Le Labyrinthe inachevé (Mazebook)
Jeff Lemire revient avec un roman graphique légèrement fantastique où le surnaturel côtoie le réel. Par sa grande humanité et son écriture teintée de surréalisme, ce récit rappelle les meilleurs romans de Haruki Murakami
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Will est chef de chantier. Tout au long de sa journée, Will est hanté par sa fille, morte dix ans auparavant et à son incapacité à s’en rappeler, comme de se remémorer les événements importants de sa vie. Il en néglige toute socialisation, dans sa vie privée comme au travail. Jusqu’à ce qu’un mystérieux appel téléphonique au cœur de la nuit chamboule sa vie. L’appel lui indique que sa fille est toujours vivante, coincée dans le labyrinthe d’un livre de jeux qu’elle n’avait pas terminé avant de disparaître. Convaincu que son enfant le contacte d’au-delà de ce monde, il utilise un labyrinthe inachevé d’un de ses journaux et une carte de la ville pour ramener sa fille à la maison…
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Date de parution | 24 Août 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Très chouette album. Lemire joue sur la corde raide, que ce soit au niveau du dessin (minimaliste) ou du scénario, qui ne tient qu’à un fil ! Mais j’ai suivi ce fil jusqu’au bout, et jamais je ne me suis ennuyé. Lemire a vraiment beaucoup de talent pour développer une intrigue et brosser le portrait d’un personnage avec peu de moyens. Il y a bien sûr l’histoire de ce type un peu paumé, désabusé, qui n’arrive pas à se remettre de la perte de sa fille – qui a entrainé la rupture d’avec sa femme et sa mise en retrait sociale. Un deuil impossible et pourtant, il est question de renaissance. L’histoire avec sa voisine, qui pratique un métier à la fois proche du sien tout en étant à l’opposé éthiquement, qui la drague gentiment malgré ses refus bourrus, est, elle aussi, pleine de fragilités et d’optimisme. Si la dernière image est une porte fermée, nous savons qu’elle va s’ouvrir à nouveau. En voulant ramener sa fille à la vie, en la retrouvant en suivant les labyrinthes qu’elle lui aurait laissé (une dérive urbaine qui permet aussi à Lemire de montrer une ville moderne froide, a priori repoussante), c’est bien sûr lui-même que le héros (re)trouve et sauve. Une chouette lecture en tout cas.
Je commence à découvrir Jeff Lemire sous la pression de notre webmaster qui n'a de cesse de le louer. Et il faut dire qu'il sait se faire convaincant le bougre ! C'est tout naturellement que je me suis tourné vers un de ses plus connus pour commencer cette découverte, et elle fut très belle ! L'histoire de deuil d'un homme seul n'ayant pas surmonté sa perte est exploité avec cet imaginaire du labyrinthe faisant évidemment référence au mythe de Thésée mais pas seulement. La BD est aussi une exploration urbaine dans laquelle la solitude est présente alors que les bâtiments enferment dans un labyrinthe de murs (symbolique présente tout au long de la BD), solitude d'un homme désormais sans liens sociaux et qui ressasse son passé. La BD est toute tournée autour de ce personnage, avec abondances de détails renforçant les symboliques : le fil rouge de l'histoire, ici carrément présent physiquement, la perte et les retrouvailles, les complémentarités... Ce dernier point est là encore traité de façon assez originale : il est en opposition avec sa voisine sur le travail : lui surveille les normes des nouveaux bâtiments, elle protège les anciens. C'est la dualité entre la préservation et la reconstruction, mais présenté comme complémentaire et même nécessaire. Une belle image métaphorique du récit, là encore. C'est un récit enchâssé de métaphore qui font ressortir un parcours somme toute "banal" de deuil enfin accepté, comme tant d'autres histoires l'ont déjà fait. Mais ce n'est pas l'histoire l'important, c'est comment on la raconte. Ici tout n'est que symbole de ce dépassement d'une situation initiale insupportable. Le tout est mis en image d'une façon originale, en tout cas je ne connaissais pas le trait de Lemire. C'est un fatras de trait qui reste toujours clair et lisible, ainsi qu'une mise en couleur privilégiant les petites touches pour rehausser l'ensemble. L'aquarelle donne le relief au dessin, tandis que son trait permet de créer de la répétition et partir dans des fulgurances lorsque le récit le demande. Il y a de vrais contrastes de planches avec des compositions originales dans les face-à-face dialogués ou la course remontant vers le labyrinthe. Je n'ai pratiquement jamais été perdu dans ma lecture malgré tout, l'auteur usant de petits artifices simples pour lier les cases et maintenir le lecteur dans le récit, comme découper de toute petite ouvertures dans les cases pour indiquer le sens de lecture. Une BD maitrisée de bout en bout, c'est clair : dessin, histoire, originalité, traitement, métaphore, tout est clair et limpide mais aussi efficace et bien trouvé. L'histoire touche rapidement au cœur de son sujet tout en restant dans une sensibilité pudique, qui ne rentre jamais dans l'effusion. Il n'y en a pas besoin, et c'est tout aussi bien. Après lecture je peux confirmer que ce premier Jeff Lemire ne sera pas le dernier ! Je ne m'attendais pas à autant aimer.
Un album qui aura déjà fait couler beaucoup d’encre, je ne vais pas m’éterniser. Juste préciser que c’est franchement à essayer. C’est ma première rencontre avec l’auteur, et si son trait ne m’a pas encore vraiment convaincu, j’ai été agréablement surpris de son univers et surtout de sa narration, qui m’a subjugué. La part fantastique est très bien amenée, l’allégorie du labyrinthe judicieuse pour soulever des questions et des émotions. Un beau roman graphique. Je vais me pencher sur les autres productions de Jeff Lemire.
Perdre le fil - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il regroupe les cinq épisodes, tous doubles, de la minisérie, initialement parus en 2021/2022, écrits, dessinés et encrés par Jeff Lemire, avec un lettrage réalisé par Steve Wands. Il contient les couvertures originales de Lemire, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Andrea Sorrentino, Dustin Nguyen, Gabriel Hernández Walta, Werther Dell’Edera, Dean Ormston, Matt Kindt. Il s’achève avec une postface de six pages dans laquelle l’auteur évoque la période de gestation de l’œuvre, l’influence de l’écriture de Haruki Murakami dont il avait lu plusieurs livres, sa volonté de faire quelque chose de différent de la précédente série qu’il avait écrite et dessinée, l’extraordinaire ROYAL CITY, une visite et une discussion déterminante avec son ami Matt Kindt, la décision de choisir un environnement urbain de grande ville à partir de quartiers réels de Toronto, la difficulté pour lui de créer les couvertures, trouvant finalement l’inspiration auprès des illustrations de Greg Ruth et de Michael Cho. William Warren se souvient de sa fille Wendy, décédé avant d’avoir atteint l’âge adulte. Il se rappelle qu’il avait un vieux pull rouge avec des motifs, et qu’elle le portait chaque fois qu’elle en avait l’occasion. Son épouse Elena ne l’aimait pas, et il sentait la naphtaline. Elena essayait de le jeter mais Wendy le retrouvait dans la poubelle et le récupérait. Will ne sait pas pour quelle raison elle l’aimait autant, mais maintenant quand il se souvient d’elle, c’est toujours dans ce pull rouge, avec ses mailles qui se défaisaient, et quelques bouts de laine qui s’enroulaient en tirebouchon. Au temps présent, Will est dans le métro, en train de se rendre au boulot : il exerce le métier d’inspecteur de la construction. Il ne comprend pas pourquoi il se souvient si bien de ce pull, alors qu’il a oublié les traits du visage de sa fille. C’est comme si chaque jour qui passe, et chaque pas effectué l’éloignent un peu plus d’elle. Mais il ne peut pas remonter le temps. William arrive à son bureau. Ses collègues le saluent l’un d’eux lui propose son aide pour le gros dossier qui vient de lui tomber dessus. Il s’installe à son bureau et commence à tracer un trait rouge sur un plan : ça fait dix ans et il a oublié autre chose. Un collègue s’approche de lui pour lui proposer d’aller boire un pot pour l’anniversaire de Chuck. Will décline l’offre, il préfère se rendre sur son premier chantier. Il quitte son cubicule et se met en route. Sur le site de construction d’un immeuble, il fait observer au contremaître que les barres d’armature sont trop espacées et qu’il va falloir casser et refaire. Son interlocuteur lui demande son indulgence : ça va lui demander une semaine supplémentaire. Will maintient poliment sa position, et indique qu’il repassera vendredi. Il s’éloigne tout en pensant à la pièce qu’il a à l’intérieur de lui, celle où se trouvent ses souvenirs de sa fille. Il s’y rend mentalement et en ouvre la porte. Elle est là allongée par terre, dans son pull rouge, sans traits de visage, en train de résoudre un labyrinthe dans un recueil de labyrinthes. Il la serre dans ses bras. La carrière d’auteur de comics de Jeff Lemire a débuté dans la seconde moitié des années 2000, avec des récits indépendants, à savoir la trilogie ESSEX COUNTY. Par la suite, il a continué à créer des comics indépendants, avec un passage de scénariste pour DC (Animal Man, Frankenstein agent of S.H.A.D.E., Green Arrow avec Andrea Sorrentino pour ce dernier) et pour Marvel (Extraordinary X-Men, Old Man Logan, Moon Knight). Il a également écrit pour Valiant Comics avec la série Bloodshot. Il a développé ses propres séries, y compris un univers partagé de superhéros : Black Hammer. De temps à autre, il réalise un récit plus personnel dont il assure également les dessins, comme l’émouvant Royal City, le rude Roughneck (Winter Road), ou bien le présent récit. Dès la première page, le lecteur comprend qu’il s’agit d’une histoire de perte d’un être cher : Wendy est décédée à l’âge de onze ans, et son père n’a pas achevé son deuil. Voilà qu’un signe se manifeste laissant planer le doute : il est peut-être possible de la joindre, et son père se raccroche de toute sa force à cette éventualité. S’il s’est résigné au décès de sa fille, il ne l’a pas accepté. Le lecteur fait connaissance avec William Warren, surnommé Will, inspecteur de la construction, un fonctionnaire de la ville de Toronto, même si elle n’est pas nommée dans le récit, Lemire le précise dans le dossier en fin de tome. Sa vie est devenue mécanique, une routine répétée chaque jour, pour ne plus ressentir, parce qu’il n’a plus de raison de vivre, mais aussi parce qu’il ne veut pas aller de l’avant et reconnaître que sa fille est partie définitivement. Son épouse a divorcé, elle s’est remariée avec un dénommé Daniel, et ils ont eu un fils Jack : elle a refait sa vie. Ses collègues essayent de le tirer de sa solitude choisie, en l’invitant à prendre un verre, ce qu’il refuse systématiquement. Sa voisine Lisa lui adresse régulièrement la parole, essayant d’établir un contact amical. Pour autant, Will a fait le choix très conscient de rester isolé, de conserver ses souvenirs de sa fille dont il ne parvient déjà plus à se souvenir des traits du visage. Une nuit, il est persuadé d’avoir reçu un appel téléphonique de quelques secondes, cela ne peut être qu’elle. Cela suffit pour qu’il se mette en tête de la retrouver, en se raccrochant à ce qu’il lui apparaît comme un bout de laine rouge, et en se plongeant dans ces labyrinthes qui étaient sa passion. Un fil rouge, un labyrinthe : l’inspiration est transparente, elle provient du mythe de Thésée, avec le labyrinthe, le fil d’Ariane, et peut-être un Minotaure tapi quelque part. De manière implicite, l’esprit du lecteur lui souffle qu’il n’y a aucun suspense dans cette histoire, pas vraiment une intrigue. Le monde dans lequel Will évolue est très prosaïque et l’irruption de la féerie ou du surnaturel s’avère fort improbable. Même s’il ne met pas en marche son esprit critique, il ne voit pas comment le décès de Wendy pourrait être remis en question. L’enjeu réside dans un récit intimiste, l’équilibre instable de l’état d’esprit de Will. Va-t-il se réfugier dans un monde de fantaisie, en choisissant de se comporter comme s’il restait une possibilité que sa fille soit en vie quelque part ? Va-t-il sombrer en reconnaissant la réalité brutale de son décès ? La manière de dessiner de l’artiste convent parfaitement à ce récit intimiste et à la personnalité de William Warren : des traits lâches irréguliers, avec un rendu en apparence négligé comme celui de Will. Des apparences âpres, sans souci d’embellissement, sans volonté de paraître agréable, à l’image de l’état d’esprit de Will. Les traits de contour sont irréguliers, souvent fins et presque malhabiles, en particulier pour les visages, les coiffures, les vêtements. Les décors sont représentés sommairement. Pour autant cette manière de transcrire la réalité conserve toute l’immédiateté des personnages, toute leur expressivité. Dans un premier temps, la narration visuelle peut donner une sensation parfois un peu pauvre. Il est vrai que l’auteur a choisi de faire usage de la décompression pour que le lecteur prenne le temps de s’imprégner de l’état d’esprit de Will, de subodorer ses états d’âme. Ainsi dans le premier épisode, il réalise un dessin en double page, avec uniquement un fil rouge qui part de la gauche et finit à droite séparant le tiers en bas de page du reste, avec un effet de nuage ou d’eau à l’aquarelle pour tout fond, et un cartouche qui ne contient que deux mots : onze ans. Deux pages plus loin, une autre double page avec la silhouette de Will et le même fil rouge, cette fois-ci décrivant des arabesques de part et d’autre de son corps, et remplissant ce dernier comme avec un gribouillis. La moitié du chapitre quatre est composé de Will et du chien Vern qui déambulent dans les rues vides. Dans le même épisode, Lemire réalise quatre pages avec quatre cases de la largeur de la page, et juste la tête de Will qui progresse lentement dans les ténèbres. Mais ça correspond également à une forme d’anesthésie de Will par rapport à la manière dont il vit son quotidien. Par ce mode narratif, la détresse de Will est poignante : son intensité ne se manifeste pas des accès de dépression ou par de la colère, mais elle est très profonde et elle étouffe son élan vital. Sans recours à des termes psychologiques ou psychanalytiques, Jeff Lemire fait partager la détresse de cet homme, un non-dit sur la culpabilité qu’il éprouve, sentiment qu’il refuse de s’avouer, sa manière très efficace de détourner toute chaleur humaine, à la fois parce qu’il estime qu’il ne mérite pas ce genre de relation positive, à la fois parce qu’il ne veut pas que de nouveaux sentiments positifs viennent accélérer l’effacement de ceux liés à sa fille. Le lecteur voit bien la manière dont la situation et le comportement de Will répondent au mythe de Thésée, comment le labyrinthe devient la métaphore de son cheminent intérieur. Il est perdu dans un labyrinthe émotionnel, celui du deuil, et il erre à l’intérieur sans volonté d’en sortir, sans méthode pour chercher la sortie… ou le centre du labyrinthe. Au fil des pages, l’évidence de cette métaphore devient telle que le lecteur peut se dire que c’est trop facile, trop téléphoné. Dans le même temps, cette image illustre avec une justesse parfaite le dilemme de Will, ainsi que le processus mental et émotionnel à l’œuvre, la manière dont sa volonté de conserver à tout prix le souvenir même de sa fille, l’être humain qu’elle a été, le conduit à se montrer actif, un paradoxe puisque l’action induit de nouvelles expériences et donc le début de changement qu’il redoute tant, qu’il a tout fait pour éviter, ce changement qui induit l‘éloignement des souvenirs, une autre forme d’abandon de sa fille qu’il est impuissant à combattre. Jeff Lemire a montré à plusieurs reprises dans ses récits les plus personnels qu’en tant qu’auteur, il a des thèmes de prédilection, comme les relations au sein d’une famille et le deuil. Il a également fait preuve à plusieurs reprises d’une sensibilité d’une grande justesse et d’un grand talent pour faire ressentir les émotions associées à ces thèmes. Ce récit se situe dans cette veine, les idiosyncrasies de sa narration visuelle faisant sens au regard de ce qu’il raconte, l’apparence fruste de ses dessins exprimant l’état d’esprit du personnage. Le lecteur ne peut pas rester de marbre devant une telle honnêteté émotionnelle, une empathie si bien exprimée. En fonction de sa propre sensibilité, il peut éventuellement ressentir que Jeff Lemire l’avait plus touché dans Royal City ou dans Rough Neck, ou au contraire que Mazebook est plus poignant.
Un autre album de Lemire que je trouve sympathique à lire, mais qui ne m'a pas trop marqué. Il faut dire que je n'ai pas ressenti beaucoup d'empathie pour le personnage principal alors que ce qui lui est arrivé dans le passé est tout simplement bouleversant. Sa quête est intéressante à lire même si j'ai eu une bonne idée de la manière dont cela allait se terminer. Je pensais qu'à un moment j'aillais trouver le récit captivant et ce moment n'est jamais arrivé. Cela reste une quête spirituelle (enfin je pense que c'est ça, c'est un peu dur de savoir si cela arrive pour de vrai ou dans la tête du héros) qui se laisse lire sans problème, c'est juste que je ne trouve pas ça génial comme la majorité des aviseurs. Le point fort selon moi est le dessin de Jeff Lemire. J'adore son style et la mise en scène est tout bonnement géniale. Dommage que je ne puisse pas dire la même chose du scénario parce que je voulais vraiment adorer cet album.
Encore une très belle surprise que ce 'Labyrinthe inachevé'. Un récit sur plusieurs strates, un père part à la recherche de sa fille décédée depuis 10 ans. Sa recherche commencera dans le monde réel pour se terminer dans un monde parallèle. Une narration avec un fil rouge bien présent physiquement sur les planches, celui-ci provient du pull-over de sa fille, un pull-over qui se détricote à l'infini pour servir de lien entre le père et la fille. Une narration toute en nuances qui explore les rouages du cerveau après le traumatisme de la perte d'un enfant et l'impossibilité d'en faire le deuil. Le labyrinthe en sera la clé, pas celui de Dédale pour enfermer le minotaure (même si celui-ci apparaîtra), mais plutôt comme un espace inconnu ou on peut y voir l'espace du mental, celui de l'inconscient et du subconscient. Lemire ne tombe pas dans le larmoyant, il interroge simplement sur la difficulté à accepter l'inadmissible. Lemire interroge aussi sur les conséquences de la perte d'un être cher. Continuer à vivre ou se recroqueviller sur soi-même quitte à s'isoler ? Un récit poignant qui m'a profondément marqué. Une mise en page surprenante où nos yeux suivent le sens de lecture des cases avec ce fameux fil rouge qui suit des chemins tortueux. Un trait puissant et expressif qui apporte cette force au récit. Grandiose. Plongez-vous dans ce Labyrinthe mental.
3ème avis du week-end sur Le Labyrinthe inachevé de Jeff Lemire. Cette BD mérite d'avoir le vent en poupe. Les avis élogieux m'ont poussé à feuilleter le bouquin dont le thème m'intéressait. Puis le feuilletage m'a complètement poussé à l'achat. Déjà pour ce qui sautait aux yeux, le dessin, qui m'a plu direct. Quelques traits subtils suffisent à changer l'expression des personnages du tout au tout, il y a du détail, une colorisation qui s'adapte... Et puis beaucoup de cases muettes, et ça, ça m'intriguait. Voir si peu de textes Et pourtant ce texte il reste en tête, la traduction n'ayant certainement pas dénaturé la version originale. Très puissant et efficace, il nous permet de rester en plein cœur de l'intrigue et des pensées de William. Chaque mot et chaque dialogue sont à leur place. Et puis j'ajoute le coup de cœur pour le scénario. Le lecteur lui-même est au cœur de ce labyrinthe, sachant ce qu'il aimerait trouvé mais n'ayant aucune idée du chemin qui sera pris. On se demande si Will va s'en sortir, alors que ses pensées se confrontent avec la réalité, le rêve, l'illusion et l'amnésie. Toute cette quête m'a ému à plusieurs reprises, et il y a une tension ambiante qui empêche de fermer le bouquin. Les nouvelles lectures n'en seront pas moins intéressantes, car il y a d'autres sujets à explorer que l'histoire en elle-même. La petite magie de cette histoire est, je trouve, d'avoir réussi à créer une histoire si personnelle et profondément émouvante avec une lecture aussi limpide. Laisser la place au silence permet parfois de s'exprimer davantage. Une approche vraiment originale sur le deuil, où l'allégorie du labyrinthe prend tout son sens. Le style du dessin tient un rôle essentiel, il y a intérêt de l'apprécier pour aimer ce récit je pense. En ce qui me concerne, c'est une des pépites de l'année
Le labyrinthe inachevé de Jeff Lemire chez Futuropolis - 2022 Will est inspecteur des bâtiments pour la ville. Quand il rentre le soir chez lui, on sent sa solitude et sa neurasthénie. Il a perdu sa fille il y a 10 ans et ses traits qui s'estompent dans sa mémoire le désespère. Un jour il reçoit un coup de fil mystérieux. La voix qu'il entend c'est celle de sa fille qui lui dit qu'elle est coincée au centre. Il se remémore les Labyrinthes qu'elle aimait faire et contre toute vraisemblance il part à sa recherche, convaincu que c'est bien elle. Dans un graphisme maîtrisé, l'auteur reste sobre dans ses couleurs qui sont apposés soit façon lavis soit comme des aquarelles. Il nous invite, cependant à suivre un fil rouge, celui, du vieux pull que la fillette affectionnait. De recherches en rencontres, Will avance et cherche. Saura-t-il trouver? Ça parle de mémoire, d'oubli, de deuil, de rédemption, de reconstruction, d'espoir. Ça se lit en apnée, avec l'émotion au bord des lèvres. Une BD magnifique tant par le dessin qui semble fait, par moment, dans l'urgence, que par le texte qui génére un coup AU cœur. Un véritable coup DE cœur #lelabyrintheinacheve #lelabyrintheinachevé #jefflemire #futuropolis #bd #deuil
Le gros point fort de ce « Labyrinthe inachevé » est incontestablement la puissance avec laquelle il vous happe immédiatement, sans vous lâcher jusqu’au dénouement. Pour ce faire, Jeff Lemire a réuni trois ingrédients imparables : le mystère, l’amnésie et la folie. Et pour touiller ces ingrédients, il a choisi comme récipient ce fameux labyrinthe que le protagoniste principal, William Warren, va parcourir dans une quête échevelée. Son but : retrouver sa fille Wendy, à l’origine d’un étrange appel téléphonique, cette fille censée être morte il y a plusieurs années et dont le visage n’en finit pas de se dissoudre dans les brumes de sa mémoire. Pour concevoir cette histoire menée tambour battant, Lemire dit s’être inspiré de l’écrivain japonais Haruki Murakami (1Q84), dont les romans ont pour caractéristique de mêler avec subtilité réalité et mondes parallèles. De la même façon ici, les frontières entre le quotidien de Will et son imagination passablement débridée s’effritent au fil du récit, perdant le lecteur dans des dédales inquiétants, ce qui somme toute paraît logique lorsqu’il est question d’un thème aussi symbolique que le labyrinthe. Ainsi, il nous faudra absolument découvrir où l’étrange quête va conduire ce père hirsute au regard dément, qui va s’enfoncer dans les sous-sols de la ville et dont l’obsession est devenue nôtre. Y trouvera-t-il le monstrueux minotaure ? Ou s’agit-il juste d’un cauchemar ou d’une bouffée délirante ? L’appel mystérieux de Wendy n’est-il pas que le fruit de son imagination ? Le choc final sombre et dantesque auquel certains pouvaient s’attendre ne se produira pas, laissant la place à une conclusion apaisante, sans doute un peu trop elliptique pour être véritablement crédible. Du reste, le propos fait du livre une réussite si l’on s’en tient à l’aspect purement parabolique de cette quête. Le dessin à l’arrache de Jeff Lemire amplifie parfaitement le climat d’urgence et de folie qui imprègne l’album. Si l’on peut être un brin rétif à son coup de crayon frénétique, qui sculpte les personnages à la manière d’un burin, on est pleinement convaincu par son sens de la mise en page et ses cadrages efficaces. Le fameux fil rouge qui virevolte entre les cases tout au long du livre, corrélé au pull rouge guenilleux de sa fille et se faisant « fil d’Ariane » pour la quête labyrinthique du père, demeurera une des trouvailles marquantes du récit.
Nouveau très bel album signé Jeff Lemire. Dans celui-ci l’auteur canadien nous parle du deuil et de l’acceptation au travers d’un récit qui, comme souvent chez lui, flirte avec les limites du fantastique. Le récit est touchant et Lemire parvient à nous faire partager l’état d’égarement de ce père endeuillé qui ne parvient pas à tourner la page, angoissé, terrorisé même du fait qu’il commence à oublier les traits du visage de sa fille. L’allégorie du labyrinthe dont ce père va devoir trouver le centre est très bien trouvée puisque justement elle se réfère directement à cet état d’égarement et à cette nécessité de terminer quelque chose avant de pouvoir en commencer une autre. L’opposition entre le caractère insensé de la quête du père et son environnement très réaliste m’a fait penser au « Fisher King » de Terry Gilliam (film dans lequel un personnage sombre dans une folie douce après le décès de sa compagne et s’imagine investi d’une mission divine). La mise en page est inventive. Ici, un fil rouge symbolise la marche à suivre tel le fil d’Ariane. Là, le découpage plonge directement le personnage au cœur d’un labyrinthe. Le trait de Lemire convient toujours aussi bien pour illustrer ce genre de personnage au bord de la rupture, il s’en dégage une fragilité touchante, encore accentuée par une colorisation qui donne à ses traits un air maladif tout à fait adéquat. Avec ce récit, l’auteur parvient à cristalliser les angoisses des parents devant ce qui, je suppose, doit être leur plus grande crainte (la perte d’un enfant) mais il le fait grâce à un récit original et créatif… et, en définitive, optimiste. J’ai vraiment bien aimé.
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