible pour le désigner, ben ça non plus je ne trouve pas ça crédible pour deux balles ! Franchement, c'est encore plus tordu que quand on donne un indice à la con pour la couverture mystère du jour, rien que pour le plaisir de voir patauger ceux qui cherchent... Sauf que là, le but était de désigner le coupable et non de faire galérer les enquêteurs (et donc ce n'est pas cohérent). Donc voilà ! C’est con parce qu’il y avait beaucoup d’atouts mais cette enquête policière ne m’a pas du tout convaincu.
Derrière un titre romantique et une belle couverture aux allures de peinture de Mucha, on pourrait s'attendre à un roman graphique sentimental. Il n'en est rien. C'est un polar, un polar dans le cadre du Paris de la Belle Epoque, à la fin du 19e siècle. Un riche industriel a été tué, empoisonné à bord de sa goélette échouée à bord de laquelle il semblait être seul. Un flic parisien est mis sur l'enquête et ses soupçons se portent très vite sur la veuve de la victime qui parait très prompte à profiter de son héritage pour reprendre la main sur l'entreprise de son ex-mari. Ce dernier avait aussi une maîtresse, une jolie rousse qui travaille comme modèle pour peintre, et elle pourrait aider le policier à avancer dans son enquête. Ce qui marque ici, c'est le graphisme. On sent le plaisir d'Alexis Chabert à faire revivre le Paris d'alors et il arrive à nous le transmettre de belle manière. Certes son encrage manque de précision et n'est pas parfait, mais il passe bien et surtout les couleurs, elles, sont superbes. C'est de la peinture directe, voire de la peinture tout court pour certaines planches très inspirées de tableaux d'époque, ainsi que d'illustrations Art Nouveau pour ce qui est des pages de titre de chaque chapitre. On tombe facilement sous le charme de cette ambiance visuelle, de l'esthétisme de la Belle Epoque, et de son univers mêlant bourgeoisie des grands Boulevards, anarchistes des guinguettes de Montmartre, milieux artistiques et sombres méandres d'une enquête policière. L'intrigue, elle, est un peu moins marquante mais elle tient la route. L'enquête policière trouve ses avancées de manière un peu facile, avec des témoins prompts à fournir des informations clés au détective. Mais elle mêle des éléments variés et intéressants, intégrant notamment en parallèle de l'enquête officielle une autre recherche de vérité, celle du policier qui cherche à venger la mort de sa fille des suites d'un avortement raté. C'est parfois un rien embrouillé, avec aussi une ou deux ellipses pas très claires, comme la raison de la blessure du héros lors de la scène finale qu'on ne peut que deviner après coup. Mais on se laisse bien porter par le récit qui s'avère assez intelligent, et surtout il permet de savourer pleinement la beauté des décors et de l'ambiance de la Belle Epoque.
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