Musée

Grand prix RTL de la bande dessinée 2023. Quand les œuvres du musée d'Orsay prennent vie sans que nous le sachions, la nuit.
Chabouté Grand prix RTL de la bande dessinée Les coups de coeur des internautes Vents d'Ouest
Entre les statues de marbre et les tableaux de maîtres, les visiteurs du musée d’Orsay posent tantôt des yeux admiratifs, tantôt un regard perplexe sur les chefs-d’œuvre qui bordent les allées. Ils échangent dans un murmure discret et continuent leur déambulation. Mais lorsque les portes du musée d'Orsay ferment et que la nuit tombe, les sculptures et les peintures quittent la pose, descendent de leur socle, s'animent, se détendent, se mettent à se raconter, s’interrogent ou commentent ce qu'elles ont pu voir ou entendre au cours de la journée. L’Olympia de Manet, qui en a peut-être assez de passer sa vie allongée, déserte sa couche ; les Raboteurs de parquet de Caillebotte, fatigués, délaissent les lattes du parquet ; et Héraclès se dirige, comme à son habitude, tout droit vers sa pièce favorite : les toilettes. Certains se retrouvent pour dresser un portrait peu flatteur des visiteurs indélicats ; d’autres, désabusés, s’assoient pour observer l’absurdité du monde à travers les vitraux de la grande horloge. D’autres encore accueillent les nouveaux venus, car les collections s’agrandissent ! Au petit matin, toutes les œuvres regagnent leur socle ou leur cadre et reprennent la pose avant l'ouverture des portes. Un quotidien au musée où l’on découvre que tour à tour, les rôles s'inversent. Que peuvent bien penser de nous les peintures et les sculptures à force de nous observer et de nous écouter dans les couloirs et les salles d'un musée tout au long de la journée ?… Ce que de jour les « regardeurs » disent des regardés, et surtout ce que de nuit les regardés racontent des « regardeurs ». Le lecteur devient témoin et spectateur d'un quotidien aussi bien nocturne que diurne dans le musée. Fin observateur, Christophe Chabouté signe un album plein de poésie qui nous invite à réfléchir sur notre rapport à l’art, nos certitudes et à la manière dont nous percevons le monde. Se jouant des visiteurs mais jamais du lecteur, il laisse place à la contemplation avec humour et sensibilité. Texte : Editeur.
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Date de parution | 19 Avril 2023 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis


Est-ce si important de savoir pourquoi ? - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il fait partie de la collection développée avec le musée d’Orsay. Son édition originale date de 2023. Il a été réalisé par Christophe Chabouté, pour le scénario et les dessins. Il comprend cent-quatre-vingt-six pages de bande dessinée en noir & blanc. Au musée d’Orsay, une jeune fille avec des couettes lève la tête pour contempler une œuvre. Un monsieur ridé baisse ses lunettes pour mieux en voir une autre. Un couple de jeunes en regarde une autre sans rien laisser transparaître sur le visage. Un monsieur d’une trentaine d’années avec une veste, un foulard, une chevelure hirsute et une barbe se frotte le menton en regardant une œuvre. Une dame ridée, écharpe au cou se penche de côté pour mieux voir un détail. Un autre barbu en regarde une de très près, les sourcils froncés, le regard sévère. Un autre en costume et cravate noire a pris un peu de recul, les bras croisés. Puis en viennent encore une vingtaine d’autres, chacun avec leur attitude et leur posture, exprimant une part de leur personnalité, de leur comportement face à une œuvre d’art. Ils contemplent, qui l’autoportrait de Vincent van Gogh, qui le Chanteur florentin du XVe siècle de Paul Dubois, Anacréon d’Eugène Guillaume, Sapho de James Pradier, La pensée d’Aristide Maillol, La source de Jean-Auguste-Dominique Ingres, etc. Le flux incessant des visiteurs, des curieux de toute nature se déroule durant toute la journée. La grande horloge marque le temps et arrive six heures. Les couloirs et la grande galerie se vident progressivement. Les gardiens procèdent à la fermeture des portes. Le musée retrouve son calme, vide de toute présence humaine. Dehors la Seine coule paisiblement et sans bruit alors que la nuit commence à tomber et que les ténèbres commencent à envahir le musée d’Orsay. À l’intérieur du musée il ne subsiste que les éclairages de sécurité, et quelques rais de lumière provenant de l’éclairage public ou de la Lune. Passé une heure du matin, dans ce grand calme, une silhouette passe dans un couloir, un tableau sous le bras. Vers une heure et quart, les ombres se sont quelque peu modifiées, toujours pas âme qui vive. Sans prévenir, un chien traverse une large allée, en silence. Une heure vingt-cinq, dehors un homme passe, promenant son chien en laisse. Le soleil se lève progressivement. Un oiseau quitte son perchoir sur l’une des cornes du Rhinocéros d’Henri-Alfred Jacquemart. Les visiteurs commencent à arriver pour entrer. Le musée d’Orsay ouvre ses portes, les uns et les autres reforment le ballet incessant devant les œuvres. Un regard se fixe plus particulièrement sur les mollets et les chaussures, établissant un panorama qui passe d’un pantalon avec des chaussures de ville, à un pantacourt avec chaussures souples, un bermuda avec des baskets, un short avec des chaussettes montant à mi-mollet, un pantalon à pois avec des chaussures de marche, un autre short et des chaussettes arrivant sous le genou, des escarpins et une robe descendant sous le genou, etc. Voici une bande dessinée estampillée Musée d’Orsay, qui présente la particularité d’être publiée par un autre éditeur que Futuropolis, ce dernier semblant avoir développé un partenariat avec cet établissement et publié plusieurs œuvres comme Les Variations d'Orsay (2015) de Manuele Fior, L'Art d'en bas au musée d'Orsay: La fantastique collection Hippolyte de L'Apnée (2016) de Plonk & Replonk, Les Disparues d'Orsay (2017) de Stéphane Levallois, Moderne Olympia (2020) de Catherine Meurisse. Sa seconde particularité réside dans le nombre élevé de pages muettes : 114 pages dépourvues de tout mot, et soixante-douze avec des dialogues. Sa troisième caractéristique apparaît sous deux points de vue. Pour commencer, les premières pages présentent les visiteurs et leur comportement face aux œuvres d’art. Quand celles-ci commencent à être représenter dans les cases, elles ne sont pas nommées. En fonction de sa culture en la matière et de sa familiarité avec le musée d’Orsay, le ressenti du lecteur peut osciller entre la curiosité et la frustration, selon qu’il les identifie plus ou moins facilement. Il peut reconnaître Héraklès archer (1909) du sculpteur Antoine Bourdelle (1861-1929), l’Ours blanc (1922), de François Pompon (1855-1933), la Source (1820-56) de Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867). En fonction de sa curiosité, il peut se renseigner plus avant et trouver les références pour les Coquelicots (1873) de Claude Monet (1840-1926), les Raboteurs de parquet (1875) de Gustave Caillebotte (1848-1894), Autoportrait (1879) de Vincent Van Gogh (1853-1890), Rhinocéros (1878) de Henri-Alfred Jacquemart (1824-1896), Méditerranée, dite aussi La Pensée (1923-1927) d’Aristide Maillol (1861-1944), les trente-six bustes des célébrités du Juste Milieu (1832-35) d’Honoré Daumier (1808-1879), l'Olympia (1863) d’Édouard Manet (1832-1883), l’Origine du Monde (1866) de Gustave Courbet (1819-1877), le Fifre (1866) d’Édouard Manet (1832-1883), L’asperge (1880) d’Édouard Manet (1832-1883), etc. Sur le moment, ou après coup avec des recherches, le lecteur reste impressionné par la capacité de l’artiste à reproduire l’apparence de ces œuvres d’art, qu’il s’agisse de sculptures ou de peintures. Au fil des pages silencieuses, parfois en plan fixe, il ressort également très impressionné par la représentation des différentes zones du musée d’Orsay. À la lecture, les images en noir & blanc apparaissent simples et évidentes, descriptives avec un degré de simplification pour conserver une lecture immédiate. Alors que la prise de vue prend un peu de recul, le lecteur identifie la grande galerie avec ses marches, ses statues sur stèle, ses poutrelles et ses verrières. Il reconnaît de nombreuses œuvres, avec encore Les Quatre Parties du monde soutenant la sphère céleste (1872) de Jean-Baptiste Carpeaux (1827-1875). Dès la page douze, il peut voir l’horloge monumentale de cette galerie, la façade vue depuis la Seine, les grandes baies vitrées et leurs poutrelles métalliques, le dallage et les murs de pierre, les luminaires caractéristiques, l’esplanade d’accès avec le Rhinocéros, les galeries secondaires qui courent de part et d’autre du bâtiment, les galeries de l’étage, avec la grande horloge de façade et sa verrière permettant de voir à l’extérieur, sans oublier les toilettes avec leurs cuvettes, leurs distributeurs de papier et les sèche-mains (des éléments essentiels de l’intrigue). Le lecteur observe que l’artiste restitue à merveille les grandes lignes structurantes de chaque zone, ce qui fait d’autant mieux ressortir leur architecture et les aménagements, configurations spécifiques qui marquent durablement l’esprit du visiteur. L’ouvrage s’ouvre avec une séquence dont les trois premières pages se focalisent sur les visiteurs. Le lecteur peut ainsi observer la posture et l’expression de visage de trente individus différents. Cette expérience est renouvelée à plusieurs reprises au cours du récit ; en se focalisant sur les tibias et les pieds en pages vingt-six et vingt-sept, puis en plan fixe pour restituer le passage de plusieurs visiteurs, puis en s’attachant à des couples pour un effet de contraste entre la réaction de l’un et celle de l’autre, puis au travers de dialogue d’une mère avec sa fille, d’une femme avec son compagnon (il croit qu’elle parle des peintures alors qu’elle parle des cadres), avec un groupe d’adolescents (sur leur portable) avec leur professeur, avec l’attitude d’une petite fille portant son nounours dans les bras et arrêtée devant la sculpture l’Ours blanc, etc. Le lecteur se retrouve fasciné d’observer ainsi les curieux, constatant qu’ils sont animés par des envies différentes. Il est à la fois épaté par la capacité de l’artiste à saisir une expression, un geste, à la fois déstabilisé par la sensation de se regarder lui-même quand il s’arrête devant une œuvre d’art au musée. Il se doute qu’il voit les visiteurs par les yeux des personnages peints ou sculptés. La nuit tout se transforme, et les êtres des œuvres d’art s’animent, prennent vie. L’Ours Blanc déambule silencieusement et majestueusement dans les grands couloirs, des couples se forment entre sculptures descendues de leur piédestal, d’autres se détestent cordialement, certains se regroupent pour observer l’extérieur depuis la grande baie vitrée de l’horloge, et Héraklès se rend dans les toilettes pour comprendre l’utilité des cuvettes, de la chasse d’eau, du distributeur de papier et des sèche-mains. L’auteur joue à la fois avec le décalage temporel et culturel de certaines œuvres qui se retrouvent dans une époque hors de portée de leur compréhension, et avec leur curiosité, leurs émotions et leurs caractéristiques physiques (les pauvres trente-six bustes des célébrités du Juste Milieu qui sont coincés sur leur socle sans pouvoir bouger). Il émane une forme de poésie dans la réaction et l’adaptation des uns et des autres à cet environnement étrange et incompréhensible, à leurs interrogations sur le comportement des personnes qu’ils voient défiler toute la journée pour les regarder, et sur celui du personnel du musée. Les personnages de ces œuvres d’art observent les visiteurs et s’interrogent sur eux, devenant le reflet de leur comportement. Pas facile de réaliser une œuvre de fiction sur une collection d’œuvres d’art et le musée qui les accueille, sans tomber dans un passage en revue de type catalogue d’une exposition. Chabouté a réalisé une histoire qui rend aussi bien hommage au musée d’Orsay et à son architecture, qu’à ses collections, avec un dispositif narratif original. Il privilégie la démarche de montrer, sans mots, plutôt que d’expliquer ou d’exposer. Le résultat génère un processus de double identification chez le lecteur : avec les visiteurs qui regardent, avec les œuvres d’art elles-mêmes qui disposent de leur point de vue sur lesdits visiteurs. Singulier : une visite originale et inoubliable.


3.5 Les albums de commande sur les musées se succèdent et hormis des exceptions cela a jusqu'à présent surtout donné des albums à l'intérêt limité. J'avais un peu peur au début que ça soit le cas avec cet album parce que c'est muet pendant un bon paquet de pages, où on voit des gens se promener dans le musée et admirer les œuvres d'arts. Le dessin de Chabouté est bon et il reproduit bien les statues, mais c'est quand même léger comme scénario et j'ai cru que cela allait être comme ça tout le long de l'album. Heureusement, le dialogue arrive enfin et on voit enfin où l'auteur voulait en venir. Faire bouger les œuvres d'art la nuit n'est pas une idée nouvelle, mais Chabouté l'utilise très bien. Petit à petit, le récit a fini par me conquérir. Les dialogues sont bien écrits avec des moments poétiques et les œuvres d'art ont chacune leur personnalité propre. À lire pour les amateurs d'arts.


En nous plongeant dans les couloirs silencieux du musée d’Orsay, Chabouté réussit à faire parler les œuvres d’art avec son style bien à lui, mélant humour et mélancolie. Avec son noir et blanc caractéristique, il crée une ambiance qui oscille entre le poétique et le fantastique, où chaque sculpture, chaque tableau semble avoir quelque chose à dire une fois les visiteurs partis. Le récit débute de manière muette, une approche que Chabouté maîtrise parfaitement, créant ainsi une atmosphère presque contemplative. Les premières planches nous plongent dans le silence des salles d’exposition, où les œuvres d’art semblent attendre patiemment que les regards se posent sur elles. Puis, progressivement, les dialogues s’installent, donnant vie aux personnages et aux situations avec une sensibilité qui n’appartient qu’à l’auteur. L’idée centrale de "Musée" est simple mais efficace : que se passerait-il si les œuvres prenaient vie une fois les portes du musée fermées ? Chabouté explore cette question avec finesse, en imaginant des statues et des tableaux qui s’animent la nuit, discutent entre eux, se moquent parfois des visiteurs du jour, et s’interrogent sur leur propre existence. Cette inversion des rôles, où les œuvres deviennent les observatrices de l’humanité, apporte tout le sel de l'album. Les dialogues, bien qu’attendus dans certains cas, parviennent à capturer l’essence des œuvres et de leur relation avec le public. Les scènes de jour, où les visiteurs interagissent avec les œuvres, sont particulièrement bien vues, offrant une réflexion subtile et drôle sur notre rapport à l’art. Les personnages, qu’ils soient en marbre ou en chair et en os, sont croqués avec une ironie douce, parfois un peu amère, mais toujours empreinte d’une profonde humanité. C'est souvent ce que j'aime chez des auteurs comme Chabouté. Le thème des œuvres prenant vie n’est pas entièrement nouveau, et certains pourraient trouver que Chabouté n’apporte pas suffisamment de fraîcheur à cette idée. Si Chabouté parvient à insuffler sa touche personnelle, certains pourraient trouver l’ensemble un peu trop prévisible, voire attendu. Pourtant, il faut reconnaître que le charme opère, même si l’on connaît déjà la chanson. L’album est une balade douce et introspective dans un lieu où l’art, d’ordinaire figé, prend vie sous nos yeux. C’est beau, c’est bien fait, mais peut-être un peu trop sage pour vraiment surprendre. Une lecture agréable, certes, mais qui laisse l’impression que Chabouté aurait pu aller un peu plus loin.


Amoureux de l'Art, procurez-vous cette magnifique déclaration d'amour aux sujets des oeuvres et des personnes qui les observent, les admirent, les commentent ou les snobbent, c'est selon. Qui ne se reconnaîtra pas dans l'un des visiteurs croqués par ce talentueux Chabouté? Et quel meilleur cadre qu'un musée de nuit pour sublimer son noir&blanc? Un musée où les oeuvres prennent vie et sortent de leur cadrer pour vaquer à leurs habitudes d'après-fermeture: étalage de potins, déclaration d'amour, contemplation, réflexion.... les chefs-d'oeuvre de la sculpture et de la peinture s'accaparent nos traits et nos pensées. Peut-être sommes-nous les sujets et eux les spectateurs? De belles tranches de vie, de belle redécouvertes d'oeuvre (quel dommage que le musée d'Orsay soit si loin). Quelques running gags bien placés (le buste trop petit qui demande à être placé plus haut) et de belles mise en scène. Mais l'album met quelques temps à indiquer dans quoi s'embarque le lecteur, ce qui peut rebuter quelqu'un le feuilletant à la va-vite pour décider de le prendre ou non. Enfin bémol pour les moins-sensibles à la poésie comme moi, les contages de fleurette sont vraiment trop gnangnans. "Je t'aime" en boucle sans argumentaire... Au moins leurs opposés démontrent par leurs coups vache de retournement de toile que des actes sont nécessaires, action-réaction. Un très bel hommage à la Culture, à ceux qui l'entretiennent et à ceux qui la soutiennent.


Après Yellow Cab qui m’avait moyennement enthousiasmé, Musée est mon 2ème Chabouté. Et bien je dois dire que c’est une très bonne pioche. Pourtant qu’est-ce que j’ai pesté durant les premières dizaines de pages, elles sont muettes et ils ne s’y passent pas grands choses. On a des zooms sur les chalands, les œuvres, le musée … c’est bien foutu graphiquement et narrativement mais je m’interrogeais vraiment de l’intérêt, je me suis tout de suite dis que ça n’allait pas être pour moi, un truc trop abscons et à la gloire du musée. Je trouvais déjà le sujet/la commande très casse gueule. Merci M. Chabouté de m’avoir prouvé, par la suite, que j’avais tort. Dès que les dialogues ont commencé à apparaître, j’ai commencé à accrocher. Alors attention il n’y a pas proprement d’histoire dans ce tome, c’est plus comme un ensemble de saynètes qui tourne autour d’œuvres phares du musée. En ça, le cahier des charges est rempli mais l’auteur le magnifie je trouve. Il y insuffle une belle magie (et c’est autre chose que le film La nuit au musée), en fait le début n’était là que pour placer l’ambiance, j’ai refermé l’album conquis. A travers ses différents instantanés, l’auteur développe tout un panel d’émotions, tantôt drôles (la quête d’Hercule, la prise de bec récurrente entre une statue et un tableau …), tantôt vraiment touchantes (le promeneur avec son chien, la petite fille et son papy …), une belle poésie s’en dégage. J’ai finalement été emporté dans ce petit monde grâce au ton juste et intelligent. Je tire mon chapeau à l’auteur, je ne vois pas comment il aurait pu mieux réussir l’exercice. Je n’ai encore jamais fait ce musée, contrairement à d’autres de la capitale, mais le jour J j’aurai cet album en tête.


Un hommage très réussi au Musée d'Orsay, à ses oeuvres et aux musées en général. La mise en place est un peu longue. Certes j'y savourais le très bon dessin de Chabouté et l'excellence avec laquelle il représentait ces scènes de visiteurs de musée et les oeuvres elles-mêmes mais la narration muette m'ennuyait un peu et j'ai attendu pendant un peu trop de pages de comprendre où allait en venir l'auteur. Il m'a fallu pour cela attendre les premiers indices clairs et surtout les premiers dialogues qui viennent bien tard. Mais une fois le concept acquis, j'ai rapidement été séduit par l'atmosphère et l'idée de cette série. Cela tient en grande partie à la perfection du dessin qui arrive à s'approprier autant de chefs-d'oeuvres de la peinture et de la sculpture et à leur donner autant de vie qu'aux personnages humains de cette histoire. C'est à la fois poétique et drôle, inspirant et divertissant. Par le biais de cette histoire ouverte, on s'attache à nombre d'oeuvres artistiques et on réalise au passage combien le Musée d'Orsay en contient de formidables et souvent ultra-célèbres. Non seulement j'ai passé un très agréable moment de lecture, mais en plus il m'a donné une très grosse envie de retourner visiter ce musée là.


Quel plaisir de retrouver Chabouté à ce niveau ! Depuis « Un peu de bois et d'acier » aucune de ses bandes dessinées ne m’avait procuré autant de plaisir que ce Musée. Un dessin en noir et blanc toujours aussi beau, des cadrages bien pensés et au service de l’histoire, un humour très présent, l’art de titiller la curiosité du lecteur avec de petites histoires dans l’histoire, l’art de les rendre complices également (ahhh, toute cette histoire autour d’un tableau que l’on ne voit qu’à la fin mais que ceux qui ont déjà visité le Musée d’Orsay –ou qui connaissent sa collection- reconnaissent rien qu’en voyant les réactions des visiteurs devant ledit tableau : du grand art !) Franchement, j’ai dévoré le livre. Il se lit vite (beaucoup de passages muets) mais il est tout sauf vide. Il se passe toujours quelque chose et c’est un plaisir d’y revenir pour relire l’histoire avec un autre regard, enrichi par notre première lecture. Un très grand cru !!


J'ai bien apprécié cette réflexion graphique de Chabouté sur les visiteurs du musée d'Orsay. Comme d'habitude Chabouté n'a besoin que d'un minimum de mots pour faire parler toute sa compréhension de l'humanité. L'ouvrage débute sur plusieurs planches muettes, véritable trombinoscope de la diversité organique qui s'extasie ou pas sur la beauté inorganique. L'idée n'est peut-être pas nouvelle mais Chabouté l'exploite à merveille avec sa touche poétique et sensible habituelle. L'immortel y observe l'éphémère, le passé étudie le contemporain dans un jeu inversé de questions souvent très drôles. Chabouté n'est pas toujours tendre avec les spectateurs qui se retrouvent tous devant l'oeuvre de Courbet qui fit tant scandale à son époque. "Origine du monde" qui renvoie bien à l'origine de tous ces visages, à toutes ces attitudes et à tous ces comportements que peint si bien Chabouté. Par petites touches non moralisatrices, l'auteur nous fait prendre conscience de l'absolue nécessité de ces "vieilleries" pour nous pencher sur notre richesse de coeur et nous éloigner d'une immédiateté stupide proche de la barbarie. Chabouté maîtrise son graphisme à la perfection. Point de discours tellement les expressions sont vivantes. Son N&B rend les scènes nocturnes si lumineuses. Une lecture singulière pour se pauser (poser ?) et se laisser bercer par la poésie du temps long.


Chabouté au style graphique reconnaissable entre tous nous fait une fois encore entrer en douceur dans une histoire. Des pages muettes au début qui nous immergent dans un lieu puis peu à peu le récit s’anime, les langues se délient, les conversations s’animent et les personnages s’agitent. Côté visiteurs, le jour, ou côté œuvres, la nuit, les réactions en miroir sont finement imaginées, finement dessinées et poétiquement racontées. Il se dégage de cet album en noir en blanc, une profonde humanité et les œuvres que l’on voit froides et sans vie révèlent une sensibilité inattendue et une attention toute particulière pour les humains qui les surveillent ou qui leur rendent visite. C’est un très bel album, une émouvante déambulation. Le seul point faible est le côté "sans surprise" du récit. Hormis quelques pointes d’humour bien vues, le temps s’écoule lentement jusqu’à la dernière page.


A l’instar du Musée du Louvre, le Musée d’Orsay s’est mis à son tour à faire des commandes auprès des éditeurs de bandes dessinées. Christophe Chabouté, artiste reconnu dans le neuvième art par son approche singulière, notamment pour son utilisation quasi exclusive du noir et blanc (comme Comès avant lui), est donc le deuxième auteur (sauf erreur) après Catherine Meurisse, à avoir été approché par la célèbre institution parisienne, en collaboration avec Glénat/Vent d’Ouest. Il nous propose ainsi un ouvrage où il réussit à conserver sa touche personnelle tout en se conformant à l’exercice imposé. Et on peut dire qu’il s’en sort plutôt bien. Graphiquement parlant, il ne déroge pas à son style habituel et confirme sa maitrise du N&B, alliée à un trait tout en finesse et une mise en page efficace où chaque plan souligne un détail significatif. Chabouté n’a plus rien à prouver à ce niveau. La narration éclatée, assemblage de saynètes, agit comme un miroir déroutant où les rôles sont inversés : le sujet se fait objet, l’observateur (le visiteur du musée) devient l’observé, tandis que les œuvres d’art (on va le comprendre très progressivement, au bout d’une cinquantaine de pages muettes et atmosphériques) vivent leur propre vie (la nuit, une fois que les portes se sont refermées) et y vont de leurs commentaires, parfois moqueurs, parfois candides, sur le monde des humains de chair et d’os. C’est finement observé et plein d’humour, de sensibilité et de poésie, d’intelligence et d’érudition, et il est difficile de ne pas tomber sous le charme. On pense parfois à Jacques Tati, et on se dit que ce dernier aurait pu très bien faire un film sur le sujet… Cela n’empêchera pas d’émettre quelques réserves, à commencer par ce sentiment déjà-vu quant aux thématiques de « l’observateur-observé », un pur délice de bédéaste, et des œuvres prenant vie. Ce sont certes de bonnes idées, et tout dépend surtout de la manière dont elles sont développées, mais l’effet de surprise risque d’être amoindri pour ceux qui auront déjà lu « La Traversée du Louvre » de David Prud’homme ou « Les Tableaux de l’ombre » de Jean Dytar. Dans le cas présent, si l’entreprise dégage un charme indéniable, on peut regretter que Chabouté se soit davantage laissé guider par l’aléatoire que par une réelle volonté de composer une histoire. « Musée » s’avère une œuvre récréative fort sympathique mais qui ne marquera pas outre mesure le lecteur un peu (trop ?) exigeant.
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