L'Homme à la tête de lion
Du fauve ou de l’homme moderne, qui est le plus féroce ?
Cirque & Saltimbanques Format carré Les Freaks et autres phénomènes de foire Les petits éditeurs indépendants
On dit que le bonheur est une vocation. Celle d’Hector Bibrowski, né dans un cirque à la fin du XIXe avec des poils recouvrant tout son visage, ne le rend pas heureux, mais il ne l’a pas choisie. Comme son père avant lui, il fera la tournée des villes européennes en compagnie d’avaleurs de sabre, de soeurs siamoises, d’hommes-troncs et autres bêtes de foire. Mais tout le monde n’a d’yeux que pour « l’homme à la tête de lion » qui, derrière son visage sauvage, est passionné de littérature et capable de converser comme le plus instruit des gentlemen. Bientôt, l’opportunité d’intégrer le plus grand cirque des États-Unis l’emmène dans le moderne New York où s’élèvent les gratte-ciels et les ambitions démesurées des hommes. Dans ce monde qui a perdu toute échelle humaine et qui connaît les premiers balbutiements du cinéma, l’homme-lion restera-t-il le roi du spectacle ?
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Date de parution | 24 Août 2021 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Une lecture très plaisante, agréable, sur un sujet douloureux. Xavier Coste a réussi à le traiter de façon relativement originale. En effet, s’inspirant d’un personnage réel, il dresse ici une biographie un peu décalée, mais qui s’écarte des angles pris d’habitude pour traiter de ce sujet. Il n’y a pas ici la noirceur et le sadisme qui innerve le superbe film de Browning « Freaks » et, à part quelques scènes (le propriétaire des cirques, l’aréopage de médecins sur la fin), on ne nous montre pas trop ceux qui ont utilisé les freaks à leur avantage (comme l’avait fait David Lynch dans « Elephant man »). C’est centré sur notre homme-lion (aux faux airs de Chewbacca) et les freaks qu’il rencontre. Il monologue souvent, ses réflexions, les qualités qu’il exprime (sa passion pour la poésie, et surtout la peinture) l’écartant de l’idée toute faite sur les « monstres de foire ». Ses réactions l’humanisent, y compris lorsque, sur la fin, il « prend congé » et devient un lion fuyant l’humanité. Coste montre aussi très bien l’évolution, de la fin du XIXème siècle aux premières décennies du XXème, du phénomène des freaks et des cirques, le public se lassant, l’arrivée du cinématographe prenant le pas sur les saltimbanques en général, et les « phénomènes de foire » en particulier. Enfin, on ne peut pas finir sans parler du graphisme de Coste, vraiment très beau, avec une mise en page originale, faisant fi du traditionnel gaufrier. Note réelle 3,5/5.
Le point fort de l'album est le dessin de Coste qui est vraiment très bon. Son trait est élégant et il a un bon sens de la mise en scène. Dommage que le scénario m'a moins plu, peut-être que j'en attendais trop parce que j'avais adoré son adaptation du roman 1984. On suit donc la vie d'un freak qui a une tête de lion et évidemment il n'aura pas une vie normale et passera sa vie dans des cirques et des exhibitions. L'idée de départ est pas trop mal, mais j'ai trouvé qu'il y avait des longueurs et qu'à force les interrogations du personnage titre deviennent un peu ennuyeuses. Ça tourne souvent un peu en rond pour moi. Il faut dire que j'avais déjà lu sur le sujet des foires de monstres alors je ne partage pas l'enthousiasme d'autres posteurs qui semblent avoir découvert ce monde à travers cette BD. Le fait que les foires de monstres semblent avoir surtout été un phénomène nord-américain doit rendre le sujet exotique pour les lecteurs européens et moins pour quelqu'un comme moi qui vit de l'autre coté de l'Atlantique.
Comme avec "1984", ce beau roman graphique de Xavier Coste me laisse perplexe : c'est du bel ouvrage, il y a un style graphique indéniable, un récit original qui prend le temps de développer son sujet, de respirer avec des planches purement visuelles... mais tout demeure étonnamment fade, vaguement ennuyeux à lire, attendu dans ses développements. On suit le parcours d'un homme-freak à tête de lion, sa vie dans un cirque, ses interrogations et espoirs. En fait, cette histoire semble étonnamment dénuée de regard, ce qui est un comble pour un tel sujet (là encore, comme avec "1984") : nous avons exactement ce que l'on s'attend à avoir, un peu comme avec l'élégant film "Nightmare Alley" de Del Toro. "Freaks" demeure indépassable visiblement.
Freak est un mot anglais qui signifie au sens premier du terme « monstre humain ». Nous suivons l’histoire d’un freak à l’époque où ils étaient exhibés dans des cirques. C’est très intéressant et agréable à lire. Le graphisme n’y est pas pour rien, il est très beau et participe à la fluidité du récit. Avec une touche philosophique : nous sentons bien la question en filigrane posée par l’auteur tout au long de l’histoire « Qui sont vraiment les monstres ? les freaks ou les autres humains dits ‘’normaux’’ ». A noter pour l’anecdote, que ce type de freak très velu (le personnage principal) a inspiré Georges Lucas pour créer son personnage Chewbacca. M’être ainsi senti immergé dans le monde des freaks grâce à cette bd m’a donné envie de revoir le super film « Freaks » de Tod Browning (1932).
Fausse biographie, cette BD s'inspire ouvertement de Stephan Bibrowski pour créer un alter ego prénommé différemment mais dont la vie fut très similaire. A travers le parcours de cet homme à la pilosité extravagante, nous découvrons le parcours des freaks en Europe puis dans les Etats-Unis du début du XXe siècle. Hector, l'Homme à la tête de lion, se produit dans des spectacles de cirque, accompagné d'autres Monstres comme lui, en représentation où il se contente d'être simplement lui-même, un être dont la pilosité faciale est incroyablement développé, et de se présenter comme un érudit littéraire contrastant avec son faciès de fauve. Mais c'est aussi avant tout un homme et un artiste, réfléchissant à sa condition, gagnant finalement plutôt bien sa vie mais malgré tout très solitaire malgré la présence d'autres freaks comme lui dans son entourage. Ce fut pour moi une intéressante découverte du monde réaliste des freaks de cette époque et de leurs spectacles qui étaient alors très à la mode. C'est instructif et le personnage d'Hector lui-même est assez intéressant par son parcours et ses questionnements. Il est aussi assez touchant, notamment quand il rencontre une femme affectée de la même particularité physique que lui et qu'il se fait rejeter car il lui rappelle justement trop sa propre condition qu'elle déteste. Graphiquement, rien à redire non plus, le dessin de Xavier Coste est élégant et très joli, avec un style me rappelant celui de Duchazeau que j'aime beaucoup. Pour autant, je dois avouer ne pas avoir franchement captivé par cette lecture et ne m'être jamais senti très proche de son héros et narrateur. Ce fut pour moi une lecture plutôt agréable mais qui n'aura finlement guère marqué ma mémoire.
Ce qui m’aura particulièrement marqué à la lecture de cet album, c’est l’osmose qui se dégage du thème, du style graphique et du style narratif. Cette complémentarité entre ces trois éléments est pour beaucoup dans mon appréciation générale. Le thème central, comme l’indique on ne peut plus clairement le titre de l’album, se développe autour d’un personnage : l’homme à la tête de lion, monstre de foire que nous allons suivre durant une bonne partie de sa vie. Le portrait est sensible et complexe, le personnage n’est pas une simple victime exploitée même s’il souffre de sa particularité. Grâce à lui, Xavier Coste nous plonge dans le quotidien des grands cirques du début du XXème siècle, nous parle de ce qui fait d’un homme un humain et traite bien entendu de la différence et de son acceptation dans nos sociétés (monstres qui effrayent les visiteurs ou objets de curiosité qui émoustillent les médecins, qu’est-ce qui est le pire ?) La narration à la première personne nous plonge dans les pensées du personnage central et cet album se lit à la manière d’un journal intime. Ses réflexions sur sa vie, sur sa dualité homme/animal, sa frustration face à sa quête d’amour, son goût pour l’art, ses besoins de solitudes alors même que son métier exige de lui qu’il fasse représentations sur représentations… Tout cela nous le rend intime et touchant, même s’il présente de mauvais côtés. Enfin la grosse claque vient du style graphique, magnifique hommage à celui que l’on pouvait trouver dans les journaux de l’époque. Chaque planche est une composition, un tableau avec lequel joue l’auteur pour nous raconter son histoire. Je craignais que ce style soit usant à la longue… mais j’ai adoré du début à la fin, ne ressentant jamais aucune lassitude. Je ne sais pas ce que cet album aurait donné si un seul des trois éléments avait été différent. Qu'aurait donné cette histoire de cirque sans ce dessin à l'aspect vieillot ? Qu'aurait donné ce récit d'une vie de freak sans cet emploi de la narration à la première personne ? Qu'aurait donné ce dessin sur un autre sujet ? Je ne saurais dire. Ce qui est sûr, c'est que ces trois éléments associés se complètent parfaitement dans le cas présent. Franchement bien !
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