Deux Filles nues

Note: 4/5
(4/5 pour 1 avis)

Grand Prix de la critique ACBD (Association des critiques et journalistes de bande dessinée) 2025 Un tableau peint en 1919 devient le témoin silencieux d’un siècle de bouleversements : la montée du nazisme, la censure de l’art dit “dégénéré”, les spoliations, et enfin sa restitution.


Grands prix de la Critique ACBD Les coups de coeur des internautes Nazisme et Seconde Guerre Mondiale, vus par les Allemands Nazisme et Shoah Peinture et tableaux en bande dessinée

Un siècle d'histoire vu par un tableau. Tout commence en 1919 dans une forêt en bordure de Berlin. Otto Mueller peint Deux filles nues. De l'atelier de l'artiste aux murs du bureau de son premier propriétaire, le tableau observe le quotidien avant d'être emporté par les tribulations de cette période noire : l'arrivée d`Hitler au pouvoir, l'antisémitisme d'État, l'art moderne qualifié de «dégénéré» par les nazis, la spoliation des familles juives, les expositions, les ventes, les bûchers... Acteur passif d'un monde qui le dépasse, Deux filles nues est un survivant. Fruit d'une enquête menée par Luz, ce roman graphique et historique nous appelle à la plus grande vigilance face à toutes les formes de censures politiques et culturelles.

Scénario
Luz
Dessin
Luz
Couleurs
Luz
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 02 Octobre 2024
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Deux Filles nues © Albin Michel 2024
Les notes
Note: 4/5
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07/01/2025 | Emka
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Par Emka
Note: 4/5 Coups de coeur du moment
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Le récit nous place d’emblée dans une perspective originale : celle d’un tableau témoin de l’Histoire, silencieux mais omniprésent. "Deux filles nues", peint par Otto Mueller en 1919, traverse les décennies, du chaos de l’entre-deux-guerres à la censure nazie, des spoliations au retour à une collection. Chaque étape raconte autant le destin de l’œuvre que celui du siècle qui l’a portée, malmenée, parfois oubliée. Luz construit une narration fragmentée, où chaque chapitre explore un moment clé de cette trajectoire. On ne voit jamais directement le tableau avant la fin, mais tout se joue autour de lui. Les cases se plient à son cadre : penchées, obscurcies, cachées, elles traduisent son enfermement, ses déplacements et ses expositions. Cela donne au récit une vraie cohérence visuelle, sans pour autant alourdir l’ensemble. Le dessin, sobre et précis, sert parfaitement le propos. Je trouve qu'il n'a ici rien à voir avec un Testosterror mais peut être est-ce un biais lié au fond du récit ? J'avais déjà été impressionné par le dessin de Luz dans Catharsis. Quoiqu'il en soit, on a ici un vrai dessin de BD, pas du dessin de presse (pour lequel j'ai un infini respect mais le but n'est pas le même). Les tons ocres et bruns installent une ambiance qui accompagne les époques traversées, et la mise en page joue habilement avec les contraintes narratives. Luz laisse de l’espace à chaque scène, à chaque silence, sans jamais surcharger. Au-delà du parcours du tableau, l’histoire interroge la censure, la liberté d’expression, et le rôle de l’art face à la violence et à l’oppression. Luz met aussi en écho son propre rapport à la création, en lien avec son vécu. Tout cela se déroule sans grandiloquence, avec une retenue qui rend l’ensemble plus fort. C’est une lecture dense, portée par une narration qui trouve son rythme et son équilibre. Une réflexion sur l’art, sur la mémoire, et sur ce que nous en faisons. Coup de coeur pour moi.

07/01/2025 (modifier)