La Voix des bêtes, la faim des hommes
Un roman graphique captivant, entre croyances ancestrales et folie des Hommes, entre Le Nom de la Rose et Les Rivières pourpres ! Un polar médiéval signé Thomas Gilbert
987 - 1299 : Moyen-Âge et Capétiens Les Loups Les prix lecteurs BDTheque 2023 Occitanie
Brunehilde est meneuse de loups. Elle vit à la fin du Moyen Âge, cette période incertaine où le christianisme combat intensément pour gagner les populations, essentiellement rurales. Nomade, considérée comme une sorcière, elle doit se méfier des brigands, des bêtes, des esclavagistes, de l'accueil des villageois, parfois. Quand elle arrive dans cette vallée forestière du Sud-Ouest de la France, elle découvre une situation terrible : des gens sont atrocement tués dans les bois, mutilés, et le village est persuadé qu'un démon ou un loup-garou sévit. Première suspecte, Brunehilde, aidée de Paulin, un vague commerçant itinérant croisé en route, est vite obligée de mener l'enquête sur ces meurtres.
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Date de parution | 26 Mai 2023 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Après Les Filles de Salem qui ne m'avait absolument pas convaincu, j'ai été bien plus convaincu par cette BD. Même si je trouve que Thomas Gilbert brasse les mêmes sujets de façon pas toujours très fine. Cette BD propose un polar/enquête qui nous propose de suivre une jeune femme meneuse de loup, personnage folklorique du patrimoine français, dans une enquête aux allures de voyage dans la campagne française aux alentours de l'an mille. L'idée est séduisante et je trouve que la réalisation n'est pas mauvaise, l'histoire ayant préséance sur les thématiques cette fois-ci. C'est ce qui sauve la BD, puisque même si je trouve les thématiques abordées de façon maladroite, j'ai été intéressé par l'histoire et ce qu'elle raconte des peurs que certains pouvaient avoir face aux transformations sociétales ou aux temps nouveaux qui s'annonçaient. Quand je dis que ça sauve la BD, c'est parce qu'encore une fois je trouve les thématiques trop lourdes et appuyées, mais surtout complètement contemporaine pour un sujet médiéval. J'accepte bien plus cette utilisation lorsque le genre est celui de la fantasy (donc de l'imaginaire) et pas du proto-historique. Mais outre cette considération personnelle, je trouve très maladroit l'utilisation de certains thèmes : la religion est obscurantiste et pourvoyeuse de cinglé (ce qui semble bien plus un point de vue contemporain qui oublie que la religion promouvait la science ...), les femmes sont moins violentes que les hommes (point de vue que j'ai toujours trouvé sexiste personnellement), elles veulent être libre y compris sexuellement (dans un monde sans contraception et sans préservatif, faut-il le rappeler !), on pose des questionnements écologiques et de rapports avec la nature bien loin des réelles thématiques de cette époque ... En fait, je vois ce que l'auteur veut me dire, je suis globalement en accord avec ses messages, je le trouve amené très maladroitement. Ce qui me fait apprécier cette BD par rapport aux filles de Salem, c'est qu'ici une contradiction existe. Brunehilde se retrouve parfois face à des personnes en désaccord avec elle, et l'existence de cette contradiction me fait plaisir. Déjà parce qu'on peut choisir parmi les propositions, mais aussi et surtout parce que ça évite le manichéen de bien des situations. Et si je vois bien des écueils, comme la représentation du Moyen-Âge comme un temps d'obscurantisme, de pauvreté et de saleté, j'apprécie que l'auteur nuance un propos (je répète, avec lequel je suis d'accord !) pour proposer quelque chose de plus intéressant qu'un pamphlet détournant l'Histoire. Bref, j'ai apprécié ma lecture, sans pouvoir dire qu'elle sera indélébile dans ma mémoire, mais j'ai passé un bon moment. De mon point de vue, ce n'est pas bon, c'est mieux. Et ça me fait m'intéresser à l'auteur plutôt que m'en détourner !
J'ai été moyennement convaincu par le scénario de cet one-shot. C'est dommage parce que je voudrais bien aimer cet album et je vois tous les efforts que l'auteur a mis dans son œuvre, mais je n'ai jamais totalement accroché au scénario. Le dessin est très bon et la mise en scène est bien maitrisée. Il y a des planches superbes. Le scénario m'a paru moins bon. J'ai trouvé que c'était correct sans plus. Pendant un bon moment j'ai attendu la scène qui allait me faire rentrer dans le récit et ce n'est jamais arrivé. J'ai eu l'impression d'avoir déjà vu les thèmes abordés par l'auteur dans des récits qui m'ont plus passionné et sa vision du moyen-âge me semble quand même un peu cliché.
Voilà une série bourrée de qualités scénaristiques et graphiques mais qui ne m'a pas fait vibrer. Pourtant Thomas Gilbert développe un récit très travaillé et documenté sur le tournant de l'an mille. L'auteur réussit à bien mettre en valeur l'esprit de peur millénariste qui habitait nombre des hommes et femmes de cette époque. La narration est exigeante en faisant appel à de nombreuses coutumes, légendes ou textes de l'Evangile. L'auteur place cette peur de fin du monde dans une lecture erronée mais souvent partagée de l'Apocalypse de st Jean. L'équilibre entre la quête de justice rationnelle de Brunehilde et sa confrontation avec le surnaturel rend une atmosphère crédible dans la lecture de l'histoire. Malheureusement j'ai des réserves sur certains points. J'ai trouvé Brunehilde un peu trop dans l'esprit contemporain avec un côté écolo et non violent trop prononcés. L'idée très moderne de la réhabilitation des loups va dans le même sens. Comme souvent l'auteur charge, avec ces idées et un graphisme d'une grande violence par moment, sur un Moyen-âge obscur et irrespirable. Que penser de notre époque où les espèces disparaissent à grande vitesse et où le massacre des innocents se perpétue toujours pour des raisons toutes plus sottes les unes que les autres. Le dessin est vraiment superbement travaillé pour nous immerger dans ces sentiers du Comté de Toulouse rudes et magnifiques. J'ai une petite réserve pour les images des visages presque insoutenables même si c'est dans l'esprit du récit. Je ne suis pas fan de ce genre à la limite du voyeurisme morbide. Je reconnais la grande qualité de la série mais je suis resté souvent en dehors.
Occitanie, aux alentours de l'An Mil, la campagne médiévale oscille entre misère, obscurantisme et violence. Un colpoteur fait la rencontre d'une meneuse de loups et ils parcourent ensemble les routes. Par meneuse de loups, ou meneux, il faut comprendre une personne capable de faire le lien entre la nature et les hommes, de comprendre et amadouer les animaux, et aussi d'apporter divers soins sous la forme de potions et de soutien psychologique. Cette dernière vit seule avec son ami chien-loup et elle apporte son aide aux gens qu'elle croise en échange du souper et d'un abri. Mais dans une ambiance de fin du monde, avec tous les signes avant-coureur de l'Apocalypse selon Saint-Jean, cette pérégrination est risquée. D'autant plus qu'il sévit dans la région un tueur d'enfants, un monstre qui écrase leur visage sans qu'on comprenne ses motivations, et la population locale est persuadée qu'il s'agit d'attaques de loups ou d'un autre animal à éradiquer. J'ai beaucoup aimé la première moitié de l'album. Le dessin est d'une belle qualité : soigné, avec une vraie personnalité, j'aime les courbes de son trait et la façon dont il représente les humains, les bêtes et les décors de la nature médiévale. Cela joue aussi beaucoup sur une mise en scène réussie et des couleurs très bien choisies. L'histoire et les personnages sont très originaux. Même si l'on est placé d'emblée aux côtés des deux voyageurs, l'intrigue lève doucement seulement le voile de mystère autour de la meneuse. Et en parallèle, on est très intrigué par cette histoire de meurtres d'enfants et par le parcours en parallèle de ce moine sujet à des visions bibliques d'anges et de Dieu qui le désigne comme son élu pour préparer l'Apocalypse. C'est un récit dur mais envoutant, qui plonge le lecteur dans l'ambiance du moyen-âge et de ses superstitions. Cependant, malgré un retournement de situation abrupt concernant l'un des personnages vers le milieu de l'album, j'ai trouvé peu à peu que le rythme se tassait, s'ankylosait, et mon esprit en est doucement venu à sortir de ma lecture avec un soupçon d'ennui à un moment donné. La grande scène conclusive, qui amène plus d'action, ne m'a pas davantage convaincu : outre la folie de l'un des protagonistes, j'ai eu du mal à apprécier ceux qui l'entouraient soudainement. Cette scène là m'est apparu moins réaliste que les précédentes, plus théatrale, et cela m'a amené à être un peu déçu par la fin de cette histoire. C'est forcément une histoire de goût, mais je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'avec tous ces bons ingrédients, ce chouette cadre historique et ce beau graphisme, il y avait matière à produire une oeuvre plus solide et marquante de bout en bout.
Un album de médiéval fantastique, mais qui ne surjoue rien, le fantastique étant réduit à la portion congrue. C’est d’ailleurs toute la narration qui se la joue modeste, sur un rythme lent (mais pas ennuyeux !), où nous suivons Brunehilde, une meneuse de loups, vaguement guérisseuse, et quelques personnages, qui un temps l’accompagnent (un colporteur, puis un bûcheron), dans une traversée du centre de la France actuelle, dans les dernières années du Xème siècle, quelques dizaines d’années après la fin de l’Empire carolingien (quelques termes permettent de situer la période), vers Aurillac. Une période assez trouble, mais la violence, pourtant bien présente (elle éclate dans le dernier tiers de l’album – le fantastique devenant alors plus présent), est ici comme atténuée par narration et personnages, Brunehilde la fuyant et la condamnant/combattant à la fois (voir sa réaction lors d’une exécution publique). Une vision apaisée de la société de l’époque. Elle trouve toujours des gens pour l’accueillir et la nourrir – y compris dans un village touché par maladie et famine (ce côté peut-être un peu naïf n’est pas trop gênant). Brunehilde est aussi éprise de justice, et veut disculper les loups d’une série de « meurtres » sauvages d’enfants. Cela bascule donc dans une sorte d’enquête, dans laquelle Église et religion ont leur part (les peurs millénaristes de l’époque attisaient les angoisses). Certains passages par contre sont un peu obscurs (la transition est parfois brutale, en particulier dans les dernières pages). Le dessin, qui s’éloigne des canons réalistes classiques (dans un style rappelant Bastien Vivès), n’est pas désagréable, et j’ai bien aimé la colorisation. Mes seuls bémols, ce sont ces traits de visages parfois effacés – ce que je n’aime pas en général – et une petite erreur (une flèche « change d’œil » lors de la mort d’un des compagnons de Brunehilde). Une histoire pas forcément très fouillée, mais que j’ai trouvé agréable et originale. Une lecture recommandable. Note réelle 3,5/5.
Voilà un bel album que la sortie sans tambour ni trompette aurait pu condamner à un anonymat éternel. C'est sa couverture qui m'a attiré, ainsi que le dessin, sorte de ligne claire souple servie par une mise en couleur intelligente et des effets de lumière très réussis. Ces effets associés aux paysages de landes et de forêt lui donne une atmosphère particulière. Cette BD constitue en outre ma première incursion sur les terres de Thomas Gilbert. Et de fait, le ton de ce récit est particulier. Situé aux abords de l'an mil, quelque part vers St Cirq (Lapopie j'imagine), on fleurte avec le fantastique à travers les délires millénaristes du personnage de Othon, guerrier errant à la personnalité trouble. En outre, Thomas Gilbert ripoline le mythe des meneurs de loup au sujet desquels j'ignorais tout, jusqu'à leur existence. La sauce prend. On navigue sur des eaux multi-référentielles. Je me suis en effet amusé à voir des allusions à Servais, Bourgeon (le Sortilège du bois des brumes), au Marquis d'Anaon également... Tout cela avance à un rythme soutenu, évoquant de ce point de vue la BD Furieuse, récent coup de cœur. J'ai aimé les personnages, et notamment Brunehilde, notre meneuse de loups, jeune femme aguerrie pour ne pas dire assez "masculine", en ce sens en phase avec les nouveaux codes de l'époque. La personnalité de Brune est en particulier marquée par cette vilaine blessure sur le nez qui se met à saigner à nouveau à chaque contrariété, à la moindre menace, semblant ainsi l'affecter de manière disproportionnée. On sent ainsi parfaitement bien le caractère viscéral de Brune, et sans qu'il soit nécessaire de tout dire. Quant au scénario, il reste assez classique finalement, quoique sans défaut, mais il accomplit largement son office. Bien construit et huilé, des surprises (Attention spoil ! : par exemple la mort totalement inattendue de l'un des personnages, compagnon de route de Brune) attendent néanmoins le lecteur au détour du chemin. La part de mystère y est également bien dosée. A la fin, les choses s'accomplissent, mais jamais totalement, ou pas de la manière attendue. En bref : une BD qui sort du lot.
Thomas Gilbert propose un album qui revisite finalement des thèmes assez proches de son superbe Les Filles de Salem, à savoir la bêtise humaine et religieuse, et la violence à l’encontre des faibles (les femmes, les enfants, les animaux), mais dans un contexte moins réaliste, presque fantasy… et j’ai beaucoup aimé. L’histoire se présente sous la forme d’une grande aventure en compagnie de Brunehilde, meneuse de loups (personnage légendaire proche d’une sorcière) et des compagnons qu’elle rencontre sur son chemin. Elle va s’opposer à un tueur en série issu de la religion chrétienne (encore une fois malmenée par l’auteur) et prendre la défense des animaux, accusés à tord par les villageois. En tout cas j’ai trouvé l’histoire prenante et rondement menée, et le personnage de Brunehilde très attachant - j’ai beaucoup aimé ses valeurs et sa quête. La mise en image est superbe. J’ai notamment adoré les paysages de campagne. Je note cependant quelques soucis de narration, avec des sauts temporels pas très clairs, qui ont rendu ma lecture un peu ardue, sans toutefois gâcher mon plaisir. Un chouette one-shot.
Superbe enquête médiévale. Thomas Gilbert, auteur plutôt prolixe, arrive une nouvelle fois à livrer une BD captivante de bout en bout. Ça sonne très pacte des loups, rivières pourpres ou nom de la rose, mais au final l'histoire trouve son propre ton et chemin. Il faudra avoir le coeur bien accroché pour aller jusqu'au bout car l'auteur ne nous épargne rien. C'est cru, cruel, rude, sanglant et sans compromis. Le titre est très bon, très bien trouvé, car il exprime parfaitement les principales thématiques du livre.
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