La Petite Lumière

Note: 3.57/5
(3.57/5 pour 7 avis)

La quête métaphysique et poétique d’un vieil homme sentant sa fin proche


Adaptations de romans en BD Mirages

Quand Daniel Pennac conseille la lecture de La Petite Lumière d'Antonio Moresco à Grégory Panaccione, il sait déjà que c'est l'un des rares artistes aptes à le traduire graphiquement... Encore fallait-il qu'il lui plaise. « Je suis venu ici pour disparaître, dans ce hameau abandonné et désert dont je suis le seul habitant ». Le récit d'Antonio Moresco met en scène un homme vieillissant qui a décidé de s'extraire du monde. Mais chaque soir, une petite lumière perce sa solitude... Grégory Panaccione démontre une fois encore son étonnante capacité à exprimer graphiquement une écriture, la plus singulière soit-elle.

Scénario
Oeuvre originale
Dessin
Couleurs
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 10 Mai 2023
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série La Petite Lumière © Delcourt 2023
Les notes
Note: 3.57/5
(3.57/5 pour 7 avis)
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15/04/2023 | Blue boy
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Par Canarde
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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En règle générale j'aime beaucoup le dessin de Panaccione, parce qu'il sait parfaitement représenter l'incertitude dans le regard ; et je me retrouve dans ce sentiment de ne pas maîtriser la marche du monde et d'être prise dedans à mon corps défendant. Donc ce petit volume m'attendait dans la sélection chrétienne des BD d'Angoulême, dans la cathédrale. J'en avais lu des avis contradictoires et je n'était pas enthousiaste a priori, mais en ouvrant sur une page avec ce vieux barbu aux arcades sourcilières fripées, j'ai presque cru reconnaître mon père, et je l'ai pris. Ici, le héros solitaire et confronté à quelque chose d’invraisemblable, qu'il tente, le plus longtemps possible de rattacher au monde rationnel qu'il a habité jusque-là. Mais finalement, c'est peine perdue, il fait un pas vers une incertitude plus grande encore. Plus j'y pense et plus je me dis que le mot Dieu n'est qu'un autre mot pour l'incertitude : celle à qui nous sommes tous à la fois soumis et reconnaissant. Un exemple de cette incertitude : commencer à contribuer à BDthèque et dix ans plus tard se retrouver avec 13 contributeurices dans un gîte près d'Angoulême à partager un chili. (J'ai peur que les églises, elles, oublient trop souvent ce nœud originel, et se laissent aller à la certitude.) Rien d'étonnant donc à retrouver Panaccione dans une cathédrale. Ce volume m'a fait penser aux adaptations de Thierry Murat (Le Vieil Homme et la Mer et Les Larmes de l'assassin), le pitch tient en une ligne, mais l'intrigue narrative est tenue de bout en bout par la densité du dessin. Je comprends que certains puissent rester à la porte de l'album, et principalement parce qu'il ne faut pas s'y aventurer dans une salle d'attente, ou entre l'épluchage des oignons et le lavage de la cocotte. Il faut y consacrer un temps indéfini, libre de toute contrainte, sans bruit parasite. Une bande dessinée qui demande toute notre attention.

03/02/2024 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Oh ! Un nouveau Panaccione ! Plutôt fan de son travail, (je vous renvoie à la chouette interview que j'ai réalisé il y a un peu plus de 6 ans maintenant à Angoulême), c'est toujours un plaisir de retrouver son trait si particulier et l'expressivité qui se dégage de ses personnages ou des créatures qu'il met en scène. C'est à travers la vie solitaire d'un vieil homme isolé dans la campagne montagneuse que l'immersion commence. Il vit là, seul, dans sa bicoque, sans électricité, seule âme solitaire dans cette petite bourgade abandonnée jusqu'au jour où il aperçoit une petite lumière sur le versant d'en face. Tous les soirs, vers la même heure, cette lueur s'allume et intrigue notre homme jusqu'au jour où il décide de se lancer à la recherche de son origine. Avec "La petite lumière", adaptation d'un roman d'Antonio Moresco, Grégory Panaccione réussi le tour de force de coucher sur le papier par son trait et ses couleurs ce qui relève du ressenti, de l'émotion. Tout ici n'est que délicatesse. N'attendez pas des aventures loufoques comme l'auteur a très bien su nous le proposer avec Chronosquad par exemple ; on est ici dans l'émotion, qu'on peut toucher du doigt ou laisser caresser notre rétine. On se laisse happer par cette histoire étrange, que dis-je, envouter par cette ultime quête d'un être qui arrive au bout du chemin de sa vie. Grégory Panaccione impressionne par sa mise en couleur, s'amusant même avec les noirs profonds de certaines planches qui nous laissent tout juste deviner les traits des personnages et les lieux où ils évoluent. Je ne connaissais pas ce roman, mais voilà une adaptation qui donne envie d'aller le découvrir et les autres oeuvres d'Antonio Moresco. Encore un très bon Panaccione !

26/05/2023 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Dès les premières pages, ce récit nous embarque par son atmosphère mystérieuse. Sans rien déflorer de l’intrigue, on pourra dire que le vieil homme solitaire va accéder à une étrange dimension où le rêve se confond avec la réalité. Celui-ci serait-il gagné par la sénilité ? Serait-il victime d’hallucinations ? Dans sa solitude, il suscite l’empathie du lecteur par son courage. Dans sa masure sans âge et sans électricité, où les murs craquent la nuit et semblent faire jaillir des fantômes, notre ermite affronte vaillamment sa fin qu’il sent proche, même si son regard révèle une sourde inquiétude. Mais surtout, ce mystère qui fait irruption au crépuscule de sa vie, il devra absolument l’élucider ! Sa quête finale le mènera vers des chemins à la fois déstabilisants, touchants et apaisants comme la pureté de l’enfance. Adapté d’un roman d’Antonio Moresco, remarqué par la critique et couronné de plusieurs prix, « La Petite Lumière » à la sauce Panaccione est une réussite. Le co-auteur d’ "Un océan d’amour" nous livre ici un récit intrigant et fluide que l’on dévore jusqu’au bout. Son trait déstructuré et un peu fragile traduit parfaitement la sensibilité du propos qui invite le lecteur à faire corps avec le vieil homme, lequel nous renvoie à notre propre fin dans sa quête ultime. Difficile de rester de glace devant la poésie de cette histoire intemporelle utilisant à bon escient la métaphore des saisons et magnifiquement restituée d’un point de vue visuel. Grégory Panaccione recourt à une palette restreinte où le vert (la nature est omniprésente ici) se mêle à des tonalités sombres où parfois on ne fait que deviner les silhouettes (avec de nombreuses scènes de nuit). Si l’on accepte de se laisser porter par la poésie de l’ouvrage, sans chercher à avoir des réponses à toutes les questions qu’il suscite, on tombera facilement sous le charme de cette « Petite Lumière », aussi fragile que puissante par sa capacité à nous habiter longtemps une fois le livre refermé. C’est souvent à cela que l’on reconnaît les œuvres de qualité et celle-ci se révèle en outre un vrai coup de cœur.

15/04/2023 (modifier)