Tue-moi à en crever (Murder me dead)
Un polar noir, très noir, réalisé par David Lapham, l'un des maîtres du genre qui se renouvelle magistralement
Comix
De retour de soirée, Steven découvre sa femme, Eve, pendue au milieu du salon. Désorienté, il se réfugie auprès de Tara, un amour d'enfance dont il a récemment retrouvé la trace. Tous deux mènent une vie heureuse, pour un temps... Rapidement, de sordides individus apparaissent dans leur entourage et révèlent à Steven le passé trouble de sa nouvelle compagne. Meutres, cupidité, gueules d'anges, horribles vieilles femmes, âmes perdues, combines douteuses, jazz, violence, gangsters, ruelles crasseuses, hôtels miteux, grand amour, luxure et mort, tel est l'univers de ce sombre polar.
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Date de parution | Mai 2006 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Bien noir - Ce tome comprend une histoire complète et indépendante de toute autre. Il regroupe les 10 épisodes initialement parus en 2000/2001, écrits, dessinés et encrés par David Lapham. le récit est en noir & blanc. L'histoire commence alors que la police effectue les relevés sur la scène du décès, Eve Kroft s'est pendue au ventilateur du plafond de sa demeure qu'elle partage avec Steven Russell son mari. le suicide ne semble pas faire de doute. Mais la famille Kroft est convaincue que c'est l'attitude de son mari qui a fini par pousser leur fille à se donner la mort, trop malheureuse dans ce mariage sans amour. La famille Kroft engage Sam Fred un privé sans gêne, n'hésitant pas à interpeller Steve Russell après l'enterrement pour lui dire qu'il fera tout pour le coincer et lui faire porter le chapeau. Russell est de fait l'héritier de la fortune de sa femme ce qui attire la convoitise de quelques uns, dont un ami d'enfance prénommé Tony aux activités un peu louches. Ensemble autour de plusieurs verres, ils se remémorent le passé, et évoquent Tara, une belle blonde qui faisait tourner toutes les têtes de au lycée. Steve se met en tête de la retrouver, cette jeune femme qui a suscité ses premiers émois amoureux, jamais concrétisés. De 1995 à 2005, David Lapham a écrit et dessiné la série "Balles perdues" qu'il a autoéditée et qui a bénéficié d'une réédition par Image Comics débutée en 2014 : à commencer par Victimologie. Lapham est un auteur complet disposant d'une grande culture polar, ainsi que d'une compétence artistique avérée pour mettre en scène des comportements à risque (Silverfish ou Young liars), ainsi que pour l'horreur glauque (Psychopathe) ou viscérale (Ferals). "Murder me dead" appartient au genre du polar. Le récit est centré sur le personnage de Steve Russell ; il est présent dans chaque scène (à l'exception du dernier épisode). David Lapham utilise avec un savoir-faire indéniable les conventions du polar. Steven Russell est un pianiste de jazz, sans grand talent, dont le mariage s'est délité dans l'indifférence froide et polie, jouant du piano dans le restaurant dont sa femme est propriétaire. Cette dernière est une femme d'affaires avisée, sans joie de vivre issue d'une riche famille. Russell vit de son argent, subissant lui aussi cette existence sans joie. le lecteur retrouve également la figure du détective privé fouineur et désagréable, l'héritage providentiel, les gros bras prêts à dérouiller les gêneurs, une femme incapable de s'extraire d'un milieu de truands, une disparition, un passage en prison, etc. David Lapham associe tous ces éléments de manière naturaliste, sans misérabilisme ou voyeurisme, sans que le récit ne bifurque vers la paranoïa ou les scènes d'action violente. Il a construit une histoire singulière dans laquelle le personnage principal essaye de profiter de la chance qui lui est donnée de refaire sa vie, et d'aider Tara à s'en sortir. Il fait de Steven Russell un individu sympathique, plutôt positif, sans être nigaud ou particulièrement intelligent. Malgré sa bonne volonté, les choses ne vont pas en s'améliorant, elles se dégradent progressivement. Chaque action entreprise par Russell finit par échouer tranquillement. Lapham indique dans sa préface qu'il a souhaité rendre hommage aux films noirs des années 1950 où les réalisateurs devaient preuve d'inventivité pour suggérer ce qu'il leur était interdit de montrer par le code Hays (code de censure des films américains de 1934 à 1966). du coup le récit s'inscrit dans le registre du polar psychologique, montrant les individus devant faire avec les contraintes et la pression de leur situation. Lapham s'avère un dessinateur très compétent dans ce registre du thriller psychologique. Ses dessins s'inscrivent dans un registre descriptif, sans esbroufe. Il dessine des individus à la corpulence variée et normale, dans des lieux ordinaires disposant tous de particularités les rendant uniques, sans qu'ils n'en deviennent exceptionnels. Lapham opte pour une narration graphique rapide et dense, avec un nombre moyen de 9 cases par page, ce qui est élevé pour un format comics, et très inhabituel. Il en résulte un rythme rapide sans être frénétique, une bonne densité narrative, sans que les cases n'en deviennent encombrées. Lapham réalise des dessins précis sans être méticuleux, avec un trait un peu gras qui permet de conserver une apparence de spontanéité aux images, de leur conférer une forme de naturel sans affèterie. Derrière cette apparence sans chichi se cache une mécanique d'une grande précision. David Lapham a conçu une intrigue solide, respectant les bases du roman noir : sonder la noirceur de l'âme humaine. Au fur et à mesure que Steven Russell prend conscience de la réalité de sa situation, le lecteur accélère sa lecture sous la pression de ce suspense posé mais implacable. Lapham consacre un épisode entier à décrire la mise en œuvre d'un meurtre, les difficultés matérielles rencontrées, la durée de l'agonie. Il réalise là un exercice délicat qui consiste à montrer au lecteur que l'acte n'a rien de simple ou d'évident, encore moins d'anodin. Ce choix évoque celui d'Alfred Hitchock s'attardant sur les mêmes détails matériels dans le Rideau déchiré pour montrer à quel point il est difficile, long et pénible de tuer un homme. Cette histoire constitue l'équivalent d'un roman noir, dans lequel l'auteur met en scène un individu ordinaire sans être banal qui essaye de se construire une nouvelle vie plus agréable que la précédente. En cherchant à concrétiser un amour sincère, il côtoie des individus qu'il ne fait pas bon connaître, s'enfonçant insensiblement dans une situation de plus en plus noire. David Lapham maîtrise les conventions du polar et en réalise un tout en retenue, sans effet spectaculaire, mais sans rien sacrifier à la noirceur du genre.
Un bon album avec un titre un peu strange, Tue-moi à en crever ou l'histoire de couples qui se forment et se déforment. Un pianiste retrouve sa femme pendue dans leur maison. On cherche à comprendre si c'est un suicide... à moins que ce soit un crime. N'y aurait-il pas une motivation financière ou alors s'agit-il d'un drame passionnel ? Lapham essaie d'instiller une ambiance film noir des années 50, genre qu'il affectionne comme il le confesse en préface. C'est réussi et j'aime bien son style de dessin mais l'histoire se perd quelque peu dans les noeuds de son intrigue et son enchevêtrement de personnages. Le lecteur se perd un peu dans une histoire qui a pourtant de la densité et de l'espace pour de développer avec ce one-shot de plus de 200 pages.
Je me retrouve dans les avis précédents. En effet, le dessin m'a paru trop peu réaliste pour que l’ambiance soit vraiment noire. Par ailleurs, exception faite du comportement stupide du héros, le scénario est relativement convaincant, l’intrigue relativement maîtrisée et le final à la hauteur. Bref, un album qui n’atteint pas le niveau de Balles perdues du même auteur.
La maquette de la couverture m'avait laissé croire à un récit assez moderne et le titre à une histoire violente. En fait, nous sommes là dans un style très classique, celui des films noirs typiques des années 30 à 50. Le décor est pour moitié celui de Los Angeles et pour l'autre moitié celui de New York. L'histoire est celle d'un pianiste jazz qui hérite de la fortune de sa femme retrouvée pendue. Il devra alors supporter la haine de sa belle famille suffisamment riche pour lui attirer bien des ennuis. Et en même temps il retrouve, par le biais d'un ancien camarade de lycée, la trace d'un amour de jeunesse avec qui il va pouvoir se remettre rapidement en couple. Le reste est une suite de complots et manipulations, tandis que le héros reste aveuglé par son amour renouvelé. Le dessin est moyen. Plutôt efficace et donc correct dans l'ensemble, il présente parfois des visages de personnages vraiment bizarres comme celui de la pendue ou encore celui de Tony. Ce style graphique peine un peu à instaurer une ambiance de récit noir à mon goût. Quant au récit, il se laisse lire et est assez divertissant. Je n'ai cependant pas réussi à accrocher aux comportements des personnages principaux. Autant l'aveuglement amoureux du héros peut encore s'expliquer même si j'y adhère difficilement, autant Tara est trop alambiquée pour moi. Elle les accumule vraiment trop pour que je trouve ça naturel, surtout sur la fin où je n'ai rien compris à ce qu'elle faisait et voulait. Et comme toute l'intrigue tourne justement autour d'elle, j'ai un peu de mal à m'en trouver satisfait en fin de lecture.
Avis un peu plus nuancé pour ce polar, certes assez noir comme je les aime mais.... Mais peut-être que ce genre d’album est moins accessible à moi, lecteur né en 1981. Peut-être également que je préfère des histoires un peu moins tortueuses et plus perverses dans la psychologie des personnages (je pense à Berceuse assassine). Les références qui y sont sans doute faites, à la lecture des autres avis, ne font pas partie de mon humble culture BD / cinéma. En bref, si j’ai pu relativement apprécier certaines parties du roman, je l’ai trouvé dans l’ensemble assez long. Pour une fois, les dessins ne me conviennent pas vraiment. J’aurais préféré un trait plus réaliste, en gardant le noir et blanc, tellement adapté à ce genre d’histoire. A chacun de voir, moi j’ai été déçu...
L'auteur explique -en préface- sa passion pour les films des années 40-50, ces "polars" à l'atmosphère qui paraît aujourd'hui désuète... mais tellement classe (et que j'aime bien, aussi)... Lapham s'inscrit volontairement dans cette lignée, tout en introduisant dans son récit des éléments modernes pour actualiser le propos. Je me suis régalé à suivre Steven tout au long de l'histoire ; lui qui persiste à foncer droit dans le mur à chaque occasion, ainsi que sa belle-famille -snob et revancharde-. C'est vrai, je n'ai pas ouvert de grands yeux à chaque rebondissement, mais l'ambiance générale est vraiment réussie... tout comme le dénouement. Ce qui m'a bien plu : un bon graphisme noir et blanc qui me fait penser à celui de Forton. Pas mal fait. Et vous en aurez pour votre argent : 252 pages !.. C'est pas tous les jours... Ma cote réelle : 3,5/5
Cette BD une ambiance étouffante assez extraordinaire, Tue-moi à en crever est construit comme un bon vieux polar noir sorti tout droit du passé. Le décor est réussi et bien planté, action! L'intrigue est intéressante, on découvre au fil des pages que tout est gangrené par la noirceur dans cette BD, les personnages ont jeté depuis belle lurette leur innocence et leurs scrupules aux orties. Dans cet univers, Steven, un pianiste talentueux qui est passé à côté de sa destinée, va faire tous ce qu'il lui est possible de faire pour la femme qu'il aime, quitte à tout perdre... En avançant dans la lecture on sent bien vite que cette histoire est ponctué, de mensonges, trahisons et complots, c'est un drame sombre, ici il n'y a pas de place pour l'humour ou les moments de bonheur. J'ai apprécié cette BD, dommage que les rebondissements soient si nombreux et l'intrigue si tortueuse, mais bon je suis content d'avoir à nouveau lu une oeuvre de David Lapham, même si je lui préfère de loin Balles Perdues, une oeuvre qui pour moi mérite d'être plus connue et surtout enfin éditée dans sa totalité en France. Je conseille tout de même la lecture de Tue moi à en crever, pas forcément son achat. JJJ
Un polar dont le scénario est bien maîtrisé. On y retrouve tous ce qui a fait la force des polars noirs des années 30 - 50 (des truands, des magouilles et une femme fatale). Malheureusement au bout d'un tiers, je me doutais plus ou moins de ce qui arriverait à la fin... et c'est ce qui est arrivé. Donc un point de moins sur la note qui sinon mériterait 4.
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