Haute enfance

Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)

Dans la banlieue de Tunis, trois jeunes garçons se lancent dans une expédition à travers la ville pour se venger de leur instituteur honni.


1961 - 1989 : Jusqu'à la fin de la Guerre Froide Enfance(s) Maghreb

Smurfeddine est un cancre avec un don pour faire de l'argent, Ghassem, passionné par Rambo, est issu d'une famille aisée et Farid, à moitié Français, a un talent pour le football. Slim, le petit frère de Farid, les accompagne.

Scénario
Dessin
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 11 Septembre 2024
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Haute enfance © Gallimard 2024
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)
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19/09/2024 | grogro
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Par Ro
Note: 4/5
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Un récit de jeunes garçons dans la Tunisie des années 80. Ils sont trois dans la même classe, un peu turbulents, surtout le plus âgé d'entre eux qui est un pur rebelle aux allures de petit caïd. A l'inverse, leur maître d'école est ultra sévère et les punit douloureusement à chacune de leurs bêtises. Poussé par le plus grand, ils vont chercher à se venger de lui et traverser la banlieue de Tunis à pied pour atteindre son logement. Sauf que le petit frère de l'un des trois l'a forcé à le laisser les accompagner. Et bien qu’il soit un excellent joueur de football et un garçon débrouillard, l’aventure est trop grande pour lui, tout comme pour les trois autres d’ailleurs. Avec une économie de traits et un style volontairement lâché, l’auteur parvient à restituer avec justesse l’atmosphère des rues et des terrains vagues d’un Maghreb de l’époque, un décor familier à ceux, comme moi, qui ont grandi en Afrique dans les années 70 et 80. Ce récit m’a rappelé ces amitiés un peu risquées, ces aventures d’enfants audacieux qui se lancent dans des bêtises ensemble. Le quatuor de personnages, aux personnalités bien distinctes, fonctionne parfaitement. Il y a ce rebelle, d’abord effrayant dans son nihilisme, mais qui se dévoile sous un jour plus humain quand il nous montre ses failles, notamment à travers sa passion pour la danse. À ses côtés, un ami franco-tunisien, blond, qui lutte contre la perception qu’on a de lui comme étant plus français que tunisien. Puis, le petit frère, brillant et talentueux, mais encore trop immature pour saisir pleinement les enjeux de l’aventure. Enfin, le quatrième ami, plus sage, qui, bien que de nature raisonnable, suit néanmoins le rebelle comme un chef. Leur périple à travers les quartiers en construction de la banlieue tunisienne prend des airs de traversée du désert, comme un groupe de cow-boys s’aventurant dans un environnement à la fois familier et menaçant. Peu à peu, nous découvrons leur véritable objectif, un secret que le petit frère ignore presque jusqu’à la fin, étant un peu l’intrus dans cette escapade. L’ambiance est d’une rare efficacité, évoquant de manière poignante et parfois dérangeante ces souvenirs d’enfance où l’on ressent à la fois l’excitation du danger et l’intensité de l’aventure, loin du regard des adultes, dans un monde pourtant banal. La fin, bien que brusque, se révèle à la fois puissante et cruelle, laissant place à une ouverture qui fait écho à la nature même des souvenirs d’enfance : on ne saura jamais vraiment ce qu’il s’est passé après la fuite. J’aurais aimé des dessins plus soignés et des décors plus détaillés, mais peut-être que cela aurait diminué l’intensité de la narration et l’atmosphère si particulière qui se dégage de ce récit.

15/04/2025 (modifier)
Par grogro
Note: 4/5
L'avatar du posteur grogro

J'apprécie énormément le travail de Néjib. Sans avoir l'air d'y toucher, c'est un dessinateur qui justement touche sa bille. Je l'ai découvert avec Stupor Mundi qui m'avait enchanté par l'originalité de son trait mais surtout de son histoire. Cette nouvelle BD est apparemment autobiographique. Il s'agit d'une tranche d'enfance, l'ultime tranche d'enfance en vérité, juste avant de basculer dans l'adolescence, vécue par son frère en Tunisie, et qui s'achève avec le dernier été avant son départ pour la France. Si le récit n'est pas particulièrement marquant de par les événements décrits, il est néanmoins superbement raconté, et se concentre sur l'essentiel. C'est pour ma part tout à fait le genre de chose que j'affectionne. Mais c'est surtout graphiquement qu'il tire son épingle du jeu. Tout d'abord, la mise en page ne comporte aucune marge, et seul un mince trait sépare les cases entre elles, ce qui permet au regard d'être tout entier englouti dans l'ambiance, et au lecteur d'être embarqué dans le rythme fou imposé par le personnage de Smurfeddine, qui est à la fois le meneur et la tête brulée de la bande. Et bien entendu, tout cela est illustré de main de maitre. Vraiment j'adore ce dessin très vivant qui permet de faire une économie de mots (de la vraie BD quoi !), et tout autant le partie pris de colorisation qui ajoute ici un dynamisme incroyable dans les scènes clefs, ou nous immerge tout entier dans l'émotion qui traverse les protagonistes. Un très bon récit sur l'enfance que je ne peux que conseiller aux amateurs.

19/09/2024 (modifier)