Un homme est mort
2007 : Prix du jury œcuménique de la bande dessinée. 2007 : Prix France Info de la Bande dessinée d’actualité et de reportage. 1950, la guerre est finie depuis cinq ans. De Brest il ne subsiste plus rien. Des bombardements massifs et des combats acharnés de presque un mois ont anéanti la ville, son port, son arsenal. Brest est un désert.
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1950, la guerre est finie depuis cinq ans. De Brest il ne subsiste plus rien. Des bombardements massifs et des combats acharnés de presque un mois ont anéanti la ville, son port, son arsenal. Brest est un désert. Il faut tout reconstruire. 1950, Brest est un immense chantier. De la ville fortifiée, aux ruelles étroites, une nouvelle ville va surgir, orthogonale, rectiligne, ordonnée, moderne, ce sera Brest-la-Blanche, qui deviendra très vite, Brest-la-grise. Des milliers d'ouvriers travaillent sur les chantiers. 1950. C'est la grève. Les chantiers sont immobilisés, les ouvriers de l'Arsenal rejoignent le mouvement. De violents affrontements surviennent lors des manifestations. Le 17 avril, le drame se produit. La police tire sur la foule, blessant plus de vingt personnes et tuant un homme. Édouard Mazé. Le lendemain, appelé par la CGT pour tourner un film sur le mouvement, René Vautier débarque clandestinement à Brest (il est alors recherché par la police suite à un premier film documentaire, Afrique 50, témoignage sans concessions du système colonial français d'après guerre). René arrive dans une ville en état de siège. Le lendemain, ont lieu les obsèques d'Édouard Mazé. Une foule immense, un peuple entier accompagnera son cercueil.
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Date de parution | 12 Octobre 2006 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
En ayant vécu plus de 20 années à Brest, bien évidemment cet album a une résonance particulière me concernant. Les Anglais ont détruit la ville occupée par les Allemands entre 1943 et 1945. Les bombes lancées à l’aveugle sont tombées en masse. Après-guerre il faut rebâtir la cité du Ponant. Le chantier est titanesque. Il faudra des années de dur labeur. Près de 7000 ouvriers seront employés à la reconstruction de la ville. En mars - avril 1950 éclate à Brest la grande grève. C’est le décor tragique du récit. Son importance dans l’histoire du mouvement social brestois est particulièrement grande mais elle le fut également au niveau national, symptomatique d’une époque qui commençait à voir l’effondrement de certaines valeurs et espoirs nés de la résistance. Etienne Davodeau et Kris ont choisi de mettre en avant, l’histoire d’un cinéaste engagé – René Vautier – qui souhaite immortaliser sur pellicule les manifestations de cette ville en ébullition. La mort d’un gréviste - Edouard Mazé – fait que la contestation se déploie. Les affrontements avec les forces de l’ordre sont de plus en plus violents. Le travail en amont des auteurs est remarquable. Le climat social de l’époque est d’une justesse inouïe. La situation politique est restituée de façon brillante. C’est une vraie bd historique que j'ai dans les mains. Le graphisme est magnifique. Les personnages notamment sont séduisants. Visuellement c’est parfait. C’est du très bon. Le récit est rythmé, sans temps mort. Ça respire la sincérité. Enfin les mots de Paul Eluard accolés aux images de René Vautier sont terriblement poignants. C’est une BD pédagogique, séduisante et divertissante. Je recommande vivement.
C'est l'une des premières BD documentaire que j'avais enregistrées dans ma pile "A acheter quand tu auras l'argent", il y a de ça des années (pratiquement lorsque je suis arrivé sur ce site), et sa lecture s'est faite avec quelques années dans les dents. Plusieurs années qui ont notamment vu l'émergence d'une grande quantité de BD documentaire, aux styles très variés (et dont Davodeau est un bon représentant d'ailleurs), permettant à chaque fois d'aller plus loin dans les manières de dire et comprendre le monde. C'est avec ce genre de regard que je me suis mis à la lire, et je n'en ressors pas déçu, mais conscient d'un manque tout de même. Cette BD a la qualité indéniable des BD traitant des ouvriers et des revendications : elle est toujours actuelle, peut-être même plus aujourd'hui que lors de sa sortie, et elle nous rappelle les combats d'hier, les luttes d'aujourd'hui et les stades par lesquels il a fallu passer. La violence policière n'est plus marginale aujourd'hui, mais solidement installée dans nos mœurs. Il faut envisager de se faire blesser en allant manifester, c'est habituel de lire des blessés à chaque compte-rendu de manifestations. C'est surtout cet écart que j'ai noté en lisant l'album : j'ai l'impression de vivre dans une normalité de violence policière, où les morts se comptent par dizaines dans les dix dernières années, et cela n'a rien de choquant pour la majorité de la population. Comme le monde à changé ! Au-delà de cette considération, il est amusant de découvrir la culture ouvrière de l'époque, la solidarité et l'entraide, la transmission de la connaissance et le partage de l'information au sein des communautés ouvrières révoltées. On sent, au travers de la BD, que tout cela fonctionne autant par réseau que par solidarité. La volonté de transmettre à tous la réalité de cette mort, la rendre palpable, est perceptible à travers les pages. Et Davodeau retranscrit très bien les environnements d'un Brest dévasté, tout autant que des quartiers ouvriers où la misère est reine. Cependant, je dois avouer qu'il manque quelque chose pour développer plus cette histoire. Elle s'arrête au film, de sa création à sa mort physique, mais il manque quelque chose à tout ça pour passer au-delà. Peut-être quelque chose sur Brest aujourd'hui, sur les mouvements ouvriers, ou simplement sur la suite. Mais là, j'ai eu le sentiment qu'il y aurait eu moyen de développer encore ce thème et que les auteurs se sont arrêtés trop tôt, et je trouve cela dommage. Ce n'est, pour autant, pas un motif de rejet de la BD, qui reste assez -tristement- actuelle, de par son sujet et ce qu'elle dit de notre solidarité de classe disparue. En la lisant, on aurait envie de rappeler que déjà 70 ans auparavant, la police tuait sans raison au nom de la sécurité. Et que cela n'a jamais été acceptable, ni avant ni maintenant. Une BD qui permet de se souvenir !
Bonne bd que voici et, surtout, sur un bon sujet. C’est le deuxième ouvrage de Davodeau que je lis après “Les Ignorants” et la deuxième fois que le sujet me plaît beaucoup, même si il n’est pas au scénario ici. En effet, le contexte de la reconstruction d’après guerre et des contestations sociales qui l’ont accompagnée est quelque chose que je ne connaissais pas. Davodeau nous dépeint bien la réalité après guerre et le sacrifice de certains au nom de “l’effort national”. L’histoire de cet ouvrier mort et de l’idée de lui rendre hommage à travers un film était une belle idée, et on prend donc plaisir à suivre le tournage, puis l’accueil de ce film. On se sent invité dans ce monde, tout comme l’est le héros, qui n’est pas de ce monde là mais en est très proche idéologiquement. Cette lecture s’est donc révélée plaisante et instructive, m’en apprenant sur un sujet et des évènements qui m’intéressent mais que je ne connaissais pas. J’ai donc bien aimé ma lecture, mais pas adoré. Et j’avais eu la même impression pour “Les Ignorants”. Peut-être est-ce dû au trait de Davodeau que je trouve bon mais un peu statique, n’insufflant pas assez de vie. Mais surtout je trouve que l'histoire manque d’un peu de pep’s, de ressort. Si on n’est pas intéressé outre mesure par le sujet, il est assez facile de sortir du livre. Le personnage de P’tit Zef vient redonner un peu de vie, mais ça reste un peu mou, un peu plat. Après, je le répète, j’ai été passionné par le sujet et ai donc apprécié ma lecture, mais je comprends qu’on n'accroche pas. Dommage car avec un tel sujet il y avait de quoi faire un incontournable. Ce n’est donc pas le cas pour moi, mais ça reste une bd que je pourrais posséder si je la trouve d’occase. Note : 3,5/5
Les grèves et autres mouvements sociaux n'ont que peu été traiter dans la bande dessinée et c'est donc avec un certain plaisir que j'ai découvert cette histoirequi c'est passé dans ma région au sortir de la guerre. A cette époque le Parti Communiste est une force politique avec laquelle il faut compter, on trouve en son sein de nombreux anciens résistants dont beaucoup ont payé leurs actions de leur vie. Quelques années après la guerre des dissensions idéologiques éclatent, notamment parce que le PC d'URSS et les cadres français s'enfoncent dans le stalinisme pur et dur. Je ne résumerais pas l'histoire, d'autres l'ont fait, mais s'il est vrai qu'un certain manichéisme se dégage de la lecture, je trouve qu'il faut, et ce qu'elle que soit la couleur politique des combattants, rendre un hommage à ces ouvriers, en fait à toute une population, qui se sont battus pour faire valoir leur droit. Et puis ce poème d'Eluard "adapté" par un ouvrier en colère possède une force incontestable qui donne à ce combat ses lettres de noblesse. Assurément à lire pour se replonger dans une époque et peut être en prendre de la graine.
Certes, on pourrait reprocher aux auteurs d’être de parti pris, et d’occulter le rôle qu’a pu jouer la CGT dans ce début de guerre froide (l’action se passe en 1950), alors que la direction du PC qui la contrôlait virait au stalinisme. Et donc de ne présenter que « le bon côté » de ses militants. Mais ce serait en fait à la fois injuste et une erreur. En effet, il n’est pas question ici des appareils dirigeants, mais de militants de base, souvent à la pointe de la résistance durant les années d’occupation – et qui faisaient face parfois en 1950 aux mêmes policiers qui les traquaient sous Vichy (au moment où la lutte contre les communistes prenait le pas sur toute autre considération) ! Et surtout, les auteurs donnent un éclairage signifiant avec en exergue un extrait d’ « Une histoire populaire des Etats-Unis », d’Howard Zinn. Ils suivent son exemple en choisissant les luttes populaires – victorieuses pour narrer l’histoire (ici d’une ville, Brest, au temps de la reconstruction). Ceci étant dit, c’est un bel album, qui se lit très bien, et qui rend vraiment un bel hommage au combat de ces hommes, de ces militants (qu’ils soient ouvriers ou documentariste). Et le dossier final, conséquent, est vraiment un réel plus, en présentant les faits et protagonistes à qui l’album redonne vie, mais aussi le travail des auteurs (documentation, croquis). Voilà un album à lire – et ce d’autant plus que de nos jours, la notion d’engagement, à la fois galvaudée et méprisée, aurait de bonnes raisons de se voir redonner ses lettres de noblesse.
De Davodeau, j'avais beaucoup apprécié les Mauvaises gens. J'ai donc ouvert ce Un homme est mort, dont il n'est cette fois que dessinateur, avec un a priori positif mais l'ai refermé avec une certaine déception. Un bon point toutefois : avec ce récit de Kris, Davodeau continue ici d'explorer les sentiers les moins fréquentés de l'histoire et de la géographique française, en prenant pour cadre la ville de Brest quelques années après la fin de la 2e guerre mondiale. J'apprécie cette volonté d'aller porter son projecteur là où il ne semble y avoir, à première vue, que morne quotidien et pauvreté sans espoir. Des milliers d'ouvriers œuvrent pour de mauvais salaires et dans des conditions éprouvantes à redresser Brest rasée par les bombes. Lors d'une énième grève, la police fait feu sur les manifestants désarmés. Un homme reste à terre. Une victime de plus de la violence policière et patronale, vite tué, vite oublié. Oublié ? Pas cette fois-ci. Un cinéaste proche de la CGT, tout juste débarqué d'Irlande, a fait quelques images des émeutes. Il va en tirer un film court et poignant, ajoutant en guise de bande-son un poème d'Eluard intitulé "Un homme est mort", lu par lui d'abord puis par un ouvrier brestois. Transporté en camionnette, projeté sur un drap ou un coin de mur blanc, le film est vu, en quelques semaines, par tous les ouvriers de la ville... L'idée de base est passionnante. Mais Kris et Davodeau, emportés par leur admiration des grands combats populaires, lui réserve hélas un traitement bien trop naïf et manichéen. Tous les ouvriers sont ici de braves gens tous simples, enfantins et généreux. Patrons et policiers s'avèrent sans exception d'immondes brutes sans scrupules. Et la CGT des années 50, entre lutte nécessaire et embrigadement, peuplée de vieux briscards de la Résistance mais noyautée par Moscou, aurait mérité un traitement plus riche et nuancé que ce récit qui la résume à un rassemblement spontané d'aimables philanthropes. Malgré l'intérêt du tableau historique, ce simplisme boy-scout finit par lasser. Et on ferme l'album, hélas, avec une émotion refroidie.
Les syndicalistes, les grèves et autres mouvements sociaux ne sont pas des sujets que je trouve forcément très intéressant lorsqu'il sont abordés dans une œuvre. Mais ça ne m'étonne pas que Davodeau s'occupe de la partie graphique de cet album, on connait l'engagement de l'homme lorsqu'on a lu des album comme Les Mauvaises Gens ou Rural !. Autant le dire tout de suite, cette histoire ne m'a pas forcément accroché, je ne l'ai pas trouvé passionnante (encore une fois, peut-être à cause du sujet, mais aussi peut-être est-ce du au fait de regarder, plusieurs fois, un "film" au travers d'une BD), mais je reconnais que la fin est assez touchante. Le dessin de Davodeau, même s'il n'est pas virtuose, est, comme souvent, plutôt juste, en plus d'être relativement agréable à regarder. Pour ceux qui ont adoré, il faut aussi reconnaitre que le dossier à la fin de l'album est un bon complément (et la BD aura néanmoins le mérite de me donner envie de voir des films de René Vautier).
Aidé de Kris, Étienne Davodeau continue son œuvre particulièrement engagée et sensible au combat syndical, après Les Mauvaises Gens. Si l'auteur a choisi une manifestation à Brest dans les années 50 pour exposer un combat de plusieurs années et une situation socio-politique des plus difficiles, j'ai un peu moins apprécié le ton employé par-ci par-là, bien que ceci soit un autre débat mais au final, cela influence mon avis. Pas mal, en effet, mais je me lasse tout doucement de ce genre d'albums et souhaiterais redécouvrir un album de Davodeau aussi "neutre et bon" que Les Ignorants.
Peu de gens ont en mémoire la grande grève qui a eu lieu à Brest en 1950 (et ce n’était pas mon cas avant la lecture de "Un homme est mort"). Tout en rendant hommage aux victimes de cette grève, cette BD raconte l’histoire d’un film documentaire par le cinéaste militant René Vautier, qui a à sa façon contribué à soutenir la lutte syndicale de ce mouvement négligé par l’Histoire officielle. Un petit film court et fragile au destin particulier que le monde ouvrier s’est approprié afin de faire entendre sa voix. L’histoire se situe donc entre la fiction et le documentaire (tous les personnages ont existé). A une époque où la guerre froide venait de succéder à la seconde guerre mondiale, où le mouvement communiste était à son apogée même si les méfaits de Staline commençaient à être connus, la répression des autorités extrêmement féroce n’entama en rien la détermination du peuple ouvrier brestois dans son combat pour de meilleurs salaires et contre l’injustice. Davodeau et Kris rendent un bel hommage aux protagonistes de cette lutte, on sent qu’il y a un gros travail de documentation derrière. De son coup de crayon élancé, Davodeau restitue avec sensibilité l’atmosphère et l’état d’esprit de ce mouvement populaire. La mise en couleur est élégante et les teintes rouges–sépia conviennent bien au récit. Et pourtant curieusement, même si je trouve la démarche éminemment sympathique et que j’ai eu du plaisir à lire cet ouvrage, je suis resté sur ma faim. Il manque quelque chose à cette histoire et j’ai du mal à l’expliquer. En fait, je me demande si le format de 63 pages est adapté à une histoire comme celle-ci, d’autant que Kris le scénariste dit avoir travaillé à ce projet pendant quatre ans ! Comme si la BD ne se suffisait pas à elle-même, une dizaine de pages de reportages et de témoignages accompagnés de photos succèdent au récit illustré (CQFD ?)… Pour le reste, je trouve ça très bien de publier ce genre de choses sur des événements que l’Histoire, la « grande », la « sérieuse », la bien-pensante, cherche à faire oublier, au même titre que la Commune ou plus récemment le combat des ouvriers de Lip à Besançon dans les années 70. A lire donc, pour tout homme ou toute femme de gauche qui se respecte.
Nous sommes dans les années 50 à Brest, une ville détruite par les bombardements de la seconde guerre mondiale ; tout est à reconstruire et les ouvriers sont à l'ouvrage. Mais ceux-ci sont mal payés, logés dans des barraquements de fortune et forcément face à un patronat qui fait la sourde oreille, le seul moyen de se faire entendre est la grève. A l'occasion d'une de ces journées de protestation, un syndicaliste CGT est tué. Ses collègues se demandent alors comment lui rendre hommage. La solution trouvée ? Faire appel à un cinéaste pour réaliser un film sur "les luttes syndicales". Celui-ci réalisera un film poignant où la bande son sera un poème de Paul Eluard. Davodeau réalise une plongée dans la France ouvrière d'après guerre dans laquelle le Parti communiste disposait d'une réelle influence. Il dessine une belle histoire, non pas tant sur le mouvement ouvrier en tant que tel, mais sur la manière de lui rendre hommage, et la manière dont ce mouvement se percoit et est mis en valeur par l'image. Le texte est présent dans les cases de Davodeau quand la chose est nécessaire, absent lorsque les images parlent d'elles-même. Les auteurs réussissent à nous faire ressentir l'émotion qui habite ces ouvriers qui contemplent la mort de l'un des leurs et se voit rendre un hommage inattendu. Une narration très moderne de la part de Kris qui s'est déjà illustré avec Bailly chez le même éditeur. En ce qui concerne Davodeau, son talent de dessinateur me parait somme toute très relatif, mais s'avère toutefois suffisant pour mettre en image cette belle histoire militante. A lire pour les amateurs de politique et de belles histoires.
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