Monsieur le commandant
Histoire d'une délation.
1939 - 1945 : La Seconde Guerre Mondiale Adaptations de romans en BD Les petits éditeurs indépendants Nazisme et Shoah Paris
Paul-Jean Husson est un écrivain bien né, grand bourgeois, éduqué, instruit, héros de la Première Guerre mondiale (il a même perdu un bras au front), auteur de livres loués par la critique et prisés du public, assez habile pour siéger à la fois à l'Académie française et à l'Académie Goncourt. Son fils lui présente celle qui deviendra sa femme, Ilse : une jeune actrice de cinéma allemande connue dans son pays sous le nom d'Elsie Berger. Lorsque la guerre éclate, le fils Husson part pour Londres, laissant sa femme au côté de son père. Paul-Jean Husson en tombe éperdument amoureux, mais découvre rapidement que sa belle-fille est juive. Partagé entre son antisémitisme viscéral et cet amour interdit, Husson entreprend alors une invraisemblable virée en compagnie de celle qu'il ne cesse de désirer, à travers la France de l'exode.
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Date de parution | 27 Janvier 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
L’histoire traverse une période très souvent utilisée, car propice au développement de pas mal d’intrigues, à savoir les années 1930 et la Seconde guerre mondiale, durant l’occupation nazie de la France. Dans ce cadre historique où la noirceur se fait de plus en plus présente, le personnage central, Paul-Jean Husson, est un gros salaud, raciste, antisémite, bourré de préventions de classe, et franchement sans scrupule. Voir ce patriarche, écrivain académicien, qui côtoie Pétain et les milieux d’extrême droite, se débattre dans sa fange est assez intriguant. Le début de l’intrigue est lent à se mettre en place. Mais ensuite les événements s’enchaînent, on sent comment Husson cogite, lui qui est à la fois amoureux de sa belle-fille, mais ne peut que la haïr, car il a découvert qu’elle était juive. Son comportement va être ensuite en tous points abjecte. La narration est fluide et agréable. Le dessin est assez froid (les personnages sont un peu rigides). Mais l’essentiel est ailleurs, dans l’exposition au grand jour de l’âme tourmentée et dégueulasse d’un homme. Le voir sur la fin ne pas pouvoir assumer certaines de ses contradictions est intéressant. Tout dans ce récit adapté d’un roman de Slocombe est crédible – hélas – et les courtes biographies ajoutées en fin d’album lui donne une patine de vérité, d’authenticité (j(avoue avoir été cherché sur le net confirmation de cette « réalité »). Un album intéressant (bizarrement doté d’une couverture cartonnée très épaisse, comme les albums pour bambins).
Quel connard abject ! En tournant la dernière page de ce récit, c’est très clairement la pensée qui occupait tout mon esprit. Mais quel con, quelle ignoble crapule, quel abject énergumène ! Et les petites biographies proposées en fin d’album et qui jettent le trouble quant à la véracité de cette histoire ne font encore qu’accentuer le choc ressenti, car on ne peut s’empêcher de penser que cela pourrait être vrai. Vous l’aurez compris, l’élément moteur de ce récit réside dans la personnalité de son personnage principal, un de ces personnages que l’on adore détester tant ils nous dégoûtent du genre humain. Le scénario, adapté d’un roman de Romain Slocombe, dose magnifiquement la progression dramatique. Il permet de comprendre le personnage, déchiré entre son antisémitisme primaire et son désir charnel. Il en deviendrait pathétique s’il n’était pas aussi abject et arrogant. Le dessin d’Etienne Oburie est très carré, et sa raideur convient parfaitement au récit tant elle vient souligner le caractère rigide de ce Paul-Jean Husson. L’adaptation est réussie. Malgré une impression d’un scénario un peu décousu en début de lecture, je trouve qu’au fil des planches, la linéarité de la progression dramatique est exemplaire. Il devient difficile de voir où des coupures ont été (ou auraient pu être) faites. C’est franchement du beau travail. Au final, cet album m’a donc marqué. Par la personnalité de son personnage central, grâce à la richesse de l’analyse de caractère à laquelle se livrent les auteurs, parce que le dessin est adapté au personnage, parce que les biographies en fin d’album donnent de l’authenticité au récit… et parce que l’être humain peut se montrer aussi vil et abject que Paul-Jean Husson. Choquant ! Dans le bon sens du terme. Un terrible rappel du trou sans fond dans lequel un homme peut sombrer par hypocrisie, égoïsme et lâcheté.
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