Switch
Après des siècles d'obscurantisme et de persécutions, la figure de la sorcière fait un retour fracassant et positif dans notre société. Porté notamment par différents mouvements et personnalités écoféministes, la Sorcière d'aujourd'hui est au coeur des combats les plus brûlants de notre temps. Mais qu'est-ce qui amène une femme d'aujourd'hui à devenir et se revendiquer sorcière ?
Autobiographie Environnement et écologie Féminisme Format carré La BD au féminin Sorcières
Dans son style enlevé et tout en douceur, Eva Roussel nous partage son parcours vers cette spiritualité et dresse un panorama de la sorcellerie contemporaine.
Scénario | |
Dessin | |
Couleurs | |
Editeur
/
Collection
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | 22 Mars 2024 |
Statut histoire | Histoires courtes 1 tome paru |
Les avis
L'autrice, Eva Roussel, a trouvé son équilibre et le moyen de rassurer son éco anxiété dans la pratique de ce qu'elle nomme la sorcellerie, une pratique inspirée d'un peu de shamanisme et de beaucoup de druidisme modernisé qu'elle présente à ses lecteurs tout en parlant d'elle-même à la manière d'un blog BD ou d'une story Instagram, avec des chapitres où elle aborde successivement différentes idées sur une structure assez libre. Il y a des qualités à cet album. La première tient dans le graphisme, un trait rond, mignon et coloré que j'apprécie. Il est charmant, esthétique et efficace pour pousser à la lecture. La seconde est la même que nombre d'autobiographies, le fait de permettre au lecteur de découvrir une personne différente, ici l'autrice, et de comprendre un peu sa façon de pensée. Et la dernière est la découverte de pratiques ésotériques et de petites croyances que tout le monde ne partage pas, en particulier présenté par quelqu'un qui y croit ou en tout cas qui trouve son bien-être dans leur pratique. Pour autant, j'ai hésité à mettre une note plus basse car concrètement il y a certains passages de cet album qui m'ont tellement barbé que je n'ai pas pu m'empêcher de les survoler sans vraiment les lire. Cela tient à la fois de convictions personnelles très différentes de celle de l'autrice, et d'un réel ennui devant le descriptif de ses rituels et autres symboles ésotériques présentés comme des recettes d'une pratique magique à suivre librement. Mon rejet a commencé assez vite avec le discours féministe de l'autrice qui diffère de mon propre féminisme actif. Elle est dans une posture "Nous les femmes brimées contre le Patriarcat et le Capitalisme" qui selon moi crée une opposition manichéenne improductive, alors que je prône pour ma part une égalité des êtres humains autant que les caractéristiques physiques le permettent. J'ai élevé ma fille dans cette optique, celle d'une femme capable de faire tout ce qu'un homme peut faire, au moins intellectuellement parlant, et je me réjouis de voir la sérénité de la jeune adulte qu'elle est devenue. Le discours de l'autrice est en outre bourré de contradictions, revenant sans arrêt sur des symboliques d'énergies féminines et masculines, alors qu'elle essaie en même temps de dire que les humains ne devraient pas être genrés. De même, son écologisme présente des contradictions similaires, entre son appel à retourner à la nature et son utilisation de tablettes graphiques, portables et autres Youtube et Podcasts. En outre, elle assimile la nature à du sacré et à des esprits de la forêt. Si cela permet de respecter la nature et la biodiversité, c'est bien, mais elle y ajoute une forme de naïveté et de superstition digne de fans de Harry Potter, d'elficologie et autre culture pop adolescente. Et surtout, au-delà de ça, c'est sa mise en scène de ce qu'elle nomme sorcellerie que j'apprécie le moins. Ces rituels comme des recettes de cuisine, ces symboles trop cools à se fabriquer ou à dessiner, ce revival du druidisme celte eurocentré comme si c'était la vérité fondamentale d'une Terre Mère oubliée, ces tisanes, cartes de tarot et autres minéraux bienfaisants... C'est du druidisme Instagram, la version internet et BD des boutiques ésotériques bidons qui font sourire et un peu pitié. Bien sûr, elle indique bien que ce ne sont que des propositions, qu'à elle ça lui fait du bien mais que ce n'est pas forcément le cas de tous, et elle admet elle-même (par le biais de son araignée-totem) quelques-unes de ses contradictions, mais tout cela m'apparait comme trop superficiel et trop emprunté d'influences de l'air du temps et des réseaux sociaux. La nature et le féminisme oui, mais pas si cela implique de s'enfoncer dans une superstition et des rituels comme des béquilles morales pour atteindre un équilibre psychologique fragile.
Il y a des autobiographies, comme celle-ci, qui m’intriguent, m’énervent et me plaisent dans un même temps. Ici, cela vient de la personnalité de l’auteure. Je la trouve sympathique et incohérente, opportuniste et pleine de bonne volonté, illogique et franchement bobo. En clair, elle m’intrigue, développe par moment des concepts qui me parlent et à d’autre des idées que je trouve simplistes voire idiotes (mais qui suis-je pour la juger ? Si ça se trouve, l’idiot c’est moi…) Eva Roussel se revendique sorcière et écoféministe. Ce récit prend donc souvent la forme d’un réquisitoire féministe mais l’auteure nous parle aussi et surtout d’elle et de la manière dont elle conçoit la sorcellerie, sa mise en pratique au quotidien et ce que ça lui rapporte dans son épanouissement personnel. En fait, le récit est tellement autocentré que j’y ai finalement plus vu un journal intime dans lequel l’auteure nous livre ses pensées qu’un documentaire car l’absence de neutralité et de recul d’Eva Roussel éloigne trop le résultat obtenu de ce que j’attends d’un documentaire, justement. Le personnage présente une image sympathique. Ses rituels sont bienveillants, elle n’est qu’amour et partage. Elle a aussi l’honnêteté de reconnaitre certaines incohérences de son discours (notamment lorsque, adepte de la lithothérapie, elle reconnait qu’importer des pierres extraites par des enfants exploités depuis des pays pauvres n’est peut-être pas ce qu’il y a de plus moralement défendable). Et certains de ses principes me plaisent (la reconnexion avec la nature, le respect de celle-ci, le fait que nous faisons partie d’un tout). Mais à côté de ça, Eva Roussel m’énerve. Son discours féministe me parait souvent trop simpliste. Ses incessants placements de produits (ses propres livres mais aussi ceux de ses amies, ou d’autres lectures qu’elle présente comme inspirantes, des films, des documentaires, etc… ) me semblent excessifs, intéressés et opportunistes. Dans ces moments-là, je me mets à douter de sa sincérité. Surtout elle a souvent l’art de ne prendre que ce qui l’arrange dans une étude et dire que le reste, ben en fait, c’est du blabla de phallocrates qui veulent rejeter la faute sur les femmes (la manière dont elle se sert d’une étude du GIEC pour expliquer ses craintes d’un effondrement de l’humanité, puis celle dont elle use pour dire que finalement la surpopulation mondiale n’est pas un problème mais que c’est parce que quelques dizaines de multinationales seulement produisent les 2/3 des émissions de gaz à effet de serre que la planète se porte si mal (sans se demander qui consomme la production de ces multinationales) est un exemple de ce qui provoque un rejet chez moi). Au niveau de la forme, le récit se découpe en courts chapitres dans lesquels alternent passages de bandes dessinées (avec art séquentiel et enchainement de cases) et passage de textes illustrés. On sent le côté « blog » du produit (court, simplifié et destiné à un public plutôt jeune). Le résultat est facile à lire. Donc voilà, parfois le discours m’a plu, parfois (trop souvent, en fait) il m’a énervé. Certaines thématiques, certaines croyances me laissent extrêmement dubitatif (la lithotérapie ou l’astrologie, notamment) mais, fondamentalement, l’auteure me semble bienveillante et le livre se lit facilement. Pour moi, on est entre le bof et le pas mal. Ce livre m'aura en tous les cas permis de découvrir un autre profil de la jeune génération actuelle mais pas d'adhérer totalement et inconditionnellement à son discours.
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2024 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site