Slava
Les années 1990, l'URSS a cessé de vivre. Son utopie appartient au passé, tout juste bonne à figurer dans les livres d'histoire. Maintenant, la loi du marché va pouvoir faire son oeuvre !
Les Meilleures Trilogies Les prix lecteurs BDTheque 2022 Russie
Dans un décor qui fait la part belle à l'immensité des espaces russes autant qu'aux vestiges de l'architecture soviétique, deux maraudeurs se livrent à une activité pour le moins douteuse : mettre la main sur toutes sortes de babioles susceptibles d'intéresser de riches investisseurs. L'un, Dimitri Lavrine, est un trafiquant sans scrupules. Selon lui, tout s'achète et tout se vend. L'autre, Slava Segalov, est un artiste qui a renoncé à ses rêves de gloire et tente de se faire une place dans ce monde nouveau qui s'ouvre à eux. Il suit Dimitri à contrecoeur, déchiré entre son éthique et la dette qu'il a contractée envers ce dernier. Au moment où commence cette histoire, ils sont occupés à récupérer, dans un bâtiment à l'abandon, tout ce qui peut se monnayer. Mais rien ne va se passer comme prévu... À travers la destinée tragi-comique de deux pieds nickelés emportés dans la tourmente de l'Histoire, Slava est une saga en trois tomes qui brosse le portrait d'un pays déboussolé, qui amorce une transition incertaine, et annonciateur de la Russie d'aujourd'hui.
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Date de parution | 26 Août 2022 |
Statut histoire | Série terminée 3 tomes parus |
Les avis
Tome 3 Décidément la plaidoirie de Blueboy m'aura fait sauter le pas pour acheter le 3ème tome mais je ne suis pas emballée. La vivacité du premier épisode ne se retrouve ni dans le 2ème ni dans le 3ème. Gomont réussit à être à la fois sans surprise et invraisemblable : les magouilles des puissants mafieux ex-soviétiques sont toutes puissantes et invincibles, les espoirs coopératifs voués à l'échec et l'artiste, jouet du capitalise triomphant, se sauve avec sa progéniture : L'art est mort mais le dessin vit. C'est déjà, ça me direz-vous. ( si vous entendez comme moi une vieille chanson de Souchon, "c'est déjà ça" vous voyez à quoi nous en sommes réduits...) C'est la simplification des personnages qui m'énerve le plus : si on veux faire jouer Lino Ventura, il faut un scénario en béton et des dialogues, on ne peut pas tenir que sur les acteurs. Déçue, déçue, déçue... Tome 2 Après lecture du second tome, je vais me raviser à 3 étoiles. Trop de voix off, trop de longueurs, les dialogues qui deviennent moins drôle sans devenir crédibles pour autant, le scénario alambiqué qui n'amuse plus, les motivations des personnages qui s'étiolent, bref ça sent l'histoire en deux tomes qui a été rallongée sans nécessité... Tome 1, 4 étoiles : Gomont m'avait emballé . Son dessin qui donne l'illusion de la spontanéité, (comme Sfar pourrait le faire) mais avec de belles compositions par page (ce que Sfar ne fait pas), et on sent un grand plaisir de l'équilibre formel, des couleurs, des formes, des valeurs...De l'aisance, du mouvement, de la lumière (avec une tendance aux ambiances surexposées) . Pour les mouvements des silhouettes, une certaine parenté avec Vincent Perriot (que je vous conseille dans Belleville Story). C'est curieux comme il arrive à accorder mouvement et précision... Ici il joue avec l'esthétique "années 30" dans un art déco socialiste qui se déploie dans des volumes gigantesques, dans d'anciennes usines, des maisons du peuple abandonnées. Mais pas du tout dans les visions de Bilal (dépressif et glacé), il y a une sorte d'émerveillement juvénile réjouissant. Pour le scénario, c'est la même chose : les apparatchiks à la Bilal nous emmerdent, imaginons sortir du mauvais jeu... Des trafics, des amours, des vieux ouvriers s'assemblent dans une aventure idéaliste qui se déplie avec grâce et emporte le lecteur. Malheureusement les puissants ne sont pas encore morts, cela se passe en 1990, et rien n'est joué. Nous qui savons comment l'Histoire a continué, nous avons la permission de l'oublier le temps d'une BD. Le plus chouette, c'est que ce n'est que le premier tome !
Après être arrivé à la conclusion de ce triptyque, me voilà donc obligé de pousser ma note au maximum, totalement convaincu que « Slava » marquera définitivement le neuvième art d’une pierre blanche. Non mais quel talent, ce Gomont ! Si « Après la chute » (le tome 1) m’avait laissé indécis, tout en en reconnaissant les qualités, je dois avouer que « Les Nouveaux Russes », second volet de cette trilogie, m’a définitivement rassuré. Une seconde lecture du premier tome a même été salutaire (eh oui, il arrive que parfois on ne soit pas dans le bon « mood »), du fait sans doute que j’étais déjà plus familiarisé avec le récit et les personnages. Quant au dernier tome, « Un enfer pour un autre », il constitue l’apogée de « Slava ». Alors que toute échappatoire à la tragédie annoncée semble de plus en plus compromise, la narration va prendre une coloration de plus en plus sombre, avec pour acmé une déflagration spectaculaire, au propre comme au figuré, qui laissera peu de monde indemne. Mais comme Gomont n’a pas pour seul but de faire pleurer dans les datchas, il va conclure son histoire en nous emmenant vers des terres plus apaisées, plus lumineuses, plus poignantes aussi. Nous laissant dans un silence ému au sortir de cette lecture. Alors que l’écroulement de l’ancien monde soviétique n’en finit pas d’entraîner la mort et la désolation, c’est captivé que l’on suit le destin de ces deux hommes, Slava et Lavrine, un destin en forme de montagnes russes, expression facile mais tellement appropriée…Il faut dire que Pierre-Henry Gomont, en plus d’être un dessinateur hors pair, sait concevoir un scénario (très peu d’auteurs ont ce double talent, il faut bien le dire) avec en prime des textes et des dialogues ciselés. La narration possède un souffle indéniable, assorti à une touche de burlesque incarné par le personnage de Volodia, l’attachant géant géniteur de la belle Nina, qui n’hésite pas à disperser façon puzzle (la diplomatie c’est pas son fort), tout particulièrement avec les vautours et les aigrefins, qu’un don particulier lui permet de repérer à dix mille lieues à la ronde. Concernant la partie graphique, je dirais que « Slava » ne saurait être dissocié du dessin. Celui-ci apporte une vibration unique, une énergie totalement en phase avec la narration. Et puis, il y a ce sens du détail pertinent pour imprimer une ambiance, allié à un minimalisme astucieux quand il s’agit de souligner les états d’âme des personnages ou un comique de situation, avec toujours ce trait agile et élégant… Chaque coup de pinceau est une gourmandise oculaire, une sensation que personnellement je n’ai pas eu si souvent l’occasion d’éprouver. A ce titre, Gomont nous livre peut-être une partie de son secret par le biais de Tatiana, personnage secondaire mais ô combien important, conseillère artistique passagère de Slava Segarov qui ne fut pas étrangère à son revirement vers l’art. Ce qui laisserait penser que ce dernier est finalement un peu le double de Pierre-Henry… Dans « Slava », il y a un vrai souffle, de tout ce qui peut composer une aventure, avec aussi une pincée de conscience sociale à travers l’histoire de cette mine que les ouvriers veulent maintenir en vie, à l’abri des rapaces sans foi ni loi. Car le récit parle aussi de cela, de cette avidité reptilienne caractéristique de l’être humain, poussée aujourd’hui à son paroxysme avec le capitalisme financier et qui ne cesse de conduire l’humanité vers le précipice depuis qu’elle existe. Et puis il y a tout de même, telle une jolie fleur née sur le fumier, cette magnifique histoire d’amour entre Slava et Nina, parce que oui, bien sûr, que serait ce monde de brutes sans amour… L’autre grande originalité de ce récit, qui le distingue encore davantage, si besoin était, est d’avoir pris le contrepied des productions mainstream en situant l’action dans cette Russie postsoviétique au lieu des sempiternelles références étatsuniennes. Un peu à la manière de Serge Lehman, qui « milite » à travers son œuvre pour la réintégration de notre bonne vieille Europe dans la pop-culture. C’est peu dire que le dernier opus conclut en beauté la saga, figurant désormais au panthéon des œuvres majeures du neuvième art. Et si on considère que PHG s’est un peu projeté dans le personnage de Slava, on ose espérer qu’il conservera comme lui une éthique plus proche des artistes galériens (mais avec le confort pécuniaire) que galeristes (ceux qui ont lu le dernier tome comprendront), afin qu’il puisse encore nous émouvoir et nous surprendre à l’avenir.
Je me range complètement aux louanges des précédents aviseurs. P-H Gomont est devenu en l’espace de quelques albums un auteur à suivre quasi les yeux fermés, la promesse systématique d’un excellent moment, il m’a toujours surpris positivement de par sa réalisation et les sujets choisis. Slava ne déroge pas à la règle, une lecture de haute volée. J’ai hâte de connaître la suite de cette trilogie. Graphiquement, c’est de mieux en mieux, l’auteur améliore encore son style, coloré et fluide. Un dessin vivant, j’aime le rendu de ses mises en page avec l’absence de trait noir autour de ses cases. L’histoire n’est pas en reste, on explore les années post chute mur de Berlin. On va découvrir une Russie confrontée à l’ultra libéralisme du jour au lendemain, via le parcours de quelques personnages hauts en couleur, parmi tant d’autres j’ai particulièrement savouré celui de Dimitri Lavrine. J’ai été complètement emporté d’entrée de jeu, j’ai adoré la construction de l’album et la voix off de Slava. Un album au Top !! MàJ tome 2 : 2 albums au Top !! J’ajoute un coup de cœur à cette série. J’admire la qualité d’écriture de l’auteur ainsi que sa patte graphique, il y a tout ce que j’aime dedans, flamboyance, dépaysement, densité, noirceur et légèreté … un plaisir de retrouver ces personnages russes. MàJ tome 3 : Ça y est Slava c’est fini. Je dois avouer que le début de la série m’a plus parlé avec ce petit côté Kusturica. La fin sera bien moins insouciante que les débuts et surprendra sans doute un peu moins. Une trilogie bien menée qui met vraiment l’âme russe à l’honneur. Hâte de découvrir le prochain projet de l’auteur.
Je suis un peu déçu après la lecture du tome 2 de la série de P.H. Gomont. En ça je partage l'avis de Canarde. Le tome 1 est original, vif avec un scénario très fluide et souvent drôle. Le couple Slava-Lavrine fonctionne à merveille et l'empathie est immédiate pour Nina et sa bande de mineurs menée par un papa gorille. Gomont réussit à créer une atmosphère de western dans un état sans foi ni loi sauf celle du plus fort. Le graphisme de type humoristique donne un ton léger qui amène de la dérision à une réalité conduite par des escrocs ou des mafieux. Si le trait est quelque peu minimaliste Gomont sait proposer de très beaux décors extérieurs au moment où il le faut. Malheureusement j'ai trouvé le tome 2 bien en dessous. Le couple Lavrine/Slava est disloqué et Slava devient même insignifiant à courir après Nina pour tirer son coup. Sans Lavrine ce tome est une coquille vide où Nina comble les faiblesses d'un scénario devenu très convenu en se déshabillant de plus en plus souvent. C'est agréable comme visuel mais cela vide Slava de sa consistance. La voix off devient envahissante sans qu'on sache qui parle du narrateur ou de l'auteur. Enfin le personnage de Nina devient très trouble avec ce passage à la délation voire à la complicité d'assassinat sans aucun remords. Pour finir je trouve l'image que propose l'auteur des Russes caricaturale et très discutable. Je lirai le tome 3 pour voir où veut nous mener Gomont mais je reste dubitatif pour le moment.
C'est la première fois que je lis une BD de Pierre-Henry Gomont. Je n'ai pas accroché au dessin au début, puis je m'y suis fait, je l'ai trouvé plus subtile en fait que de prime abord. Même chose pour la voix off qui est très présente. A priori pas fan au début mais elle s'intègre très bien à l'histoire et rebondis avec ce qu'il se passe dans les cases. Scénario assez original dans un contexte que je connaissais très peu. Bonne lecture.
Même si je n'ai pas été totalement charmé par cette BD, je lui reconnais sans peine son originalité, la densité de son scénario et sa bonne tenue tant graphique que narrative. Le contexte est intéressant puisqu'il nous plonge dans la Russie des années Eltsine, une Russie à peine sortie de l'ère soviétique et qui semble partir à vau-l'eau de toute part. Dans ce cadre, nos deux héros profitent de la situation pour piller d'anciennes bâtisses soviétiques abandonnées mais ils vont être finalement rattrapés par la situation bien plus terre à terre d'un village de mineurs qui veut sauver sa mine et son usine. Le héros, Slava, est vite convaincu de leur venir en aide, notamment grâce au charme de Nina, dont la beauté n'égale que la force de son caractère. Mais ce sera bien plus compliqué de motiver son partenaire, Lavrine, nettement plus cupide et sans scrupule. Cette plongée dans la Russie de l'époque est particulièrement réussie. Elle présente un caractère fantasmé, avec de grandes étendues enneigées et leurs bâtisses désertées, et une ambiance d'aventure entre grands espaces de la campagne et salons corrompus de la grande ville. L'intrigue est dense, soutenue par une poignée de protagonistes à la personnalité aussi marquée qu'intéressante. Le héros est presque le plus creux d'entre tous, simple ancien artiste frustré reconverti en pillard honteux. On appréciera davantage le caractère indépendant de la jolie Nina, la force de la nature imbibée d'alcool qu'est son père, ou encore et surtout le fameux Lavrine et sa passion semi-comique pour l'argent et les magouilles commerciales, pourtant bien piètre criminel comparé aux mafieux et futurs oligarques qu'on voit tirer les ficelles au-dessus de lui. Graphiquement, le style de Pierre-Henry Gomont m'a rappelé celui de Christophe Blain, pour un résultat convaincant, aussi plaisant à l'œil qu'à la lecture. Il m'a manqué une petite touche de je ne sais pas quoi pour être complètement transporté par le récit et charmé par son ambiance, mais j'ai beaucoup apprécié cette série qui aura de plus l'avantage de se terminer en trois tomes seulement.
Pierre-Henry Gomont est décidément un auteur à suivre. Ses œuvres sont globalement très bonnes et en plus il se renouvelle tout le temps et propose toujours des sujets différents, cela change des auteurs qui brassent les mêmes thèmes encore et encore. On retrouve les qualités des œuvres de Gomont à savoir des personnages humains et attachants (j'aime particulièrement le magouilleur cynique), une histoire captivante se passant dans un contexte intéressant qu'on ne voit pas beaucoup dans une BD, des dialogues savoureux, une narration fluide et un très bon dessin. Ce premier tome est excellent et j'ai bien hâte de lire la suite. J'ai rien d'autres à ajouter, d'autres posteurs ayant déjà beaucoup développé sur les qualités de l'album. J’avoue juste un 4 étoiles de plus pour cette série qui le mérite amplement. C'est à lire si on est fan de Gomont et c'est aussi à lire si on ne connait pas Gomont. Un des meilleurs auteurs modernes.
Ce n’est pas moi qui vais faire baisser la moyenne de cet excellent album. Pierre-Henry Gomont nous propose une histoire au background diablement intéressant, à savoir la période qui a immédiatement suivi l’effondrement du bloc soviétique. Intéressant car extrêmement instructif et plus pertinent que jamais aujourd’hui, pour quiconque essaye de comprendre un peu l’ogre Russe. Intéressant pour moi plus personnellement aussi : étant franco-bulgare, j’ai passé pas mal de temps derrière le rideau de fer, puis vu (et partiellement compris) la transition vers le capitalisme de mes propres yeux. Il greffe sur ce background une histoire enjouée, des personnages hauts en couleurs, et un humour vraiment efficace (j’adore ces phylactères qui contiennent une unique image). J’ai en tout cas passé un excellent moment de lecture. Voilà, un premier tome réussi, qui se lit d’ailleurs presque comme un one-shot. Je suis en tout cas impatient de retrouver Slava et sa clique.
Je me joins aux concerts de louange. Gomont est un grand, il peut bien être un gros prétencelard, il en a franchement et largement les moyens. Perso, je n'ai pas trop de problème avec ça (dans un autre genre, j'aimais beaucoup John McEnroe et son caractère de m....). Une nouvelle fois, force est de le constater : Slava n'a que des qualités. - Des personnages forts, complets, entiers, animés par de vraies intentions et dont les nuances ne sont pas toutes offertes au lecteur, même si elles sont belles et bien là. - Un dessin vif et alerte - Un scénario élaboré au scalpel. - Un contexte historique qui réhausse encore l'intérêt de cette histoire. - Ce petit truc en plus qui fait que... Bref ! Inutile de répéter tout ce qui a déjà été dit, mais le tome 2 me manque déjà. I can hardly wait !
C'est la première fois que je mets le nez dans un Pierre-Henry Gomont, mais ce n'est pas la dernière ! Même si le dessin pourrait initialement me rebuter car il ne correspond pas trop à mon style, j'ai été totalement séduit par cette bande dessinée. Le trait est plus fin qu'il n'y paraît de prime abord, et grâce à une très belle colorisation, les pages offrent souvent des compositions très plaisantes à l'œil. Donc même si ce n'était pas gagné de base, j'ai finalement beaucoup aimé toute la partie graphique. Mais ce qui m'a surtout frappé, c'est la qualité scénaristique et narrative. L'écriture de Gomont est tout simplement grandiose. Il sait écrire des dialogues ciselés et/ou percutants, et la "voix off" (qui n'est pas un procédé que j'apprécie forcément beaucoup, en général) est très bien gérée, contenant peut-être les plus beaux morceaux de texte. Et j'aime beaucoup, à la fin, le moment où cette voix off n'est plus seulement descriptive, mais remplit un rôle dans la narration et la compréhension du récit, par le décalage entre ce que dit le personnage et ce qui est montré au lecteur. Mais avant d'aborder cette fin brillantissime, revenons à l'essentiel. Gomont est très fort pour réussir à croquer des personnages très fortement caractérisés en peu de vignettes. On perçoit dès le début la répartition des caractères et évidemment, on s'attache au beau parleur, qui se révèle également être un cynique de première classe. Là où le cadre choisi par l'auteur aurait pu donner un récit déprimant, Gomont parvient à instaurer une atmosphère légère et décalée, remplie d'un humour irrésistible. Mais son plus beau tour de force est de faire en sorte que cet humour ne cache jamais la noirceur des événements, et la tragédie humaine qui se déroule sous nos yeux. Alors même que l'on visite les bas-fonds de la Russie à peine post-soviétique, l'auteur dévoile progressivement une profonde humanité, avec ses forces et ses faiblesses, dans chaque personnage. A la manière d'un Fabien Nury, Pierre-Henry Gomont met en place une galerie de personnages apparemment décevants sur le plan humain, qui se corrompent à volonté ou baissent les bras face à l'obstacle, mais qui, tous, réussissent à susciter l'empathie du spectateur car on sent bien, derrière le masque qu'ils se sont forgés, l'amas de souffrance et le contexte tragique qui explique comment chacun de ces personnages ont pu en arriver là. Cette tragédie traverse tout l'album, mais elle explose dans une fin d'une cruelle ironie, qui réussit à surprendre tout en étant cohérente, et sans briser l'humour qui caractérise cette histoire. Ce mélange des genres n'est pas unique, mais il est particulièrement bien maîtrisé ici. Cet univers fait de petits trafiquants opportunistes, de milliardaires snobs et méprisants, de chefs de mafia omnipotents, de boîtes de nuits et d'hôtels de luxe, on l'a déjà vu ailleurs, mais pourtant, on ne ressent jamais d'impression de déjà-vu. J'ai beaucoup pensé à une version soviétique de Guy Ritchie à la lecture. On sent le même cynisme, mêlé à une étonnante tendresse et à un art subtil de la punchline, qu'on pouvait sentir à divers niveaux dans Snatch ou The Gentlemen, avec le même genre d'intrigues typique d'un univers de film noir, mais soutenu par un élan comique inattendu. C'est tout cela que j'ai trouvé en lisant Slava, et si cela correspond à ce que j'espérais trouver, je ne m'attendais pas à être autant emporté dans ce récit captivant, drôle et cruel à la fois. Un joli tour de force, qui ne fait qu'augmenter mon impatience de pouvoir enfin lire le deuxième tome !
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