Gaston Lagaffe (Delaf d'après Franquin)
La reprise de la saga culte de Franquin par Delaf.
Auteurs canadiens Autour de Gaston Lagaffe
Panique à la rédaction ! Gaston Lagaffe revient de vacances ! Et il apporte avec lui tout un lot de nouvelles inventions délirantes... Avec son lot d'intrigues au suspense brûlant : Cette signature que Mesmaeker appose au bas des contrats est-elle définitive ? Gaston arrivera-t-il au bout de la patience de Prunelle et de Fantasio ? L'ami insistant de Gaston réussira-t-il à publier ses planches atrocement laide dans Spirou ? Et surtout, que vont devenir les planches de Franquin que Gaston a malencontreusement égarées ?
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Date de parution | 22 Novembre 2023 |
Statut histoire | Strips - gags 1 tome paru |
Les avis
Annoncé par surprise lors du dernier festival d'Angoulême,en janvier 2022, sort enfin le Gaston Lagaffe signé Delaf. Je passe sous silence les aventures éditoriales et procès, dont j'avoue ne pas avoir compris grand chose, et la controverse sur la reprise par Delaf, dans mon avis, pour ne retenir que l'album à proprement dit. Et bien, je dois dire que j'ai été assez bluffé par ces nouvelles aventures de Gaston. On retrouve évidement le style de Franquin (et pour cause ajouteraient certains...), et l'effet madeleine de Proust joue à plein dans cette reprise. Nous retrouvons ici l'ensemble des personnages de la rédaction de Spirou : Mlle Jeanne, M.Boulier, Prunelle évidemment toujours tendu comme la ficelle d'un string, mais aussi M. de Mesmaeker, Longtarin et Ducran et Lapoigne. J'avais le regret au fil des pages de ne pas revoir Fantasio, mais Delaf le fait apparaitre sur plusieurs pages, ce qui m'a ravi. Certains gags sont très bien amenés, d'autres plus faibles et on peut regretter peut-être l'abondance de jeux de mots un peu forcés. Mais je dois avouer avoir bien ri plus d'une fois en lisant cet album. J'ai juste été surpris par les dernières planches qui forment une petite aventure de Gaston, sur une dizaine de pages, un format dont nous n'avions pas l'habitude de lire pour cette série. N'en plaise aux gardiens du temple de Franquin et de Gaston, cette reprise est une réussite et atteint parfaitement son but, celui de divertir et de retrouver un personnage qui m' a accompagné depuis que j'achetais le journal Spirou lorsque j'avais à peine 10 ans, soit plus de 40 ans ! Par contre, n'aurait-il pas fallu faire l'impasse sur la numérotation (n°22) ? En effet, vu la pagaille dans la numérotation des éditions et rééditions des Gaston Lagaffe, je ne connais pas un lecteur qui posséderait la série dans cet ordre.
J'aime Franquin. Je l'aime vraiment, j'ai lu tous ses Gaston Lagaffe, tous ses Spirou et Fantasio (les meilleurs de la saga) et j'en suis évidemment fan, mais je ne suis pas un adorateur non plus. Si j'ai usé les Gaston jusqu'à la corde dans ma jeunesse, je ne considère par l'œuvre de Franquin comme intouchable, et je suis prêt à voir d'autres auteurs s'y essayer, quitte à assister à quelques ratages dans le lot. Après tout, j'ai vu des échecs dans les reprises de Spirou et Fantasio ou d'Astérix, et cela n'a jamais entaché ces séries cultes à mes yeux. Vous l'avez compris, ce nouveau tome écrit par Delaf, qui s'insère parfaitement dans la continuité de ce qu'a fait Franquin, m'a passionné au plus haut point. Il est d'ailleurs appréciable à mon sens que le tome s'intitule "tome 22" et non "tome 1" d'une nouvelle série. En effet, le Gaston de Delaf est à l'œuvre de Franquin ce qu'est L'Affaire Francis Blake à l'œuvre de Jacobs. Une reprise en tous points exemplaires, qui sait manier avec une dextérité inattendue les codes et la mythologie du matériau initial, tout en y faisant quelques ajouts aussi subtils que discrets qui créent à cette suite une identité affirmée, habilement différente de celle du père fondateur sans que ces différences ne lui soient un affront. En effet, on ne pouvait pas imaginer plus bel hommage au génial Franquin que cette bande dessinée signée Delaf. Ses gags sont souvent d'une précision chirurgicale. On y retrouve le génie de Franquin pour les petites répliques "à côté", celles qui ne font pas avancer l'action mais sont prononcées par un personnage spectateur impuissant de la tragédie à venir, avec toujours un calembour ou une remarque gentiment décalée qui rehausse le gag de manière prodigieuse. On y retrouve également le génie pour la chute à double ou triple rebondissements, ce qui fait que, même en voyant venir la chute principale du gag, on est agréablement surpris car elle nous amène quelques détails savoureux inattendus. Ainsi, Delaf déploie toute sa maîtrise d'une mythologie qu'il n'a pas créée, dans des gags proprement hilarants, et je confesse m'être surpris plus d'une fois à éclater de rire tout seul dans mon canapé. De cette mythologie, l'auteur-dessinateur a quasiment repris l'ensemble des personnages. Pas de Labévue en vue, me semble-t-il, mais en-dehors de lui, tout le monde est là ! Jusqu'à Spirou, Spip et le Marsupilami, qui accompagnent Fantasio le temps de deux planches, laissant l'espoir fou que Delaf s'empare un jour de l'autre série emblématique de Franquin pour la redresser enfin. Jusqu'à Freddy-les-doigts-de-fée et Cloclo-l'acrobate, même, que l'auteur remet en scène, donnant à Cloclo le rôle de sa vie ! En effet, le cambrioleur, acolyte de Freddy, déjà rencontré plus que brièvement chez Franquin, a le droit ici à une vraie intrigue, amorçant le réel changement apporté par Delaf. Ne brisant jamais la sacro-sainte règle "un gag par page", l'auteur commence toutefois dans la dernière partie du récit à amorcer une succession de gags d'une page formant une histoire cohérente. Pas d'inquiétude, chaque page termine sur une chute réelle, mais l'enchaînement narratif offre à Delaf l'occasion du meilleur hommage qu'il pouvait fournir à son gigantesque prédécesseur. N'hésitant pas à intégrer Franquin lui-même en personnage systématiquement hors-champ et sans dialogues, l'auteur s'amuse comme un petit fou autour d'un MacGuffin parfaitement trouvé pour offrir à Gaston une intrigue non dénuée de noblesse... et même - si j'osais ! - d'un soupçon d'émotion pour les lecteurs, dont le ravissement à la lecture de l'apothéose de ce tome 22 ne pourra qu'être proportionnel à l'amour qu'ils portent au personnage. Et s'il existe un paradis pour les auteurs-dessinateurs-sales gosses, un qui doit bien se marrer là-haut, c'est l'ami André ! D'un rire humble mais fier, et surtout légèrement contrit d'avoir voulu nous enlever Gaston pour l'entraîner avec lui dans la tombe. Mais Gaston a bien appris de son papa, et plus sale gosse que jamais, dans un élan de saine désobéissance, il est revenu pour nous embêter ! Pire, on espère que ça va durer !
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