Journal inquiet d'Istanbul

Note: 3.89/5
(3.89/5 pour 9 avis)

L'histoire vraie d'Ersin Karabulut, célèbre artiste de bande dessinée turc ; son parcours des banlieues déshéritées d'Istanbul aux sommets de l'édition et de la presse satirique ; comment il vécut, parfois en première ligne, les bouleversements et l'agitation politique de son pays, une Turquie transitant lentement d'une démocratie à un régime autoritaire.


Autobiographie Futurs immanquables La Turquie Profession : bédéiste

En même temps qu'il raconte son parcours d'artiste et de citoyen lambda, Ersin Karabulut dresse le portrait d'un pays tiraillé par des antagonismes politiques et sociétaux profonds, dont l'histoire récente est faite de coup d'états, d'espoir, de désillusion et de drames.

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 19 Août 2022
Statut histoire Série en cours 2 tomes parus
Dernière parution : Moins d'un an

Couverture de la série Journal inquiet d'Istanbul © Dargaud 2022
Les notes
Note: 3.89/5
(3.89/5 pour 9 avis)
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17/08/2022 | Mac Arthur
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Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Blue boy

Volume 1 : Ersin Karabulut, figure emblématique de la bande dessinée turque, signe avec Journal inquiet d’Istanbul une autobiographie vibrante, où se mêlent talent graphique, récit poignant et critique sociale. Istanbul, ville qu’il dépeint avec amour et réalisme, devient un véritable personnage, avec ses ruelles animées, ses minarets omniprésents et ses contrastes saisissants entre tradition et modernité. Pas de doute, on y est ! Et pour ceux qui n 'y auraient jamais mis les pieds, c'est une excellente occasion de découvrir un pays finalement assez méconnu de ce côté-ci de l'Europe. Le premier volume pose les bases d’un récit intime et universel. Karabulut y raconte son enfance marquée par une passion précoce pour Tintin, Astérix, Popeye, Superman et les comics US, ses débuts difficiles liés à un environnement peu favorable, et ses premiers pas comme caricaturiste. À travers un style fluide et un humour candide, il expose les entraves rencontrées : un contexte familial exigeant, des contraintes financières, et la montée d’un climat politique plus conservateur sous l’influence des islamistes. Le quartier de Beyoglu, refuge des artistes, devient un symbole de liberté dans un parcours semé d’embûches. Sur le plan graphique, le trait dynamique de Karabulut, mêlant finesse de la ligne claire franco-belge et impact du comics indépendant américain, capte l’attention. La richesse de ses couleurs et son sens aigu de la mise en scène renforcent l’immersion dans ce récit sincère et attachant. Tome 2, 2007-2017 : La seconde partie, plus sombre, explore les années 2007-2017, marquées par l’ascension autoritaire de Recep Tayyip Erdogan et le recul des valeurs laïques d’Atatürk. Karabulut y décrit la répression croissante, l’intolérance religieuse et les menaces pesant sur les voix dissidentes, y compris les caricaturistes. Malgré cette atmosphère pesante, il partage également des moments de solidarité, notamment la création du magazine Uykusuz avec ses amis, un projet mêlant passion et débrouillardise. Des anecdotes lumineuses, comme sa visite au festival d’Angoulême, contrastent avec des épisodes douloureux, tels que l’impact des attentats contre Charlie Hebdo. Cette conjonction d’événements nourrit ses doutes quant à l’avenir de son métier et de son pays, mais aussi son désir de continuer à créer, malgré le poids des incertitudes. Au-delà de la qualité exceptionnelle de son dessin et de son écriture, on peut saluer l’humanité de Karabulut. Son œuvre, à la fois personnelle et politique, trouve un écho universel. Par son regard lucide et son ton empreint d’autodérision, il incarne un pont entre l’Orient et l’Occident, à l’instar de Riad Sattouf. "Journal inquiet d’Istanbul" est une œuvre coup de cœur, promettant de laisser une empreinte durable dans le paysage de la bande dessinée internationale. On attend la suite avec une sincère impatience. Et comme le dit très bien Canarde, vous allez entendre parler de lui, c'est certain ! Hasard du calendrier ou pas, notons que le volume 2 est paru le 3 janvier 2025, soit dix ans après le massacre à Charlie Hebdo, à trois jours près.

26/01/2025 (modifier)
Par Canarde
Note: 3/5 Coups de coeur expiré
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Tome 2 Je viens de lire le deuxième tome, et mon enthousiasme grandit. La situation de la Turquie reste le cadre crucial de l'action, mais la période se rapproche de nous (2007-2017). Cet épisode raconte à la fois - la difficulté de créer une entreprise collaborative (je me sens concerné sur ce chapitre !) ici un magazine de bande dessinée, à tendance politique dans un dictature. - la défense efficace des arbres de Gezi face aux bulldozers d'Erdogan, qui démontre que face à un tyran, on a plus de chance de gagner en défendant des arbres que des gens . Mais l'arbre est ici comme la Pomponnette de "la femme du boulanger", il représente la démocratie, comme la petite chatte prend la figure de la femme qui a découché et revint au milieu de la nuit... - la peur et le courage dans un régime arbitraire, les putschs avortés, et les attentats de Charlie-Hebdo à Paris qui ont plus de retentissement dans les autres pays que je n'aurais pu le croire. Tome 1 Les débuts d'un jeune auteur de BD en Turquie. Un dessin et un regard agréable, sur un sujet nouveau pour moi, mais qui rappelle le Persepolis de Marjane Satrapi en Iran, ou L'Arabe du futur de Riad Satouf dans les périodes syriennes, c'est-à-dire le regard d'un enfant sur une dictature en formation. Des points communs donc entre ces trois récits : la distorsion entre le regard d'un enfant qui fait part de ses observations judicieuses sur un environnement que les adultes ne peuvent percevoir de la même façon, grippés qu'ils sont par la peur, l'inquiétude, la résignation ou l'indignation. Une part d'humour donc provoqué par ce décalage enfants/adultes et observation factuelles/motivations politiques. Les trois livres ne vont pas cependant aussi loin que le Guide Sublime de Fabrice Erre qui s'affranchit complètement de la réalité pour mettre son dictateur imaginaire aux prises avec le ridicule de ses décisions, un ridicule qui arrive presque à désarçonner ses bras droits. Ici nous sommes les deux pieds dans la réalité historique Turque, plus récente toutefois que celle retranscrite en Iran par Marjane Satrapi qui remonte au shah et même rêve à la naissance de la Perse. L'environnement social d'Ersin Karabulut (quel nom dépaysant) est constitué de personnes éduquées et plutôt modérées, mais pas très riches et qui ne souhaitent pas faire de vague. Ici peu de référence à une famille élargie comme dans les deux autres albums, c'est le milieu des revues de BD qui l'intéresse, et la montée des barbus qui est le principal ressort dramatique, c'est peut-être pour ça que je suis moins emballée. On sait peu de chose de l'histoire de sa famille, que fait sa sœur, etc... et finalement, cela manque d'épaisseur psychologique Le coup de cœur porte surtout sur le dessin : un caractère des visages qui me rappelle un peu Derf Backderf (Mon ami Dahmer) , du comics underground, mais adouci par la colorisation aquarellée. A mesure que l'enfant grandit, sa vision du monde semble devenir plus proche de la réalité et le dessin devient, lui aussi, plus réaliste. Des photos en fin d'album permettent d'en juger. Ce passage de la caricature comique vers le dessin sensible et précis laisse imaginer un avenir différent pour cet auteur. En tout cas retenez ce nom : Ersin Karabulut, prononcez-le à haute voix, pour le plaisir : je pense qu'on entendra parler de lui...

23/11/2022 (MAJ le 26/01/2025) (modifier)
L'avatar du posteur AuroreYoyo

Coup de cœur pour cette bd que j’ai mis longtemps à lire après être allée la chercher à la bibliothèque quand on me l'a recommandée suite à la lecture de Dissident Club. La raison : le dessin me rebutait, j’avais l’impression de voir un dessin animé satyrique pour adultes . Mais en fait on s’habitue à ce dessin plein de caractère dont j’ai aussi apprécié le côté « volumineux » des formes . L’histoire est très intéressante, à travers l’autobiographie de l’auteur qui parle de pourquoi il a voulu faire du dessin depuis petit, on voit les intimidations des religieux sur sa famille, les angoisses de son père. L’artiste est vraiment sympathique et courageux mais montre aussi ses mauvais côtés quand il fait le filou avec sa copine …lol Je vais m’arrêter à ce tome 1 je crois car j’adore la fin.

14/02/2024 (modifier)