Red Road
1994 Prix Max et Moritz de la meilleure publication de bande dessinée importée. Derib nous fait part de sa connaissance et de sa passion pour les Amérindiens. Red Road est la suite directe de « Celui qui est né deux fois ».
Auteurs suisses Indiens d'Amérique du nord Sioux et Cheyennes [USA] - Middle West
L’histoire contemporaine d'un jeune indien qui à la suite d'un drame familial va découvrir ses origines ancestrales via un voyage initiatique. Amos quitte sa réserve et découvre les aspects nuancés des Etats-Unis ainsi que de la culture indienne grâce à une mystérieuse présence. Amos assume et retrouve ses racines.
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Date de parution | Juin 1993 |
Statut histoire | Série terminée 4 tomes parus |
Les avis
J'avais beaucoup apprécié les trois opus de Celui qui est né deux fois (5 étoiles !). Mais je suis assez déçu par ce qui tient lieu de suite. 4 albums qui retracent les tribulations d'Amos héritier incertain de "Pluie d'Orage". Je trouvais que Derib évitait le manichéisme et avait fouillé son sujet pour Celui qui est né deux fois. Pour cette suite nous tombons dans la caricature excessive par moment. Ce qui m'embête, c'est que j'ai l'impression que Derib passe à côté d'un vrai grand sujet sur la vie dans la réserve de Pine Ridge avec les difficultés qui ont conduit aux événements de Wounded Knee en 1973 et les violences qui ont suivi. Le tome 1 est une vraie charge contre le père d'Amos qui ressemble trait pour trait à Richard Wilson le président tribal de Pine Ridge élu en 1972. C'est le déroulement de cette élection qui va principalement provoquer l'occupation de Wounded Knee en 1973 (thème du T3). Ce tome 1 est presque une charge allégorique contre le numéro 1 de la réserve qui abandonne sa famille (les Oglala Lakota) à cause de son avidité et de sa cupidité au détriment de sa tribu qu'il assassine par son comportement (meurtre de la grand-mère). Le tome deux serait bien avec cette ambiance de rodéos si Derib n'amplifiait pas jusqu'à l'excès le racisme dont est victime Amos. Se faire pisser dessus, se faire tabasser sans raison, se faire traiter de "cul rouge" à toutes les pages par tous les blancs rencontrés, je trouve que cela diminue la crédibilité d'autant qu'Amos est très passif. Or s’il y a bien une communauté qui a gagné l'empathie d'une grande majorité de la population blanche dans les années 70/80 c'est bien la communauté Amérindienne justement grâce à l'activisme des années 70 qui a montré toutes les injustices subies. C'est le tome 3 qui me pose le plus de questions. Centrer l'album sur un événement historique très connu avec seulement quelques dialogues approximatifs sur son déroulement, je trouve que c'est un peu court. De plus pourquoi introduire de l'héroïne dans le récit après le tabac et l'alcool, cela fait un peu catalogue des addictions. Le tome 4 "Wakan" revient à ce que Derib fait le mieux. La recherche de l'harmonie, le chamanisme et la réconciliation. Cela forme un scénario assez chaotique à mon goût qui est sauvé par les dessins de l'auteur. Derib peint les grands espaces américains comme peu savent le faire avec ses couleurs, ses bisons et ses chevaux. Il y a aussi beaucoup d'amour pour ce peuple Amérindien quand il le représente. Dans les tomes 1 et 3 je trouve que Derib passe un peu à côté de son sujet. Quitte à centrer sur les malheurs des Lakota à Pine Ridge pourquoi ne pas parler de la corruption, des milices et des meurtres au sein de la réserve. De plus dans son récit les différents intervenants semblent absouts de toute responsabilité car il y toujours un méchant Blanc qui a provoqué une catastrophe (un docteur, un flic, un cow-boy) avec pour toute réponse de la passivité. Pas le Derib que je préfère.
Etrangement, moi qui suis fan de Derib et de ses séries indiennes, j'ai découvert celle-ci assez tard, en tout cas pas en 1988, date où il l'entreprend après Celui qui est né deux fois, prépubliée dans le journal Tintin. Si j'ai aimé très tôt Derib avec d'abord Buddy Longway, c'est parce qu'il a montré une autre image de l'homme rouge ; sa démonstration d'humanisme est délivrée avec intelligence par les Indiens. D'un seul coup, Derib ôtait le masque de l'Indien sauvage et sanguinaire colporté par une imagerie d'Epinal peu flatteuse, rendant hommage à sa grande sagesse, à son expérience mystique, à l'harmonie qu'il entretient avec la nature, à son combat légitime contre l'avidité de l'homme blanc, et à sa souffrance résultant de son injuste dépossession par un gouvernement qui n'a pas su ou voulu le comprendre et l'accepter. J'ai retrouvé tout ça dans Celui qui est né deux fois ainsi que dans son prolongement contemporain "Red Road", seconde époque et suite directe de ce récit, située 150 ans après. Ici, l'expansionnisme des Blancs a scellé le destin des Indiens ; refoulés dans des réserves en forme de bidonvilles, amputés de leurs vastes territoires et de leurs moyens de subsistance, ils végètent et meurent une seconde fois. Au 20ème siècle, un monde neuf a émergé sur les cendres de l'ancien, l'Amérique moderne a peu tendu la main aux Indiens contemporains, ils ont juste été bons à servir le pays pendant la guerre, à pratiquer des travaux pénibles ou à construire les gratte-ciels de New York car ils ignorent le vertige. La fracture sociale est donc énorme, plus que pour le Noir ou l'Asiatique dans un pays qui a toujours méprisé les ethnies tout en les utilisant. La violence, le racisme, l'alcoolisme, le chômage et la précarité touchent l'Indien des réserves, et d'ailleurs, le tome 1 s'ouvre sur une réalité dans laquelle se débat Amos le jeune héros de cette histoire ; l'album offre des premières pages laissant voir la misère de la réserve de Pine Ridge qui est le lot de beaucoup de réserves, et où l'Indien ne connait que le désespoir et le mépris des Blancs dès qu'il en sort. Mais grâce à l'héritage précieux de ses ancêtres qu'il ignorait et qu'il découvre, Amos peut faire renaitre l'esprit indien, c'est ce que démontre Derib à travers ces 4 albums qui forment un parcours initiatique pour son héros : dans le tome 1, le grand père raconte l'héritage du peuple Sioux et le bison, animal qui en est la sève nourricière. Dans le tome 2, c'est l'apprentissage de la vie avec le monde des rodeos ; dans le tome 3, c'est l'errance, Amos se cherche en découvrant des Indiens rebelles au gouvernement ; dans le tome 4, il retrouve son identité à travers la révélation qui le présente comme l'héritier spirituel de Celui qui est né deux fois.. Voici donc une très belle Bd, d'une très grande valeur humaine, un récit fort avec un peu de naïveté qu'on ne trouvait pas dans la première époque, mais qui a le mérite de montrer avec acuité les conditions de vie des Indiens en réserves, et comment ils sont perçus encore à notre époque par ces gros lourdauds d'Américains cowboys ou de petites villes de bouseux. Le dessin est toujours aussi somptueux, avec des mises en page aux grandes cases, aux cadrages éclatés et des pages grandioses (double pages des bisons, du Mont Rushmore, du cercle cérémoniel de Wounded Knee...). Un récit prenant à travers lequel Amos prend conscience de ses talents de guérisseur, de la noblesse de sa race et du rôle qu'il peut jouer ; il y a donc de l'espoir au bout de la route rouge.
Sur un traitement plus adulte que Yakari, on retrouve dans « Red Road » quelques caractéristiques de la série pour « plus jeunes » à laquelle participe Derib. D’abord l’empathie de Derib pour les Indiens, en particulier ceux des plaines, généralement les Lakotas – et sa connaissance de leur civilisation. Et, mais c’est en fait lié, son « naturalisme », qui peut paraître un chouia naïf, simpliste, mais qui fonctionne quand même. Alors ici, on est (malgré les flash-back se situant au XIXème siècle parfois) dans un univers contemporain. L’univers des réserves – celle de Pine Ridge en particulier, avec l’alcoolisme, le chômage, l’échec et le désœuvrement qui sont le lot de ces « décharges d’humanités » est plutôt bien rendu. Mais Derib fait preuve de trop de manichéisme, ce qui fait perdre un peu de force à son récit, c’est dommage. Sinon, le dessin est réaliste et franchement très bon ! Ce qui peut rendre intéressante la lecture d’une série où qualités et défauts s’équilibrent à peu près.
Red Road est la suite de Celui qui est né deux fois, la deuxième époque de l'énorme intégrale qui regroupe les 3 tomes de la première série et les 4 de la seconde. Parlons-en de l'intégrale : quelle idée de faire un tel pavé ! Ce n'est franchement pas pratique à lire et en plus les coins de la couverture ont tendance à mal supporter le voyage par la poste. Financièrement par contre, il ne faut pas une longue hésitation pour choisir entre ce format et trouver d'occasion les 7 tomes séparés, surtout quand on voit les prix pratiqués sur le marché de l'occasion notamment pour le dernier tome "Wakan". Voilà pour la partie finances et format. L'histoire de "Red Road" est, comme l'ont déjà dit d'autres posteurs, moins passionnante que Celui qui est né deux fois mais pas tant que ça, je lui reproche principalement d'être trop moralisatrice et clichée dans la fin du quatrième tome. J'ai beaucoup aimé les deux premiers volumes "American Buffalos" et "Business Rodeo", la rencontre avec les protagonistes dans la réserve et cette fuite éperdue du jeune Amos après la mort de sa grand-mère, son parcours, ses rencontres sont tout à fait dans la veine des récits d'indiens de Derib : très orienté nature et terre nourricière avec un doigt pointé vers l'envahisseur blanc qui a sauvagement détruit l'harmonie qui existait à l'époque entre les êtres humains, la terre et les esprits de la nature. Le tout est servi par un dessin de tout beauté, de véritables fresques par moments, avec encore et toujours cet inimitable talent pour représenter les chevaux, les animaux en général, les amérindiens, leur mode de vie et leurs traditions. Le troisième tome "Bad Lands" m'a un peu moins plu, je n'ai pas eu l'impression qu'il servait à grand chose dans l'histoire d'Amos, il y a trop de violence et de modernité dedans. On pourrait dire qu'il est plus réaliste. Le quatrième tome marque la fin du parcours initiatique du descendant de Celui qui est né deux fois. Il est un brin caricatural sur la fin mais je crois que je peux tout pardonner à Derib, rien que pour le plaisir visuel qu'il me donne à chaque page et toutes les choses qu'on apprend au fil de l'eau. Ici, c'est la période de la bataille de Little Big Horn qui est mise en avant : les Black Hills (j'ai découvert à cette occasion que le mont Rushmore était taillé dans ces fameuses Black Hills), le rôle de Crazy Horse et de Sitting Bull dans cette bataille qui fut une victoire des indiens, le massacre Wounded Knee (ça m'a d'ailleurs fait penser à Sky Hawk puisque c'est la même période qui y est évoquée). On y apprend également pourquoi et comment Buffalo Bill a hérité de ce surnom par exemple. Quelques jours après ma lecture, il reste encore et toujours cette éternelle impression de plénitude face à la sagesse indienne toujours associée au sentiment d'injustice face aux dégâts provoqués par l'appât du gain. Derib a un don pour créer des personnages attachants et charismatiques et donner une réelle importance aux seconds rôles, souvent tenus par de vieux indiens ridés porteurs de sagesse et de messages spirituels. Les deux jeunes femmes qui croisent la route d'Amos ont tout pour plaire, avec leur plastique irréprochable et leur force de caractère. Je suis une fan absolue de l'auteur, je ne me lasse pas de son dessin et de ses histoires d'indiens. Ici encore je suis ravie de ma lecture, même si je préfère Celui qui est né deux fois ou encore Buddy Longway. 5/5 pour le dessin, 3,5/5 pour l'histoire.
Red Road est la suite directe de « Celui qui est né deux fois ». Mais contrairement à ce dernier, le récit traite de la situation actuelle des « native americans ». Il commence donc au cœur d’une réserve indienne sclérosée par l’alcoolisme, le chômage et la perte des valeurs ancestrales. Bien plus bavard que sa première partie, ce récit ne m’aura pas autant séduit. Il y a tout au long du scénario un apitoiement sur soi-même qui me dérange. De plus, l’histoire est très prévisible. C’était déjà le cas de « Celui qui est né deux fois », mais le problème est que, si je pouvais voir dans ce dernier une sorte de conte, je ne vois Red Road que comme une histoire qui se voudrait réaliste. Du coup, le manichéisme, la condescendance et la gentillesse de Derib finissent par m’irriter. Mais tout n’est pas mauvais. Le dessin reste d’une très belle facture, les seconds rôles sont souvent attachants, et Derib est un tel passionné qu’il parvient à m’intéresser à son histoire. Et puis, un peu de gentillesse dans ce monde de brute, ça fait parfois du bien (même si là, je frôle l’overdose). Allez ! C’est pas mal, mais à réserver à un public amateur de guimauve. (Achat conseillé pour ceux qui ont aimé Celui qui est né deux fois).
Je ne souhaite absolument pas paraître condescendant envers cette bd qui est la suite de Celui qui est né deux fois. J'adore véritablement le dessin dont les traits sont très réalistes mais le propos de cette histoire est d'une naïveté sans pareille. Pourtant, je dois admettre que cela se laisse lire agréablement et que c'est un cran au-dessus de la première saga indienne de Derib. Mais je n'accroche pas plus que cela... La faute à des ficelles déjà bien exploitées dans la bd ou même dans les films de bons sentiments qui passent en boucle l'après-midi sur nos chaînes de télévision et que je ne regarde plus depuis bien longtemps... Amateur de chamanisme et autre quête spirituelle de la recherche de soi, cette bd est faite pour vous avec quand même (ne l'oublions pas) son lot moralisateur : mauvais l'alcool, mauvais ! Cependant, j'avoue qu'un peu de moralité dans ce bas monde ne fait pas de mal. 3 étoiles tout de même.
Après l’histoire du sioux nommé Celui qui est né deux fois, Derib nous offre ici un récit nettement plus réaliste, plus prenant, plus tragique et plus profond. En quatre albums, le lecteur suit avec beaucoup d’intérêt la vie de Amos, descendant du chef sioux. L’histoire, certes teintée de leçons d’humilité et de paix, est loin d’être niaise et ne se limite pas à un pseudo débat moralisateur. Le lecteur ressort à la fois paisible et marqué à la fermeture du dernier opus… Les dessins me semblent plus aboutis dans cette deuxième partie de récit. Je trouve qu’ils sont en parfaite harmonie avec l’aspect sauvage du récit, des paysages et des personnages. Je conseille vivement ces albums, meilleurs selon moi que la partie consacrée à Celui qui est né deux fois. Mon avis concerne l'édition intégrale de chez Le Lombard, avec une excellente préface, des croquis inédits et les couvertures originales mais, de logique, très difficile de manipulation (416 pages).
Une série peu connue de Derib. Et c'est bien dommage !... Le père de Buddy Longway y développe les dures réalités de la vie indienne actuelle : les réserves, la violence, le racisme, l'alcoolisme, la déchéance. A travers la vie d'un jeune Sioux, c'est aussi toutes les difficultés de l'adolescence que m'a contées cet excellent auteur. La narration est essentiellement graphique, dans le style qui a fait sa renommée. Et je dois dire que -franchement- certaines planches sont d'une réelle grande beauté. Une oeuvre adulte, en quatre albums, qui aborde le peuple indien -fascinant- de l'intérieur, en traitant sa mystique et sa spiritualité. Si vous ne l'avez pas encore fait : du très beau travail à découvrir. Vite !...
Avec le temps qui passe, impossible de ne pas mettre le maximum à cette série. Jamais les amérindiens n'ont été aussi bien traités en bd. Il s'agit d'une histoire qui témoigne du passé avec ses douloureuses réalités, et de la mésestimée culture autochtone des USA, et du devenir de cette culture. On sent que Derib y a mit tout son coeur et ses capacités, pour aboutir à une histoire fluide, dense et subtile. Certes, il y a bien un côté qui peut paraître un rien moralisateur, mais cela est largement compensé par la force et la noblesse des sentiments que suscite le voyage du jeune indien paumé Amos. Ce n'est pas rien de traduire en bd l'itinéraire intérieur d'un personnage, ses changements au fur à mesure qu'il apprend et qu'il est confronté à de nouvelles situations, parfois cruelles, parfois libératrices. Rien que pour cela, "Red Road", suite indirecte de Celui qui est né deux fois mérite de rester dans les annales.
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