Devolution

Note: 4/5
(4/5 pour 1 avis)

Et si le futur ressemblait à notre passé ?


Après l'apocalypse... Dynamite Entertainment

Dans le futur, suite à l’épidémie d’un mystérieux virus, toutes les créatures sur Terre ont « dévolué », plongeant la planète entière dans une nouvelle Préhistoire. Toute trace de civilisation a disparu, et les cités humaines ne sont plus que des territoires hostiles dominés par néandertaliens à dos de mammouths, tigres à dents de sabre et autres insectes géants anthropophages. Seule une poignée d’êtres humains semble avoir gardé ses capacités intellectuelles. Parmi eux, Raja va se lever pour combattre et trouver un antidote pour faire rentrer son espèce sur les rails d'une nouvelle évolution. Mais avant cela, elle va devoir traverser les terres désolées pour convaincre les dernières poches d’humanité de la rejoindre dans sa quête… et surtout survivre aux brutes nazies qui les contrôlent par la peur ! Rick Remender, le prodigieux scénariste de Black Science et Fear Agent, nous livre un chef-d’œuvre post-apocalyptique emporté par la beauté brutale du dessin de Jonathan Wayshack. Un récit complet.

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 26 Septembre 2018
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Devolution © Glénat 2018
Les notes
Note: 4/5
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25/08/2024 | Présence
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Par Présence
Note: 4/5
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Faut-il vraiment souhaiter revenir à l'état antérieur ? - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il comprend les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2016, écrits par Rick Remender, dessinés et encrés par Jonathan Wayshak, avec une mise en couleurs de Jordan Boyd. Les couvertures ont été réalisées par Jae Lee. Dans quelques années, la Terre compte 7 milliards d'êtres humains, s'adonnant aux jeux vidéo et la télévision, laissant les gouvernements prendre des décisions uniquement guidées par l'intérêt économique. Quelques scientifiques décident de prendre les choses en main en mettant en pratique une de leurs découvertes. de leur analyse de l'être humain, ils en ont déduit que l'une des sources de tous les maux réside dans le besoin de spiritualité des individus, et en particulier la religion. Ils développent un virus capable de supprimer ce besoin et le lâchent dans la nature. Tout ne se passe pas exactement comme ils l'avaient calculé et la plupart des êtres humains, des animaux et des végétaux régressent sur l'échelle de l'évolution. Raja est une jeune femme, la fille du scientifique qui a inventé le virus. Elle se trouve dans l'état du Nevada et cherche à rejoindre San Francisco où se trouve un anti-virus qui ne demande qu'à être lui aussi lâché dans la nature. En cours de route, elle tombe sur une minuscule communauté d'êtres humains, ayant eux aussi résisté au virus d'involution. Mais elle est faite prisonnière sur les ordres de Gil (diminutif de Gilbert) qui souhaite l'ajouter à son harem et qui n'a aucun début d'intérêt pour restaurer la race humaine. Au sein de cette communauté se trouvent Darren qui perçoit bien le risque d'extinction de la race humaine si rien n'est fait, et le docteur Scott qui a tout intérêt à mettre le plus de distance possible entre lui et Gil (suite à une indélicatesse avec Jana, l'une des femmes de Gil). Le point de départ du récit permet de tout suite en cerner la nature. Il n'est pas possible d'éliminer le besoin de religion en agissant par le biais d'un rétrovirus. Rick Remender ne souhaite donc pas raconter un récit d'anticipation avec une forme de validité scientifique, mais plus une histoire d'aventure, avec un point de départ fantaisiste. Les premières pages font penser à un artiste un peu influencé par Frank Frazetta, déjà plus par Mark Schultz (l'auteur de Xenozoixc) et aussi un peu par Sam Kieth (l'auteur de The MAXX). Il s'agit donc d'un récit en hommage aux publications d'EC Comics, mêlant anticipation, horreur, survie en milieu hostile, grosses bébêtes agressives, et une touche de science-fiction. Dans des interviews, Rick Remender a expliqué qu'il s'agit d'un projet qui mis 10 ans à aboutir, faute de compatibilité d'emploi du temps avec l'artiste prévu initialement, à savoir Paul Renaud, et de contrats mal fichus. Lorsque toutes les questions juridiques ont été résolues et que le nouveau dessinateur qu'il avait proposé a été accepté, il a repris son scénario, a apporté quelques modifications pour qu'il ne ressemble pas à un plagiat de Mad Max: Fury Road (2015) sorti entretemps, mais il a conservé la structure du récit et sa nature essentiellement de divertissement. Comme l'indique donc les prémices, il ne faut pas y chercher de la vraisemblance. Rick Remender a indiqué qu'il avait fait usage de la licence artistique pour inclure tous les monstres qu'il lui semblait bon, et pour que l'artiste puisse s'amuser à dessiner ce qui lui passe par la tête. Il ne faut donc pas essayer de trouver une logique dans la forme régressive des êtres humains, ou une cohérence entre les niveaux d'évolution des différentes espèces animales et végétales. de même, les personnages disposent d'une résistance à la douleur impressionnante, surtout sans anesthésiant, leur comportement est souvent primaire, sans se préoccuper du lendemain. Certains personnages (comme Violet la fille de Sharon & Darren) ne servent que d'artifice narratif, sans aucune psychologie. Sous les couvertures élégantes et élancées de Jae Lee, le lecteur découvre les dessins de Jonathan Wayshak, un étudiant de la même école d'art que Rick Remender, mais section arts graphiques. Les différentes comparaisons flatteuses avec Frazetta, Schultz et Kieth ne sont pas imméritées. du dernier, Wayshak utilise la propension à déformer les perspectives suivant des arcs d'ellipse pour accentuer l'impression de vitesse dans le mouvement, ainsi qu'une forme de caricature des visages, exagérant les expressions veules et primaires. L'effet produit est similaire à celui des dessins de Sam Kieth : des mouvements plus parodiques, des individus à l'intelligence parfois limitée et une moquerie sarcastique qui souligne que tout n'est pas à prendre au premier degré. de Frazetta, l'artiste retient l'importance du réalisme pour rendre ces aventures plus concrètes. Il ne s'adresse pas à des enfants, ni même à des adolescents. Il prend soin de concevoir des vêtements pratiques et plausibles, évoquant souvent des surplus militaires. Il fait de même pour les moyens de transport, hélicoptère ou véhicules terrestres. Il conçoit des monstres à l'apparence et la texture répugnantes, étrangers à l'humanité, provenant d'un monde animal déréglé. Le lecteur peut donc s'immerger dans ce monde post-apocalyptique recelant bien des dangers. Il y a bien sûr les inévitables bâtiments en ruine, ou d'autres encore debout, comme les buildings du centre-ville de San Francisco. Jonathan Wayshack représente aussi bien les lézardes dans les murs, que la nature ayant repris ses droits, les arbres et autres végétaux s'étant frayé un chemin à travers le béton, et utilisant les infrastructures comme des tuteurs. le passage obligé par les égouts montre une connexion inattendue avec le métro, et dépasse les clichés habituels sur la progression dans l'eau chargée d'excréments. le camp bâti par la communauté de Gil ressemble à quelque chose de construit, avec l'intention de durer, et des fortifications réalistes faites pour résister. Outre, les exagérations les personnages disposent d'une forte identité graphique, qu'il s'agisse de leur morphologie ou des traits de leur visage. L'un des autres attraits du récit réside dans la capacité de l'artiste à représenter des gros monstres méchants. Cet aspect s'avère très savoureux : hommes de Neandertal musculeux, sauvages avec une forte pilosité, ptérodactyles aux dents acérées, monstres arachnoïdes titanesques, tout poilus avec des grandes dents (peu importe l'exactitude entomologique), mammouths, fleurs exotiques hors de contrôle, et bien sûr le requin blanc démesuré avec plusieurs rangées de dents. Toutes ces bébêtes mordent à pleines dents dans les pauvres êtres humains, testant leur viscosité avec des dessins bien répugnants. Wayshak s'y entend pour transcrire les fluides nauséabonds et les chairs déchirées. Dans le premier épisode, une pauvre astronaute s'enfuit d'une base lunaire, mais elle est infectée. le lecteur assiste avec horreur à la transformation de son visage prisonnier du casque de sa combinaison spatiale. Il ne voudrait pas être chargé de le nettoyer… Dès le premier épisode, le lecteur se rend compte que Rick Remender ne se contente pas d'aligner les séquences chocs à base d'horreur visuelle primaire. Lorsqu'il évoque la motivation des scientifiques dans la création du virus DVO-8, il dresse un portrait de la race humaine cynique et désabusée : entre volonté de s'abrutir par n'importe quel type de divertissement le plus débile possible en toute connaissance de cause, et montées de violence se concrétisant par des guerres incessantes, plutôt que de rechercher de vraies solutions comme des adultes raisonnables. le lecteur ressent l'écœurement du scénariste devant cette attitude d'une irresponsabilité affligeante. Un peu plus loin il évoque la notion d'altruisme sous une forme d'adulte, la question du sacrifice de quelques-uns pour que le plus grand nombre survive. Il est également question du rythme de renouvellement des matières premières, et du rythme de leur consommation pour le bien être de 7 milliards d'êtres humains. Le début montre l'intention des auteurs de réaliser un récit de genre, avec un arrière-goût de second degré. de fait, Jonathan Wayshak réalise des dessins rendant hommage aux belles années des EC Comics, avec la latitude de se montrer plus graphique dans les horreurs, plus imaginatifs dans les monstres, en profitant des couleurs de Jordan Boyd qui augmentent le relief des surfaces. de son côté, Rick Remender jour le jeu d'un récit post-apocalyptique avec survie contre des gros monstres, et êtres humains toujours en affrontement, malgré l'enjeu de la survie de la race humaine. Il glisse également quelques réflexions désabusées sur la capacité de l'être humain à s'autodétruire. Un récit très divertissant, sans être bête.

25/08/2024 (modifier)