Les Pionniers de l'Espérance
Une très belle série de science-fiction française...
Best of 1940-1949 Les petits éditeurs indépendants Pif Gadget
Dénommée Radias, une planète se dirige peu à peu vers la Terre. Ce rapprochement déclenche de nombreuses catastrophes. Le danger est immense. Le Conseil Mondial décide de l'envoi d'un vaisseau spatial -l'Espérance- à la rencontre de cet astre mystérieux... et qui serait habité lui aussi !... A bord de l'engin : on trouve un groupe de spécialistes -hommes et femmes- venus de différents pays. Seulement quatre personnes survivront à cette expédition : Robert -un ingénieur français-, Tsin-Lu -une chinoise-, Maus -une américaine- et Rodion, un soviétique. Pendant près de 30 ans, ces survivants continueront leur chemin parmi les étoiles et multiplieront de bien palpitantes aventures !...
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Date de parution | Octobre 1947 |
Statut histoire | Histoires courtes 8 tomes parus |
Les avis
J’ai lu le premier volume publié par Futuropolis dans leur belle collection Copyright (avec dossier introductif), album comprenant les histoires « Vers l’Ourang mystérieux » et « La cité de Bangra ». C’est une série « patrimoniale » que j’avais envie de découvrir, mais qui ne m’a pas emballé plus que ça. C’est assez verbeux, tout en usant de raccourcis brutaux. Dès les premières pages c’est assez saccadé, les événements s’enchainent à toute vitesse. Comme le début de « Les naufragés du temps », ou comme les séries américaines de SF des années 30-50. On sent par contre que c’était publié par les éditions Vaillant, proche du Parti communiste, car rapidement des piques sont lancées contre « des capitalistes sans conscience », avec des allusions à la paix internationale, la défense des intérêts de l’humanité (qui étaient au cœur du discours du parti dans l’immédiat après-guerre). Si certains passages lorgnent sur des séries d’aventure comme « Tarzan », Lécureux, pilier des publications Vaillant, s’inspirent de séries comme « Flash Gordon ». On y retrouve une action trépidante, avec héros forcément infaillible, le tout mâtiné d’un message humaniste et fraternel un peu gâché par la naïveté de pas mal de situations. Mais les auteurs n’ont pas à rougir de la comparaison avec d’autres bandes sorties du même moule, comme les premiers essais de Jacobs. Le dessin de Poïvet est lui aussi très inspiré par la BD américaine (du moins sur les histoires que j’ai lues). Même si son trait s’affinera sur d’autre séries par la suite, et si certaines planches mal encrées (ou dont les originaux ont peut-être été dégradés) sont « moyennes », l’ensemble est de bonne facture. Les décors sont minimalistes, mais le dessin est globalement très lisible et encore agréable. Au final, c’est une série qui vaut surtout pour son caractère « historique » dans la BD française, le reflet d’une époque aussi (début de la guerre froide, balbutiements de la conquête spatiale, recherche de héros « positifs » par les éditions Vaillant). A lire « pour voir », même si je n’ai pas vraiment accroché aux deux histoires lues.
Cette grande fresque spatiale qui a duré de 1945 à 1973 (avec quelques interruptions) est un grand classique de la BD, réalisée à une époque où le genre était encore méconnu en France. Elle a d'ailleurs suivi l'évolution de la science-fiction des années 50 et 60, reprenant les thèmes habituels mais en s'inspirant d'un idéal humaniste et progressiste. Conçue au départ dans l'esprit des Bd américaines d'avant-guerre, elle est influencée par Alex Raymond et son Flash Gordon, mais elle s'en détache vite, les scénarios de Roger Lécureux faisant preuve d'imagination et d'originalité pour accrocher un public qui commençait à devenir friand de ce genre d'histoires futuristes. Les dessins de Raymond Poïvet étaient élégants et apportaient une certaine esthétique, pourtant, c'est du dessin à l'ancienne avec des mises en page classique. Son dessin évoluera et il ne me plaira pas toujours dans d'autres séries. Ce n'est pas ça qui me gêne, j'y suis habitué, j'ai connu ce genre de dessin dans beaucoup de petits formats des années 60 ; ce qui me fait sourire, c'est la naïveté de certaines situations et le peu de vraisemblance, comme par exemple la barrière des langues ; ici, tout le monde se comprend, c'est formidable, c'est comme dans certains films de série B où des savants américains débarquent dans un continent inconnu et parlent à des indigènes qui comprennent l'anglais, ça m'a toujours fait rigoler. Tout ceci fait partie d'un état d'esprit de l'époque, c'est ce qui différencie les auteurs de BD de ce temps avec ceux d'aujourd'hui. Ce qu'il faut voir avant tout dans cette oeuvre, c'est le message humaniste délivré par l'équipage pluriethnique de L'Espérance, que l'on peut comparer à celui de la série TV Star Trek (la première de 1966). J'ai eu l'occasion de lire quelques épisodes dans Pif-Gadget en 1973, puis dans quelques beaux tomes de la collection Copyright, mais déjà que je n'aime pas la SF, je n'ai donc pas vraiment goûté à cette version kitsch. Cependant, je reconnais sa valeur de Bd pionnière dans le genre, et pour les amateurs, elle peut mériter l'achat.
J'avais entendu beaucoup de bien de cette vieille série et je me suis décidé à emprunter les albums parus chez Futuropolis (j'avais aussi trouvé l'album paru chez Glénat, mais c'était un récit paru en 1957 donc déjà disponible dans l'intégrale). Je ne suis pas un grand fan de la science-fiction à la Flash Gordon, mais là j'ai vraiment aimé. Certes, il y a une certaine naïveté dans les scénarios humanistes de Roger Lécureux et si on pense trop, on va vite se rendre compte des dizaines de trucs qui ne font pas de sens (Spooky a énuméré plusieurs exemples), mais les histoires sont solides et j'étais souvent captivé du début jusqu'à la fin parce que je voulais savoir comment l'histoire se terminait. Le scénariste fait aussi preuve de beaucoup d'imagination et j'ai été surpris à plus d'une reprise. Mais le meilleur pour moi c'est le dessin de Raymond Poivet. Au début, c'est sympa et son trait me faisait penser à du Milton Caniff et puis au fil des histoires son trait évolue pour devenir un des plus beaux dessins réalistes que j'ai vus !
Une BD qui appartient au patrimoine de la BD européenne, et même mondiale, je pense. En effet elle nous amène sus les pas d'une petite équipe d'aventuriers sortis tout droit de l'imagination de Roger Lécureux, connu des générations plus jeunes pour Rahan. Ces aventures ont dû tenir en haleine une génération entière de lecteurs, puisqu'elles les amènent au fin fond du cosmos, mais aussi dans une jungle tropicale, ou encore dans des dimensions insoupçonnées. Très vite ces histories se démarquent du tout-venant du genre, nous présentant des femmes fortes (Maud et Tsin-Lu), mais aussi certains des six "Pionniers" d'origine qui disparaissent. Par contre le personnage principal, Robert, qui sera rebaptisé presque inexplicablement plus tard Tangha, est fort en à peu près tout, il faut dire que c'est un ingénieur. Et c'est bien connu, les ingénieurs peuvent tout faire, y compris se battre à mains nues avec des monstres innommables. Le récit cependant n'échappe pas, sur la longueur, aux incohérences scientifiques (par exemple les Pionniers peuvent nager plusieurs minutes, et sans dommage, dans de l'eau glacée...). Ils n'ont pas de problème de langue avec les peuplades hautement exotiques qu'ils croisent... Les hommes, qui passent des semaines dans l'isolement, ne sont jamais mal rasés, ils gardent les mêmes vêtements durant ces semaines sans dommages pour l'odorat de qui que ce soit... Mais on sent que les lecteurs ont dû se plaindre (ou le scénariste réfléchir), car des ajustements sont faits en cours de route. Mais passons sur ces incohérences, le souffle de l'aventure étend largement son voile sur ces histoires, et il se passe beaucoup de choses dans ces pages. Ainsi les Pionniers sont-ils renvoyés dans l'espace dans l'épisode de 1960, après avoir passé des années à arpenter "seulement" la Terre... Je n'ai lu "que" l'intégrale parue sur Futuropolis couvrant la période 1945-1960, mais cela m'a permis d'apprécier cette série, qui inspira beaucoup d'auteurs par la suite. Patrimoniale.
La grande et belle série de SF française que voilà !... C'est vieux, c'est vrai, mais c'est tout bon ! Nos "pionniers" débutent leur odyssée dans l'hebdo Vaillant n° 45 du 14 Décembre 1945. Ils disparaissent des étoiles dans Pif Gadget n° 239 du 26 Septembre 1973. D'accord, c'est fortement inspiré de Flash Gordon, mais cette série -sous le trait de Poïvet- propose ses propres critères graphiques : un excellent noir et blanc qui fait penser aux meilleurs comics US d'Avant-Guerre. Il y a des "bagarres", c'est vrai aussi, mais j'ai surtout noté une sorte de contre-courant par rapport aux séries américaines : Lécureux et Poïvet m'ont emmené dans une saga où les "héros" tentent toujours d'élargir les connaissances de l'humanité, sans pour cela spolier les nations extra-terrestres qu'ils rencontreront. Il n'y a pas de grandes envolées graphiques, pas de cases ni planches "éclatées". Les "Pionniers" est un travail d'artiste "à l'ancienne", minutieux, pointilleux parfois, dont la narration graphique peut parfois même se passer de texte. Et pourtant, du texte -du scénario plutôt- il y en a. Et du bon (il faut bien sûr replonger 60 ans en arrière !). Et quand je relis mes bonnes vieilles séries Artima des années 50 ("Atome Kid", "Aventures Fiction", "Météor" et autres "Sidéral") je me pose parfois la question de savoir si certains des auteurs n'ont pas puisé -ou se sont inspiré- des aventures vécues par Robert, Maud et Cie. C'est de la "SF de papa", ben oui... Mais qu'est-ce qu'elle était en avance sur son temps ! Les albums : Problème : quasi introuvables. Diverses éditions, principalement brochées, paraîtront de 1947 à 1962. Puis un "revival" en 1974. Deux autres encore chez "Soleil" en 1994 et 1995. Si intéressé(e), je ne peux que vous conseiller -sans obligation aucune-, les Intégrales parues chez Futuropolis (5 albums épais) dès 1984 (période 1945-1960) ainsi que celles éditées chez Soleil (2 opus) qui traitent de la période 1965-1967. Les "Pionniers" ?... Une très très bonne série SF française, passionnante, réalisée par un duo d'artistes -chacun dans son genre-, et dont je retire un véritable plaisir de lecture.
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