Passage Afghan (To Afghanistan and back)
Focalisés sur l’Irak, on ne parle plus guère de l’Afghanistan. Pourtant il reste beaucoup à dire…
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Focalisés sur l’Irak, on ne parle plus guère de l’Afghanistan. Pourtant il reste beaucoup à dire… Sur les raisons profondes – et économiques – qui ont motivé les troupes américaines à attaquer leurs ex-alliés Taliban ; sur la façon dont les troupes ont mené leurs attaques ; sur la différence toute relative qui sépare Talibans honnis et Seigneurs de la guerre alliés des occidentaux. Ted Rall, grand spécialiste de la région a voulu se rendre compte par lui-même de la situation. Pour le magazine Village Voice, il est parti en reportage et nous livre son expérience. Pas seulement ce qui est télégénique mais sa vision des combats, ses conditions de travail ainsi que celles de ses confrères des grands réseaux, ses rencontres avec la population afghane, ses stupeurs et sa fuite devant l’insécurité générale. Initialement publié aux Etats Unis, Passage Afghan (intitulé alors To Afghanistan and back) a touché à la fois le public et la presse. Mêlant reportage de guerre et récit intimiste, le livre regroupe à la fois les dessins d’humours, photos et chroniques parues dans le magazine américain Village Voice ainsi qu’une BD de 48 pages où l’auteur détaille au jour le jour son périple en zone de combats. Après Gorazde et Palestine de Joe Sacco, Rural d’Etienne Davodeau… un nouveau reportage en BD aussi instructif que saisissant.
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Date de parution | Septembre 2004 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
L'auteur dresse un bilan très noir de la situation de l'Afghanistan peu de temps après le début de l'intervention américaine (consécutive aux attentats du 11 Septembre 2001). Sa brève incursion dans ce pays en guerre lui donne l'occasion de préciser la chienlit dans laquelle il a sombré. Le récit est court mais très intéressant. Factuellement bien sûr, mais aussi grâce au ton adopté. En effet, Ted Rall n'a pas sa langue dans sa poche, et, dans un univers où le cynisme prospère, sa vision lucide de la situation est assez rafraichissante. Mettant presque dos à dos l'Alliance du Nord (de l'ex-commandant Massoud) et les Talibans, Rall va à contre-courant de la vision manichéenne: il n'y a pas ici de super gentils (Alliance du nord) et de super méchants (Talibans) sous prétexte que certains seraient nos "alliés" ou au moins les ennemis de nos ennemis. Surtout, on voit bien le désordre, pour ne pas dire l'anarchie complète où le banditisme ordinaire fait son beurre sur le dos de tous les occidentaux qui viennent en Afghanistan (les négociations pour obtenir des traducteurs, des objets du quotidien ou pour être véhiculé sont instructives à ce propos). La narration est fluide, agréable, simple. A compléter avec les témoignages de Guibert ou Wild, mais la lecture de cet album est intéressante. Le dessin est simple, pas vraiment le point fort, mais il est lisible (un peu de Delisle dans ce trait, en moins abouti). La partie proprement BD occupe la moitié de la pagination. L'autre moitié, se tenant tête-bêche par rapport à la BD, est constituée de texte (quelques photos et dessins l'accompagnent), est un très bon documentaire. Note réelle 3,5/5.
Actuellement, je m'intéresse particulièrement à cette région du monde que je ne connais qu'à travers ce que disent les médias. J'ai lu récemment L'Etoile du soldat, Kaboul Disco, Les Larmes du Seigneur Afghan sans compter sur Le Photographe, une lecture certes plus ancienne. Je ne connaissais pas du tout cet auteur qui est dessinateur de presse américaine. Je trouve que son témoignage est assez instructif car il a voulu se rendre compte par lui-même de la situation sans subir l'influence néfaste des médias qui servent une certaine forme de propagande occidentale. Il a vécu une expérience de vie des plus marquantes avec la mort d'un journaliste suédois. Il nous livre une vision sans concession ce que j'apprécie fortement. Je pensais naïvement jusqu'ici que l'Alliance du nord étaient nos alliés mais ils sont finalement pareils que les talibans. C'est dire à quel point cette société est complètement détruite par tant d'années de guerre et d'obscurantisme liée à la fanatique religion. C'est également une auto-critique de l'administration Bush qui s'est servi des attentats du World Trade Center pour occuper cette région et permettre l'acheminement d'un pipeline. Le style ressemble à celui de Guy Delisle avec ce dessin minimaliste et ses détails sur son mode d'hébergement. Cependant, je verrai mal ce dernier dans un tel pays avec un tel manque de confort et de sécurité. Par contre, je m'aperçois que Ted Rall apparaît comme assez proche de ses sous lorsqu'il s'agit de payer les services rendus par les populations locales. Certes, les tarifs sont multipliés par 100 mais cela reste raisonnable. Il dénonce que le capitalisme s'est bien installé en Asie centrale pour profiter de la situation de ces étrangers qui viennent pour relayer l'information. Il n'a sans doute pas tort mais je suis surpris par son insistance sur ce point à de multiples reprises. J'ai bien aimé la partie documentaire également de cet ouvrage qu'on peut prendre dans le sens que l'on souhaite. C'est d'ailleurs une bonne trouvaille. Bref, en conclusion, un ouvrage utile pour comprendre un peu mieux ce conflit qui n'est d'ailleurs toujours pas terminé plus de 10 ans après.
Sans essayer de copier les avis précédents, il faut bien avouer que cette BD présente une situation intrigante. J'ai beaucoup aimé la lecture de ce roman graphique très court (48 pages) mais bien complété par une deuxième partie qui, elle, est entièrement rédigée et contient quelques cases de BD et des photos. Cette deuxième partie est très intéressante aussi. Me dessin de Ted Rall est franchement minimaliste, voir très moche, qui rend très faiblement compte de la situation. En dehors de ça, il n'apporte rien à l'histoire, qui est largement plus supporté par le texte. Ce texte est assez étonnant. Ce que j'ai beaucoup aimé, c'est qu'en croisant la lecture avec Le photographe et Kaboul Disco, nous avons trois points de vues sur l'Afghanistan à trois époques différentes, selon trois points de vues différents et usant de méthodes différentes, mais les trois étant un carnet de voyage. Le propos de Ted Rall est ici double. A la fois un rapport sur la guerre menée par les USA en Afghanistan, mais aussi tout une dénonciation des médias américains et de la propagande servie au monde. C'est assez amusant comme double lecture, d'autant que Ted Rall ne se prive pas d'accuser tout ceux qu'il estime responsable de cette guerre absurde et illogique. Lors de ma lecture, j'ai été frappé de remarquer combien elle était complémentaire des deux autres BD citées ci-haut. Elles trois nous font l'étalage d'un pays vraiment différent, qu'un occidental à du mal à concevoir et comprendre. C'est une géopolitique à part entière que cette Afghanistan, complété par tout les pays avoisinant et qui donnent un échiquier géopolitique complexe. C'est un véritable piège dans lequel il ne faut surtout pas mettre les doigts, comme le firent les USA en 2001. Cette BD nous fait aussi comprendre pourquoi tout cela est arrivé, arrive, et arrivera sans doute. Entre les attentats, les kamikazes, les guerres, les déplacements, les extrémismes religieux, les questions d'argent, les enjeux pétroliers, les ethnies et les peuplades, tout est à prendre en compte dans cette région du monde, et la BD nous montre un petit pan de cette complexité. En ce sens, elle réussit parfaitement son propos, et la fin résume bien tout cela : "Ça n'est vraiment qu'un jeu." Mais un jeu très dangereux. Amateurs de renseignements, avide de comprendre le Moyen-Orient, simplement curieux, lisez cette BD et vous verrez que vous êtes loin, très loin de comprendre la réalité du terrain. C'est quelque chose qui nous dépasse, délicat, et qui pourtant est à l'heure actuelle encore très important. C'est un pays qui a son importance aujourd'hui, et qui est situé dans la région du monde la plus remuée. Connaitre un peu mieux ce qu'il s'y passe n'est pas négligeable. C'est pour cela que je vous recommande cette BD.
Je ne vais pas m'attarder sur le dessin qui est d'un niveau faible. Son minimalisme lui permet tout de même d'être lisible et compréhensible. L'intérêt de cette BD est surtout sur son contenu. L'auteur témoigne librement sur son séjour en Afghanistan. Il décode et retranscrit fidèlement la dure réalité du terrain. On est bien loin des reportages télés où la réalité est toujours peu présente faisant place au sensationnel. Les journalistes de guerre n'ont pas la vie facile. Cette BD permet de comprendre les contraintes qu'ils rencontrent dans un pays en guerre. Elle est aussi un hommage à cette corporation et à ses nombreuses victimes que l'on intégrera dans les victimes collatérales.... Avec cette lecture, je me rends surtout compte que pour des sujets sérieux et complexes, il est préférable de lire plusieurs ouvrages pour recouper les informations et mieux les appréhender. Cette BD a également un côté verso documentaire de 70 pages. C'est un excellent travail donnant une très bonne BD documentaire.
Cet album est très intéressant car il est raconté pour moitié sous forme de roman graphique "à chaud" après son retour d'Afghanistan (pas très très bien dessiné mais ça passe) et pour autre moitié de manière purement littéraire. Ted Rall est un journaliste américain qui après les événements du 11 septembre décide d'aller sur place, chez "l'axe du mal" et d'avoir ainsi une source d'informations autre que celle des médias américains. Ce point de vue est d'autant plus rare qu'il est rapporté par un américain (faut quand même en vouloir alors que leurs avions bombardaient le pays de manière pas si chirurgicale que cela au même moment), qu'il donne une autre vision : en gros avec ou sans Talibans c'est plus ou moins pareil, mêmes conditions pour les femmes par exemple. Donc les médias nous racontent un petit peu n'importe quoi des fois car le seul roi est le dollar dans ce pays pauvre où certains ont bien vu l'aubaine de l'arrivée de tous ces pigeons occidentaux aux poches remplies de billets. Certains ne reverront jamais leur pays d'ailleurs face aux meurtres crapuleux, l'auteur lui-même y échappera de peu. Sur le mode Le Photographe, mais relaté d'une manière différente. Les 2 sont à lire.
“Passage afghan” est une mine d’information sur la situation en Afghanistan, sur l’histoire de ce pays, sur les guerres pétrolières de l’administration Bush, et propose une vision vraiment cynique et sans partage de la situation actuelle. Ted Rall est clairement anti-Bush, mais contrairement à d’autres auteurs, on n’a pas l’impression que c’est pour être dans le vent, ou pour vendre ses BDs. Non, son analyse est documentée, réfléchie, et j’ai appris une quantité de chose incroyable en lisant ce recueil. Au niveau du format, la partie BD est assez courte comparée à la partie textuelle, qui constitue finalement le plus gros du bouquin. A vous de voir si ce genre d’œuvre vous tente donc (un peu de BD et beaucoup de pages de texte pur, et un temps de lecture assez long). Un documentaire immanquable, du niveau des meilleurs œuvres de Joe Sacco, et selon moi bien meilleur que Le Photographe, auquel je reprochais justement de se contenter de montrer la situation en Afghanistan sans vraiment l’expliquer.
Depuis quelques années déjà, je suis presque quotidiennement les strips comiques et politiques de Ted Rall publiés aux USA et sur Internet. Je sais à quoi m'en tenir avec ce journaliste et humoriste : il est profondément anti-Bush, très cynique, très ironique et il dénonce en permanence l'utilisation du 11 Septembre par le gouvernement américain, la guerre en Afghanistan et bien sûr la guerre en Irak. Pour lui, Bush est un "Généralissimo" dont les deux seuls neurones sont nommés Guerre et Pétrole. N'étant pas loin de partager l'ensemble de ses idées, c'est toujours avec le sourire ou un vrai rire franc que je lis ses strips mordants. Même si, à chaque fois, je suis obligé de me dire qu'il simplifie peut-être un peu trop les choses, qu'une attaque aussi directe et brutale contre Bush manque peut-être de recul. Mais dans l'ensemble, sans aborder l'aspect de la justesse politique de son discours, on ne peut pas nier que Ted Rall aie vraiment de l'humour et le sens de l'ironie. Et puis de telles attaques flattent tellement l'esprit de l'opposant typique Français à Bush et à ses manipulations guerrières que je ne vais pas m'en priver. Passage Afghan, tel qu'il a été publié par La Boite à Bulles, est composé de deux livres en un, avec deux couvertures tête-bêche de chaque côté de l'album. D'un côté, une vraie BD en 48 pages racontant le reportage que Ted Rall a effectué en Afghanistan au début de la Guerre entre Alliance du Nord et Talibans, sous les bombardements des avions américains. De l'autre côté, Ted Rall revient sous la forme de textes, de photos et de strips comiques sur les mêmes évènements qu'il racontait en BD et y apporte une foule de données supplémentaires et d'explications. Le dessin de Ted Rall est dans une veine de strips comiques publiés quotidiennement dans les journaux américains : ce n'est pas un dessin techniquement maîtrisé, il se contente de faire dans l'efficace et le compréhensible. Sur un sujet similaire, on ne peut s'empêcher de comparer Passage Afghan à Le Photographe de Guibert puisque dans les deux cas on aborde, avec photos à l'appui, un reportage dans des conditions très difficiles en Afghanistan, même si plusieurs années séparent les deux récits. Eh bien, on peut affirmer sans crainte que Passage Afghan est nettement moins esthétiquement réussi que Le Photographe. Et pourtant, personnellement, et ça va faire bondir certains amateurs de Guibert, je préfère Passage Afghan à Le Photographe car en 48 pages, j'en ai appris bien plus et j'ai été nettement plus intéressé. Le récit est fort, intéressant et drôle à la fois. Ted Rall raconte avec franchise et une bonne dose d'ironie son petit périple en tant que journaliste occidental aux abords de la Guerre. Il nous montre avec acidité l'aspect ubuesque de cette guerre où du jour au lendemain les Talibans se transforment en membres de l'Alliance du nord et vice-versa, où les américains bombardent à peu près tout le monde, où les occidentaux rivalisent de médiocrité, où les Afghans passent leur temps à racketter les occidentaux. Mais il raconte aussi et surtout la guerre, avec son lot de morts de tout côtés, morts qui seront également nombreux aux côtés de Ted Rall, parmi les journalistes qui l'ont accompagné. Sans manichéisme, il est implacable avec tous les partis en présence, dénonçant aussi bien la politique Américaine et le comportement des occidentaux dans leur ensemble que le comportement des Afghans eux-mêmes. Il montre surtout que cette guerre n'est qu'un leurre car les Talibans et l'Alliance du Nord ne sont pas seulement proches les uns des autres : ce sont strictement les mêmes personnes, changeant de camp au gré des évènements. Et bien sûr, c'est une dénonciation de la manipulation de l'information par la presse occidentale puisqu'on nous annonce la libération de l'Afghanistan, le départ des Talibans, mais « la plus grande réussite des Etats-Unis en Afghanistan a consisté à remplacer le pire régime du monde par l’anarchie et le chaos, et d’augmenter sensiblement le mépris des musulmans envers des Américains qu’ils considéraient déjà comme de la racaille. Les femmes portent toujours la burqa, la charia la plus radicale est toujours en vigueur, la nuit appartient aux bandes armées. » Ce récit noir et pessimiste est raconté pourtant sur un ton humoristique, légèrement cynique. Mais la vérité dans cette guerre n'est-elle pas la plus belle des ironies ? Le seul reproche que je puisse faire à ce reportage, c'est son aspect très largement politisé et trop directement anti-Bush car certaines affirmations de Ted Rall peuvent peut-être prêter à un peu de reflexion. Mais dans l'ensemble, c'est une vraie bouffée d'informations, de vérité, le tout raconté avec intelligence et humour.
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