Souvenirs d'un jeune homme
L'histoire humoristique et grinçante d'un jeune homme qui, à l'âge de 18 ans, décide de prendre en main son existence... (couverture: "Jai 18 ans déjà! Et qu'ai-je fait de ma vie: rien!")
Adolescence Pilote
Le fils de la famille Chapron, issu d'un milieu petit-bourgeois, décide, le jour de ses 18 ans, de changer de vie. Il consigne ses impressions et ses directives sur un journal intime. Tout ne va pas pour le mieux dans le giron familial, en particulier avec le paternel. Un jour qu'il traînait sa rancune et ses utopies dans les rues, il rencontre Salima, fille de banlieue d'un milieu totalement opposé au sien. Il en tombe follement amoureux, et essaie de la séduire, malgré sa relative froideur. Après plusieurs rebondissements, Salima vient habiter chez le jeune homme par nécessité, à la grande joie de celui-ci qui n'a pas anbandonné ses décisions. Un jour, elle lui annonce que son petit-ami,Jeannot, fraîchement sorti de prison, vient habiter avec eux... De bars en bars, de soirées en soirées, de rebondissements en rebondissements, le jeune homme se réfugie parfois chez ses voisins, une famille hippie et loufoque issue de mai 68, et au gré de ses utopies communistes et de ses (cruelles mais si évidentes) désillusions, l'histoire va prendre une tournure de plus en plus burlesque...
Scénario | |
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Editeur
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Genre
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Date de parution | Février 1983 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J'ai relu cet album qui avait été d'abord prépublié dans la formule mensuelle de Pilote en 1982 sous le titre "Souvenirs d'un jeune homme médiocre", je le précise parce que c'est important, puisque le héros de ce récit, Michel Choupon, passe le cap de ses 18 ans, il devient majeur à une époque (début des années 80) où les jeunes s'incrustaient le plus longtemps possible dans le foyer familial, tout en gardant furieusement leur indépendance et en s'isolant dans leur chambre, et en étant perpétuellement en conflit avec leurs parents. Choupon symbolise tout ça et se considère comme quelqu'un de médiocre puisqu'il dit qu'à 18 ans, il n'a rien fait de sa vie, et je crois que les mecs de ma génération peuvent s'y reconnaître un peu car on a tous vécu ça, c'est sans doute aussi pour ça que j'ai un rapport ambivalent avec cette Bd : je l'aime et je ne l'aime pas des masses car elle me rappelle cette épreuve de la majorité qui fut parfois difficile, encore que moi je n'avais pas de problème avec ma famille et mes parents, mais j'étais plutôt mal dans ma peau, les fils uniques qui grandissent seuls (et qui en plus ont été ballotés par plusieurs déménagements) sont souvent ainsi, ceux qui ont des frères et soeurs ne peuvent pas comprendre cet état d'esprit. Enfin je dis ça, je dis rien car il se trouve quand même que j'ai apprécié cette bande, peut-être plus que les autres que j'ai pu relire de Lauzier qui ont tendance à avoir vieilli car elles développent des idées propres à leur époque de parution, très sociales, qui sont obsolètes aujourd'hui et qui peuvent ne pas être bien comprises par les lecteurs actuels qui ne vivent plus de la même façon. Toujours est-il que Lauzier donne encore dans un créneau similaire à ceux de La Course du rat ou des Tranches de vie, on est toujours dans la critique sociale et l'analyse sociologique, à la différence que ce récit est axé sur un jeune homme, le fils Choupon, tout est vu par lui et analysé par lui, ce qu'il retranscrit dans son journal intime. A travers Choupon, il est question de l'idéalisme, des questionnements et des désillusions de la jeunesse, Lauzier brasse des individus issus de milieux sociaux divers : parents bourges, hippies post-soixantehuitards, magrhébine libérée des banlieues, petit merdeux à l'orthographe déplorable, faune parisianiste etc... il est toujours aussi féroce et juste dans ses portraits des moeurs de ces classes sociales où les hommes sont réacs, machos, affairistes ou très cons, et où les femmes sont belles, sans scupules, soumises ou libérées, ou alors servent de mères-poules, bref chez Lauzier, on retrouve beaucoup d'éléments communs à ces Tranches de vie comme je disais plus haut, c'est le reflet d'une époque, celle des années 80, qui peut être soit mal comprise parce qu'on a évolué, soit intructive car ça permet de voir comment étaient les gens à cette époque. C'est un peu comme ça que je l'ai perçu en relisant cet album, et je trouve que les analyses de Lauzier sont toujours aussi vraies et justes, c'est finement observé, même si la caricature est souvent poussée à l'extrême, mais ça s'appuie sur un fond réel. Après, on retrouve toujours les mêmes défauts dans toutes les Bd de Lauzier, c'est ce côté extrêmement verbeux qui déjà dans le passé avait tendance à m'ennuyer un peu, ça croule sous les dialogues à n'en plus finir, ça remplit les cases et parfois ça cache presque les personnages, mais en même temps, c'est ce qui fait l'identité de Lauzier et le sel de ce type de bande. Quant à ceux qui critiquent la colorisation, libre à eux, moi ça ne m'a jamais dérangé parce que encore une fois, c'est le reflet d'une époque et qu'à cette époque c'était comme ça et on n'avait rien d'autre, c'est une mode de colorisation qui comme les colorisations d'aujourd'hui deviendront aberrantes dans 40 ans et seront moquées, donc je m'y suis fait et j'aime bien, tout comme j'apprécie le dessin de Lauzier, ça m'aide à supporter ces litanies interminables car il est clair que si le dessin ne jouait pas dans le processus d'affect pour ce genre de Bd, je ferais un rejet immédiat. Une relecture qui m'a donc rappelé des souvenirs, bons et moins bons, il faut de tout pour faire un monde, Lauzier le prouve de belle façon.
Bon, autant le dire, j’étais un peu circonspect avant d’attaquer la lecture de cet album de Lauzier, auteur intéressant mais à la production franchement inégale. Je craignais surtout que ces souvenirs aient mal vieilli. En fait, mes craintes étaient en parties injustifiées. En partie seulement, car la colorisation est franchement très datée et très 80’… Pour ce qui est de l’histoire, les états d’âme de Michel Choupon peuvent être parfois saoulant, verbeux (au point que parfois on se prend à le détester, alors que l’instant d’après on le « comprend »), mais ça se laisse lire, et même mieux à vrai dire. On suit en parallèle l’auto analyse de Michel, et la critique de la société où craquent certaines valeurs (la famille en particulier). Autant qu’un jalon dans l’œuvre de Lauzier, c’est un témoignage quasi sociologique – même s’il n’en avait pas l’ambition. Un album à redécouvrir, peut-être l’un des mieux réussis sur l’entrée dans l’âge adulte (ou la sortie de l’adolescence). Note réelle 3,5/5.
Décidément, Lauzier a un sacré don pour croquer la société et ses malaises. Pour un troisième ouvrage de l'auteur, j'ai été plus qu'enchanté, je dois bien le dire. Tout est bon là-dedans. Déjà, le trait est soigné par rapport à La Course du rat du même auteur, avec de petites améliorations notables. Le dessin n'est toujours pas beau mais je l'ai trouvé un poil plus sympathique. Peut-être une plus grande maturité (bien qu'il n'y ait pas dix ans entre les deux). Les couleurs sont toujours autant abominables, là-dessus il n'y a rien à sauver. Par contre, un effort énorme a été fourni au niveau des phylactères, et enfin c'est lisible ! La lecture est fluide, les bulles sont bien taillées, c'est un régal ! Rien à voir avec l'ancien système complètement brouillon. Et encore une fois, c'est l'histoire qui est juste superbe. J'ai littéralement a-d-o-r-é ! Le principe de base est un peu semblable à La Course du rat, avec une personne qui décide de changer sa vie en profondeur et se casse un peu la figure. Mais par contre, le propos va se tourner vers une autre forme de critique sociale. Là, c'est la jeunesse et ses fameuses illusions qui vont s'en prendre plein la poire (et sans gants je vous prie !). Et sans cette fois-ci de slogan tel que "Tous pourris !". Des pourris, il y en a, mais aussi beaucoup de gens normaux qui sont abusés par le système. Les désillusions vont être nombreuses, et encore plus de questions sont posées à la fin qu'au début de l'ouvrage au final. Un adolescent qui fait sa crise d'ado, c'est bateau comme sujet. Mais lorsqu'on pousse le concept un peu plus loin, c'est très intéressant. Les relations avec le père sont ici poussées à l’extrême, de même avec la mère, et pourtant au final, alors qu'on plaignait le père tout le livre durant, on en vient à se demander si il ne le mérite pas. Aucune limite claire n'est posée entre le salaud et l'homme de bien dans toute la BD. Que ce soit pour les hommes ou pour les femmes ! Nul n'est à l'abri. Le plus important à ce niveau, c'est bien le héros. Narrateur de tous les événements, personnage haïssable par ses manières, ses réflexions et tout le mal qu'il fait autour de lui, il n'est néanmoins que perdu dans un monde qu'il doit découvrir comme un adulte désormais mais dans lequel il ne trouve pas sa place. Une sensation qu'on a aussi pu ressentir. Mais là, le héros fait dans tous les extrêmes possibles, ne se rendant même pas compte de sa propre connerie (qui est monumentale), se haïssant lui même tellement fort que c'en est presque malsain. On ne peut pas le prendre en pitié, et pourtant, on ne peut pas le blâmer de tout. C'est du coup un personnage encore une fois ambigu. Il n'est pas tout blanc, pas tout noir, pas tout gris. Il oscille entre tout en permanence. Et hautain, arrogant, haïssable ... Tout est fait pour qu'on le déteste. Lauzier a bien travaillé. En fait, je crois que Lauzier a voulu retranscrire ici tout ce qui est haïssable en nous lorsque nous passons du monde de l'enfance à celui des adultes. Le héros est chargé autant que possible, mais c'est une dénonciation. De ce que le jeune peut ressentir, de ce que la société en fait, de ce qui ne va pas. Tout est passé encore une fois au crible, des bobos aux hippies, les familles strictes et les nouveaux artistes, la mère poule et le père dépassé par son temps, les considérations philosophiques de bas étage, ... Et peut-être que, nous reconnaissant dans ce héros, nous ne le haïssons que d'avantage, aussi méchant et mesquin qu'il est. Si j'ai mis 5 étoiles à ce récit, c'est que je l'ai trouvé excellent, vraiment, avec les plus gros défauts que j'imputais à Lauzier qui ont été gommés. L'histoire marque, étant très sombre, très noire, et ne finissant ni bien ni mal. Je ne peux pas vraiment expliquer autrement, mais la fin est étrange, sans qu'on ne sache encore une fois sur quel pied danser. Lauzier nous emmène dans un tourbillon des 18 ans qui laisse perplexe, la morale n'étant pas simple du tout. Je pense que le récit s'adresse avant tout aux adultes, mais je crois que ceux qui connaissent cette période peuvent aussi comprendre beaucoup de choses à travers cet être complexe et tourmenté. Personnellement, j'ai été marqué par cette BD, et j'en recommande la lecture. Déjà pour se faire son propre avis. Mais également pour apprécier une lecture à la philosophie très particulière, par une satire de la société efficace et une satire de l'homme encore plus efficace. Nijal dit qu'il voit la BD comme la représentation de l'écueil des 18 ans. Je pense que c'est vrai. 18 ans, c'est un cap qu'il faut franchir. Et Lauzier tente de nous montrer une voie à ne pas emprunter. C'est un bon avertissement, et il mérite d'être écouté.
C'est la première oeuvre de Lauzier que je lis, et j'avoue qu'elle m'a fait grosse impression. En effet, "souvenirs d'un jeune homme" revêt un aspect humoristique et sociologique, et même historique, d'une ampleur inédite pour moi. Le personnage principal de cette histoire est un jeune homme qui vient d'avoir ses 18 ans. Il fait le (mince) bilan de sa vie: "Qu'ai-je fait de ma vie? Rien". Inaugurant dans son journal des résolutions toutes neuves, il décide solennellement de changer de vie, d'abandonner cette sensibilité d'écorché vif qui le fait tant souffrir, de mettre au placard cette "orgueilleuse solitude qui n'est en fait qu'une défense", bref, de communiquer. L'instant d'après, le repas familial se transforme de peu en pugilat. Symbole du paradoxe qui existe entre ses déclarations et son comportement. Présentons ce jeune homme: il a effectivement une sensibilité d'écorché vif, qui lui fait épouser les causes les plus nobles et les plus généreuses. Il se dit l'ami, le compagnon des parias et des opprimés du monde entier, anti-capitaliste... bref, un tempérament d'extrême gauche (alter mondialiste dirait-on aujourd'hui), comme beaucoup de jeunes de cet âge. C'est surtout le comportement qu'induit ce tempérament romantique qui provoque les situations humoristiques. Attention! Il y a très peu de situations comiques ou cocasses dans le sens strict du terme. C'est principalement, comme nous l'avons dit, la personnalité du personnage principal qui la cause principale de l'ambiance humoristique, ainsi que des personnages secondaires: une famille hippie complètement déjantée vivant à l'heure de mai 68, une fille de banlieue terre-à-terre, un ex-taulard forte gueule, un ami homosexuel, une famille typiquement "petite-bourgeoise" (pour utiliser ses propres termes)... Cette BD, c'est aussi un féroce portrait sociologique. Comment ne pas reconnaître une certaine frange de la jeunesse dans les aspirations utopiques du jeune homme, comment ne pas reconnaître même toute la jeunesse dans ses contradictions et l'incompréhension dans les rapports familiaux? Je voudrais d'ailleurs faire une parenthèse sur les rapports entre le fils et le père. Ce dernier, d'abord dur avec lui, tente un rapprochement, mais le fils ne cesse de lui reprocher tous ses malheurs. Dans un dialogue, le fils le qualifie d'"opprimeur" et le père, qui toute sa vie a essayé d'être "un bon mari, un bon père, un bon citoyen", se demande ce qu'il a fait pour mériter d'être qualifié d'opprimeur. La fin est d'ailleurs assez éloquente à cet égard... (mais chut!) C'est aussi la peinture d'une époque, le milieu des années 80. Tout, dans les voitures, les habits, le vocabulaire, mais surtout l'état d'esprit, des derniers relents de mai 68 aux persistances de la crise économique, rappelle cette époque. Je pense que le message qu'a voulu faire passer Lauziel (car il y en a un: cette BD n'est pas seulement humoristique), c'est la vision d'un cap, d'un écueil de la vie: l'âge de 18 ans. L'époque est secondaire, et l'humour est un merveilleux moyen de nous faire prendre conscience des caractéristiques et des contradictions parfois cruelles de cet âge. Mieux: l'auteur transcende cette vision, et nous montre un personnage, plus tout à fait un garçon mais pas encore un homme, dans toute la médiocrité de son existence, et en même temps la sublimation de sa vie. C'est cet assemblage inouï qui rend cette oeuvre vraiment exceptionnelle; j'en suis ressorti radieux, avec une vue renouvelée de ce qui m'entoure. Cette lecture n'aura que plus d'impact pour les jeunes gens de 18-19 ans. Lauzier est un auteur rare que j'ai eu la joie de découvrir, qui croque de son talent satirique toute la complexité et la simplicité mêlées des existences humaines.
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