William, 31 ans, scénariste
Quelle est la vie des raconteurs d'histoires ? Quels sont leurs secrets ? Sont-ils comme nous ? William, jeune scénariste de 31 ans, ouvre la porte de son intimité pour partager son quotidien d'auteur de BD.
Profession : bédéiste
Une équipe de reportage télé débarque chez William, scénariste de BD, pour dévoiler les coulisses de la création. Face à la caméra, William se confie sur sa façon de travailler, sa conception du métier, les raisons qui l'ont amené à la bande dessinée. Des flash-backs en forme de comic strips vintage, des illustrations et des interviews de ses partenaires viennent compléter son témoignage.
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Date de parution | 10 Mai 2023 |
Statut histoire | Strips - gags 1 tome paru |
Les avis
L’enfer, c’est la surproduction des autres. - Ce tome contient une série de gags, la majorité en une page, indépendant de toute autre série. Sa date de parution initiale date de 2023. Il a été réalisé par James pour le scénario, les dessins et les aplats de couleurs. Il comprend soixante-trois gags, la majorité en une page, à l’exception des strips intitulés Lil’ Will (cinq pages à raison de trois strips par pages), deux gags en deux pages et un gag en trois pages. William Cabot, scénariste âgé de trente-et-un ans, ouvre la porte palière de son appartement et accueille l’équipe de tournage pour leur proposer d’aller directement dans son bureau. Il effectue le mouvement de leur tourner le dos pour rentrer dans son appartement, marque une pause, tourne la tête et leur demande si ça fait assez naturel cette fois. Le journaliste lui répond qu’ils sont encore en train de tourner et qu’il faut attendre qu’ils aient coupé avant de faire des apartés. Il faut la refaire et il doit tâcher de rester spontané. William se confie à la presse : l’intervieweur constate que le bédéiste ne fait pas de séries d’Heroic Fantasy avec des guerrières dévêtues, des épées, tout ça, et demande pourquoi donc. William répond qu’en réalité il n’a fait que de l’Heroic Fantasy jusqu’à ses trente ans, maintenant il a trente-et-un ans, il a mûri. Réclame : une femme en maillot de bain déclare qu’elle ne pourra jamais tomber amoureuse d’un scénariste tout maigrichon ; le texte explique comment rajouter quatre-vingts à cent kilos rapidement et facilement. La magie de la rencontre : à une question posée, William répond qu’être scénariste de BD, c’est avant tout une histoire de rencontre, de complémentarité avec ses dessinateurs. Ils savent dessiner, il sait écrire. Off the record : la caméra continue à tourner, et William se demande en quoi sa réplique précédente pourrait être drôle. La note d’intention : William explique le projet de sa prochaine bande dessinée, c’est-à-dire l’histoire d’un gamin des favelas, on découvre qu’il est le dernier hériter de la dynastie des Kennedy. À la suite d’un bug informatique, il est propulsé directeur de la CIA et le voilà alors poursuivi par une horde de parachutistes ninjas qui veulent sa peau. Pour donner une petite couleur politique à l’histoire, le héros couche avec la femme du président des États-Unis. Bref, comme peut le constater le journaliste, on est bien loin de l’Heroic Fantasy. C’est du sérieux ! William révise ses classiques : accoudé à la rambarde sur son minuscule balcon parisien, il déclare Madame Bovary, c’est moi. Le journaliste l’interroge pour savoir si à l’instar de Flaubert, l’auteur du roman, il s’identifie au personnage d’Emma. Il dissipe rapidement le malentendu : Madame Bovary, c’est lui… qui l’adapte en BD. Le quotidien de l’artiste 1 : quatre figures montrant William en train de marcher pipe au bec, s’arrêter avec la pipe à la main, adoptant une posture avantageuse, un pied sur une souche d’arbre, assis dans son fauteuil, jambes croisées, le regard fixant le lointain, avachi dans le même fauteuil en train de piquer un roupillon, la quête de l’inspiration. Oui, bien sûr, il s’agit d’un ouvrage nombriliste où un bédéiste considère sa profession, réduite à la portion de scénariste, car l’auteur, lui, est un auteur complet. Il a choisi une forme qui peut sembler minimaliste : William porte toujours la même tenue, à savoir un pantalon avec un pli sur le devant, une chemise et une cravate, et un gilet assorti, sans oublier ses lunettes et sa coupe impeccable avec une raie sur le côté. Le journaliste et le caméraman restent hors champ tout du long, avec seulement leurs remarques ou leurs questions dans une cellule de texte. Le nombre de personnages est assez limité : William, les deux journalistes, deux amis d’enfance du scénariste, une femme assise à la table d’à côté à la terrasse d’un café, Caroline Cabot (54 ans) la mère de William le temps de deux gags, Antonin (59 ans, éditeur) le temps de trois gags, une femme demandant un autographe en convention, Vulvania (27 ans, autrice, 1 gag), trois autres dessinateurs (chacun le temps d’un gag), un autre scénariste (le temps d’un gag), Claire (44 ans, libraire). Bon, mine de rien, ça fait quand même une douzaine d’autres personnages. Bien sûr, William est au centre de tous les gags, il est même le seul personnage à apparaître dans quarante-et-un d’entre eux, sur un total de soixante-trois, c’est-à-dire juste deux tiers. Bon d’accord, mais ces gags se déroulent presque tout le temps dans son salon, sauf pour la porte palière, sa bibliothèque, son petit balcon étroit, l’atelier d’un dessinateur, une terrasse de café, l’appartement de sa mère, le bureau de son éditeur Antonin, la cuisine de William, une galerie d’exposition de planches de bande dessinée, une table à une convention BD, une ville de western, une librairie, sans compter les décors des strips Lil’ Will. D’ailleurs, le lecteur constate rapidement que la monotonie apparente de la forme même des strips (trois bandes de deux cases) est régulièrement rompue par des formes différentes. Ça commence avec un gag en trois cases les unes au-dessus des autres, une rubrique appelée Off the record qui revient à sept reprises dans le tome : le journaliste repose une question pour avoir une réponse plus honnête, moins politiquement correcte. Ça continue avec les pages appelées Le quotidien de l’artiste : uniquement William dans une posture posé, entre une et quatre postures, pour illustrer un thème, comme 1 La quête de l’inspiration, 2 Inspiration nocturne, 3 Le processus de création, 4 Explorer de nouveaux terrains créatifs, 5 Jalouser/admirer le talent d’un concurrent/collègue, 6 Le scénariste de bande dessinée dans un salon du livre, 7 S’accorder une petit pause de temps à autre, 8 Rester connecté au monde extérieur, 9 Boucler un livre. Puis, le lecteur découvre les strips intitulés Lil’ Will : trois bandes de rois cases, chacune constituant un gag, un hommage patent aux Peanuts de Charles M. Schulz (1922-2000), avec parfois une petite touche de Calvin & Hobbes, de Bill Watterson (1958-). Le bédéiste réalise également des parodies de réclame (celle sur le thème de Charles Atlas), deux pages de Trucs & astuces de scénariste, ou encore un western parodique dessinée à la manière des westerns de comics. Le lecteur tombe vite sous le charme de cette diversité, de la capacité de l’auteur à faire siennes des formes classiques. Mais quand même, ça doit vite tourner en rond ces gags ? Ben, pas du tout. James fait usage de la dérision et de l’autodérision, pour évoquer de nombreuses facettes du créateur solitaire et isolé, soumis à une concurrence protéiforme. Il intègre le fait qu’il y a une part d’immodestie plus ou moins consciente chez l’auteur qui estime qu’il peut vivre de sa plume, que ce qu’il raconte et la manière dont il le fait vont intéresser assez de personnes pour qu’il en vive, qu’il y aura assez d’êtres humains ayant envie de savoir ce qu’il exprime, pour acheter ses œuvres, pour le rémunérer. Dans le même temps, William (forcément l’avatar de papier de l’auteur pour une partie significative) a conscience qu’il n’est qu’un auteur parmi tant d’autres, sans compter les écrivains qui l’ont précédé, aussi bien en bande dessinée, qu’en littérature. L’expérience de la vie lui a permis de constater qu’il ne serait jamais un écrivain dont la postérité retiendra le nom pour les siècles à venir, qu’il n’est pas grand-chose comme scénariste de bande dessinée comparé à des vrais écrivains (ceux qui écrivent des vrais livres), que son métier est dépendant des artistes dans une relation pas toujours très saine (le scénariste exigeant une case avec des centaines de personnages en costume, seulement avec quelques mots, ou une séquence de course-poursuite dont il laisse le soin à l’artiste de la concevoir sur trois pages), qu’il est dépendant d’une inspiration que la banalité de son quotidien à sa table de travail ne nourrit pas. Sans compter sa notoriété quasi inexistante. Son chiffre de vente peu élevé comparé à d’autres. Sa propension à s’en tenir à des récits de genre pour une littérature d’évasion avec des clichés de genre infantiles (comme les femmes en armure riquiqui ou les épées en guise de symbole phallique) le rend pathétique par rapport à de jeunes autrices parlant sans tabou d’une facette de la condition féminine dans la société. Une série de gags sur le métier de scénariste de BD, réalisée par un bédéiste auteur complet, avec une forme un peu austère d’interview d’un monsieur dont les années fougueuses sont derrière lui, en chemise et cravate, et déjà un peu résigné à une carrière sans éclat. Certes, mais aussi une mise en forme très variée, des dessins de type Ligne claire, un regard pénétrant, honnête sans être méchant ou condescendant. James fait sourire grâce à une solide maîtrise de la bande dessinée, une franchise implacable et gentille, une vraie compassion sans hypocrisie. William 31 ans, scénariste, sait qu’il pratique un métier dans lequel il doit convaincre de potentiels acheteurs de lire ce qu’il écrit, qu’il doit convaincre des dessinateurs de donner à voir le fruit de son imagination, que certains genres restent encore infantiles ou adolescents, que d’autres auteurs sont beaucoup plus doués ou enrichissants, qu’il participe à la surproduction, mais c’est son métier. Un paradoxe insoluble et parfois accablant quand l’inspiration fait défaut et qu’il faut gagner sa croûte.
J’ai un peu le même ressenti que Pol, même si je vais arrondir au niveau supérieur (ma note réelle serait 2,5/5). Aucun éclat de rire, et des gags qui manquent souvent de surprise et de percussion, voilà les reproches qu’on peut faire à cet album qui, sous couvert d’une longue interview et de quelques « bonus », nous présente le métier d’auteur de BD de façon un peu loufoque et cynique. Plusieurs styles graphiques cohabitent, mais la plupart sont dessinés avec un trait rigide, proche de l’itération iconique (même si James change quelques détails entre les dessins). Si je vais jusqu’aux trois étoiles, c’est que la lecture est quand même globalement plaisante – même si pas assez vacharde et surprenante que je ne l’espérais – et que j’ai quand même souris un certain nombre de fois, en lisant les affirmations un peu débiles et désespérantes de cet auteur raté (et les commentaires en off du journaliste censé faire le reportage).
Cet album se présente sous la forme d'un documentaire dans lequel une équipe de télé suivrait le quotidien d'un scénariste de bande dessinée. Au travers d'une succession de strips de nombreux thèmes seront abordés : la genèse d'une idée, la recherche de l'inspiration, le succès, le déclin, les séances de dédicaces, etc... Si le thème ne parait pas hyper novateur, la forme est plus originale. Car les strips se suivent mais James, l'auteur, arrive à varier les styles et le ton : faux reportage face caméra, souvenirs d'enfance, parodies de pub ou de western. Il y a pas mal de styles alternés, c'est plutôt une bonne surprise et évite clairement la succession monotone de gags qui se ressembleraient tous. Cela dit, et malgré cet effort de variété, les gags tombent un peu à plat. Un peu trop souvent. C'est pas que c'est pas drôle, car les chutes arrachent de temps en temps un sourire. Mais à quelques exceptions près, c'est pas très percutant, et en tout cas c'est pas suffisamment marrant pour obtenir un album mémorable qu'on relira plusieurs fois.
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