L'Eau et la Terre
Séra investit la collection “Mirages” avec un récit profondément humain et poétique, sur le Cambodge des années 1975 à 1979, théâtre d’une des pires tragédies du XXe siècle. (Editeur)
1961 - 1989 : Jusqu'à la fin de la Guerre Froide Guerre civile cambodgienne et Khmers rouges Indochine Mirages
Des destins se croisent sur une route, au lendemain du 17 avril 1975, quand les Khmers rouges ont brutalement évacué toutes les villes du pays. Les personnages se savent en sursis au point de se définir comme des gens “n’étant pas encore morts”. Ils font partie des trois groupes qui seront au coeur de la tragédie à venir : paysans, citadins et Khmers. (Editeur)
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Date de parution | 13 Avril 2005 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Je rejoins en partie les remarques de Ro et Noirdésir sur les difficultés de cette série. Toutefois la thématique est tellement bouleversante que je ne peux me résoudre à mettre une note moyenne. Je connais assez bien cette tragédie humaine qui renvoie vraiment à Ubu tellement les situations furent absurdes, criminelles et de pure folie. La construction assez décousue de Séra renvoie à cette incohérence criminelle édifiée par les Khmers rouges au rang de pensée idéologique révolutionnaire. Par exemple le rappel que le port de simples lunettes vous condamnait à mort reste un sommet d'inhumanité du siècle dernier. Séra ne fait pas dans le voyeurisme morbide par respect pour les millions de morts. C'est comme si il voulait nous amener devant un tableau géant avec le visage souriant des victimes que l'on se doit de ne pas oublier. C'est un devoir de mémoire que nous nous devons de perpétuer d'autant plus que nombres de criminels n'ont pas été jugés mais pire n'ont eu aucun remords et pour certains ont continué les actions armées pendant des années. Le graphisme de Séra est hyper réaliste à la limite de la photographie. Le noir des tenues Khmers, le brun de la terre et le rouge du sang dominent dans une atmosphère lourde d'angoisse. Aucune éclaircie ne vient alléger cette ambiance. Une lecture mémoire d'une série au visuel et à la construction singulière mais pour un résultat très touchant.
J'ai déjà lu Lendemains de cendres du même auteur et je trouve les deux BD complémentaires, avec les mêmes réserves que Noirdésir sur celle-ci, plus complexe à aborder sans informations préalable. Le massacre perpétré par les Khmers rouges dans leur propre pays après une longue guerre fut abominable de bien des façons. Les chiffres sont hallucinants, les actions stupéfiantes par leurs ampleurs et le silence qui accompagna tout ceci est glaçant. Mais progressivement la parole se délie et des informations apparaissent sur ce régime et ses exactions. Cette BD s'inscrit dans le même ordre d'idée : dénoncer, raconter, se souvenir. Elle apparait moins comme un documentaire ou un pamphlet qu'une errance dans le régime des Khmers, collectionnant des instantanés de vies de la part de personnes contraintes de fuir les villes, de paysans voyant leurs vies bouleversées et de Khmers qui croient fermement dans leurs combats. L'ensemble est plutôt décousu et présente les différentes situations que des gens peuvent avoir vécus, entrecoupés de cartes présentant l'ampleur des déplacements ou de textes historiques Cambodgien, ainsi que des témoignages. C'est un patchwork qui tente de faire ressentir ce qu'il s'est passé. Accompagné par le dessin de Sera qui donne un mélange de rendu photographique retouché et de scènes plus sauvage dans le traitement, presque floues. C'est un mélange qui fonctionne en grande partie, donnant une atmosphère proche du rêve (ou du cauchemar) au récit, les figures humaines se mélangeant avec un environnement très présent et une horreur graphique qui joue sur ce qu'elle cache. Une BD sympathique à lire, instructive et qui conviendra aux personnes s'intéressant au Cambodge et son histoire. Moins complet que Lendemains de cendres, toutefois, elle se limite à un ressenti de l'intérieur et me semble en ce point complémentaire aux autres ouvrages déjà sortis sur le sujet. Pour ma part, j'ai apprécié et je conseille pour la culture générale et la compréhension de cette horreur encore bien récente.
Le sujet est bouleversant : le massacre à très grande échelle (le débat autour du terme génocide n’en atténue pas l’horreur) perpétré par les Khmers rouges au Cambodge dans les années 1970. L’album en lui-même est assez décousu, agglomérat de témoignages, de personnes tentant de survivre au milieu d’une violence institutionalisée, et rendue à la fois ridicule et affreuse par la propagande aux airs de novlangue que les Khmers rouges assènent à une population sous le choc. Le dessin de Sera est assez statique, mais j’aime bien son rendu. La lecture est intéressante, mais je pense qu’il faut quand même avoir un petit peu de connaissance sur le sujet pour prendre pleinement conscience de l’ampleur des violences. Une bonne bibliographie complète l’album pour qui veut approfondir ses connaissances sur le sujet (aussi en partie évoqué dans le film « La déchirure »). Une lecture intéressante donc, mais que j’ai paradoxalement trouvé moins marquante que je ne l’avais prévu, eu égard au sujet, plus que douloureux.
C'est très spécial comme dessin. En effet c'est souvent composé à base de photos et en pleine planche, mais finalement ça me plaît bien. Par contre j'ai du mal à garder en tête quelque chose de marquant concernant l'histoire malgré son sujet très fort. Cela parle du massacre de la population cambodgienne perpétré par les Khmers rouges dans les années 70. On sent que l'auteur est concerné, c'est son pays et son histoire personnelle qu'il met en scène. On suit la vie de quelques cambodgiens fictifs impliqués dans le conflit agrémentés de slogans Khmer. Le tout est entrecoupé de cartes du pays avec les flux migratoires ou encore les prisons et charniers ce qui donne un côté documentaire. Bref malgré son sujet j'ai eu du mal à dégager quelque chose de cette lecture.
Charmé par son travail graphique sur « Mon frère, le fou », j’ai voulu découvrir une autre œuvre de Sera. J’ai cependant voulu privilégier un album au scénario a priori plus dense, car c’est à ce niveau que se situait le point faible de l’opus précité. Après la lecture de « l’Eau et la Terre », je n’ai que très peu changé d’avis sur mon appréciation de l’artiste. Sa maîtrise technique est réellement impressionnante, mais ses talents en tant que scénariste ne me convainquent pas. L’évocation du génocide commis par les Khmers rouges au Cambodge est intéressante, mais ce scénario trop décousu me prive des émotions qu’un tel sujet aurait dû engendrer. Cela ne signifie pas que je n’ai rien ressenti, mais le seul véritable sentiment que ce récit a fait naître en moi est celui du désespoir de ses acteurs. Et, par désespoir, j’entends dé-espoir, c’est-à-dire l’absence totale d’espoir, de perspectives d’avenir, de rêves de ces multiples acteurs, qu’ils fussent persécuteurs ou persécutés. C’est profondément déprimant, et d’autant mieux retranscrit que Sera insiste régulièrement sur le fait que ses personnages sont encore (à cet instant du récit) toujours vivants. Par ce biais, le seul fait de ne pas être mort constitue clairement l’unique perspective d’avenir des acteurs. Graphiquement, comme je l’ai dit, je considère Sera comme un très grand artiste, même si je me demande si sa technique convient réellement à la bande dessinée. Ses planches sont magnifiques, mais ce dessin s’admire bien plus qu’il ne se lit. Finalement, cette deuxième œuvre de Sera confirme mon premier sentiment. Cet artiste est incroyablement doué du point de vue technique, mais l’originalité de son style et les lacunes qu’il manifeste au niveau de l’écriture (malgré quelques belles trouvailles) me laissent croire que la bande dessinée n’est pas le domaine d’expression qui lui convient le mieux. Pas mal, quand même.
Est ce encore une BD ? Sur le fond, ça vaut un bon 4/5. Le côté documentaire est bien traité même si la construction de ce one-shot est complexe et demande beaucoup d'attention à la lecture. Le sujet n'est pas des plus évidents : le génocide perpétré par les khmers rouges au Cambodge. Devant une telle barbarie, il n'y a aucune explication ni excuse possible. J'aurais aimé un développement moins opaque : une meilleure explication de la mise en place de ce régime, de ses exactions et de sa chute m'auraient davantage convenue. Mais l'initiative reste à saluer et apporte un devoir de mémoire. Sur la forme, je suis plus déçu, en partie pour des raisons déjà évoquées plus haut. On n'est plus vraiment dans de la BD, mais plus sur un photo montage. Ca manque de rythme et de fluidité dans la narration. Seule l'ambiance sombre s'y retrouve dans ce système. A découvrir, mais pour l'investissement, je ne me prononcerai pas.
J'ai trouvé cette Bande dessinée magique. Tant au niveau des ambiances, qu'à la manière dont Séra raconte. Pour nous expliquer, il a fait des dessins. Ce récit, bien que tragique, devient touchant sous ses pinceaux et sa plume. On se rend compte dans ces pages que la guerre est aussi remplie d'humanité, dans le sens où ce ne sont pas que des fronts qui s'affrontent et des chiffres qui baissent à travers un écran de télévision. Ce sont des gens qui survivent, chacun a son histoire. Ce sont de Belles histoires. (Ce qui ne veut pas dire "jolies", mais bien "belles", profondes.) On en suit quelques-unes, ici. "Les personnages me sont familiers, et pourtant je n'ai a priori pas de lien avec ce récit. Là est sa force. "L'eau et la terre" n'est apparemment pas autobiographique, dans le sens où tous les faits ne sont pas réels, mais je crois que l'on se doit de soupçonner de nombreux flashbacks de la part de l'auteur. C'est un ouvrage qui suinte de sa sincérité, qui peut mettre mal a l'aise, mais qui agrippe le coeur, la gorge et la tête, tant il est indispensable. Je crois que l'auteur s'est plié en quatre pour le rendre aussi vrai que possible, avec les documents d'époques, les cartes, les horribles phrases de propagande, et tout l'inimaginable dont il a tenté de restituer ne serait-ce que la silhouette, pour ne pas tomber dans l'insoutenable. Conscience de la sagesse d'un témoignage... Sans trop en faire, surtout. Juste ce qu'il faut pour pointer du doigt et mettre en colère. Pour faire comprendre que, même si on ne peut pas se rendre compte, il faut que l'on sache. L'objet en lui-même est très beau, petit, dans ces tons sépias... La couverture est mate, tout ce que j'aime. Le dessin de Séra est surprenant... Un mélange de photographie et de crayonnés, de peinture, d'encre... qui se meuvent dans un rendu autant réaliste qu'expressif. C'est très étrange et on peut lui reconnaître une grande personnalité dans son traitement graphique. (=si on aime, on achète tout ses albums!...) En lisant, on se dit "enfin un auteur de bandes dessinées qui ne néglige pas l'image au profit de l'histoire, ou l'inverse". Il a su mettre ces deux plans à la même échelle, et c'est ce qui rend cet ouvrage si riche, si particulier. "L'eau et la terre" est vraiment un petit chef-d'oeuvre de vérité, une oeuvre précieuse et intimiste qui se doit de toucher tout les publics. C'est beau. C'est touchant. A lire absolument, plusieurs fois, et à tête reposée. Même ceux qui ne sont pas adeptes de bande dessinée aimeront. C'est au-delà de ça.
Note approximative : 2.5/5 Cette BD bénéficie de belles images et fait témoignage d'une tragédie incroyable et dont pourtant le monde Européen ne sait que très peu. Cependant, je dois dire que je n'ai pas réussi à vraiment l'apprécier car elle n'est pas exempte de défauts. Les images semblent inspirées ou directement issues de photos d'époque. Les couleurs sont très esthétiques. Cela donne quelques jolies planches. Mais l'ennui, c'est que ce style de dessin ne colle pas tellement dans une BD : les personnages ne se ressemblent pas d'une case à la suivante, il n'y a quasiment pas de narration séquentielle, etc. Bref, ce n'est pas facile de suivre le récit en se basant uniquement sur les images. Hélas le texte non plus n'y aide pas trop car ce sont des suites de témoignages sans réel suivi, sans que les séparations entre eux ne soient bien visibles. On y apprend des choses, certains passages sont forts et touchants, mais on reçoit un peu tous les textes, témoignages et images sur le tas, sans suffisamment de cohésion pour les ressentir et les comprendre convenablement. Et c'est bien dommage, car le peu que j'ai appris sur les horreurs et l'atroce aveuglement du régime Khmer rouge grâce à cette BD m'a montré à quel point un véritable récit de témoignage sur ce sujet me semble indispensable. Mais le support BD m'a semblé assez mal utilisé ici, et le message m'est passé haché et sans le ressenti qu'il mérite.
Voilà une bande dessinée très esthétique. Les dessins sont vraiment superbes, des petites toiles à eux seuls. Par ailleurs, l’ambiance qui s’en dégage rend compte d’un malaise et d’une ambiance à la limite du glauque, de l’aliénation en masse d’une population, de son enchaînement et de son nivellement par le bas pour un seul et unique but : le grand bond en avant. Ca parait tellement incroyable qu’on pourrait penser à de la science fiction. La construction du récit rend très bien compte des grandes phases du régime Khmer rouge, les déplacements de la population vers la campagne afin de vider les villes, les exterminations en masse des « ennemis du grand bond » et surtout la souffrance d’un peuple. Ce n’est pas toujours très facile à lire, et ça demande un minimum de calme et de concentration. Une très belle bd, mais dure aussi dans son propos. A lire…
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