Le Champ des possibles
Quand Marsu et Thom se rencontrent dans un congrès d'architectes au bout du monde, c'est un véritable coup de foudre professionnel. Thom, qui achète des droits d'utilisation virtuelle d'habitations remarquables, fait découvrir à Marsu, grâce à un casque de VR, quelques endroits paradisiaques.
Cyberespace : Mondes Virtuels Ecole Emile Cohl La BD au féminin
Marsu et Thom vont entamer une relation amoureuse dans ces mondes virtuels. Dans la vie réelle, Marsu a un compagnon, Harry, qu'elle aime profondément et qu'elle ne veut absolument pas quitter. Mais elle ne veut renoncer à aucune de ces deux relations...
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Date de parution | 09 Février 2024 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
En deux mots, Le Champ des Possibles raconte l’histoire de Marsu, une jeune ingénieure qui, lors d’un congrès, rencontre Thom, un architecte en réalité virtuelle. En gros, Thom a créé un monde de réalité virtuelle, inspiré du notre, dans lequel on peut se rendre très facilement et explorer/visiter/vivre dans des endroits inaccessibles, pour beaucoup d’entre nous, dans la vraie vie. Les deux personnages ont alors un véritable coup de foudre professionnel. Marsu, d’abord réticente à l’idée d’utiliser la VR, va se laisser petit à petit séduire par toutes les possibilités que propose cette invention, et surtout, elle va y retrouver Thom de plus en plus régulièrement. Le soucis, c’est que dans la vie réelle, Marsu a un compagnon, Harry, qu'elle aime profondément et qu'elle ne veut absolument pas quitter. Et en même temps, elle ne veut renoncer à aucune de ces deux relations... C’est une histoire à la croisée entre un épisode de Black Mirror et des Chroniques de Bridgerton. Personnellement, je ne pensais pas que le côté « triangle amoureux » me passionnerait à ce point, mais, à la lecture, on se laisse complétement enchanter par cette histoire douce-amer, tout à fait surprenante et magistralement bien dessinée (les passages dans le monde en VR sont au crayon de couleur…c’est vibrant et enivrant). Une belle histoire qui questionne notre rapport à la réalité (ce qu’il convient de faire ou pas), nos addictions à la technologie et la place de l’amour dans tout ça !
Marsu est une architecte de talent dont les bâtiments respectueux de la nature et de l'environnement ont fait la renommée. Elle vit avec son compagnon, artiste potier de profession, qu'elle aime profondément. Mais le jour où Thomas vient lui proposer de découvrir la technologie de monde virtuel qu'il a mise au point, sa vision du monde et du rapport aux autres va être bouleversée. Il s'agit d'un monde virtuel parallèle où une vie paisible est possible dans n'importe quel décor paradisiaque que les utilisateurs souhaiteraient se bâtir. Les humains s'y retrouvent par le biais de casques de réalité virtuelle ou encore mieux de puces implantées permettant à leur conscience d'être à la fois dans ce monde et dans la réalité. Le graphisme est la grande force de cet album. Le trait est beau, doux et soigné, offrant de bons personnages et de jolis décors. Mais surtout il est mis en valeur par une colorisation intense et qui démarque judicieusement les limites entre le réel et le virtuel. Les deux sont beaux et colorés, mais l'un a des couleurs que je qualifierais de sages et lisses malgré leur originalité, tandis que l'autre va à fond dans l'exubérance et la variété, avec une technique différente rappelant les crayons pastels, représentant bien un autre monde où tout est possible. Le titre est un peu trompeur. Car autant une série comme Alt-Life creusait en effet le sujet du champ des possibles d'un monde virtuel, en poussant la réflexion sur son potentiel, les opportunités qu'il crée et son impact sur l'esprit humain, autant Le Champ des possibles ne montre que superficiellement les capacités techniques et sociologiques d'un tel monde virtuel pour se focaliser sur sa beauté et sur... le sujet du polyamour. Car c'est bien une double histoire d'amour qui est le thème principal de cet album. Celle que l'héroïne vit avec son compagnon de toujours dans le monde réel, et en parallèle celle qu'elle vit dans le monde virtuel avec un autre homme, refusant de choisir entre les deux. Aussi belle que soit cette BD et cette histoire, j'y ai ressenti plusieurs malaises. Le premier est en terme de suspension d'incrédulité. Je n'ai aucun souci à accepter la possibilité d'un univers virtuel où tout est possible et où les humains peuvent plonger entièrement leur conscience, comme s'ils y vivaient pour de bon. Et même si c'est un peu plus compliqué, je peux accepter aussi la magie de ce qu'il va finir par s'y passer et les natifs qui en découlent ; ce n'est pas la première fois qu'une telle histoire de SF est racontée (Tron : L'Héritage, la Cité des Permutants...). Mais là où techniquement, je n'arrive plus à y croire c'est dans la capacité d'un être humain à scinder sa conscience et vivre pleinement dans un univers tout en vivant pleinement dans un autre. Concrètement, je ne peux pas y croire quand on voit un personnage se comporter normalement dans le monde réel et nous dire qu'en fait, exactement en même temps, il vit des aventures et des discussions enflammées dans le monde virtuel, étant conscient des deux en même temps. C'est soit l'un soit l'autre pour moi, comme je peux le constater quand je suis absorbé par une tâche ou un récit et que j'en oublie complètement le monde qui m'entoure. Le second est une forme d'agacement envers le comportement de l'héroïne qui dit des choses et fait l'inverse. Je veux parler de son discours initial indiquant qu'elle ne veut pas tester le monde virtuel pour immédiatement après le faire, puis qu'elle ne veut pas ramener ça chez elle puis immédiatement après le fait, qu'elle aime profondément son compagnon mais en même temps on la voit être tactile et très visiblement attirée par un homme qu'elle vient de rencontrer, et quand son compagnon lui dit qu'elle devient pénible à être sans arrêt absente car dans ce monde virtuel, elle dit qu'elle comprend, qu'elle va y remédier... et la case d'après elle se fait greffer la puce qui va lui permettre d'y être rigoureusement en permanence. Difficile pour moi de m'attacher à une telle héroïne. Et le troisième malaise est d'ordre sensible et personnel. Exactement comme je n'imagine pas pouvoir scinder ma conscience en deux, je suis totalement réfractaire à l'idée de polyamour car je n'imagine pas pouvoir scinder mon amour et mon attention pour une personne en deux. Les autrices suggèrent que c'est bien possible avec ses propres enfants que l'on aime tout autant les uns que les autres, mais pour autant il est bien clair qu'on ne peut pas s'occuper de tous à la fois avec la même passion et la même disponibilité, et justement cela crée des jalousies dans les fratries. Alors imaginer vivre pleinement une vie entière d'amour avec une personne tout en vivant pleinement une autre vie d'amour avec une autre, ça me parait insensé. Et c'est bien cela qui est glorifié dans cet album et auquel je n'adhère pas, quelque soit le piédestal de beauté et de compassion mystique sur lequel tout cela est mis en scène, surtout sur la fin. Bref, il y a de belles idées dans cet album, un très beau graphisme, et tout cela est joliment raconté, mais je n'adhère pas aux thèmes abordés et à la conclusion des autrices même si je reconnais que l'album pousse à la réflexion.
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