La Route
Après Le Rapport de Brodeck, Manu Larcenet adapte de nouveau une oeuvre majeure de la littérature. Couronnée par le prix Pulitzer en 2007, "La Route" a connu un grand succès et a été adaptée au cinéma en 2009 avec Vigo Mortensen dans le rôle principal.
Adaptations de romans en BD Après l'apocalypse... Larcenet Les Arts Appliqués de Paris
L'apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d'objets hétéroclites, censés les aider dans leur voyage. Sous la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l'humanité. Survivront-ils à leur périple ? Avec cet album, Manu Larcenet réussit une adaptation d'une originalité absolue et pourtant d'une totale fidélité. En posant son trait sous les mots du romancier, en illustrant les silences du récit, l'artiste s'est approprié l'univers sombre et fascinant du roman de Cormac McCarthy. D'un roman-culte il a fait un album d'une beauté saisissante, à la fois puissant et poignant. Incontestablement un des chefs-d'oeuvre de la bande dessinée moderne. Cormac McCarthy a signé plusieurs romans phares dont "La Route" mais aussi "No Country for old men", également adapté par les frères Coen au cinéma. Son oeuvre est essentiellement disponible aux éditions de L'Olivier (et Points), associées à Dargaud sur ce projet. L'écrivain est décédé le 13 juin 2023. Son roman, publié aux Éditions de l'Olivier et chez Points pour la version poche, a été vendu à près de 800 000 exemplaires.
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Date de parution | 29 Mars 2024 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
29/03/2024
| Paul le poulpe
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Les avis
C'est graphiquement parlant la BD la plus chiadée de Larcenet. D'abord, les visages y sont nettement plus "convaincants" que dans Blast, par exemple. Ensuite, le trait est super fin, contenant une foultitude de détails. On est proche de l'ombre chinoise. L'ambiance est très forte. Le visuel de ce monde désolé est d'une puissance sans trop d'égal. En tout cas ce qui peut se faire de mieux dans le genre. Le livre vous laisse des traces de cendres sur les doigts. Et l'emploi parcimonieux des couleurs ne fait qu'enfoncer d'avantage le clou. Non, rien à dire de ce point de vue. Quant à l'adaptation, je n'ai trop rien à en dire, et d'abord parce qu'il s'agit d'une adaptation, justement, ce qui permet d'avoir les mains libres. Cela dit, d'après mes souvenirs, j'ai le sentiment que Larcenet a fait une traduction assez fidèle du roman dont il a préservé intégralement le climat de tension sourde. Alors 3/5 parce que faut bien le reconnaitre, cette histoire est plombante. Aucun espoir, aucun rayon de soleil ne transpire des pages de ce pavé d'ombres et de cendres. Les personnages errent sans but réels et surtout sans jamais rencontrer la moindre trace d'humanité et de chaleur. Personnellement, j'ai besoin de lumière en ce moment histoire de chasser l'anxiété liée aux événements qui secouent la planète. D'ailleurs, au passage, puisqu'on parle de prendre La Route, j'en profite pour glisser que je suis allé voir hier soir le film Riverboom que je conseille à tout le monde : on en ressort avec la banane jusqu'aux oreilles, et une envie de voyager de ouf. Bref ! Bonne BD, splendide de noirceur, mais qu'il faut aborder sévèrement harnaché. Pour moi, ce n'était juste pas le moment.
Très belle lecture, certes elle est parfois dure visuellement avec des scènes choc. C'est la survie, certains deviennent cannibales. La route, la Route avec un grand R même et bien que je ne l'ai pas lu est la référence littéraire du post-apocalyptique. Un homme et son fils tentent de s'en sortir en évitant toute mauvaise rencontre, poussant leur chariot sans fin tel Sisyphe poussant sa pierre. Manu Larcenet sort un récit qui happe le lecteur et son dessin est un atout indéniable. Je trouve par contre la couverture assez ratée, elle manque de visibilité et c'est à la lecture que j'ai compris qu'ils passaient près d'une chute d'eau.
Décidément, j'ai de la difficulté avec les œuvres plus sérieuses de Larcenet. Il faut dire que j'ai souvent l'impression qu'il ne prend en compte que la beauté de son dessin et rien d'autre. Donc au niveau du graphisme c'est excellent. On est très loin du dessin à gros nez qu'il faisait à ses débuts et son changement de style est bluffant ! Malheureusement, le scénario m'a semblé faible et un peu trop léger. J'ai rien contre les histoires sombres, mais à force de voir le père et le fils répéter les mêmes choses, je me suis un peu ennuyé. Les rebondissements ne m'ont pas passionné et je n'ai pas réussi à m'attacher aux deux personnages principaux, ce qui a fait en sorte que je n'ai pas ressenti de tensions lorsqu'ils étaient en danger. Ça se laisse lire, mais ce n'est pas une œuvre mémorable à mes yeux.
Une adaptation graphique qui frappe par sa densité et sa capacité à retranscrire l’atmosphère oppressante du roman de Cormac McCarthy. Sans avoir lu l’œuvre originale, j’avais quelques réserves sur la manière dont Larcenet, avec son style si particulier, allait réussir à capturer la lenteur, la désolation et la lourdeur de cette histoire apocalyptique dans un format aussi court. Finalement, c’est une véritable réussite. Ce qui m’a immédiatement marqué, c’est la froideur qui se dégage de chaque planche. Larcenet joue sur des tons sombres, des dessins minimalistes qui parviennent à dire beaucoup avec peu. Chaque case semble peser sur les épaules du lecteur, comme si l’on marchait aux côtés des personnages, dans ce monde dévasté où tout espoir semble perdu. Le rythme de la bande dessinée, lent, calculé, rend parfaitement cette sensation de voyage sans fin, une errance où chaque jour ressemble à un autre. L’absence presque totale de dialogues ajoute à cette lourdeur, laissant l’image parler d’elle-même, sans surcharger. Ce qui est particulièrement réussi, c’est la manière dont Larcenet fait ressentir le froid et la solitude. Les personnages, souvent réduits à des silhouettes anonymes, apparaissent comme des ombres qui avancent, sans véritable but, dans un monde en ruines. La nature hostile, presque absente, devient un personnage à part entière. Il n’y a rien de spectaculaire ici, et c’est précisément ce qui fonctionne. La violence, la mort, l’effondrement de la civilisation sont là, en filigrane, mais ce n’est jamais surjoué. Graphiquement, chaque planche est bluffante. Larcenet alterne entre des paysages désolés et des plans rapprochés qui captent la fatigue et la terreur des personnages. Les visages, souvent masqués ou effacés, reflètent cette humanité en voie de disparition. Et paradoxalement, cette sobriété visuelle donne une grande force à l’œuvre. Chaque détail compte, chaque silence pèse. En fait, c’est cette économie de moyens qui rend l’adaptation si puissante. Là où d’autres adaptations auraient peut-être cherché à amplifier le drame ou à souligner les moments forts, Larcenet préfère la retenue. Il laisse le lecteur ressentir la longueur du chemin, le froid qui mord, l’épuisement moral et physique des protagonistes. C’est une bande dessinée qui ne cherche pas à plaire ou à flatter visuellement, mais qui s’impose par sa capacité à immerger totalement dans ce monde sombre et glacial.
Poussé par l'engouement populaire et connaissant le talent graphique de Larcenet, j'ai acheté cet album il y a longtemps mais j'ai repoussé sa lecture jusqu'à hier. La raison : je n'ai pas lu le livre La Route mais j'ai vu son adaptation en film, et je connaissais la dureté de son récit ainsi que l'amertume de sa fin. Je souhaitais donc prendre mon temps pour lire cet album plutôt épais et fort en émotion. J'ai pu constater à nouveau la virtuosité du dessin de Larcenet. Il pose une ambiance intense, toute en noirceur et grisâtre. Ses décors postapocalyptiques sont terribles de même que la morphologie des humains qui y trainent leurs carcasses de survivants désabusés et désespérés. C'est très beau, à l'exception du visage du fils quand on le voit de face : je n'aime pas la forme qu'il prend alors, comme sans relief et floue, alors qu'il est bien plus fin et précis quand on le voit de profil ou de trois-quarts. Malgré ce reproche, c'est avant tout sa beauté graphique qui fait la force de cet ouvrage. Car pour ce qui est de l'intrigue, que je connaissais donc déjà en grande partie, elle m'a moins enthousiasmé. C'est une longue errance sans espoir, ponctuée de quelques moments plus intenses et de rares rencontres dangereuses ou navrantes. J'ai noté quelques différences avec les évènements du film et je dois dire que ce dernier était à mes yeux un peu mieux rythmé que la BD qui se rapproche sans doute plus du roman. Malgré la force de quelques dialogues et de circonstances aussi cruelles que pragmatiques, je m'y suis un peu ennuyé, et j'ai beaucoup été plombé par le désespoir d'ensemble ainsi que frustré par l'envie de comprendre comment on en était arrivé là et pourquoi il n'y avait pas d'échappatoire. L'adaptation est très bonne, le dessin formidable, mais c'est l'adaptation d'un ouvrage qui ne me parle pas vraiment et ne m'a pas enthousiasmé.
Mouais, je vais aller contre la doxa mais je n'ai pas été convaincu par cette série. Elle a beau être l'adaptation d'un prix Pulitzer et d'un film à succès je suis sorti de ma lecture sans beaucoup d'émotion. Je ne suis pas fan du genre post apocalyptique très en vogue il y a une trentaine d'années. Mac Carthy l'a remis au goût du jour dans une version road trip très noir. Larcenet s'en empare avec un graphisme de très haut niveau mais avec un scénario qui m'a laissé insensible. Je rejoins ainsi les remarques de Jeannette sur la répétitivité de nombreuses scènes, l'abus voire le voyeurisme excessif sur le cannibalisme ou les corps mutilés et suppliciés. Personnellement je trouve que l'on navigue dans la fourniture d'angoisse facile et malsaine. Comme le texte est très rare et banal, on reste captif d'un visuel paradoxal si on se réfère à la 4ème de couverture "Réfléchis à ce que tu mets dans ta tête, parce que ça y restera pour toujours." Perso pas pour cette lecture.
J’ai moi aussi beaucoup été marqué par le roman de Cormack McCarthy, mais aussi par le film sorti en 2009. J’étais donc impatient de découvrir cette adaptation de Manu Larcenet, dont j’avais adoré Le Rapport de Brodeck, une autre BD basée sur un roman. Et je ressors satisfait de ma lecture. On retrouve les moments clés de l’histoire : les rencontres avec les gangs cannibales, la découverte de la cache remplie de provisions, le monsieur qui vole le chariot. L’adaptation est réussie, et mon avis se rapproche beaucoup de mon avis sur Le Rapport de Brodeck : la narration est légère et souvent contemplative, les dialogues se font discrets, et à ce titre l’auteur évite les lourdeurs parfois associées à ce genre d’exercice un peu casse gueule. Après, pour le bénéfice de celles et ceux qui ne connaissent pas l’œuvre originale (voir l’avis de Jeannette), il faut quand même signaler la noirceur absolue du récit, qui ne laisse aucune place à l’espoir. Si vous lisez pour vous divertir, rêver, vous évader, alors « La route » risque de vous déprimer. J’ai personnellement attendu le « bon » moment pour la lire. Un grand bravo à l’auteur.
Délicate critique que celle-ci. Entendons-nous bien : cette BD est un projet vertigineux, d'une ambition esthétique indéniable, un projet total sans la moindre compromission. Et il y a ma note, ce 3 banal, ce que n'est absolument pas cette BD, reflétant mon appréciation subjective de l’œuvre. Nul propos et regard ici sur à la qualité de l'adaptation, n'ayant ni lu le roman ni vu le film. Cette BD est incroyablement noire, glauque, morbide, ce qui n'est aucunement un problème. Ce qui me gêne davantage est la conduite du scénario. Tous les éléments sont immédiatement présents dès l'entame du récit : la crainte des rares autres, la faim, le froid, la soif, l'horreur du cannibalisme, etc. Le récit ne dégage pas de surprise, ni n'élabore un crescendo dans l'horreur. L'on sait où l'on va, et l'on y va comme prévu. Côté récit d'initiation, c'est très pauvre et essentiellement limité à des précautions sur les lieux à éviter, et de bien décevants dialogues père-fils. Côté métaphore, l'on ne sait s'il s'agit d'une fable sur le nucléaire, le changement climatique, la guerre (civile ou non), soit un regard bien peu acéré sur notre société contemporaine, n'exprimant que son nihilisme froid. Autre point regrettable, l'ambiance. Mon point de vue n'est visiblement pas unanimement partagé, mais je n'ai été saisi ni par l'horreur (aussi parce qu'exprimée dès le départ, comme un préalable à accepter pour entrer dans ce récit SF), ni par la tension. Je n'ai pas craint pour la vie de nos héros lorsqu'une milice ou des égarés s'approchaient, n'ai jamais véritablement senti la douleur du froid, l'horreur de la faim faisant chez certains perdre toute morale, n'ai pas soufflé ni ressenti la moindre délivrance quand nos héros mettaient la main sur un stock de nourriture ou dénichait un abri sûr. Aucun abattement, comme l'enfant d'ailleurs, lorsque l'inéluctable événement final tomba. Une BD impressionnante en de nombreux points, qui peut regrettablement se lire avec un improbable détachement. Blast et plus encore Le Rapport de Brodeck m'avaient bien davantage convaincu.
Je comprends que Larcenet soit un bon auteur, cependant il pèche dans ses adaptations de roman par un manque d'ambiance. Je ne sais pas comment l'expliquer mais il manque quelque chose qui ferait qu'on s'attache à nos personnages. Heureusement que le dessin est au rendez vous, et que j'aime le post apo.
En adaptant le roman de Cormac McCarthy, Manu Larcenet nous prouve une fois encore, après « Blast » et « Le Rapport de Brodeck » (autre adaptation d’un livre de Philippe Claudel), qu’il n’est jamais aussi bon que quand il aborde la face sombre de l’humanité. Et on peut le dire, ce roman de l’écrivain américain, qui est d’abord un ouvrage de littérature avant d’être d’anticipation (le contexte « post-apo » n’est en fait qu’un prétexte pour explorer la nature humaine lorsqu’elle est confrontée à une situation catastrophique), en laissant passer si peu de lumière, fournissait au bédéiste français une matière première idéale. Larcenet étant resté très fidèle au roman, l’effet de surprise est donc moindre pour ceux qui l’ont déjà lu et/ou ont eu l’occasion de voir le film de John Hillcoat avec Viggo Mortensen dans le rôle principal. Mais l’auteur du « Combat ordinaire » ne s’est pas contenté d’être fidèle, il s’est parfaitement approprié le livre, ce que suffit à confirmer la puissance de son trait. Le chemin de croix de ce père et de son fils errant dans un univers de grisaille, pris en tenaille entre le froid et la terreur, poussant sur des routes défoncées un caddie rempli de rares provisions et de leurs maigres biens (quelle image forte !), a été mis en scène avec brio par celui qui fait figure de maître du neuvième art en France. A coup sûr, le lecteur sera plongé dans un état d’effroi hypnotique en découvrant ce monde désespérément morne où toute vie semble avoir disparu, laissant apparaître les reliques d’une civilisation volatilisée corps et biens : distributeurs de canettes, boîtes de conserve empilées (clin d’œil warholien ?), panneaux publicitaires vantant les mérites d’une destination de rêve… Autant d’objets divers et variés qui, juxtaposés avec des crânes humains témoignant du retour à des pratiques d’un autre âge, nous rappellent par un effet de miroir grinçant notre inconséquence et notre aveuglement, celui de notre monde actuel individualiste et anthropocentré, que l’on nous pousse toujours à considérer comme le summum de la civilisation, le modèle à suivre sans aucune alternative possible. Mais le plus terrifiant (âmes sensibles s’abstenir), ce sont surtout ces scènes récurrentes suggérant l’anthropophagie, encore plus terrifiantes peut-être du fait qu’elles ne soient que suggérées… Notamment celle où l’on voit défiler une cohorte d’hommes en guenilles, simulacre d’armée brandissant des drapeaux en lambeaux et escortant ses prisonniers humains, tels des garde-manger vivants, un choc visuel qui vient percuter violemment notre rétine. Le trait de Larcenet, ici réaliste et minutieux, associé à un cadrage évocateur, joue à plein. Les paysages désolés sous la brume ou la neige laissent filtrer la beauté évanescente de ce qu’il reste d’une nature indifférente à la laideur ambiante. Il paraîtrait presque déplacé de dire que c’est superbe, entant donné le propos extrêmement âpre du livre, et pourtant c’est bien le cas. Vers la fin, une case (p.130) pourrait d’ailleurs rappeler certains tableaux du romantique allemand Caspar David Friedrich, où souvent des personnages font face à l’immensité de la nature. Ici, le père et le fils contemplent une mer grise, laissant apparaître au loin un bateau échoué. Cette brillante version de « La Route », largement acclamée par la critique, est déjà un best-seller, ce dont on ne peut que se réjouir quand il s’agit d’une œuvre atteignant un tel niveau de qualité. Certes, ce n’est pas la lecture la plus « feel-good » de l’année, mais il faut parfois savoir s’infliger des chocs pour prendre conscience de la fragilité de notre monde, et peut-être, s’efforcer de le changer à son échelle. Si le propos de « La Route » est à la fois lucide et sans illusions sur la nature humaine, ce récit, qui décrit le basculement rapide d’une société dite « civilisée » dans la barbarie la plus extrême, n’a pas pour fonction de nous plomber le moral, sinon à quoi bon ? Il devrait plutôt, en nous délivrant un électrochoc mental, nous avertir quant à l’urgence de brandir notre humanité comme seule voie de salut, à l’image du jeune garçon, seul personnage doté d’empathie, et de fait, le plus touchant.
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