Au cœur des solitudes
Le voyage à travers les États Unis de John Muir à la fin du XIX ème siècle.
1816 - 1871 : De la chute du Premier Empire à la Commune Les petits éditeurs indépendants Les prix lecteurs BDTheque 2023 [USA] - Dixie, le Sud-Est des USA [USA] - Middle West
1867. Une scierie tourne à plein régime dans un bruit effroyable quand soudain, des ouvriers courent secourir un homme à terre. Il s’est blessé gravement aux yeux. John Muir a déjà vingt-neuf ans et il est confiné dans une chambre obscure : il est probable qu’il reste aveugle. Mais miraculeusement, après des mois d’une convalescence quasi mystique, il recouvre la vue. C’est décidé, il va tout quitter et embrasser son rêve de toujours : partir plein Sud à la rencontre de la vie sauvage. Armé de son seul courage, de sa jeunesse, d’une loupe et d’une presse botanique, il parcourra ainsi des centaines de kilomètres, à pied, de l’Indiana à la Floride. Imaginez une nature sauvage presque inviolée, où seuls rôdent quelques dangereux soldats du Sud en déshérence et d’anciens esclaves jetés hors des anciennes plantations…
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Date de parution | 06 Septembre 2023 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Vivre au sein de la nature, se reconnecter avec elle : voilà un thème extrêmement d’actualité… mais qui, à la lecture de ce magnifique album, ne semble pas dater d’hier. S’appuyant sur les carnets de John Muir, Lomig raconte le long périple de ce dernier à travers l’Amérique. Au travers de ces superbes planches, c’est à une véritable déclaration d’amour vis-à-vis de la nature à laquelle on assiste. John Muir fait constamment montre d’émerveillement face à la diversité et à la beauté du monde sauvage, quelles que soient les difficultés rencontrées. Au contraire, face à l’avancée du monde civilisé, il s’interroge et s’attriste devant les dégâts causés par l’exploitation de cette même nature. Cette prise de conscience s’accompagne d’une harmonisation de son propre être avec son environnement naturel. Chaque rencontre lui permet d'accroitre ses connaissances (des autres, de lui-même et de la nature qui l'entoure), en restant à l'écoute et sans jugement. Chaque région traversée lui apporte matière à émerveillement et à réflexion, nourrissant autant le naturaliste que l'humaniste qu'il est. Les courts flash-backs permettent de découvrir d’où vient John Muir et quelles ont été les valeurs qui lui ont été inculquées. On découvre ainsi un homme instruit mais aussi un rude travailleur, quelqu’un qui n’a pas peur du labeur mais qui est aussi capable de saisir la poésie présente dans son environnement. C’est aussi quelqu’un qui se remet en question mais, surtout, quelqu’un qui fait montre d’une capacité de résilience proprement admirable. Franchement, j’ai trouvé ce récit magnifique et inspirant. Il donne envie de lâcher prise, d’arrêter de se croire hors de la nature et, au contraire, d’accepter de n’être qu’un détail dans celle-ci, d’en faire partie non avec mission de la façonner mais avec l’envie de s’y fondre et de l’admirer. Les planches proposées par Lomig sont tout simplement superbes. Avec son trait en noir et blanc, il parvient à saisir la beauté d’une plante, d’une forêt ou d’un champ cultivé, le charme d’une fleur, l’empathie ressentie à la vue d’un chevreuil, d’un écureuil ou d’un lynx, la splendeur d’un soleil couchant…. Tout ça sans la moindre couleur et sans nous faire regretter cette absence. Je ne peux que très chaudement recommander.
Contemplatif passionné, c'est le terme qui caractérise le mieux le personnage principal, John Muir. Lomig décrit une partie de la vie de l'un des premiers naturaliste, un discours qui sonne toujours juste malgré l'époque à laquelle Muir a vécu (1838-1914). Cet homme a eu le courage de créer une rupture par rapport à sa vie passée, il travaillait dans une usine et exerçait un métier qu'il aimait. Un accident du travail lui fait remettre en cause la signification de sa vie, sa situation dans son lit d’hôpital lui met en évidence qu'il doit assouvir ses rêves et ses passions. Il décide, à l'encontre des valeurs inculquées par sa famille et la société qui place le travail comme une obligation à la réussite de tout quitter et partir à la découverte du monde. Le point fort de cet album c'est son personnage principal, une histoire vraie décrite dans la biographie illustrée en fin d'album, Lomig nous transmet la passion de cet homme et cette force pour vivre une vie choisie et idéale. John Muir part à la découverte d'une nature riche et diversifiée, une aventure dessinée en noir et blanc avec des représentations d'oiseaux particulièrement réussies et des paysages dont l'immensité est retranscrite, nous donnant une idée des distances parcourues par notre héros. En racontant l'histoire de John Muir, Lomig nous donne l'occasion de découvrir les États Unis au moment où l'industrialisation et l'agriculture intensive ont eu peu d'impact environnemental. Muir est aussi témoin d'un pays où la population indigène qui avait laissé cette terre proche de son état originel se fait chasser de ses propres terres. Cette aventure décrit la dureté de la vie nomade, un homme qui sans l'aide de la médecine n'aurait pas survécu à son périple et qui sans les réapprovisionnements dans les villes serait mort de faim, Lomig met en évidence les avantages et les inconvénients de notre modèle de société. Muir, un militant écologiste quand personne ne parlait d'écologie.
Comme pour grogro, cette BD m'a touché en plein cœur - je retiens d'ailleurs son conseil de faire une balade pour le jour où j'aurai un souci de pelote... ;-) Dans le domaine de l’écologie, on connaît plus David Henry Thoreau que John Muir. Pourtant, les deux hommes ont des parcours très similaires et beaucoup de points communs, à commencer par leurs origines écossaises. Et hormis le fait d’être également contemporains, nés au début du XIXe siècle, tous deux étaient écrivains, philosophes et naturalistes, avec un profond respect pour la nature et le vivant. Si Thoreau est davantage connu que son cadet de vingt ans, sans doute est-ce dû à l’un de ses ouvrages emblématiques, « La Désobéissance civile », qui a influencé Gandhi et Martin Luther King, ainsi que les mouvements contestataires des années 60 ou encore les anarchistes. Mais Muir aussi a laissé son empreinte en fondant en 1892 le Sierra Club, l’une des premières associations écologiques, toujours très active de nos jours, et en ayant milité aux côtés de Robert Underwood Johnson pour la création du parc national du Yosemite. C’est donc Lomig, auteur dont la bibliographie traduit les préoccupations environnementales et sociétales (Dans la forêt, Le Cas Fodyl…), qui nous met avec bonheur dans les pas de cet arpenteur infatigable qu’était John Muir, en s’inspirant de son journal. D’emblée, on est intrigué par le parti pris du noir et blanc pour un style franco-belge généralement coutumier de la couleur. Et très vite on en réalise la pertinence en examinant le trait, d’une finesse rare, frôlant le sublime, en particulier dans la représentation des paysages, des végétaux et des animaux. Il y a de quoi rester bouche bée, et l’on se dit en effet que la couleur serait redondante ici. Lomig nous donne à voir, de façon réaliste, les beautés d’une nature luxuriante dans de longs passages contemplatifs qui produisent une sensation unique d’immersion. Dans un souci de s’approcher au plus près de l’expérience de Muir, Lomig a respecté la linéarité de son journal, ce qui produit une narration lente, sans à-coups, sans esbroufe, ce qui colle tout à fait au rythme d’une marche au long cours. L’impression globale, c’est que l’auteur a réussi à se mettre dans la peau de John Muir pour nous faire ressentir la plénitude expérimentée par l’Ecossais durant sa randonnée. Mais il n’a pas non plus cherché à enjoliver le sujet plus que nécessaire. Car si ce pionnier de l’écologie pensait parfois avoir l’impression d’être au paradis en observant l’harmonie et la beauté des sites qu’il traversait, son expédition n’a pas toujours été une partie de plaisir. La nature peut se révéler sans pitié, et, comme nous le montre Lomig, notre arpenteur en a fait les frais en contractant le paludisme dans les marécages de Floride, ce qui l’avait énormément affaibli et l’empêcha de poursuivre son voyage vers l’Amérique du Sud. On voit aussi comment l’Homme, en adhérant au progrès technique, en a payé le prix en brisant l’harmonie qui le reliait à la nature. Muir croisera ainsi sur sa route des chasseurs stupides et avinés, des populations traumatisées et appauvries par la guerre de Sécession. Alors qu’il se dirige vers la vallée de Yosemite, il s’émeut des dégâts causés sur la nature par le troupeau de moutons qu’il accompagne en transhumance, ainsi que des scieries installées au beau milieu des magnifiques forêts de la Sierra Nevada. Mais c’est lorsqu’il remet les pieds à New York qu’il prend conscience qu’il ne pourra plus jamais vivre dans la cité grouillante « où un luxe exubérant s’étale face à une misère noire, la plus affligeante qui soit ». A travers les yeux candides et émerveillés de cet être hors-normes, à qui certains esprits très terre-à-terre reprocheront sans doute de n’être qu’un doux rêveur, Lomig nous fait redécouvrir de façon magistrale une nature que nos modes de vie urbains, de plus en plus soumis au tout-technologique, nous ont fait oublier. Une nature que l’être humain continue à maltraiter avec désinvolture, jusqu’à compromettre sa propre survie, peut-être justement parce qu’il a désappris à en apprécier les beautés. « Au cœur des solitudes » est un roman graphique magnifique et, pourrait-on dire, une expérience inoubliable, celle d’un homme remarquable dont l’ambition première était de faire corps avec les éléments.
Cette BD basée sur la vie et les voyages de John Muir, écologiste avant la lettre, manque d'un chouia sa cinquième étoile. Peut-être parce que j'ai trouvé ça tellement admirable malgré mes réserves de départ, que j'en ressens finalement un peu de frustration. En fait, j'aurais aimé que ce soit encore plus long, plus étoffé. Allez, je lui colle un coup de cœur quand même. Ca les vaut amplement. D'abord graphiquement, le dessin est splendide. Le trait est remarquable de finesse et contient une foultitude de détails. Ca foisonne, ça vibre. Les contours fourmillent comme dans les tableaux pointillistes (alors qu'on a affaire à des traits bien marqués, hein ?). Le noir et blanc, qui peut être source de frustration (on imagine aisément le travail de coloriste que cela pourrait engendrer), apporte pourtant la touche contemplative. En effet, mon impression avant d'entamer ma lecture était de tenir une BD terne, presque vide comme ces dessins que l'on trouve dans les carnets de coloriage pour enfants. Mais non, le dessin est vraiment splendide et colle finalement très bien à l'état intérieur de cet homme tout entier happé dans l'environnement qu'il traverse. En outre, notre personnage sort d'une longue période de convalescence qui a bien failli le laisser définitivement aveugle. Alors oui, le dessin, à la fois net et pâle, retranscrit ce retour à la vue, à la vie, et traduit assez bien l'émerveillement de John Muir devant cette nature extraordinairement subtile. Ce voyage est agréable à suivre. On est avec lui, dans l'immensité de territoires encore vierges de souillures humaines. De longs passages muets et méditatifs composent et rythment le récit. Contrairement à Cosme, j'ai trouvé le propos juste et profond, que ce soit au niveau écologique ou spirituel. Lomig présente John Muir un peu à la façon d'un Adam moderne, et ça fonctionne parfaitement. Le propos est d'une actualité brulante et tragique. Bien entendu, il n'y a pas d'intrigue. Il s'agit d'un voyage, d'une déambulation solitaire à travers les Etats-Unis d'avant la conquête totale de l'Ouest sauvage, pas d'une enquête policière. Chercher un scénario ici avec moults rebondissements me parait un non-sens. Néanmoins, les images accompagnent parfaitement les réflexions de Muir et offrent de très belles transitions. Moi, en tout cas, ça me va complètement. En outre, ça m'a rappelé le récit de Jean-Jacques Audubon qui a fait également l'objet d'une adaptation BD, plus classique. Mais il y a dans la BD de Lomig une force poétique incontestable, absente du livre de Grolleau et Royer. Il permet d'inscrire ce voyage de découverte dans une attitude spirituelle profonde et juste : la "Nature" (pour les peuples animistes, la Nature n'existe pas en dehors d'eux ; ils en font parti intégralement) est une source d'inspiration, permet la méditation. Une promenade vaut toutes les gamberges du monde. Quiconque a déjà fait cette expérience le sait. T'as un souci, tu te poses des questions en boucle sans parvenir à démêler la pelote ? Alors va faire une balade, et la solution, si tu sais regarder, viendra à toi. C'est aussi simple et magique que cela. Ouais ! Cette solitude vaut bien un coup au cœur.
Nous suivons dans cet album John Muir qui, suite à un accident où il a risqué de perdre la vue, décide de tout plaquer et de partir à travers les États Unis dans le but de rejoindre l’Amérique latine, et de se reconnecter avec la nature, dans le seconde moitié de XIX ème siècle, juste après la guerre de sécession. Le postulat de départ m’a fait très envie. Je m’imaginais déjà des grands espaces, de la contemplation et de longue réflexion sur le monde, sur la vie. Sur ce point j’ai été déçu. Finalement nous avons droit à un Road Trip assez mal fait. Une succession de scènettes, sans grande saveur, des rencontres avec des personnes le temps de quelques planches, avec des dialogues entre eux assez creux, sans grands intérêts, le tout entrecoupé régulièrement de planches de paysages, d’animaux, et de pseudo réflexions sur la nature et la place de l’homme, pseudo réflexion car elles n’entrent jamais en profondeur, j’ai eu le sentiment que ça restait toujours totalement en surface, vue l’absence totale d’intrigue dans l’album (car c’est bien là le gros point faible), j’aurais aimé en contrepartie de longs monologues menant à la réflexion. J’ai suivis son parcours sans conviction, sans curiosité, on suit le personnage aller vers rien… Niveau dessin, par contre, je n’ai rien à reprocher. Il n’est pas exceptionnel, mais ses grandes planches en noire et blanc, le soin apporté aux paysages, aux éléments de la nature fait qu’on ce perd avec plaisir à l’intérieur. Il est propre, jolie, et efficace. Puis arrive en fin d’album un dossier sur John Muir. Comment? C’est un personnage ayant existé? Je n’en avais jamais entendu parler. Alors quelques clics sur internet pour en savoir plus et je découvre le personnage. Sur sa page Wikipedia il y est présenté comme : Botaniste, glaciologue, alpiniste, écologue, philosophe, naturaliste, préservationniste, essayiste, géologue, écrivain, explorateur, inventeur, conservationniste. Le Sierra Club, qu'il a fondé, est à ce jour une des plus importantes organisations de protection de l'environnement des États-Unis. Ses écrits et sa philosophie ont fortement influencé la naissance du mouvement écologiste moderne. Et bien c’est quand même un sacré personnage, qui mérite mon attention. Et là j’ai compris qu’effectivement, l’auteur a retranscrit un extrait de la vie de John Muir, il a donc été fidèle à ce que l’on sait. J’aurais aimé savoir cela avant de lire l’album, j’aurais certainement pris le temps de l’apprécier dans cette optique, et moins dans un espoirs de lire un road trip avec une grande aventure, et de grandes réflexions. Pour conclure, j’ai beaucoup apprécié la lenteur de cet album, le contemplatif, et le côté culture qu’il m’a permis d’aller découvrir après. Je regrette un manque de densité au scénario, qui aurait vraiment mérité d'être plus étoffé, tant au niveau des événements, que de la réflexion.
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